Donc j'ai pris en compte toute vos remarques ! Je reprend pas vos critiques une par une car vous allez trouver nombre de réponses dans ce chapitre qui est surement le plus important de l'histoire ! Donc accrochez-vous, ca va balancer Au fait, Iliaron, je remets un indice sur ce qu'on parlait l'autre fois ( dernier indice était dans le cimétiere )
Au niveau des âges, je le reprends beaucoup plus loin. Mais Neldirage est née lorsque ses parents avaient 21 ans. Là, il a 28 ans ! Voilà pour vous remettre dans l'histoire
Chapitre LI
-Capitaine… Fit l’un des domestiques avec une courbette.
-Messieurs… Répondit-il.
-Nous devons vous préparer…
-Comment ça ? Demanda le capitaine. Vous trouvez que je ne suis pas bien vêtu ?
-Une tenue de militaire ne sied pas à ce genre de réception ! Dit le domestique outré.
-Alors tant pis pour eux ! Ca sera avec cette tenue ou sans moi !
-Comme vous le désirez… Fit l’homme passablement ennuyé. Veuillez me suivre…
Neldirage suivit l’homme à travers le dédale du château. Il sut qu’il se rapprochait de la salle de réception quand il vit une multitude de serviteurs faire des allers-retours. Certains portaient des plateaux vides, d’autres étaient chargés de nourriture, d’autres encore portaient des boissons. Le capitaine attrapa un verre au passage et suivit le serviteur qui l’amena jusqu’à un escalier tellement haut qu’il devait au moins égaler celui du palais de justice… Sauf que ce dernier était à l’extérieur. Neldirage se laissa donc guider par les marches et arriva dans la plus grande pièce qu’il eut jamais vue.
La première chose qui le frappa fut un homme pressé qui le percuta à l’épaule. Neldirage suivit quelques instants l’homme du regard tout en continuant de monter les marches. Quand il se retourna, il eut donc pour vision la pièce dans son ensemble. Les deux plus gros objets de la pièce étaient de magnifiques lustres qui pendaient au plafond par un moyen qui échappait au capitaine. Sur le côté gauche, il y avait une succession de portes-fenêtres qui menaient toutes sur un large balcon de pierre. Sur sa droite, il y avait un escalier qui menait sur une sorte de mezzanine supérieure. En dessous de ce palier, qui s’élevait à mi-hauteur du mur, il y avait des tables sur lesquelles reposaient d’appétissants mets. Entre lesdites tables, il y avait des portes et Neldirage se demandait bien où elle pouvait mener.
Le reste de la salle était occupée par les convives. Hommes comme femmes. Ces dernières portaient des robes toutes plus extravagantes les unes que les autres. Maquillées et recouvertes de cette poudre blanche, elles riaient fort pour se faire remarquer… Cela avait toujours eu l’effetd’agacer notre capitaine. Ces dames étaient au bras d’hommes divers et variés. D’après les costumes qui croulaient sous les médailles, ils faisaient tous partie de l’armée. Mais par les vêtements et l’ego que dévoilaient certaines personnes, il était sûr qu’il y avait aussi des seigneurs dans la salle.
Le capitaine Van Hoff l’aperçut et vint dans sa direction. Neldirage était content de voir un visage ami dans cette foule. Le capitaine se méfia quand même car que voulait dire un visage amical dans ce monde hypocrite ?
-Enchanté de te voir Neldirage ! Commença-t-il.
-Moi aussi, capitaine ! Répondit notre ami en oubliant qu’ils avaient désormais le même grade.
-Tu peux m’appeler Karl !
-D’accord… Karl ! Répéta Neldiage.
-Allez, suis-moi, il va falloir te présenter.
-Ecoutez-moi ! Cria le capitaine Van Hoff en mettant ses mains en porte-voix.
Les regards convergèrent vers les deux hommes.
-Voici l’homme qui est à l’honneur ce soir ! Le capitaine Neldirage qui ira dès demain prendre le contrôle de Kaer Ynir !
Des murmures de soulagement et de respect parcoururent rapidement l’assemblée. Les convives entreprirent de venir saluer et encourager un homme qui ne savait pas ce qui l’attendait. Van Hoff présenta toutes les personnes qui se présentaient à lui. Il y eut un défilé de noms, de visages, de vêtements à tel point que Neldirage faisait tout presque par réflexe. Une salutation et un sourire forcé. Le capitaine était sûr que plusieurs d’entre eux étaient responsables de sa mutation. Il les regarda tous dans les yeux et tenta de déceler un malaise. Mais ces personnes étaient bien entraînées et rien ne filtra de leurs regards.
La soirée commença après que tous les invités eurent félicité Neldirage pour son travail et sa promotion. Au cours de la reception, ce n’est pas qu’il s’ennuyait dans un monde qui n’était pas le sien mais il avait envie de prendre l’air. Il s’excusa donc auprès du groupe dans lequel il avait été embarqué. Ceux-ci ne firent pas attention à ce qu’il venait de dire et il n’osa pas s’éclipser par manque de respect. Soudain, les invités se tournèrent vers une porte qui se trouvait cachée derrière les autres convives. Neldirage saisit l’opportunité pour passer sur le balcon.
La vue qu’il avait était vraiment magnifique. Le capitaine n’avait aucune notion des hauteurs mais il devait se trouver à au moins une cinquantaine de mètres du sol. Neldirage plissa les yeux pour vérifier car il n’avait pas tant eu l’impression de monter. Face à lui, une lune pansue s’élevait difficilement dans le ciel. En dessous de cette dernière, la ville était colorée de milliers de petits points jaunes qui faisaient ressembler l’agglomération à un brasier en train de s’éteindre. Il faisait une nuit noire et profonde mais Neldirage arrivait quand même à distinguer les remparts de sa position. Il se demandait qui pouvait bien être de garde ce soir-là… Il secoua la tête avec un sourire : ce n’était plus à lui de gérer cette affaire.
Sa hanche fut percutée par son épée de cérémonie. Le capitaine tourna son regard vers l’arme. Elle ne devait même pas couper, se dit-il. Que de la décoration. Il dégaina et examina cette dernière. Il ne s’était pas trompé, la piètre qualité et le temps avaient contribué à faire disparaître le fil de l’épée. Neldirage fit quelques mouvements contre un ennemi invisible. Ca lui rappelait sa jeunesse et sa poutre…
-Quel talent ! Etes-vous aussi efficace qu’on le raconte ? Dit une voix de jeune fille dans son dos.
Neldirage rougit et rangea rapidement sa lame dans son fourreau. Il sourit et répondit :
-Ne vous inquiétez pas ! Cette lame est inoffensive. A qui ai-je affaire ?
-Vous avez une mémoire bien courte… Lieutenant Neldirage… Dit-elle avec un ton impérial.
C’est vrai que cette jeune fille ne lui était pas inconnue. Ces cheveux blonds… Ces yeux pétillants… Où les avaient-ils vus ? Et pourquoi l’appelait-elle lieutenant ? Soudain la vérité resurgit.
-Excusez-moi de ne pas vous avoir reconnu… Princesse Caroline.
En même temps, ce n’était guère étonnant qu’il ne la reconnût pas. Elle avait tellement changé. La plante avait poussé et pris des formes. Elle mesurait une demi-tête de moins que Neldirage. Elle avait noué ses cheveux couleurs des blés en une queue de cheval qui lui arrivait à la hauteur de la nuque. Ses formes étaient devenues pleines et généreuses… Le capitaine devait avouer qu’elle était belle. Elle semblait aussi provocatrice que cinq années auparavant…
-Allons ! Rentrons ! Si l’Empereur m’a demandé de m’occuper de vous, ce n’est pas pour rien !
-Vous êtes son ambassadeur ? Demanda Neldirage.
-Absolument ! Pour ma touche… féminine, dit-elle avec une moue séduisante.
-Je vous suis alors ! Allons rejoindre cette élite du royaume… Tenta Neldirage avec audace et ironie.
La princesse se contenta de sourire et retourna dans la salle. Le capitaine la regarda un instant puis la suivit. La soirée se passa nettement plus vite au bras de cette si charmante compagnie, nota Neldirage. Ils passèrent de groupe en groupe et elle lui apprit qui étaient ces hommes. En qui l’on pouvait avoir confiance, qui était dangereux, qui était ambitieux, qui était courageux… Au grand regret de Neldirage, il semblait y avoir plus d’hommes à défauts qu’à qualités. Le temps passa.
Le banquet touchait à sa fin et les derniers invités venaient de se retirer laissant Caroline et Neldirage seuls. La princesse, qui s’était assise quelques minutes sur une chaise, entreprit de repasser sur le balcon. Elle fit des signes à Neldirage pour qu’il la rejoigne. Le capitaine retint un bâillement et y alla. Elle avait grimpée sur la rambarde et jouait l’équilibriste au-dessus du vide. Le capitaine, par prudence, lui demanda de descendre.
-Et pourquoi, ô vaillant capitaine, je ferais ça ?
-Imaginez que vous tombiez…
-Et bien ce cher Empereur retrouverait une princesse dans sa famille pour la marier et assurer sa succession.
-Vous allez vous mariez ? Demanda Neldirage avec un pincement au cœur.
-Oui… Répondit-elle. Un jour ou l’autre ! Le temps de trouver quelqu’un dit-elle avec un clin d’œil complice. Et j’ai déjà ma petite idée…
Elle sauta de la balustrade aux bras du capitaine. Leur visage se trouvait à quelques centimètres. Ils se rapprochèrent lentement. Elle ferma les yeux et s’approcha et Neldirage en fit autant. Un centimètre les séparait maintenant. Soudain, un bruit de gravier foulé se fit entendre. Elle s’écarta vivement et sonda la nuit.
-L’Empereur ! Je ne pensais pas qu’il rentrait si tôt ! Je suis désolé ! Il faut que j’y aille.
Elle commença à partir laissant Neldirage dans l’incompréhension totale de ce qu’il se passait. Elle embrassa ses doigts, les posa sur les lèvres du capitaine qui restait amorphe et complètement déboussolé puis fit demi-tour.
-Je reviendrai… Parvint à dire notre capitaine
-Je sais…
Elle traversa la salle et emprunta une porte qui plongeait dans les entrailles du palais. Neldirage, après quelques secondes à réfléchir, décida de repartir par le même chemin qu’il avait emprunté à l’aller… S’il s’en souvenait… Il suivit plusieurs couloirs avant de se perdre. Après cinq minutes à errer, il retomba sur une voie par laquelle il était passé. Par contre, ce à quoi il ne s’attendait pas, c’était à tomber sur l’Empereur lui-même.
-Qui êtes-vous et que faites-vous ici ? Demanda-t-il sur la défensive.
-Je suis le capitaine Neldirage et je reviens de la soirée donnée en mon honneur…
-Ah oui, je me souviens ! Fit son interlocuteur. Hé bien félicitation ! Dit-il avant de le dépasser et de s’enfoncer dans son palais.
Ca faisait deux gros événements en une dizaine de minutes. Rencontrer l’Empereur… même quelques secondes. Quelle prestance ! Quelle aura de puissance et de pouvoir ! Neldirage en resterait marqué longtemps.
L’autre, c’est cette princesse qui gardait avec elle son cœur. Notre capitaine, alors que c’était la première fois qu’il vivait ça, ne savait pas trop quoi faire. Confiant dans ce nouvel amour, il décida de partir quand même et de revenir quand l’heure serait venue.
C’est donc joyeux et fort d’un nouveau sentiment que le capitaine se mit à courir le long de l’allée principale du château. Neldirage se retourna en continuant à trottiner et chercha sa belle à l’une des fenêtres. Il ne la vit pas mais le capitaine ne doutait pas qu’ils se voyaient par une autre vision… Celle du cœur. Après une dizaine de minutes à marcher à travers la ville, Neldirage remercia le maréchal-ferrant, lui dit au revoir, le paya et chevaucha sa monture pour rejoindre ses amis aux portes de la ville.
Il ne mit qu’une poignée de minutes pour rejoindre la herse d’entrée. Mais quel fut sa surprise de ne pas voir trois cavaliers mais seulement deux…
-Van ? Demanda simplement Neldirage.
-On l’a pas retrouvé… Dit Ylanay.
-Tant pis, il faut y aller ! On ne peut se permettre du retard. Joli cheval Pierre, en fait !
-Merci ! Rik, il s’appelle ! Hein mon bel étalon noir !
Le cheval renâcla quand Pierre lui flatta l’encolure.
-En avant !
Neldirage fit tourner bride à sa monture et passa la porte que les gardes venaient de récemment ouvrir. Les trois cavaliers ne lancèrent pas leurs montures au galop tout de suite, ils voulaient encore un peu profiter de cette ville qui avait été un peu comme une deuxième mère. Après un regard commun, ils talonnèrent leurs montures. Une voix les fit pourtant s’arrêter. Neldirage tira sur ses rênes ce qui fit cabrer sa monture. Le capitaine remercia le maréchal-ferrant d’avoir bien fixé ses affaires à la selle de son cheval. Mais cela en valait le coup car le capitaine avait reconnu la voix.
-Van ! Dit-il en reconnaissant le cavalier qui arrivait.
-Vous pensiez partir sans moi, les copines ?
-On t’a cherché hier, tu étais où ? Demanda Ylanay.
-J’ai fait des courses ! Enfin si on peut appeler ça comme ça !
-C'est-à-dire ? Demanda Neldirage.
-Regardez !
Il attrapa une première couverture qui se situait à l’arrière de son cheval. Il l’ouvrit et les compagnons purent voir des armes sublimes.
-Whao ! S’exclama Pierre. Tu as trouvé ça où ?
-A mon avis, le propriétaire va râler, je me trompe ?
-Si il râle, je ferai en sorte qu’il ne parle plus jamais ! Ajouta-t-il avec un clin d’œil. Non mais sérieusement, je ne pense pas que là où il est, il en ait franchement besoin. Alors Neldirage, pour toi qui préfère dorénavant te battre avec deux épées et bien en voici deux ! Je les ai achetées à prix d’or ! A ce qu’il parait, y en a une de magique ! J’ai eu beau la secouer, j’ai rien trouvé !
Van lui tendit deux lames mesurant quatre ou cinq pieds de long. Malgré leur grande taille apparente, elles n’étaient pas trop lourdes. Neldirage tendit les bras avec les épées au bout pour tester l’équilibre. Elles étaient parfaites. L’une d’elles, comme il l’avait précisé, semblait magique : de petites étincelles bleues couraient à la surface de la lame.
-Je ne sais pas à qui tu les as prises et je veux pas le savoir ! Ces épées sont magnifiques !
-Pour toi, Ylanay… J’ai chourr… J’ai trouvé ce magnifique livre parlant de l’anatomie humaine. Ainsi qu’un nouvel arc. Tiens, c’est cadeau. Dit-il en tendant les objets à l’intéressé.
-Merci, gars, dit-il avec un clin d’œil.
-Pour toi, Pierre… Je n’ai pas trouvé de cerveau ! Désolé !
Le groupe éclata de rire.
-Mais, j’ai ceci… Il sortit une longue lance et un arc.
Neldirage ne put s’empêcher d’ouvrir de gros yeux. Quelle arme ! Elle était également superbe. La hampe était faite dans un bois très résistant. Au bout, la pointe était reliée par une décoration vraiment bien sculptée. Elle représentait deux serpents dont la tête était sur la pointe et la queue descendait sur la hampe.
-Tu t’es offert quoi comme cadeau ? Demanda Pierre visiblement ravi.
-Ce cheval, des rations pour le voyage, un bouclier et une épée.
-Tu aurais pu prendre une autre couleur pour le cheval ! Dit Pierre, vexé que les deux bêtes se ressemblent.
En remarquant que Neldirage, Ylanay avait les deux autres couleurs de cheval les plus courantes, il dit :
-Désolé, le modèle vert, il le faisait plus !
-Arrête de t’en prendre à moi, dit Pierre, sinon tu vas goûter à ma nouvelle lance ! Le menaça Pierre.
-Pff, tu sais pas viser de toute manière ! Dit Van en s’élançant. Premier arrivé, les gars !
Les amis sourirent et le poursuivirent. Ils ne mirent guère longtemps avant de le rattraper et le suivrent sous un soleil levant.
Chapitre LII
Voilà deux semaines qu’ils chevauchaient. D’après les informations qu’ils avaient recueillies en chemin, ils ne devaient plus être très loin. Les quatre amis sentaient que l’air se faisait doucement plus doux. Il ferait bientôt froid. L’hiver arrivait et Neldirage n’en avait jamais passé un si loin au nord. La nuit allait tomber et les amis décidèrent de camper à l’orée d’une forêt. Pendant ce trajet, ils n’avaient croisé qu’un seul village. On leur avait fait comprendre qu’il ne fallait pas qu’ils s’attardent.
Après avoir racheté des rations, ils se remirent en route. D’après les réserves, Van avait déduit qu’ils pourraient errer encore une semaine et après ils seraient en disette. Ils attachèrent leur monture à un arbre et entreprirent de faire un feu.
-Le feu devra être à couvert, dit Neldirage. Creusez un trou. On n’est jamais trop prudent ! Ylanay, tu vas faire un tour ?
Il hocha la tête, prit son équipement et s’engagea dans la partie du bois qui était derrière eux.
-Que crois-tu qu’il peut y avoir dans le coin ? Demanda Pierre.
-Je ne sais pas, dit Neldirage, mais je préfère être trop prudent que négligent.
Ils s’assirent en cercle autour du feu qui venait de prendre. Au loin, le soleil ne laissait qu’une partie visible de lui. Les ombres de la forêt grandirent ce qui n’eut pas pour effet de rassurer les quatre soldats.
-En fait, je n’ai pas osé te demander, mais pour Charlotte ? Demanda Neldirage à Van.
-Les aux revoirs furent chaleureux… On s’est promis de s’attendre, j’espère qu’elle tiendra parole.
Neldirage hocha la tête.
-Et toi ? Tu ne veux toujours pas dire comment s’est passée ta soirée ?
-Mais rien de spécial, je vous dis !
-Allez, je suis sûr que non ! Lança Ylanay en sortant d’un buisson.
-Bon, bon, d’accord ! Je vous le révèle sinon je sens que vous n’allez pas me lâcher ! Il y a quelque chose entre elle et moi, voilà !
-Oh, rien que ça ! Dit Pierre en rigolant.
-Et qu’en pense la demoiselle en question ? Demanda son meilleur ami.
-Bin… Je crois qu’elle pense pareil.
-Un nouveau mariage en perspective ? Demanda Pierre en donnant un coup de poing sur l’épaule de Van pour le rappeler que ça serait bientôt lui.
-Tu sais… Une si jolie fille trouvera forcement quelqu’un pendant mon absence ! Et puis, l’Empereur n’acceptera jamais qu’elle se marie avec moi !
-Rien ne t’empêche d’y croire… Dit Van.
-Non, c’est ça le problème !
Les quatre compagnons restèrent dans un silence quasi palpable. Neldirage repensa à leur dernière étreinte et jeta quelques brindilles dans le feu. Une larme faillit couler mais il réussit à se retenir. Il ravala un sanglot et déclara qu’il prendrait le premier quart. Il prit ses épées, un arc ainsi que quelques flèches avant de trouver une position où il pourrait veiller sur ses amis. Une fois que ce fut chose faite, il laissa son regard se promener dans les étoiles. Tant de points brillants, tant de symboles représentés… Neldirage n’avait pas la moindre idée de ce qu’ils signifiaient et il décida alors d’inventer des constellations qui porteraient toutes le même prénom, celui de Caroline.
Il resta ainsi une bonne heure, camouflé dans son arbre mort. La nuit avait étendu ses ailes depuis longtemps et un épais rideau noir recouvrait la forêt et le campement. Le capitaine se mit à se rappeler toutes ces situations qui l’avaient amené à être caché dans ce genre d’endroits saugrenus. Il sourit rien qu’en se l’imaginant. Cela lui paraissait si loin… C’était un âge où il ne savait pas ce qui l’attendait. Bien qu’ayant acquis une expérience et pris du grade, on lui retirait quelque chose de fondamental : son amour.
Neldirage se demanda s’il avait fait le bon choix. Devait-il avoir des regrets sur sa vie ? Avait-il bien fait de partir à la place de son père ? Qui pouvait le lui dire ? Il aurait sûrement continué d’exploiter la ferme. Il se serait marié avec une paysanne du coin, aurait plein de marmots. Il serait ensuite mort, on l’aurait pleuré puis oublié. Pourquoi une vie si courte ? Neldirage tapa machinalement l’écorce de l’arbre.
-Allez, descends de là que je te remplace ! Dit Pierre.
-Je suis si mal planqué pour que tu m’aies vu tout de suite ? Demanda Neldirage qui ne l’avait même pas entendu arriver.
-Je porte le médaillon que m’a offert de La Croix ! Il ne découvre pas que le brouillard ! Il permet de voir la nuit aussi !
-Bah ça te sera bien utile, tiens ! Allez bonne veille ! Je te laisse l’arc là-haut.
Neldirage s’agrippa à une branche et se laissa choir au sol tandis que Pierre montait rapidement se mettre en position. Autour du feu, Ylanay et Van dormaient déjà. Le capitaine tira sa couverture avant de s’étendre sur le sol. D’ici une semaine, se dit-il, le froid serait plus mordant et la terre se ferait molle. Il serait donc plus difficile de camper. Neldirage espéra qu’ils seraient arrivés d’ici là.
Il fut réveillé à l’aube pour prendre le dernier tour de garde. Neldirage s’étira un bon coup et se leva. Il déposa la couverture sur sa monture puis se dirigea pour remplacer Van. Comme pour Pierre, ils échangèrent des paroles pendant que l’un descendait et l’autre montait faire la sentinelle. La région semblait paisible. Quand Neldirage décida qu’il était l’heure de prendre la route, un vent glacé se leva. Arrivé au campement, il enfila un deuxième gilet car il commençait à grelotter. Il réveilla ensuite un à un ses amis qui refusèrent catégoriquement de sortir de leurs couvertures car la température extérieure était trop froide. Ils finirent tous par enfiler plusieurs couches de vêtements en attendant que le soleil daigne bien les réchauffer.
Eclair semblait content de la couche protectrice que Neldirage lui avait octroyée. Le capitaine vérifia que toutes ses affaires étaient là, au cas où, puis ordonna le départ. Les compagnons remontèrent en selle.
-Ylanay, passe devant… Tu as regardé le terrain sur combien hier ?
-Deux ou trois kilomètres je pense. Je n’ai pas croisé âme qui vive, c’est que du bois.
-Restez prudent ! On ne sait jamais.
-A vos ordres, capitaine ! Dit Van en suivant Ylanay.
La traversée de la forêt fut sans événements notables. A la sortie de la partie boisée, ils tombèrent sur une clairière qu’ils traversèrent pour rejoindre un flanc de colline tout aussi boisé que précédemment. Neldirage nota que depuis une centaine de kilomètres déjà, les conifères se faisaient de plus en plus présents. Une végétation plus drue, plus sauvage, plus résistante.
-Kaer Ynir en vue ! Annonça Ylanay qui était parti en éclaireur.
-Combien de temps d’ici ?
-Deux kilomètres max, Nedi !
-Bien alors ne traînons pas ! Plus tôt on sera arrivé, mieux ça sera !
Du haut de la colline, ils purent voir la forteresse. Le Kaer avait été bâti sur une colline similaire à celle où ils se trouvaient maintenant. Autour du château, des champs s’étendaient dans toutes les directions. Une palissade de bois avait été dressée un kilomètre après celle de pierre. Elle permettait ainsi de protéger le millier de chaumières qui entourait cette forteresse. Sur la gauche, Neldirage put voir une vaste étendue turquoise qui réfléchissait le soleil : la mer. Il ne l’avait jamais vue. On lui en avait parlé mais jamais il n’était allé regarder de lui-même. Il espérait pouvoir bientôt combler cette lacune. L’étendue d’eau était cachée en partie par la forteresse et Neldirage ne put dire si elle continuait ou pas. En tout cas, à droite du fort, il n’y avait que de la forêt…
Une vaste et dense forêt. Le capitaine se demandait quels secrets elle pouvaient bien renfermer. Au loin, les arbres avaient revêtu leur manteau d’hiver et étaient déjà recouverts d’une fine pellicule de neige. Le brun de la vie se dégradait lentement vers le blanc du changement. Une bourrasque plus fraîche que les autres ramena les amis à la réalité. Après avoir lâché le coin du paysage qu’ils regardaient, ils descendirent le long de la colline et firent route vers Kaer Ynir.
En chemin, ils rencontrèrent deux éclaireurs qui furent surpris de les voir. Ils chevauchaient des montures à poils longs qui les faisaient davantage ressembler à des chiens géants qu’à des chevaux. Une fois leur identité déclinée, les éclaireurs partirent indiquer à l’intendant qu’ils arrivaient. Les quatre amis ralentirent l’allure pour leur laisser le temps de tout préparer.
-A votre avis, combien sont-ils à vivre autour de cette forteresse ? Demanda Van.
-Je dirais entre trois et quatre mille personnes, répondit Pierre.
Ils empruntèrent un chemin qui était marqué par le passage régulier de charrettes. Les soldats décalèrent leurs montures au milieu de la route et les firent marcher en colonne. Ils éviteraient ainsi qu’elles ne glissent et ne se rompent le cou. Ils finirent par arriver à l’accès principal de la palissade de bois. Neldirage arrêta sa monture une dizaine de mètres avant.
-Prêts ?
-Prêts ! Répondirent ses amis.
Ils engagèrent leurs chevaux dans l’étroite porte. Ils suivirent ensuite une route grossièrement pavée qui semblait mener jusqu’au château. Les champs avaient été occasionnellement abandonnés et la population s’était massée en bord de route pour voir l’homme qui allait la diriger. Neldirage se força à quelques sourires mais personne ne les lui rendit.
-Et bien, quelle joie de vivre ! Dit le capitaine à ses amis.
-Tu m’étonnes… Répondit Van. Si je vivais à cet endroit, je serais dans le même état.
Pierre et Ylanay sourirent à la remarque. Ils continuèrent à avancer sous les regards méprisants, curieux et inquiets des habitants du lieu. La foule semblait assez homogène comme put le noter Neldirage. Un carrefour de civilisations, pensa-t-il. Il y avait des hommes bruns comme le capitaine avait l’habitude d’en voir mais aussi des blonds à la musculature imposante. Ils portaient majoritairement de la fourrure et semblait manier des haches à deux mains.
Alors qu’il allait arriver à la forteresse, un barbu blond musclé lui barra le passage. Neldirage fit avancer sa monture de quelques pas. L’homme ne broncha pas et resta en place.
-Hors de mon chemin ! Dit Neldirage assez énervé du manque de respect manifeste de ce village.
-C’est toi le nouveau capitaine ? Demanda l’homme.
-Oui, répondit Neldirage, cela poserait-il un quelconque problème ?
-Nan…Nan… Il jeta un coup d’œil complice vers ses amis sur le bord de la route. Mais le précédent s’est jeté du haut de la tour ! C’est qu’on ne voudrait pas qu’une mauviette reprenne le pouvoir si tu vois ce que je veux dire…
-Laissez-moi lui botter le c… Commença Van.
-Non, dit Neldirage, je vais m’en charger ! Je vais voir si les cours que j’ai pris servent à quelque chose.
Notre capitaine tendit les rênes à Pierre tandis qu’il mettait pied à terre. Les bottes s’enfoncèrent de quelques centimètres dans la boue omniprésente. Neldirage décida de faire attention car ce facteur pourrait le piéger dans le futur affrontement. Il se déchargea de quelques couches de vêtements, ce qui eut pour effet de faire rire l’homme qui ressemblait de plus en plus à un ours. Il s’arrêta de rire quand le capitaine mit ses lames au clair. Après quelques mouvements pour chauffer ses poignets, Neldirage se mit en garde.
Le capitaine comptait expédier le combat dès les premiers coups… Il mit sa première épée tendue au-dessus de sa tête tandis que l’autre fut aussi pointée vers l’homme, mais en retrait au niveau de sa hanche. Il plia les genoux et attendit que sa cible se précipite. Les villageois rythmèrent le combat d’un grondement sourd. Le barbare, voulant lui aussi gagner au plus vite, se jeta sur Neldirage qui l’attendait de pied ferme. Il frappa de haut en bas. Le coup aurait pu fracasser un roc, aurait parié notre capitaine. Neldirage se déplaça sur le côté et frappa du plat de la lame le derrière des genoux du barbare. Celui-ci, emporté par son élan, s’écrasa dans la boue et lâcha sa hache. Le silence était complet. Neldirage fit peser son regard sur la foule puis remonta sur son cheval. Le barbu s’était assis et se demandait encore comment il était arrivé là quand les quatre amis le dépassèrent avec un sourire narquois.
-Joli combat ! Lança Ylanay à l’adresse des compagnons de l’homme blond.
L’incident déjà hors de leurs pensées, ils se présentèrent aux portes du château de pierre.
-Qui va là ? Cria une voix en haut du rempart.
-Fais-nous croire qu’on t’a pas prévenu qu’on arrivait ! Hurla Van.
Neldirage se retourna avec un grand sourire.
-Tu pourrais être plus amical ?
-Attends, regarde ses questions à l’autre aussi ! C’est n’importe quoi !
-Dis-lui qui c’est sa mère la prochaine fois ! Dit Pierre en pouffant.
Les portes s’ouvrirent. Deux gardes semblaient avoir du mal à déplacer ses lourdes planches de bois. Le gel commençait à bloquer les gonds et la boue s’accumulait sous les portes, créant des frottements gênants. Neldirage talonna sa monture qui rentra dans la cour. En face de lui, sur le palier de la forteresse, attendait un homme vêtu d’une longue cape de fourrure qui cachait difficilement une robe rouge. L’homme semblait gelé et décida de ne pas trop le faire attendre. Des écuyers se saisirent des chevaux.
-Une fois correctement installés, prenez nos affaires et amenez-les nous ! Ordonna Neldirage à l’adresse des jeunes hommes.
Les compagnons se jetèrent de leur monture pour enfin rentrer dans un lieu plus chaleureux… Enfin l’espéraient-ils.
-Bonjour, seigneur… Fit l’homme pour Neldirage qui sourit en entendant ça.
-Je ne suis pas votre seigneur mais votre capitaine… Rectifia le capitaine en souriant.
L’homme fronça les sourcils.
-Il fait froid, je suppose que vous ne désirez pas rester dans ce froid croissant.
Les amis firent non de la tête. L’homme se retourna et rentra dans la forteresse. Il fut immédiatement suivi par Neldirage et ses hommes. A leur grand regret, il ne faisait pas plus chaud dans l’édifice qu’à l’extérieur. Ce n’était pas étonnant car une telle superficie devait être vraiment très difficile à chauffer.
L’homme les guida dans ce qui semblait être une salle à manger. Une table avait été préparée près du feu. L’intendant les invita à s’asseoir. La température devenait enfin acceptable et les amis purent enfin enlever toutes ces couches de vêtements gênantes. La table, bien qu’elle ne fût pas richement décorée, avait un certain style. Neldirage nota qu’une panoplie d’efforts avait été déployée pour leur arrivée. Des serviteurs entrèrent et déposèrent un bol de soupe chaude à chacun des quatre amis. Ils se ruèrent le plus délicatement dessus. Une fois ce repas rapidement avalé, l’intendant se risqua à parler.
-Désolé pour l’altercation tout à l’heure… Ces hommes font passer l’honneur avant tout mais ils ne sont pas méchants.
-Ce n’est rien, dit Neldirage, je me doutais que j’aurai mes preuves à faire en quelque sorte.
L’intendant hocha la tête sous ce raisonnement logique.
-Tu es qui toi, au fait ? Demanda Ylanay sans le moindre respect.
Neldirage le lui fit discrètement remarquer. Ce dernier répondit par un ‘quoi ?’ muet. L’intendant voyant ce reproche prit la parole.
-Ne vous en faites pas, capitaine… Je me suis douté qu’il serait difficile dans un premier temps de se faire confiance !
-Espérons qu’elle vienne vite ! Il est moins dangereux de travailler quand les gens peuvent compter les uns sur les autres. Mais pour reprendre la question de mon compagnon, qui êtes-vous ?
-Je me nome Rek, je suis l’intendant de cette forteresse. Je suis aussi mage au service de notre capitale.
-On dit que les magiciens sont arrogants, est-ce vrai ? Demanda Pierre.
-On dit aussi que vous et vos amis montez vos chevaux comme des princesses… Répondit Rek au tac au tac.
Pierre rit de bon cœur et tapa le dos de l’homme joyeusement. Il l’avait déjà adopté. L’homme, visiblement gêné par cette affection que lui accordait Pierre, ne bafouilla aucun mot intelligible.
-Il ne faut pas croire tout ce que l’on raconte… Et vous qui êtes-vous ? Dit le mage en regardant chacun des compagnons de Neldirage.
-Sergent Van.
-Ylanay.
-Et moi, c’est Pierre ! Fit celui-ci en se balançant sur sa chaise en bois.
-Bon, dit Neldirage en reprenant les rênes de la discussion, il va falloir m’informer de pas mal de choses… Réservé votre journée… Ca risque d’être long !
Chapitre LIII
Et en effet, cela fut long. Tandis que Pierre, Van et Ylanay avaient décidé de faire un tour des lieux, Neldirage écoutait un rapport que faisait Rek sur l’endroit.
Ils avaient commencé par la région. Comme l’avait vu Neldirage, l’intendant lui confirma que la forteresse se trouvait pratiquement entourée par la mer. Loin au sud-ouest et nord-est se trouvait deux grosses villes qui empêchaient Kaer Ynir de se développer. Quelques bateaux accostaient parfois et le commerce se faisait surtout à base d’orge. Encore plus au nord, il y avait les steppes gelées… D’après le mage, seule la mort vivait là-haut. Mis à part ça, le coin était forestier et contenait en majorité des conifères qui servaient à la fois de combustible et de matériau de construction.
Ensuite, il avait parlé des environs même de la forteresse. Les abords étaient eux aussi formés par la forêt. Une forêt humide et regorgeant de pièges, de ruines et de bêtes. Ensuite venait la palissade de bois, Neldirage apprit qu’elle était souvent démolie par endroit. Des intrus s’introduisaient souvent et personne n’était jamais parvenu à les voir ni les arrêter. Le magicien pensait à un petit groupe de chaotiques qui avait été aperçu dans la région. Après cette menue barrière de bois, il y avait les champs et les habitations. Après ça, il y avait la forteresse elle-même. Entourée d’une muraille de pierre qui avait bien survécue aux années. Installée en haut d’une colline naturelle, elle dispensait une vue imprenable.
Ils parlèrent ensuite de la population civile. Celle-ci était méfiante envers les étrangers… Notamment à cause de ce mur qui était sans cesse amoché. Bien que Neldirage ne vit pas le rapport, il laissa l’homme continuer. Il devait y avoir trois mille sept cent personnes qui vivaient aux alentours. Sur ce nombre, il devait y avoir cinq cents hommes d’armes. La majorité des civils étaient fermiers. Pour le reste, ils étaient soit bûcherons, soit chasseurs. Avec ces métiers-là, on devait avoir quatre vingt dix-huit pour-cent des habitants.
-Avez-vous une quelconque éducation ? Demanda Rek à Neldirage.
-J’ai commencé dans ma jeunesse ! Je sais lire et écrire mais avec des fautes.
-Si vous voulez, je pourrais vous apprendre…
-Avec plaisir ! Accepta Neldirage.
C’est ce moment que choisirent les amis pour faire irruption dans la pièce. Ils semblaient tout excités ce qui eut pour effet de retenir l’attention de notre ami.
-Que se passe-t-il ? Dit celui-ci en retirant les pieds de la table.
-Viens voir ! Vite !
-Quoi ? Demanda Neldirage.
-Ne discute pas ! Viens voir !
Le capitaine se leva d’un bond et courut après ses hommes. Ils prirent des enchevêtrements de couloirs, de pièces, d’escaliers mais une chose était sûre : ils montaient. Personne ne voulait dire ce qu’il se passait et ça avait le mérite d’agacer particulièrement Neldirage. Ils finirent par arriver dans une petite salle circulaire qui ne devait pas mesurer plus de deux mètres de large. Cette pièce était occupée par un escalier en colimaçon fait en pierre grise. Les trois amis l’empruntèrent rapidement et le capitaine fut obligé de suivre.
Neldirage finit par être légèrement distancé et alors qu’il se demandait quand finiraient enfin ces escaliers, la lumière du jour réapparut. L’escalier débouchait sur une pièce similaire à celle du bas. Dans l’encadrement de la porte, le capitaine put voir un ciel bleu et ses amis qui regardaient dans sa direction en souriant niaisement. Neldirage se doutait de ce qui l’attendait.
Il ne put retenir un cri de surprise.
Ils se trouvaient en haut de la plus haute tour de la forteresse. Et comme l’avait dit Rek, la vue qu’on y avait était vraiment incroyable. Encore plus impressionnante que la vision qu’il avait eue du palais royal. Le balcon de pierre donnait une vue à trois cent soixante degrés.
En dessous de lui, les champs, qui blondissaient sous les lourds épis de cette fin d’été, recouvraient la colline d’une couleur or. Les maisons ressemblaient à des cailloux et la palissade de bois à un cercle que l’on aurait creusé dans la boue à l’aide d’un bâton. Neldirage arrivait à peine à voir les habitants du village qui ressemblaient à de petites fourmis. La forêt contrastait en fonction de l’endroit d’où l’on regardait. Au sud, elle avait pris un aspect roux pour marquer l’heure du repos et du renouveau prochain. En se rapprochant de la forteresse, le tapis vert prenait une teinte plus foncée voire bleue. Derrière lui, une bande de neige commençait d’une partie de monde que Neldirage ne pouvait pas voir et formait une large bande qui traversait ce nord de part en part. Il y avait une sorte de frontière où la neige ne parvenait pas encore à persister. Le reste du paysage était remplie par la mer. Le capitaine ne savait pas quel nom elle avait… Tout ce qu’il savait c’est qu’elle s’étirait à l’horizon en tentant de se mêler avec le ciel. Pour la première fois, Neldirage put suivre des yeux le lent remous que faisait les vagues au large. Il parvint même à distinguer un navire au loin. Le soleil était dans la même direction et le capitaine ne put voir plus de détails. Il disparut rapidement derrière les côtes.
-Je vois que vous avez découvert mon lieu d’observation… Dit Rek en faisant irruption.
-C’est vraiment magnifique… Dit Neldirage en ne parvenant pas à quitter le paysage des yeux.
-N’est-ce pas ? Et attendez de voir la nuit ! Je fais beaucoup de mesures astronomiques…
L’intendant laissa encore Neldirage profiter quelques secondes du spectacle avant de dire :
-Il va être l’heure de passer à table !
-Bien, je commençais à avoir faim ! On mange où ? Demanda Van.
-Dans la salle à manger commune, bien évidemment ! Dit-il en montrant le plus gros bâtiment du village.
-Pourquoi là-dedans ? Demanda Pierre.
-Il est coutume que le dirigeant mange avec ses hommes.
Neldirage coupa court à toutes les protestations en acceptant l’offre. Ils firent donc demi-tour pour aller prendre le dîner dans cette monstrueuse salle. Ils mirent quinze minutes pour tout redescendre et atteindre le bâtiment. L’édifice se composait uniquement d’une salle dans laquelle il devait facilement y avoir une centaine de table. Elles devaient pouvoir accueillir dix personnes sauf celle du milieu qui pouvait supporter une cinquantaine. Tous les carrés de bois étaient pratiquement occupés. Des serviteurs, hommes comme femmes, faisaient des allers-retours entre ce qui devait être la cuisine, qui était cachée aux yeux des soldats, et la salle principale où étaient attablés les habitants.
Le magicien guida les quatre étrangers jusqu’à la table centrale. Neldirage s’assit au bout et les quatre autres compagnons s’installèrent également de part et d’autre.
-Il faut bénir le repas dans un discours pour que celui-ci commence… Chuchota Rek à l’oreille du capitaine.
Neldirage se leva, bien qu’il ne sut pas quoi dire. Tous les regards se tournèrent vers lui. On aurait dit qu’ils n’avaient jamais vu d’humain comme lui auparavant… Mais au moins, dans la majorité des regards, il n’y avait plus cette lueur mesquine mais celle du respect.
-Moi, Capitaine Neldirage… Il chercha ses mots. Bénis ce repas. Qu’il vous apporte force et longue vie…
-C’est bidon… Dit en se marrant Van.
-Ouais ben hein…. Dit le capitaine à son sergent avant de reparler pour l’ensemble de l’édifice. Je sais que l’on ne se connaît pas. Je sais aussi que vous n’avez pas confiance en moi… Tout ce que je vous ai montré, c’est que je ne suis pas homme à me laisser impressionner par l’adversité !
L’homme qui s’était fait battre hocha la tête : Il avait compris la leçon.
-Je vais apporter des changements. J’aimerais que, bien que comme je l’ai déjà dit je ne sois pas grand-chose dans votre considération, vous coopéreriez. Si tout se passe bien, vous n’aurez pas à le regretter. Merci et bon appétit ! Termina Neldirage avant de se rasseoir.
-C’est quoi… ces changements ? Dit Pierre en mâchonnant un bout de poulet.
-La seule façon que j’ai de gagner leur confiance, c’est par des prouesses martiales.
L’intendant Rek opina du chef pour confirmer ces dires.
-On va donc aller traquer ces chaotiques…
-Vous n’y pensez pas ! S’exclama le mage.
-Et pourquoi donc, dit Van ? Qui avait délaissé temporairement son dîner. A ce qui paraît, ils ne sont qu’une dizaine…
-Parce que ce n’est qu’une approximation et en plus, on n’est pas sûr qu’ils soient encore dans la région.
-Pierre, Ylanay… Vous connaissez votre mission pour demain. Essayez de remettre la main dessus.
-Moi, je ferai quoi ? Demanda Van qui avait peur d’être écarté.
-Tu inspecteras cette palissade de bois et me feras un rapport sur son état. Rek ?
L’homme lâcha le morceau de viande qu’il était en train de manger pour tourner sa tête vers son capitaine.
-Oui ?
-Tu as bien dit qu’il y avait des problèmes d’eau douce dans le village ?
-C’est exact ! Les rivières sont trop loin pour qu’elle puisse sustenter correctement le village.
-Alors demain, réquisitionne des hommes, on va creuser la terre à la recherche de nappes d’eau.
-Bien mon capitaine, dit ce dernier en hochant la tête.
Le repas continua où les amis intégrèrent facilement Rek à leur groupe. Ils se racontèrent leur vie, leurs projets et leurs ambitions. Le mage leur apprit les coutumes locales, les mœurs et tout ce qu’il y avait à savoir. Les quatre soldats furent loin d’être ravis quand ils apprirent que l’hiver qui s’annonçait allait être rude… Bien pire que le froid actuel, précisa l’intendant. Rien qu’à cette évocation, Neldirage ne put s’empêcher de frissonner et de rentrer ses mains un peu plus dans ses manches.
La nuit était bien entamée quand le capitaine lâcha son premier bâillement. Dans la salle, il ne restait plus que des soldats. Ils jouaient, faisaient des bras de fer, buvaient ou simplement, discutaient. Neldirage s’excusa auprès de ses amis et décida de se mettre à la table du barbare qu’il avait battu plus tôt dans la journée. Après des regards inquisiteurs, Neldirage dit :
-Un bras de fer, ça te tente ? Pour ta revanche !
-Avec plaisir ! Grogna l’homme.
Ce petit duel intéressa une bonne partie de la salle qui se massa autour des deux protagonistes. Le capitaine remonta sa manche et posa le coude sur la table. Il savait qu’il allait perdre mais s’il pouvait, par ce moyen, se mêler à ces soldats alors il le ferait. L’homme posa aussi son coude sur la table laissant entrevoir une masse de muscles assez impressionnante. Neldirage déglutit silencieusement et attrapa la main de son adversaire.
Un homme saisit les deux mains et les maintint en place. A son signal, le duel s’engagea. Neldirage força comme un beau diable et l’homme en face en fit de même. Les deux poignets tremblaient sous la pression qui menaçait de faire exploser leurs os, ce que Neldirage craignait le plus à ce moment là. Mais petit à petit, la force du barbare prenait le dessus. Bien que le capitaine réussisse à remettre l’affrontement à égalité en lançant toutes ses forces dans la bataille, il finit par perdre et sa main de s’écraser contre la table de bois. Le barbare leva les bras au ciel avec un cri de victoire auquel les autres soldats répondirent.
Neldirage tapota le dos du vainqueur et retourna s’asseoir sous les regards approbateurs de certains barbares. Il se laissa tomber dans son siège en se massant le poignet.
-Alors ? Résultat ? Demanda Van qui n’avait pas bougé de sa place.
-Il a failli emporter ma main en plus de la victoire, le bougre !
Ylanay sourit et Rek dit :
-C’est une bonne idée de se mélanger aux soldats… Si vous gagnez leur confiance, jamais ils ne la vous retireront.
-Bon, je suis fatigué ! Annonça Neldirage après avoir réfléchi à cette déclaration. Rek, où est ma chambre ? Mes affaires y sont-elles ?
-Oui, oui… J’y ai veillé personnellement. Pour votre chambre, capitaine, je vais vous accompagner.
-Attendez, je vais y aller aussi ! Déclara Ylanay en se levant à la suite des deux hommes.
-Bon bah on y va aussi alors ! Déclarèrent simultanément Pierre et Van.
Les cinq soldats sortirent de la salle pour se rendre au château à travers la nuit noire et obscure. Un craquement arrêta les cinq hommes.
-C’est quoi ? Demanda Ylanay qui avait tiré une flèche.
-Pierre ? Demanda Neldirage.
-Il semblerait que ça vienne de la palissade… On dirait qu’un bout s’est écroulé…
-Exactement ce que je vous disais… Dit Rek nullement surpris.
-En avant ! Dit Neldirage en partant à l’aveuglette.
Ils franchirent plusieurs champs avant d’arriver jusqu’à la muraille de bois. Des coups de hache avaient été portés à la base des troncs sur environ cinq mètres. Le pan de bois s’était ensuite effondré.
-Pierre, Van ! Enfoncez-vous dans la forêt et regardez si vous trouvez des pistes ! Soyez prudents…
-Pourquoi faire ça ? Demanda Ylanay en touchant une des encoches faites par une hache.
-Je ne sais pas ! Dit Rek. Ils espèrent qu’un jour peut-être, on arrête de réparer et qu’ils puissent s’infiltrer tranquillement quand bon leur semblera.
-Postez des hommes ici jusqu’à ce qu’on répare ça demain !
-C’est ce que j’allais faire, capitaine ! Dit Rek avant de s’éclipser.
Les deux amis attendirent le retour des deux éclaireurs. Ceux-ci revinrent bredouilles. Les personnes qui avaient fait ça avaient disparu sans laisser de trace.
-A quoi penses-tu ? Demanda Pierre.
-Rien de particulier… Dit Neldirage. Allons nous coucher…
Chapitre LIV
Neldirage accueillit avec plaisir le confort de ses draps en fourrure. La chambre était la plus grande que le capitaine eût jamais possédée. Après avoir regardé les dernières bûches mourir lentement dans l’âtre, le capitaine s’endormit. Il se réveilla naturellement aux environs de dix heures. Alors que Neldirage traînait encore dans son lit, quelqu’un tapa à la porte et ce fut Rek qui entra.
-Je dérange ? Demanda le mage.
-Non, non ! Répondit Neldirage qui attrapa son pantalon qui était à côté de son lit.
-Vos compagnons s’attèlent déjà à la tâche et j’ai jugé bon de vous réveiller pour que nous commencions nos leçons…
-Nos leçons ? Répéta Neldirage.
-Vous n’avez pas oublié que je devais perfectionner votre éducation ?
-Non, non ! Mentit Neldirage. Par quoi commençons-nous ?
-Mathématiques et géographie ! Répondit l’intendant avec beaucoup d’enthousiasme.
-Passionnant…
-Ne vous en faites pas, capitaine… Cela sera l’histoire d’un bon mois.
-Je crois que je pourrai tenir, dit Neldirage malicieusement.
Le capitaine enfila ses derniers vêtements puis les chausses recouvertes de fourrure blanche qu’on avait pris soin de lui apporter. Ils retournèrent dans la salle à manger de la forteresse où les leçons débutèrent. Ils travaillèrent jusqu’à ce que le soleil fût à son zénith. Neldirage claqua le livre qu’il lisait ce qui eut pour effet d’envoyer une myriade de petits grains de poussière qui se transforma en étincelle au contact des bougies posées sur la table.
-Bien, fini pour cette première matinée ! Se réjouit le professeur. Vous êtes un bon élève, capitaine.
Neldirage ne broncha pas. Il n’osait pas dire à l’intendant que, en fait, apprendre ces choses était ennuyeux. Il regrettait que ses parents ne lui aient pas laissé finir son éducation. Il n’aurait pas été ici en train de s’embrouiller avec tous ces chiffres… Il se leva de table pour aller chercher des affaires plus chaudes et rejoindre ensuite ses amis dans la salle commune.
-La cape brune… Celle en peau d’ours là ! Dit Rek pour guider Neldirage.
Le capitaine attrapa la cape et la posa sur ses épaules.
-On se retrouve là-bas ! Cria ce dernier au mage.
Sans attendre de réponse, Neldirage traversa une cour toujours plus boueuse. Il passa en dessous de la herse et quitta la protection du rempart de pierre. Un coup de vent permit aux cheveux du capitaine de lui octroyer sa vision. Il se remit en marche après avoir enfilé un bandeau qui lui faisait le tour de la tête. Neldirage entra dans le bâtiment après avoir salué deux gardes.
Comme d’habitude, tout le monde était déjà attablé. La table centrale, celle où seule l’élite était acceptée, était complète sauf à deux endroits : la place de Neldirage et de Rek. Ylanay, Van et Pierre parlaient déjà entre eux.
-De quoi qu’on cause ici ? Demanda le capitaine avec un accent feint.
-On se faisait un petit rapport… Répondit Pierre.
-Alors vous êtes bon pour le recommencer ! Dit Neldirage avec un clin d’œil.
Van soupira et c’est Pierre et Ylanay qui commencèrent à parler.
-Et bien, on a dû explorer la forêt sur une trentaine de kilomètres, on a rien trouvé. Quelques empreintes mais elles n’ont débouché sur rien. On en a trouvé sur la plage aussi, on s’est dit qu’ils venaient peut-être par bateau. Enfin rien n’est sûr, c’est peut-être pas des hommes qui ont laissé ces traces.
-Sinon, compléta Pierre, comme l’a dit Rek, c’est que de la forêt. Les rivières commencent à geler loin au nord… L’hiver approche.
-Pour ce qui est de ma matinée, dit Van, les bougres ont été sympas et ne m’ont pas causé de problèmes. On a commencé à creuser dans le reste d’un marécage. Il était asséché toutes les années pour éviter que les maladies ne se répandent. On a fouillé la moitié du lieu et on a rien trouvé.
-Continuez à chercher, dit Neldirage, au pire, creusez plus profond.
-Bien, capitaine, la taupe sera toujours là ! Répliqua Van à qui l’idée de recreuser toute la journée ne plaisait guère.
Notre ami bénit le repas alors que Rek n’était pas encore arrivé. Les guerriers, chasseurs, fermiers et autres, attaquèrent un repas bien mérité. La salle s’emplit d’un grondement sourd : celui des discussions. Neldiraga mangea une tranche de lard en réfléchissant à son après-midi.
-Et cette palissade ? Demanda Neldirage à Van.
-Et bien, elle est en piteux état ! Il y a des marques de réparations qui la ponctuent. En cas d’attaque, mieux vaut ne pas compter dessus. Il n’y a même pas d’échafaudages où placer quelques soldats.
-D’après ce que je sais, les sentinelles actuelles sont placées majoritairement sur les remparts intérieurs. Une patrouille surveille l’entrée de la ville et deux autres vérifient constamment la palissade.
-Mais personne n’a jamais tenté de les prendre en embuscade ? Demanda Pierre.
-Non ! Répondit Rek qui venait d’arriver. Ils ne frappent pas régulièrement et jamais au même endroit…
-Il faudrait réfléchir à une manière de les arrêter ! Déclara Ylanay.
-Pour l’instant, nos priorités sont de les localiser et de mieux défendre notre position actuelle. N’allons pas chercher les ennuis si nous ne sommes pas capables de les assumer ensuite.
Van manifesta son accord. Une idée vint à Neldirage.
-Rek, y a-t-il une carrière dans les parages ?
Il réfléchit un instant.
-Oui, personne ne l’exploite, il me semble. Nos habitations sont bâties majoritairement à base de bois. La pierre sert uniquement aux réparations de la forteresse.
-On va transformer cette palissade en quelque chose de plus… défensif ! Dit Neldirage.
-Votre prédécesseur y avait déjà pensé… Dit Rek. Mais nous n’avons ni homme qui sache tailler la pierre, ni matière pour la souder.
-Pour tailler la pierre, il va falloir apprendre ! Ca doit pas être sorcier ! Et je ne veux pas des morceaux parfaits… Je veux des trucs qui puissent s’emboîter. Pour souder la matière… Tu es magicien, non ?
-Je ne vois pas le rapport, dit le mage.
-Tu lanceras une bonne boule de feu là-dedans ! Si ça chauffe assez, ça devrait fondre, non ?
-Je suppose, dit celui-là, mais il faudrait qu’elle dure plus longtemps. Une boule de feu apparaît et disparaît en peu de temps.
-Ca tombe bien, dit Neldirage, on va étayer les alentours de nos défenses. Couper un maximum de bois sur deux cent mètres ! Ensuite, il faudra réduire ce bois le plus finement possible et le glisser dans les interstices.
-Il y a une pierre qui résiste très peu à la chaleur au nord de l’autre carrière… Annonça le mage.
-Magnifique ! S’exclama le capitaine en abattant son poing sur la table. Tout s’arrange ! On devrait pouvoir faire un mur avec de l’allure, non ?
-Ca me semble possible, répondit le magicien, on ne perdra rien à essayer.
-Ylanay, tu prendras quinze hommes avec toi. Vous irez chercher la pierre principale. Réquisitionne des charrettes dans le village pour la transporter. Van… Tu continueras de creuser ! On a absolument besoin de cette eau. Pierre, tu feras plus attention mais tu pousseras plus loin tes recherches. Rek, tu viendras avec moi et on testera tes pouvoirs sur cette roche. Autant voir tout de suite si nos efforts seront vains !
Les amis se remirent à manger pensivement. Tous s’interrogeaient pour essayer de déterminer si l’entreprise dans laquelle ils allaient se plonger avait une chance d’aboutir ou non. Une fois sa ration engloutie, Neldirage laissa le soin à ses subordonnés de donner les ordres. Quant à l’intendant, il devait faire seller les chevaux et se tenir prêt. Pendant ce temps, le capitaine décida de se retirer un peu dans sa chambre. Sa digestion était assez… soporifique.
Neldirage attrapa donc sa cape qu’il avait déposée sur le dossier de sa chaise puis partit monter dans sa chambre en laissant le soin à ses amis de terminer leur repas. Le capitaine ne se l’expliquait pas mais quelque chose les menaçait. Son ventre était secoué de spasmes et il était sûr que ce n’était pas dû qu’au repas. Bientôt, il se passerait quelque chose. Il en était persuadé. La question était quoi. Neldirage s’approcha de sa fenêtre et laissa son regard se perdre sur les étendues sauvages.
Comme toute intuition, le capitaine ne l’oublia pas tout de suite. Il se confia à Rek qui lui assura que la région était l’une des plus calmes de l’Empire. A juste titre : personne ne voulait de ce coin perdu. Ils chevauchèrent donc tranquillement jusqu’à cette carrière dont lui avait parlé le magicien. On voyait nettement la trace de l’homme : la falaise semblait avoir été tranchée par un gigantesque coup d’épée. A ses pieds, plusieurs rochers, allant du simple caillou à d’énormes pierres, attendaient sagement qu’on les ramasse.
-Bien, dit Neldirage en mettant pied à terre, voyant ce que ça donne.
Il fit le tour du lieu en cherchant d’autres pierres que celles qui caractérisaient la carrière. Une fois qu’il en eut trouvé deux de taille vaguement similaire, il les déposa sur le sol et alla chercher une de ces pierres blanches. Il la souleva et la transporta jusqu’au deux autres rochers. Il la laissa tomber dessus et, malgré son apparence fragile, elle ne se brisa point.
-A toi de jouer ! Dit le capitaine en reculant à hauteur du magicien.
L’homme mit les mains dans des positions précises et commença à incanter. Des petites lueurs bleues émergèrent de chaque coin de la carrière et formèrent un amas devant le visage de Rek. Elle prit un éclat plus pâle puis rentrèrent dans son corps. Neldirage massa sa nuque qui s’était raidie. Juste après, l’air crépita et une boule de feu s’échappa des mains du magicien. La boule explosa au contact du sol menaçant d’embraser les arbres tout proches. Le capitaine se précipita pour éteindre ces petits foyers et dégaina une de ses épées. Il tâtonna les trois roches qui n’en faisaient désormais plus qu’une. Comme le mélange semblait résister, Neldirage frappa un grand coup. La violence du choc se propagea jusque dans son épaule. A part quelques bouts en moins, l’assemblage avait tenu le coup.
-Bien, tout est bon ! Rentrons, on reviendra en chercher plus tard…
Les deux hommes rentrèrent au château, fort joyeux que leur opération ne se soit pas soldée par un échec.
LA SUITE
@+
-= Inxi =-