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Petimuel

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Tout ce qui a été posté par Petimuel

  1. Petimuel

    Adoption

    un rapide passage, dans un club internet en Irlqnde. Merci beaucoup pour vos reponses, j' y repondrqi plus tqrd a mon tour... mais je n' ai pas le temps, le prix a la minute est eleve... guygui "pas facile, le qwerty... "
  2. Petimuel

    Adoption

    Merci pour cette réponse que je n'attendais plus. Et désolé à ceux à qui j'ai oublié de répondre, j'ai pris compte de vos critiques, et modifié les fautes sur le texte original. Alors, tu pourrais m'explqiuer cette phase, s'il-te-plaît? Ah! et, au passage Voui, parceque j'ai fais un gros effort. Je me suis relu!
  3. Mmmmh! De gromu tout craché! Etrangement, le personnage le mieux fait de la BD, c'est toi... mais j'insinue rien, moi! Bon, tu devrais renforcer au stylo, mettre un fond, coloriser, et tu m'offres la planche, et je la vend dix millions de balles dès que t'es célèbre. Miammiammiam Et au passage, oui, Ludwig, la suite des aventures de lulu au pays de warfo, ça m'plairait bien!
  4. Mouais... c'est vrai que de ce point'd'vue là, ça va, pour les encolures. Je rejoins Tirli et l'elfe des bois pour dire qu'il vaudrait mieux que Néo soit tourné vers l'avant... mais sinon, encore bravo!
  5. ca ne leur donne pas des cous un peu longs? autrement, bravo, je me demande si je ne vais pas m'en inspirer... mais en racourcissant les cous!
  6. Petimuel

    Adoption

    VIII JEU Gaston regardait par la fenêtre. Il voyait la forêt, ce mélange de tons verts et rouges… au loin, les hautes tours d’Annecy. Le ciel était bleu, mais parsemé de longs nuages cotonneux, voilant la faible lumière du soleil déclinant. Il en ressortait une impression de brutalité, dans ce paysage pourtant harmonieux, un étrange sentiment que tout était figé, immuable. Nul son, nul chant d’oiseau. Tout était immobile et silencieux. « Gaston. » « Mh ? » « Tu ne m’as toujours pas dit pourquoi. » Il se retourna lentement, pour faire dos à la fenêtre. Il voyait sa chambre, à présent. Malgré la lumière émanant de l’extérieur, la pièce était sombre, et froide. Les contours d’un petit lit se dessinaient au fond, tandis qu’à sa droite, un petit buffet en bois poli constituait l’unique mobilier. Les murs étaient en pierres grises juxtaposées. Seul un bloc d’une teinte plus ou moins orangée se tenait, encastré dans le mur à sa droite. Cette pièce était restée inoccupée des années durant. Des toiles d’araignées envahissaient les moindres recoins. En face de Gaston se tenait son présent ami, Vincent. Ou pour mieux dire, camarade, car ils n’avaient pas encore vraiment lié connaissance. Vincent était grand et maigre, son visage était presque cadavérique, avec des pommettes saillantes, un nez allongé, et quelques cheveux blonds rebelles, qui, ne se contentant pas de sa coupe au bol graisseuse, pendaient mollement devant son nez. « Pourquoi, pourquoi... c’est pourtant simple... mon père et mort, et ma mère s’est remariée avec un valet... et elle gère mal l’économie : tout aux riches, rien aux autres… alors, j’ai préféré partir… » « Son système est une idée comme une autre… ne blâme pas les gens pour leurs opinions économiques, Gaston.. » « Des sermons, des sermons, toujours des sermons ! Ne sais-tu donc faire que cela ? Peut-être que ton désir est de devenir abbé ? Car là, des sermons, tu pourras en faire, hein ! Tu seras là pour ça ! » Gaston se retourna, et reporta son attention vers le paysage, en tous les cas bien plus intéressants que le seul mode de conversation que pouvait lui tenir son soi-disant ami. Des leçons de morale… un vrai professeur ! Il détestait les professeurs… « Je… excuse-moi… » « Non. » « Non ? Que… » « Non. » Vincent détourna les yeux, ne sachant que répondre. « Alors… alors ta mère, tu ne l’aimes pas… » « Si… si, je l’aime...enfin, je l’aime bien… mais elle n’a pas choisi la bonne voie… tout cela, c’est à cause de Michel. » « Michel ? » « Le valet de chambre. » Un cri retentit, au dehors. Un cri d’enfant. Un cri gai, mêlé de rires. Gaston se retourna, et bondit sur la porte, l’ouvrit prestement, et, une fois dans le couloir, se précipita à la fenêtre qui donnait sur la cour, pour la scruter. Son cœur battait la chamade. Il avait peur. « Qu… qu’est-ce que c’était ? » « Ils jouent. » « Ils jouent… » Ils jouaient… ils jouaient… ils jouaient ! C’étaient des enfants ! Quand on est enfant, on joue ! On joue ! On joue ! Lui avait oublié ce qu’était le jeu… mais il voulait bien recommencer, même s’il fallait tout rapprendre de zéro ! « Allez, viens, on va avec eux ! » « Non… jouer n’est pas une activité très saine, et… » « Oh, tais-toi », lança Gaston, tout en dévalant l’immense escalier de pierres, au fond du couloir. Une marche deux marches trois marches. Il courait, courait. Jouer ! Il allait jouer ! Il avait même oublié ce que ça faisait… c’était bien, ça, il le savait. C’était l’essentiel. Etait-ce fatiguant ? Reposant ? Il ne s’en souvenait plus… Dix-huit marches, dix-neuf… Chacun de ses pas le rapprochait un peu plus de ce moment béni où il retrouverait les joies de l’enfance. Alors, il fallait faire vite ! Et en même temps, savourer chaque pas en avant… Vingt-cinq, vingt-six…. Il entra dans la bien nommée grande salle du château. Il ne l’aimait pas. Elle avait quelque chose de mélancolique, elle semblait regarder son passé de richesses. Elle était gigantesque, mais vide. De ses huit lustres pendant du plafond, deux seulement étaient pourvus de bougies. Une cheminée esseulée ne laissait échapper aucune fumée, et de larges tables sans nappes n’étaient occupées que par quelques couverts en porcelaine. Une tête de cerf empaillée était accrochée au mur. C’était le seul restant, le seul parmi les animaux sauvages, ours et sangliers, seul trophée bien peu glorieux, perdu dans l’ancien prestige de la collection du seigneur. Pourquoi celui-là ? Pourquoi ce cerf ? Il n’en savait rien… il voulait quitter l’ambiance austère et mélancolique de la pièce, qui semblait tournée vers le passé... il voulait jouer ! Il s’élança en courant ! La salle était vide, il avait la place. Il courut tout droit vers la grande porte du fond. Courut, courut… il comptait les chaises de la grande table qui défilaient, à sa gauche. Pour savourer… Onze, douze, treize… La cour, enfin ! Un grand terrain de boue sur lequel caquetaient quelques poules rousses, entouré par des maisons sales, aux toits de chaumes ou d’ardoises bleues troués. Mais pas d’enfants… personne… pourquoi … « Ouch ! » Il fut projeté à terre, et roula sur un bon mètre dans la boue. Il ouvrit les yeux, hagard, et vit au dessus lui une petite tête ronde, au dessus de laquelle pendaient quelques mèches brunes. « Charles ? Que t’arrives-t-il ? » « On joue ! », lui dit celui-ci, en se relevant pour reprendre sa course folle. Il serrait entre ses mains une balle de cuir brun. « Attends… vous jouez ? Vraiment ? » « Que veux-tu que je fasse, imbécile ? » lui lança Charles, tout en jetant derrière lui un œil inquiet. « Que je joue du luth ? » « Non, non, ce n’est pas ce que je veux dire, mais… attends, Charles, attends ! » Mais le garçon s’était mis à détaler à travers la cour, à la vue d’Henri, qui tournait au coin du château. « Attends, je veux jouer, aussi ! » Charles ralentit, s’arrêta soudain, et retourna sa tête, un soupçon de malice dans les yeux. « Tu veux jouer ? Jouer…. Vraiment ? » « Bien sûr, que je veux jouer ! » Henri fonçait à vive allure, tête la première, vers Charles. Il se moquait de déraper, se contrefichait de la boue qui souillait sa tunique. Mais ses yeux cernés de noir ne laissaient paraître que la détermination d’atteindre sa cible. Cible qui se mit à gesticuler, et à gémir comme un goret. « Attends, Henri, attends ! » Mais Henri n’attendît point, et continua sa course, plus vite et plus vite encore ! « Henri ! Henri ! Le gamin veut jouer ! » Les yeux du garçon s’écarquillèrent. Il tenta de se redresser, mais son pied glissa, et il fit une magistrale pirouette avant de s’affaler dans la boue, dans une immense gerbe du liquide visqueux et brunâtre. Il redressa soudain la tête, les yeux hagards, la bouche grande ouverte, bavant des relents de boue. Il ressemblait à un chien sortant d’une immersion joyeuse. D’un bond, il se remit debout, les vêtements dégoulinants. Mais il semblait ne point s’en soucier. « Il veut jouer ? Vraiment ? » « Comme je te le dis ! » « Alors debout ! » dit-il à Gaston, qui réalisa soudain qu’il était resté assis dans une flaque visqueuse, sur le pas de la porte. Il se releva, et se débarbouilla grossièrement, penaud. « Tu veux commencer à avoir le ballon ? » lui demanda Charles. « Bien entendu ! » « Alors tiens. » Gaston attrapa entre ses mains la boule de cuir dégoulinante que lui lança Charles, un énorme sourire aux lèvres. Enfin, il allait jouer ! « Que fait on, de présent ? » « Le but du jeu », expliqua froidement Henri, « est de frapper celui qui a le ballon. » « Chouette ! » s’écria Gaston, qui n’avait pas encore réalisé ce que venait de dire le jeune homme. Mais un coup de poing dans le nez l’aida à comprendre. Un autre coup dans le ventre le fit se plier sur lui-même, et il tomba à la renverse après avoir reçu un genou dans le menton. Il s’écroula dans la boue, du sang coulait de ses narines. Et les autres se jetèrent sur lui, et le frappèrent, le frappèrent. Lui, impuissant, se tordait de douleur sous les attaques incessantes. Dans ne nez, le ventre, les côtes. Il était roué de coups, frappé, cogné. Il avait mal, du sang se mêlait à la boue, pendant que les autres ne cessaient de malmener la pauvre créature sanguinolente qui se présentait à eux, en riant, en hurlant. C’étaient des fous, des démons qui se repaissaient de la douleur humaine ! Des monstres, des abominations sans nom ! Il avait mal, il avait mal… Soudain, le carnage cessa. Gaston se tenait par terre, recroquevillé sur lui-même. Il s’était masqué les yeux, aussi ne voyait-il pas ce qui se passait. Mais ses agresseurs avaient cessé de le battre. Il avait trop peur pour écarter ses mains. Il restait là, grelottant et pleurnichant, avec des vêtements en lambeaux qui laissaient apercevoir ses nombreuses blessures, ses ecchymoses innombrables. Il n’avait plus envie de jouer. « Ainsi, votre décision est prise ? » « On ne peut plus certaine, monseigneur. » « Alors, allez au diable ! » Gaston retira un peu ses mains, et entrouvrit les yeux juste à temps pour voir une énorme botte ferrée lui tomber dessus. Il roula sur le côté, le pied au-dessus de lui ne fit que l’éclabousser un peu plus, en retombant à l’endroit où se tenait son crâne quelques secondes avant. « Tiens ! Tu étais là, toi ? » L’enfant redressa la tête, et vit le visage sombre et buriné d’un chevalier en cottes de mailles, avec une tunique d’un bleu marin, penché vers lui. Une épée de fer pendait lourdement à sa ceinture de cuir. « Avec toute cette boue, je ne t’avais pas vu… quelle idée, de se fourrer ici !» Il se retourna pour s’adresser à une personne encore dans le château : « Te décides tu enfin? » « Me voici.» Un autre chevalier apparut sur le pas de la porte. En plus d’une cote de mailles, il avait des jambières et des épaulettes en métal. Sa tunique était en damier noir et blanc. Il avait un grand visage fin et austère, surmonté d’une épaisse chevelure noire. Tous deux partirent alors en direction des écuries, dans un fracas d’armes et de métal. Gaston releva la tête, cracha un peu de boue, de sang, et une dent. Sa tête lui tournait, il avait mal partout. « Je suis de l’avis du comte, qu’ils aillent au diable ! C’est une catastrophe. » « Quoi donc ? » souffla Gaston, qui avait reconnu la voix de Vincent. « Le départ de messires De Richebois et De Couriz, voyons ! Tous les chevaliers quittent le château, c’est une hécatombe. » « En effet, c’est terrible. », dit faussement Gaston, en tentant de se remettre sur pieds. « Tu te rends compte que nous n’auront bientôt plus de chevaliers !? Il faudra seulement compter sur les roturiers, en cas d’attaque ! » « J’en tremble par avance. » « Où vas-tu ? » « Je ne sais pas… prendre un bain… » Au fond, se disait Gaston, en rentrant à nouveau dans la sombre grande salle, c’était Vincent, qui avait raison. Il ne voulait pas jouer, il ne voulait plus jouer. Les jeux, c’était nul… Il lui aurait plutôt fallu... mais… « Mathilde ? Que fais-tu ? » « Je sors dehors, je vais jouer. » « Non, ne va pas jouer, c’est… » « Je ne parle pas de vos stupides jeux de garçons, mais d’un jeu calme et intelligent. Tu m’accompagnes ? » « Euh… oui… oui, bien sûr ! » Ainsi Gaston rebroussa chemin pour suivre une magnifique jeune fille, au visage clair et avenant que soulignaient ses grands yeux verts, et une longue chevelure d’or. Ainsi se retrouva-t-il, assis par terre, trempé de boue, entouré de Mathilde, Vincent, Charles et Henri, qui ne semblaient guère se soucier de l’était de leurs vêtements. Tous s’étaient installés en cercle, selon la proposition de Mathilde. Le but du jeu était simple : une personne allait au centre du cercle et posait une question. Tous étaient obligés d’y répondre. Henri avait demandé qui était d’accord pour que Gaston soit intégré au sein du groupe, seul Charles refusa de lever sa main, Vincent se demandait qui voudrait suivre plus de cours, au détriment des heures de jeu, avec peu de succès, Henri reprit la parole pour savoir qui aimait le château d’Annecy… Mathilde, elle, se leva calmement, se plaça au centre du cercle, et pose sa question d’une voix douce et mélodieuse. « Qui est amoureux de moi ? » Il fallait le dire… oui, il fallait lui dire. Mais il ne pouvait pas, il ne pouvait pas ! Sa bouche s’articulait sans sortir aucun son ! Il pâlissait et rougissait à la fois ! Un démon s’était emparé de lui, il se sentait mal, si mal… il sentait son corps transir et brûler dans le même temps… sa tête lui tournait… Dame, que se passait-il ? Il… Elle… oooh, sa tête… Décidément, Vincent avait bien raison… les jeux, c’était nul. Il regardait. Il se regardait. Il se regardait mais ne se voyait pas. L’eau du bain était opaque, tant elle s’était mêlée au sang et à la boue. Il avait mal partout. Couvert de croûtes, d’ecchymoses et de cicatrices, il ne devait pas ressembler à grand-chose… Dame, quelle journée ! Il n’a fait que voler de déceptions en déceptions…si seulement sa mère ne s'était pas remariée... si seulement... Des coups contre la porte. « Non, je veux être seul ! » La porte de bois vermoulu s’ouvrit, dans un grincement. « Mathilde ! Mais… » « Tu veux vraiment être seul ? » « Non… si… en fait non… mais si... c'est-à-dire que… » « C’est vrai, que tu m’aimes ? »
  7. Et pourquoi ne pas me dessiner mouâ? (t'inquiètes pas, Tirli, j'attends...) sinon, comme mascotte, on pourrait avoir un elfe maniant des pistolets bolters, ou un soldat de la garde avec une masse d'armes. Après, moi, c'que j'en pense...
  8. Petimuel

    Adoption

    Je vais corriger les erreurs, et je te remercie de ton commentaire, mais je me permettrait de te faire remarquer qu"adonc" est une traduction d'époque. il n'y a donc pas là d'étourderie... sinon, merci de ton commentaire très constructif! -Pour la Dame!-
  9. Petimuel

    Adoption

    Oui, je vais peut-être refaire le précédent chapitre.. mais j'attends d'avoir fini tout l'histoire, pour ça! Mais je t'aientendu, jorgar! V Exil Gaston sauta sur le parquet, puis courut ouvrir à son ami. Il ouvrit la porte sur un couloir plus que jamais encombré par des artistes et des petits bourgeois pompeux. Son camarade s’était déjà écarté, croyant que cette fois encore, la porte resterait close. « Romain, attends ! » Son ami se retourna, les yeux pleins d’espoir, puis courut dans la chambre. Gaston ferma la porte. Romain lui sauta au cou, puis le serra dans ses bras pendant un moment. Puis se recula, mais en gardant ses mains sur les épaules de Gaston. « Ah, Gaston ! Je n’espérais plus que tu daignes ouvrir ta porte ! » « Si, Romain. Ecoute, j’ai besoin de toi. » « De moi ? » « Oui, Romain… je pars. » « Tu pars ? Où ? » « Au château d’Andrésy. » Loin de rester immobile et ébahi, comme le pensait Gaston, Romain sourit, sans s’emporter. Ses yeux pétillaient. Visiblement, lui aussi aurait voulu partir, et le fait d’aider à s’enfuir, c’était s’évader un peu. « Je pars tout de suite. Va me chercher des pommes, à la cuisine » « Entendu, Gaston. » « Ah ! Une épée, aussi. » « Une épée ? Pourquoi donc ? » « A-t-on jamais vu un aventurier sans épée ? », soupira Gaston, en levant les yeux vers le plafond, vide et blanc. Romain ouvrit la porte, sur une foule de passants qui déambulaient dans le couloir, puis sortit discrètement. Gaston referma la porte sur une vision de son ami, accroupi, tentant de se faufiler entre les gens. Il se retourna et s’affala sur son lit. Enfin un moment de quiétude… depuis des années… mmmh… quelle agréable sensation, que de se sentir enfin tranquille.. sans soucis, et sans obligations aucune… Il s’emmitoufla sous les couettes… bientôt, une famille le recueillerait, et l’hébergerait… bientôt, il serait heureux… loin de sa mère… loin de ce château… qui lui faisait horreur… loin de ce monde… loin des gens… tranquille… seul… dormir… dormir… « Gaston ! » Plus que la voix de Romain, un vacarme assourdissant pénétra soudain dans la pièce. Gaston se leva d’un bon, les cheveux décoiffés. Avait-il dormi ? Il se le demandait… « Ferme la porte, Romain… on ne s’entend plus, ici… » « Qu’est-ce que tu dis ? », demanda son ami, l’air visiblement taquin. Mais il s’empressa bien vite d’aller exécuter les ordres de Gaston avant que celui-ci ne s’énerve. « Dis donc, ce cloître t’as fait perdre ton sens de l’humour, dirait-on. » « Qu’y a-t-il, dans ce sac ? » demanda sèchement Gaston. Romain ouvrit un petit sac de toile bleue, troué de partout. Il y entra la main, et en sortit une pomme. « C’est tout ce que j’ai pu trouver. » « Quoi ? Mais même du temps de Raoul, la cuisine débordait de nourriture. Alors, maintenant, avec cette débauche de luxe, il devrait… » « … y avoir beaucoup de banquets, ce qui raréfie la nourriture disponible. » le coupa Romain. « Oui… en effet.. » constata Gaston, confus, et terriblement embêté d’avoir pu se tromper. « Bon, et pour l’épée ? » Romain sortit un petit glaive du sac, et le présenta à Gaston, qui s’en saisit immédiatement. « Ce n’est pas exactement ce que j’attendais, mais ça suffira pour ce petit voyage. Bon, en route ! » Gaston arracha le sac de toile des mains de son ami, et y mit la pomme, avant de passer son glaive à sa ceinture. « Gaston, tes cheveux. » Le garçon reprit son glaive, puis s’appliqua à le faire passer sous la longue tignasse. « Tu ne vas pas… » D’un coup sec, en tenant fermement ses cheveux, Gaston les coupa au ras. Une longue bande brune s’échoua sur le sol de la pièce. Il répéta l’opération pour les cheveux qui lui masquaient le visage. « C’est mieux, ainsi. » « Bon, J’y vais. » « Gaston, je voulais te dire… » « Au revoir. Tu voulais me dire au revoir. En route ! » Gaston marcha vivement vers la porte d’entrée, mais se ravisa. Il ne voulait pas avoir à supporter encore ce défilé interminable d’imbéciles en vêtements de luxe. Il préférait la fenêtre. Mais, après s’être approché de celle-ci, il se rendit compte que cette tentative n’aboutirait qu’à sa mort… il en avait rêvé, certes… mais cette fois-ci, il se rendait compte qu’un espoir subsistait. C’était pourtant si tentant… si facile… Finalement, il reprit la direction de la porte, sous le regard d’un Romain à la fois intrigué par tous ces changements d’avis, mais aussi médusé par le manque d’égards que son ami de toujours lui témoignait. Gaston ouvrit la porte, sortit de la pièce et referma immédiatement derrière lui, avant de s’élancer entre les jambes des passants. Il savait qu’il y avait une fenêtre, juste en face, qui donnait sur la cour. Il serait plus aisé de passer par ici. Mais il fallut éviter es espadrilles des serviteurs comme les lourdes bottes des gardes, les chaussons des courtisans et les souliers des dames. C’était une folle danse qui se jouait tout autour de lui, une farandole de pantalons, de jupons et de petites culottes. Et lui, placé au milieu de la scène, esquivait, s’élançait et dérapait, se rattrapait. Il se faisait bousculer et s’excusait .Il palissait devant le regard foudroyant des serviteurs, et rougit sous les tendres yeux d’une belle demoiselle. Et enfin, la fenêtre. C’était un vitrail. Il ignorait même s’il pouvait l’ouvrir. Au fond, il ne savait pas de quelle manière le château s’était transformé. Exception fait du jardin. « Que fais-tu là, petit ? », hurla une voix derrière lui, étouffée par le bruit ambiant qui régnait, dans le couloir. « Rien… j’observe le vitrail. » « Ah ! Mais… je ne t’ai jamais vu, toi, ici ! » « C’est normal… c’est normal, je viens d’arriver. Le vitrail… il peut s’ouvrir ? » « Tu viens d’arriver, dis-tu ? Oh, tous ces gens, qui ne peuvent se taire ! Bon… et comment te nommes-tu ? » « Le vitrail, monsieur ? » « Le vitrail ? » « Il peut s’ouvrir ? » « Oui. » Pour couper court à la discussion, qui risquait de devenir embarrassante, Gaston chercha immédiatement le loquet de bois, puis ouvrit le vitrail bleu et rouge. Il passa sur la corniche, et referma la fenêtre, sous le regard ébahi du serviteur. L’enfant espérait de tout cœur que celui-ci ne souffle pas un mot de tout cela. Mais qu’est-ce qui l’avait pris, de sortir là, bien en vue de tous les usagers du corridor ? Babille, il s’en fichait. Fichtre ! Qu’il était haut ! Il prit soudain conscience du vide au dessus duquel il était perché. La corniche était maigrelette, il faudrait bientôt descendre, s’il ne voulait pas finir par perdre l’équilibre… A ses pieds, le mur qui encadrait le potager. Par cette chaleur, seuls quelques jardiniers parcouraient ce dernier ; Seulement, suite aux récentes rénovations, tout le lierre avait été arraché, et il ne devrait compter que sur quelques pierres mal juxtaposées pour prises. Deux mètres sous lui, la fenêtre du boudoir de sa mère, d’où s’échappaient des filets de voix. Cela compliquait la tâche. Il était hors de question d’être vu par la baronne. Tudieu, il n’avait jamais fait d’escalade, et se retrouvait confronté à un défi de taille ! Pas de plantes grimpantes, de rares prises, et un obstacle à contourner. Le tout à prendre de haut en bas, de surcroît ! Courage, Gaston. Dame, ce mur est trop haut ! Songe, Gaston, songe à cette terre idyllique, songe à ce château, qui t’attend, les bras ouverts. Pense à la mort qui t’attend en bas ! Figure toi ton sang, répandu à terre en une grande flaque difforme ! Pense à ta nouvelle famille, à ta nouvelle vie… pense à ton père, à ton père, à ton père ! L’enfant serra faiblement le pommeau de son glaive pour se donner du courage, puis se retourna, s’agenouilla sur la petite corniche, et passa une jambe en dessous. Immédiatement, une vague d’angoisse lui parvint, un flot glacial de vide. Sa jambe gesticula, jusqu’à ce que son pied bute contre le mur, ce qui eut pour effet de l’apaiser un peu. Il y avait donc une issue. Lentement, son pied cherche la jointure entre deux pierres, mais n’en trouva pas. Le mortier était trop épais, et ne laissait nul sillon entre les pierres qui composaient le mur. Une nouvelle vague d’incertitude le submergea. Sa gorge se nouait lentement, l’envie lui prenait d’appeler… il fallait appeler ! Appeler qui, Qui viendrait à son secours ? Il ne le savait, mais c’était son seul espoir. Hurler, hurler ! Sa gorge était trop nouée pur émettre l’appel strident espéré, et seul un mot tremblotant sortit dans un souffle de sa bouche. « Papa… » Courage. Le pied gauche… peut-être que celui-ci aura plus de chance, et trouvera une prise. Mais hélas, à gauche aussi, le mur était lisse comme du crin de cheval. Il fallait remonter. Gaston tenta de se mettre en appui sur ses coudes, sur la corniche, tout ne levant la jambe gauche. C’était difficile, la douleur était insoutenable. Ses coudes frottaient la pierre de la corniche, la peau s’arrachait, et lui tirait des larmes de douleur. Une pulsion grave, un écho d’énergie parcourut son corps, empruntant le chemin de ses veines et de ses muscles. Sa bouche était sur le point de s’ouvrir, mais il luttait de toutes ses forces pour ne point crier. Et si, en contrebas, sa mère l’entendait ? La douleur se faisait de plus en plus forte, de plus en plus vive, comme une plaie que l’on ouvre petit à petit. Tant pis. Il ne pourrait tenir plus longtemps. S’il ne voulait pas crier, il fallait que la douleur cesse. Vivement, il leva ses bras au ciel, et se laissa choir. Immédiatement, il se sentit emporté par le vent, poussé dans sa chute. Les éléments se distordaient, il voyait le haut du château s’éloigner à une allure impressionnante... il allait se mettre à crier ! Alors, il tendit les mains en avant, et eut la chance de pouvoir s’accrocher à la corniche de la fenêtre du boudoir, dans lequel sa mère et son nouveau mari conversaient. Une vive douleur lui élança les bras. tout d’un coup. Il croyait que les os de ses coudes allaient craquer. N’y tenant plus, il lâcha prise, et atterrit dans un bruit sourd sur un plant de salades. Ses oreilles bourdonnaient. Il avait mal au dos. Ses membres l’élançaient. Autour de lui, le paysage était flou et déformé. Des arabesques de verdures succédaient à des tourbillons de grisaille. Petit à petit, ses tempes cessèrent de bourdonner, son ouïe devint claire. Quelques mots lui parvinrent aux oreilles. « Je crois que ça venait de dehors. » La voix de sa mère. « Je vais aller voir à la fenêtre. » Que faire ? Il avait l’esprit si embrumé… sa mère , le voir… non, il ne fallait… Ooooh… trouver une cachette… Gaston s’était mis péniblement debout. Mais sa tête lui tournait… il avait le dos courbé, et titubait de-ci de-là. Finalement, sentant le danger proche, l’horreur de sa découverte, la révélation de son départ intempestif, il se mit dos à la fenêtre, et s’efforça d’avoir la démarche d’un badaud flânant à travers les salades et les tomates. « Alors, mon aimée ? » « Je ne vois rien… seulement quelques jardiniers, et des promeneurs. L’un d’entre eux a l’air bien jeune… » « Adonc, il ne s’est rien passé. Reprenons notre conversation, voulez-vous ? » La partie était gagnée. Gaston continua son chemin vers les rangées de potirons. De là, il devrait pouvoir se mettre à quatre pattes, puis obliquer vers la porte principale, sans être vue de cette mère qu’il haïssait. « Quand m’avez-vous dit que cela s’est passé ? » « Deux ans avant la naissance de Gaston. » « Et où supposez-vous que.. » « Eh bien, dans le château d’Andrésy ! Si toutefois cette Dame n’a pas migré vers un autre endroit. » « J’entends bien. Cela dit, puisque nous ne connaissons pas son nom, je ne pense pas qu’il soit possible de… » « C’est vrai, je sais… cependant… » Gaston atteint les rangées de potirons, et se mis à détaler à travers le potager. La conversation se perdit à travers les jasements des jouvenceaux las de la foule envahissant les jardins, et des interpellations des jardiniers, qui se hélaient à travers vignes et plantation de choux et carottes. L’enfant se perdit au milieu d’un océan de nature, d’un dédale de légumes. A droite, à gauche, tout droit, qu’en savait-il ? Encore avancer. Par là… non, par ici… Dame ! Et pourquoi pas par là ? Ici, des plants de carottes, par là, des endives, des potirons ici et du maïs là. Des radis, des betteraves et des concombres, des vignes de raisin, des plants d’aubergines et de vastes pommeraies. Tourner à gauche, puis à droite, et… Dame ! Il se retrouvait face à la fenêtre du boudoir ! Il était revenu sur ses pas ! Sa mère n’était pas à la fenêtre, et la pièce semblait silencieuse. Gaston s’avança donc, puis longea le mur, jusqu’à enfin atteindre l’entrée du potager. Il franchit donc le porche, pour se retrouver dans le tronçon de couloir qui séparait la grande porte principale de celle du potager. Il entra donc dans cette partie du château, et, une fois de plus, manqua d’être happé par la foule. Des dames, des seigneurs, des riches et des simplement aisés; des artistes, peintres, sculpteurs, poètes, des guerriers et leurs écuyers, des courtisans cherchant leurs demoiselles. Les valets du château, des balayeurs, des cuisinières, des élagueurs, des femmes de chambre. Des enfants. De voyageurs. Une vingtaine d’hommes d’armes encadraient cette foule. Du temps de son père, il eut fallu rassembler la totalité de la garnison, pour atteindre pareil nombre. Que les choses avaient changé ! Gaston dût encore se frayer un chemin entre les braies et les robes, les pantalons et les tuniques, entre les chausses et les bottes ferrées, les scandales et les souliers. Il eut encore son lot de courses et d’esquives, de trébuchements et de reculs. Que d’efforts, et que de sueur pour se traîner jusqu’à la sortie ! Cette traversée avait été un véritable enfer, ce qui conforta l’enfant dans l’idée que jamais il ne pourrait vivre en pareil endroit. Quiétude et solitude étaient désormais ses seules doctrines. Même dehors, les routes supportaient leur lot de badauds et passants divers. Mais la circulation était plus aisée, et Gaston n’eût qu’à s’écarter du chemin pour pouvoir passer sans être gêné. Il avançait d’un pas rapide. Il entendait le bruit de ses espadrilles foulant les herbes basses. Il craignait que sa mère le voie, depuis l’une des fenêtres des hautes tours, récemment érigées. Après quelques minutes de marche rapide, il atteint enfin la forêt. Doux contact avec la nature ! L’atmosphère lourde et pisseuse qu’il venait de quitter le faisait suffoquer. Il dépassa les premiers taillis, puis, estimant être hors de vue de sa mère, ou qu’elle soit, il s’arrêta un peu, et respira l’air pur. Dame, quel bonheur ! S’oxygéner, enfin ! Il sentait l’air investir ses poumons, il pouvait suivre le chemin qu’il empruntait, à chaque inspiration, à chaque expiration, à chaque battement de son cœur… Il regarda autour de lui. Que la forêt était belle, en ce jour d’été ! Il courut un peu sauta une épaisse racine, et s’arrêta au bord d’un ruisseau. « Loin de la luxure, il est une chose qui s’appelle nature… » Un sourire illuminant son visage, Gaston regardait autour de lui, rêveur. « Les hommes devraient s’en souvenir. Rien n’est plus beau, rien n’est plus pur que la nature. Ah, Dame ! Ces couleurs chantent dans ma tête ! » Le garçon rit un peu. « La clapotis de l’eau berce la forêt, les feuilles des arbres sont plus colorées que toutes les peintures du monde ! Les fleurs et les plantes sont plus vigoureuses sans la main de l’homme, les fruits sont plus juteux s’ils ne font partie d’une plantation… » Un petit oiseau voleta doucement, se posa sur une branche, et se mit à piailler. Gaston le regarda en riant. « Et l’oiseau sans art n’en a qu’un chant plus doux…. » Apaisé, Gaston s’assit sur une pierre moussue, ouvrit son petit sac de toile, et croqua sa pomme, en observant le paysage qui l’entourait. Les verts de l’herbe, de la mousse et des feuilles se fondaient en un délicieux camaïeu, rehaussé par quelques fleurs sauvages, bleues, blanches et rouges. Quelques oiseaux chantaient. Non loin de lui, le petit ruisseau coulait. L’eau était claire, et l’on pouvait apercevoir les cailloux, au fond. Gaston s’approcha, sa pomme en main, pour admirer le fond du cours d’eau. Des galets de différentes teintes de gris. Un objet, vers la droite, attira son attention. Sous les remous de l’eau, il était difficile à voir nettement. C’était un fer rouillé. L’épée, de son père. Gaston remit sa pomme à demi croquée dans son sac de toile, puis partit immédiatement en direction de château d’Andrésy. Il voulait quitter cet endroit au plus vite. Le crépuscule tombait. Gaston avait des cloques sur les pieds. Ses espadrilles étaient trouées. Son pantalon déchiré laissait entrevoir ses mollets couverts de marques et autres cicatrices, provoquées par les ronces et autres buissons épineux. Il suait de partout. Il gravit avec peine un gros rocher, en s’aidant de ses mains moites. Ses ongles étaient en sang. Cela faisait plusieurs heures qu’il marchait. Encore un effort… ses genoux s’écorchèrent un peu plus sur une arrête rocheuse. Des larmes ne cessaient de couleur sur ses joues humides. Du haut de son promontoire, il distinguait le château d’Andrésy. Peste ! Il était encore à deux heures de marche, à tout le moins… Gaston était épuisé, exténué. Il n’en pouvait plus, et tombait de fatigue. Il s’affala sur le rocher. Son sac tomba sur le rocher, et laissa choir la pomme, qui dégringola jusque dans la boue, en contrebas. Grégoire ouvrit les yeux. Dame, quel vacarme ! Il se leva, puis revêtit sa tunique de toile jaune, qu’il boucla avec une ceinture en cuir. Il saisit sa dague, et la coinça derrière sa ceinture. Crebleu, que le coq se taise ! Son chant devenait insupportable ! Il descendit dans la cour, puis regarda le ciel. L’aube se levait à peine. Et cette foutue bestiole hurlait encore. Grégoire s’approcha de son perchoir, l’air mauvais. Dès qu’il le vit, le coq se tut. Une fois avoir calmé l’animal, Grégoire revint dans la cour de terre battue, parsemée d’excréments d’hommes, et d’animaux divers. Il grimpa l’escalier qui menait aux remparts. Devant lui s’étendait la forêt d’Andrésy, et, au loin, l’énorme château d’Annecy. Grégoire était un vieil homme, empli de bonté. Ses cheveux grisonnants disposés en auréole au dessus de sa tête trahissaient son âge. Son visage, lui, était encore jeune. Pas une ride n’apparaissait sur son front. Mais ses yeux étaient éteints. Il avait vu suffisamment de la vie pour ne plus rien en attendre. Rien de bon, du moins. Il longea le mur d’enceinte, puis s’arrêta devant un homme recroquevillé contre le mur, sa cape miteuse rabattue sur lui, ne dévoilant que ses yeux clos, sous son casque grossier. Grégoire lui décrocha un puissant coup de pied. « Debout, coquin ! » La sentinelle se réveilla en sursaut. « Je prends la relève. » A ces mots, le garde se leva d’un bond, réajusta son casque, et rabattit sa cape rapiécée derrière son dos. « Ah, enfin : Je ne vous attendez plus ! La veille de cette nuit a été épuisante… je vais enfin pouvoir dormir ! » « C’est cela », répondit froidement Grégoire. « Que je te retrouve encore une fois au matin à ronfler devant le mur, et c’est à coups de trique je te tirerai de ta torpeur, crois-moi. » Entendant cela, l’homme se dirigea promptement, vers les escaliers, la tête basse. Tout bonhomme qu’il fût, Grégoire détestait voir les sentinelles assoupies, surtout par les temps qui couraient. Les impôts mandés par Annecy avaient tant augmenté ces dernières années que la garnison du château se limitait à une dizaine de gardes, et les chevaliers désertaient de plus en plus les lieux, pour se rendre à Annecy. Grégoire s’accouda à un merlon, et regarda du côté de la cour. La ville se réveillait lentement. Des enfants sortaient des chaumières, d’autre de la forteresse. Quelques serfs commençaient à investir la cour. Certains allaient chercher de l’eau, d’autres s’affairaient aux récoltes. Quatre enfants sortirent de la forteresse en courant. Deux garçons bruns et un blond, ainsi qu’une fille blonde. Grégoire les connaissait bien. Il se retourna pour se concentrer à nouveau sur le paysage. Mais ? Que pouvait bien être cela ? Quelque chose qui se traînait sur le chemin boueux… Grégoire se pencha un peu, pour mieux distinguer ceci… Dame, un enfant ! Il semblait épuisé ! Le vieil homme dévala les escaliers, descendit dans la cour, et courut jusqu’aux portes. Il souleva le lourd battant de métal rouillé, qui fermait la porte depuis qu’ils avaient dû vendre le système de poulies. Il ouvrit ensuite l’un des grands panneaux de bois, pour découvrir le sentier détrempé, et un jeune garçon brun sale, souillé, écorché de partout, avec les doigts et les pieds en sang, les espadrilles et les vêtements déchirés, couvert de sueur. Gaston ferma les yeux… il était bien, assis sur une chaise, dans la grand salle du château d’Andrésy. Il rouvrit les paupières. Le vieil homme qui l'avait recueilli l’appelait. L’enfant jeta un dernier coup d’œil à ses vêtements neufs : un pantalon de toile grise, et une chemise à croisillons brune, ainsi que de nouvelles chausses. Enfin, il se leva du fauteuil, et suivit son sauveur dans la cour. Il disait s’appeler Grégoire. Une fois dans la cour, il lui présenta quatre nouveaux compagnons de jeux. Henri, un grand garçon brun, aux traits fins. Charles, un garçon, brun li aussi, mais plus petit qu’Henri. Vincent, un garçon un peu rond, mais aussi grand qu’Henri, blond, à la mine sympathique. Et Mathilde, une belle fille blonde, au visage charmant. Henri et Charles repartirent jouer avec Mathilde, pendant que Vincent s’approchait de Gaston. Grégoire, lui, repartir sur les murs. « Alors, comme ça, tu t’appelles Gaston ? » « Oui… toi, c’est Vincent, c’est ça ? » « En effet. Je vais te présenter les gens du château… je connais beaucoup de monde, ici. Situ veux, je te ferais visiter ! Le baron voudra bien nous laisser faire… il est très pieux et un peu bourru, mais Dame Catherine, sa femme, est en revanche… Oh, Gaston, tu m’écoutes ? » Gaston ne l’écoutait pas. Il regardait Mathilde.
  10. Petimuel

    Les sept compagnons

    Quoi!? Une suite! Mais c'est ma mort, que tu veux! Bon, je vais voir ce que je peux faire, mais si je ne l'ai pas lu danns la nuit, je rentre chez ma mère, et ce sera donc pour mercredi prochain... GuyGui "au secours! le chat arrive, et je n'ai pas le temps de le carresser!"
  11. Petimuel

    Les sept compagnons

    Pfff.... et au moment ou je promets de lire et de commenter le texte, enfin terminé, d'Inxi, je tombe soudain sur ton récit que, je m'en souviens, je m'étais juré de lire (et de commenter, par la même occasion.) Ben dis donc, GuyGui, t'as du taf, pour ce soir! La réponse demain matin, sans doute, monb cher Ilarion, en même temps que pour inxi... à condition que l'imprimante marche à nouveau (auquel cas je pourrais enfin lire les aventures de karl baker pour le conseil des sages... j'ai pas fini, moi! ) Bon, ben voilà! Juste pour te prévenir que j'étais avec toi! Edito : sans compter, je m'en rappelle maintenant, le chapitre VII d'Adoption que j'avais décidé d'écrire ce soir... ouhlàlàlà... -Pour la Dame!-
  12. Petimuel

    Adoption

    Barf, après ces remontrances, la suite pourra attendre... Je vais juste te dire qu'on est dans l'univers de warhammer, qui laisse une bonne part à l'imaginiaire, donc, si je veux qu'elle puisse se marier avec un gueux, elle peut. Non mais! Quand à la misère, je te demanderai de relire tout le texte, afin que tu puisse te rendre compte qu'il avait déjà visité les villages voisins, et quecette pauvreté date de la mort de son père.. ainsi que lea luxure du château. Quand au suicide, là, je n'ai rien à dire... mais l'image du père, allongé sous l'eau, me plaît. Donc, je garde! Et merci pour ta critique.
  13. Petimuel

    Adoption

    VI Douleur Toute la maisonnée fut en deuil, suite à la mort de Raoul. Gaston se cloîtra dans sa chambre, et n’en sortit pas pendant des mois. Il restait toute la journée sur son lit, à lire ses parchemins d’école, ces parchemins qu’il écrivait en pensant à autre chose, afin de ne pas sentir la douleur que lui infligeait son poignet, las de virevolter sans cesse sur de la chair tannée. Il relisait ses cours, minute après minute, heure après heure, jour après jour. Il avait déjà étudié la Bretonnie, nation humaine dans laquelle il vivait. Il avait étudié son système politique, basé sur la féodalité et l’allégeance. Des cours avaient porté sur sa divinité, la Dame du Lac, une puissante déesse qui accordait à ses meilleurs chevaliers de tremper leurs lèvres dans le saint Graal ; et son histoire, principalement les 12 batailles de Gilles le Breton , qui libérèrent la Bretonnie de ses envahisseurs. Il lut que Baudouin avait effectivement rejoint les compagnons, et comprit le piège que lui avait tendu le professeur. Il avait jeté un œil sur l’Empire, une autre nation humaine voisine, qui ne respectait ni le code de l’honneur ni celui de la chevalerie, et qui osait user des armes de tir. Ses armées partaient souvent à la bataille accompagnées de puissants canons et d’autres machines qui permettent de lâchement tuer l’ennemi, tout en restant à l’abri de ses coups. Il avait fait quelques leçons sur le monde dans lequel il vivait. On lui avait parlé de dangereux guerriers nordiques, de terribles démons, d’elfes orgueilleux et imprévisibles, de brutes vertes qui portaient le nom d’orques, et qui envahissaient les terres impériales, et même une leçon qu’il ne se souvenait pas avoir couché sur le papier, qui parlait d’une antique civilisation, en plein désert, composée de squelettes qui avaient le don de vie ; et qui surveillaient les pyramides qui abritaient les dépouilles de leurs anciens rois. De nombreux aventuriers impériaux y venaient afin de dérober des parchemins diaboliques. Peu en revenaient, et ceux qui avaient cette chance étaient contrôlés par les répurgateurs impériaux. Ces parchemins étaient interdits. Ils étaient brûlés avec les voleurs, sur un grand bûcher. Ainsi passaient les journées. Parfois, Gaston se levait, et allait à la fenêtre. Il fixait les bois, qui avaient emporté son père. Suite à la mort de celui-ci, la déforestation fut abandonnée. Mais elle reprit bien vite, avec plus de fougue et d’entrain. De grands échafaudages étaient là, afin d’adoucir la descente des arbres. Gaston ignorait la cause de ce revirement. Il n’avait pas eu l’occasion de le demander à sa mère, régente du domaine. Il ne la voyait pas. Ses repas lui étaient servi par la porte entrouverte, midi et soir. Il le mangeait lentement, dans son lit, en lisant et relisant ses cours. C’était son manque d’intérêt pour ceux-ci qui avaient provoqué la mort de son père. Il en état persuadé. Alors, il fallait lire. lire, et relire. Et il lisait. Lisait et relisait. Il lisait tellement que les phrases finissaient par ne plus avoir de sens, que chaque mot s’individualisait, que ses leçons se décousaient. Il ne comprenait plus ses lectures, mais n’avait de cesse de les parcourir. Un jour enfin, au bout d’une année à s’être cloîtré dans sa chambre, il se décida à ouvrir sa porte. Il sortit dans le couloir, qui était baigné de lumière. Il était littéralement tapissé de merveilleux vitraux, qui laissaient passer des lumières blanches, bleues et rouges. Continuant sa route, il vit des salons resplendir de lustres, sentir la propreté, des parquets briller et refléter son image. Il vit des gardes vêtus de riches vêtements, et des marchands charrier des livres tous plus chers les uns que les autres. Il vit des tapisseries parmi les plus belles de Bretonnie, qui représentaient des licornes, des pucelles nues et des chevaliers qui chassaient dans la forêt. Enfin, sortant du château, il découvrit un immense jardin, qui s’épanouissait au soleil. Des rosiers de plusieurs mètres de haut déployaient leurs fleurs, roses, rouges et blanches. Des fontaines crachaient bruyamment leur eau, fraîche et pure. De gigantesques parterres de fleurs recouvraient plusieurs hectares de terrain. De larges allées graveleuses, où passaient quelques fauconniers, écuyers, nobles ou pages, à pied comme à cheval, bordées de massifs feuillus taillés pour représenter des fées, des anges, et des chevaux. Gaston déambula au milieu de ce foisonnement de couleurs de feuilles, de fleurs, de plantes, au milieu de ce camaïeu de senteurs que dégageaient les fleurs, les grands arbres qui sentaient la sève, et l’allée enfin qui sentait la terre et le sable. Il se perdit dans les jardins, courait partout, s’émerveillait à chaque nouvel endroit. Il sauta dans un parterre de fleurs, et roula au milieu des pâquerettes, des violettes et des coquelicots, des roses et des géraniums, des colchiques et des jacinthes, des camélias et des lys. Il sentit une odeur forte et suave lui pénétrer les narines. Le doux murmure des abeilles qui récoltaient de pollen lui parvenait aux oreilles, dans le même temps que le roucoulement des colombes et des jeunes jouvenceaux, qui se plaisaient à flâner au milieu de ce paradis terrestre. Son cœur, ses poumons, et tous ses muscles se gonflaient d’une énergie nouvelle, d’une énergie qu’il avait perdu, pendant cette année coupée du monde. Chaque parcelle de son corps, chaque fibre de sa peau lui demandait de bondir, de sauter et de courir, de chanter et de danser. Il se leva d’un bond puis, au milieu des fleurs, et au gré des allées, il sauta, courut, chanta et dansa un hymne à la beauté, à l’allégresse et à la joie de vivre. Galopant au milieu des haies de rosiers, renversant les passants, qui se relevaient en s’époussetant, mécontents, il riait, il chantait à tue-tête une chanson qu’il inventait au fur et à mesure. « J’aime les fleurs, et j’aime leur senteur. » Il courait, dérapait, se redressait, tournait, sautait, chantait et chantait. « Les jardins, je me les fait miens. » Il prit la direction du château, afin de remercier sa mère pour tout ce qu’elle avait fait. Pour cet étalage de grâce, de joie et de beauté. « C’est grâce à ma mère, que cette odeur embaume l’air, cette odeur si douce, que jamais je ne tousse. » Ses paroles n’étaient pas très hautes, les rimes se faisaient hésitantes, mais il improvisait, et en était content. Il bondit sur le pont-levis, et observa la herse, peinte en blanc, polie et vernie, refondue, sculptée à nouveau, afin de présenter une série d’entrelacs magnifiques et audacieux. Cet ouvrage de métal se souleva à sa venue. Il bondit dans le boudoir de sa mère, pour la découvrir avec stupeur en train d’embrasser Michel. « Maman ? » La baronne sursauta. Elle eut un rire gêné, ramena la lanière de son soutien-gorge sur son épaule, puis dit : « Gaston ! Enfin ! Cela fait bien un an que je ne t’ai pas vu ! Oh, dame ! Tes cheveux ! » Gaston n’avait pas fait attention à ses cheveux, qui avaient beaucoup poussés durant toute cette année, pas plus qu’il ne fit attention à la réponse de sa mère. « Pourquoi embrasse-tu Michel? » « Ah ! Euh… eh bien, chéri, je dois te dire… Michel n’est plus le valet de chambre. » « Ah ? », fit Gaston, dont la gorge se nouait, alors qu’il commençait à comprendre la raison de la mort de son père. « Non, c’est… c’est le seigneur d’Annecy. Michel d’Annecy. » « Michel d’Annecy ? » Le valet de chambre fit un pas vers le garçon. « Ecoute, Gaston, je… » Mais Gaston tourna les talons, et claqua la porte, qui fut rouvert par la baronne. « Gaston ! » La herse se refermait. Gaston partit à travers champs, en évitant soigneusement le jardin d’agrément. Il leva la tête vers les remparts du château, qu’il découvrit garnis de nombreux trébuchets, faits avec le bois de la forêt d’Andrésy, qui n’avait de cesse de diminuer. Et sans cesse des animaux disparaissaient, des lieux enchanteurs étaient recouverts de terre. Un petit ruisseau, un parterre de champignons. Il se dirigea vers le village le plus proche, comble de misère et de pauvreté. Le bois des maisons était vermoulu, et détrempé par la pluie. Les paysans, en train de déraciner les arbres d’Andrésy, n’avaient pas le temps de les réparer. Les énormes champs étaient traités par les quelques hommes qui n’étaient pas partis déboiser, et qui peinaient, qui devaient accomplir à dix la tâche de cinquante. Il vit les énormes granges qui avaient abrités les rires de son enfance vidées de toute leur paille. Il vit des familles mendier, sans rien récolter, car tous les passants étaient aussi pauvres qu’eux. Il croisait des enfants aux corps cadavériques, exposés aux maladies et au froid. Nul n’avait d’argent, mais tous devaient payer le four et le moulin, le puits et le chariot. Des hommes, gisants, morts, étaient ramassés avec des pelles et jetés dans des fosses communes. Une épidémie de peste s’était déclarée, trois jours plus tôt, et des hommes déambulaient, couvert de bubons. Tout le monde s’écartait de leur passage, et les malheureux trouvaient toujours porte close. Gaston marcha ainsi durant le reste de la journée, errant à travers tous les villages d’Andrésy, réduits à la misère et à la pauvreté. Ecrasés par les impôts, les paysans survivaient à grand peine, lorsqu’ils survivaient. Il entendit des gémissements de douleur et de peine, des cris de fins et des pleurs de désespoirs. Il vit des regards se tourner vers lui, parfois avec implorance, faisant appel à sa générosité, parfois avec haine et suspicion, du fait de ses riches vêtements. Il ne supportait ni les uns ni les autres. Voilà le prix de tout ce luxe, de cet étalage de richesse et de beauté, pensa le garçon. Sa mère et son nouveau mari vivaient sur le dos des autres, plus que de raison. Tout ce qui était produit à des lieux à la ronde finissait dans le château d’Annecy, au comte de la baronne. Et lui-même était coupable, ou du moins complice de ce crime affreux ; même enfermé dans sa chambre à longueur de journée, il était logé aux frais de la princesse, selon l’expression. Et la princesse elle-même aux frais des paysans, pensa Gaston. Il rentra au château sous un ciel gris et lisse comme un galet. Une légère brise soufflait, lui glaçait les os, lui paralysait les muscles. Il croisa ses bras, et marcha durant une bonne heure, sur la plaine d’Annecy. Il grelottait et tremblait de froid, mais se forçait à continuer. Il voulait rentrer au château, et s’enfermer dans sa chambre une bonne fois pour toutes, jusqu’à y mourir. En chemin, il rencontra un group de garçons, qui jouaient à se donner des coups avec un bâton. Parmi eux, Romain, toujours aussi blond, toujours aussi vif et gai. Il se tourna vers son ami, en lâchant son bâton, les yeux écarquillés, la bouche entrouverte. Les autres auraient pu le frapper, l’assommer, profiter de ce moment d’inattention pour le mettre à terre. Mais ils sentaient que le moment était important. « Gaston ! » Une véritable aura émanait de Romain, toujours hagard, retrouvant enfin un ami qu’il croyait perdu depuis une année. Il avait l’air du fou pris de vision, il avait l’air d’un saint, voyant le christ. Une véritable énergie se dégageait de sa personne, un mur d’amour pour ce garçon, ce garçon perdu et retrouvé. Gaston s’en fichait. Il rentrait dans le château, d’un pas vif et déterminé. Il dépassa Romain, qui ne le quittait pas du regard, sans même un signe, sans même un geste. Son ami resta ainsi quelques instants, sans rien faire. Etait-il possible que ce garçon ne l’ait pas reconnu, que le Saint ne voie pas son apôtre ? Finalement, le charme qui le tenait immobile se rompit. Il se retourna, puis trotta en direction de Gaston. « Gaston, attends moi ! Gaston ! Gaston… » Romain suivait son idole, son roi, son Dieu, Dieu qui n’eût pas à demander l’ouverture des portes, qui l’étaient tout le temps afin de laisser passer la foule d’artistes, de penseurs, de professeurs, de nobles et de badins, cette foule qui avait enrichi Annecy, et appauvri ses propriétés et ses provinces, cette foule que Gaston haïssait et vomissait, cette foule à travers laquelle il se frayait un passage, au milieu du bruit, jusqu’à l’entrée encombrée, jusqu’aux escaliers impraticables, jusque devant la porte de sa chambre, dans laquelle enfin il trouverait un peu de repos… Une main se posa sur son épaule. « Gaston ! » Il se dégagea rapidement de l’emprise de son ami, rentra dans sa chambre, et claqua la porte. Les coups ne se firent pas attendre. En trios, d’abord, comme pour signaler sa présence et sa volonté d’entrer, Gaston, ouvre-moi, puis plus fort, comme si on se demandait s’il y avait quelqu’un à l’intérieur, ouvre-moi, s’il te plaît, puis, de plus en plus rapides, comme un homme pressé d’entrer, Gaston, je t’en prie, ouvre-moi, et encore plus rapides, tonitruants, saccadés, avec des brisures de rythme, Gaston, comme si un emprisonné demandait à sortir, Gaston, ouvre moi, s’il te plaît, Gaston, Gaston, Gaston… s’il te plaît… Non, non, non… Gaston pensait, répondait dans sa tête aux supplications de Romain, non, non, cela ne me plaît pas… Etendu sur le lit, les bras le long du corps, le regard fixé sur le drap qui, tel un toit, recouvrait le lit à baldaquins. La tête haute, et embrumée de pensées. Le corps droit, noble. Aussi droit et noble que celui de son père, recouvert par l’eau. Gaston s’en souvenait toujours, et s’en souviendrait toujours. Il se rappelait ses pleurs, ses cris, cette vision d’horreur, ce père bercé par les flots. Et pourtant, son visage s’était détendu… il avait l’air calme et reposé, même sous le trouble de l’eau. Comme si la mort l’avait délivré. Gaston se leva de son lit, et, très calmement, il se dirigea vers la fenêtre, comme d’habitude. Il regarda dehors. Mais il n’y voyait plus un paysage gai et verdoyant, ni même triste et grisonnant. Il y voyait une façon de mourir. Il voulait ouvrir la fenêtre, monter sur le rebord, et crier, pour que tous les passants s’arrêtent, pour que toute cette troupe d’imposteurs indifférents, de salauds innocents, pour que tout le monde s’arrête et le regarde. Et alors, il voudrait sauter, pour s’écraser contre les graviers de l’allée, pour que son sang se répande entre les cailloux, éclabousse les passants, salisse les haies de rosiers, et souille les parterres de fleurs, pour que tout soit recouvert de rouge, d’un rouge écoeurant, pour dire, implicitement, ce qu’il avait sur le cœur, pour crier muettement qu’il ne s’était pas tué, mais qu’il avait été tué, par sa mère, qui avait déjà assassiné son père, par ces impôts qui eux-mêmes tuaient les paysans, et par eux, eux, tous ces passants qui défilaient béatement, qui s’émerveillaient devant la richesse des lieux, et qui alors seraient en train d’essuyer le sang sur leurs chemises, ces nobles qui tuaient toute une population sans pour autant avoir de sang sur les mains. Une pulsion soudain lui insuffla l’envie de tendre sa main vers la poignée, et de le faire, de sauter, pour pleurer et rire des larmes de sang à la face du monde. Mais il se détourna de la fenêtre, bondit dans son lit, et dormit. Le lendemain, Il se leva à grand peine à l’heure du déjeuner. Une assiette en porcelaine remplie de bouillon avait déjà été déposée, près de la porte. Il l’avala rapidement, en reversant le liquide dans sa bouche, sans même se servir de sa cuillère, puis prit à nouveau le chemin de la fenêtre, quand trois coups retentirent. C’était Romain, qui demandait le droit d’entrer. Gaston l’ignora et s’approcha de la fenêtre. Il avait toujours envie de l’enjamber, de se tuer, de se faire tuer… cette fois-ci, il ne pût réprimander un vif mouvement de son bras vers la, poignée. Et un cycle commença. Ainsi, tous les jours, il se levait plus où moins à midi, avalait son bouillon, puis se dirigeait vers la fenêtre. Tous les jours, Romain vint frapper à la porte. Et chaque jour, la tentation, la tentation d’ouvrir la poignée, la tentation de sauter sur les graviers se faisait plus forte. Le temps passait ainsi, loin des leçons et des professeurs, loin de tout. Proche de la mort. Gaston ne vit pas passer le temps. Les pensées s’enfilaient dans son esprit, toujours les mêmes, toujours les autres. Il se racontait les mêmes histoires, nourrissait les mêmes espoirs, attisait les mêmes pensées morbides, et pourtant, trouvait tout nouveau. Il avait perdu la mémoire, et ne se rappelait plus avoir déjà pensé. Mais il se souvenait être déjà mort, allongé dans un ruisseau. Comme dans un rêve, il voyait son fils, arriver à cheval, puis, le découvrant ainsi, reposant au fond des eaux, pleurer et crier. Mais, avait-il un fils ? Qui était-il vraiment ? Gaston avait douze ans lorsque après avoir avalé son bol de bouillon, il alla une fois de plus rêver à la fenêtre. La tentation fut trop forte. Il tourna la poignée, et monta sur e rebord de la fenêtre. Qu’il était haut ! Les gens étaient tout petits, en bas ! Il sentait le vent mouler ses vêtements, et lui caresser le visage. Il ferma les paupières, et respira à pleins poumons. Soudain, Romain toqua à la porte, comme à son habitude. Gaston ouvrit les yeux, et les ouvrit sur une vision d’espoir. Ses yeux s’écarquillèrent. Il avait fait son choix.
  14. Escoublac est mon seul vrai poème. Le reste n'est que gribouillage.
  15. Petimuel

    Les sept compagnons

    On va me traiter de tous les noms, mais je survolais juste le sujet comme ça, quand j'ai vu une certaine polémique au sujet de "nous nous cachèrent." Alors, je vous offre la clé : on dit "nous nous cachâmes." Voilà. je vais m'attaquer au texte, maintenant! Mes impressions plus tard... -Pour la Dame!-
  16. Petimuel

    Adoption

    Vous saurez tout dans le prochain épisode... arkh arkh! Merci beaucoup pour vos critiques, ça m'encourage plus que vous ne le croyez (quoiuqe, tout dépend de ce que vous croyez.) Sinon, Roujio, je n'ai rien contre le système éducatif, BIEN AU CONTRAIRE! Mais c'était juste pour montrer que l'enfant, loin de s'en ficher, hait l'éducation. Voilàvoilàvoilà. Encore merci! je bloque un peu sur la suite, non que les idées manquent, mais je suis préoccupé par un système de mise en forme. Mais, donte inquiètte, j'ai fait pareil sur le chapitre III, donc, ça va venir! -Pour la Dame!-
  17. Petimuel

    Adoption

    V Triste dénouement L'aube était à peine levée. Le ciel passait du bleu au rouge dans un éblouissant camaïeu de couleurs. Il avait beaucoup plu, la nuit dernière, aussi un arc-en-ciel se dessinait-il timidement au milieu du ciel, le chevauchant de ses couleurs vives. Gaston regardait par la fenêtre. Il voyait les prés verdis par les dernières pluies. Il voyait les petites chaumières, dont les trous dans toits de chaume provoqués par les averses étaient en train d'être comblés par les paysans, il voyait les remises, encombrées d'outils, de placards, il voyait les énormes greniers remplis de paille, dans lesquels il était allé jouer avec Romain l'année précédente. Il voyait la forêt d'Andrésy, en train d'être déboisée, à certains endroits, sur ordre du baron, prétextant qu'il était facile de s'y perdre. Il voyait le ciel d'un bleu azuré, qui descendait vers l'ocre profond, parsemé de nuages blancs aux contours roses. Il percevait le gai chants des oiseaux, il humait la délicieuse senteur des jardins, entretenus en permanence par trois jardiniers. Il aurait aimé aller dehors, pour rejoindre toute cette gaieté, il aurait voulu y aller, pour participer au printemps, pour être au milieu de tout cet étalage de merveilles. Il aurait aimé faire partie de la fête, jouer, danser avec les autres; aider les paysans à réparer leurs demeures, aller fouiller les remises afin d'y trouver quelque ustensile amusant, jouer dans la paille, courir dans la forêt, regarder le ciel, allongé sur cette herbe si grasse, rêveur, un brin de paille entre les lèvres, écouter les oiseaux et se promener dans le jardin. Mais il ne pouvait pas. Un grand bandeau masquait ses joues, son front et son manteau, et lui soutenait le bras. Un mois auparavant, un grand garçon blond l'avait attaqué, et il ne s'en était toujours pas remis. Interdiction de sortir jusqu'à la fin du printemps. Babille, quel enfer ! Dans un grincement sonore, la porte s'ouvrit derrière lui. C'était une grosse porte en bois sombre, l'un des rares meubles qui tranchait avec le mur désespérément blanc de la chambre de Gaston. Dans le fond, son lit, sans baldaquin, en ébène. Une table de nuit en chêne et, depuis son agression, un bureau en sapin, tout comme son écritoire. Le vieux maître se présenta dans l'embrasure de la porte. Il faisait prendre des cours particuliers à Gaston, qui ne les suivait que parce qu'il y était obligé. Ensuite, il jouait avec son père. Il conversait avec sa mère, de temps à autre. Non pas que sa compagnie lui déplaisait, mais il se sentait moins proche d'elle que de Raoul. Et puis, ces derniers temps, elle visitait de plus en plus le village voisin. Personne ne savait ce qu'elle y faisait. Elle parlait de faire du commerce. Toujours est-il qu'à chaque fois qu'elle en revenait, elle était plus heureuse. Tout le monde ignorait de quel genre de transaction il s'agissait. Gaston, pour sa part, avait cru comprendre qu'elle montait un commerce. Mais il n'en savait pas plus sur le sujet. "Nous en étions resté, la dernière fois, à la libération de Brionne par Gilles le Breton, c'est bien cela ?" Gaston n'en savait rien. Depuis son agression, il n'avait pas la tête à étudier, et cette belle nature, cette formidable journée, cet air de fête et de gaieté qui l'attirait dehors, qui l'enveloppait jusqu'à la moelle, qui le tirait à travers la fenêtre, cet air de liberté qui rôdait en lui n'était pas là pour arranger les choses. "Oui." "Bien. Cette fois-ci, nous allons voir la suite des exploits de Gilles le Breton. Vous avais-je dit comment Baudoin trouva son blason ?" "Oui" "Et vous avais-je dit s'il avait rejoint les compagnons ou non ?" "Oui." "Les a-t-il rejoints ?" "Oui." "Bien. Je vois." "Quoi ?" "Pour votre gouverne, Baudoin n'a pas rejoint les compagnons." "Ah…" Le vieux maître traîna Gaston à travers les couloirs. L'enfant était une vraie furie. Il se débattait comme un beau diable. De plus en plus excédé, le professeur tirait fortement l'enfant par le col. Une porte, devant. Trois coups. "Oui ?" "Monseigneur, c'est pour votre fils." "Allons bon." "Figurez-vous qu'il n'apprend pas ses leçons." "Et alors ?" Le professeur était interloqué. Il restait là, devant le baron, dont le visage fatigué apparaissait dans l'embrasure de la porte. Le maître tenait sa tête légèrement en arrière, dans une expression de stupeur et d'indignation. "Très bien ! Je ne vous importunerai plus avec l'éducation de votre héritier, monseigneur !" "C'est cela, et bonne journée." La porte se referma avec fracas. Lentement, le professeur baissa ses yeux, pour jeter un regard noir à son élève. "Petit imbécile." "On pourrait arrêter les cours ici, m'sieur ?" "Petit imbécile !" "Merci, monsieur !" Gaston se dégagea vivement de l'emprise de son maître, et s'enfuit en rigolant. Le vieil homme n'esquissa pas un mouvement. Des années de travail pour arriver à un résultat aussi pathétique ! Et le baron lui-même qui permettait à son fils de tels écarts ! Autant ne plus rester ici. C'était décidé, il partirait de cette maison de fous ! Rien n'est plus morne qu'un plafond. C'est blanc, c'est terne, ça n'a aucune nuance. Un plafond n'a aucun intérêt esthétique, en tous les cas, pas celui de la chambre du baron. Quelques lézardes ici et là renforçaient l'impression de poussière qui émanait de ce plafond. Et pourtant, ce plafond, ce plafond laid, ce plafond terne, monotone et inesthétique, ce plafond, Raoul d'Annecy le regardait fixement. Allonge sur son lit et sur le dos, inerte, les bras le long du corps, les yeux écarquillés, le baron d'Annecy observait ce plafond. Le regard fixe, en vérité, d'Annecy pensait. Il pensait à tout ce qui le contrariait, à toutes ces choses qui nous tourmentent, à toutes ces choses qui attirent notre attention, au point de nous aveugler, au point que l'on ne pense plus qu'à elles, si futiles furent-elles. Elles étaient nombreuses, ses contrariétés. Trop nombreuses et trop importantes. Le fils qu'il n'avait pu garder réapparaissait dans sa vie. Au moins n'avait-il pas sa mort sur la conscience, mais cet enfant avait été éduqué, avait été monté et endoctriné contre lui et son fils à tel point que sa conscience risquait d'avoir à supporter le poids de la mort de Gaston. Et puis, les affaires de sa femme, de moins en moins crédibles. Elle était de plus en plus joyeuse, mais de plus en plus distante de lui, au fur et à mesure que son affaire de commerce se concrétisait, du moins d'après elle. Mais que pouvait elle bien lui cacher ? Il avait interrogé les paysans des villages proches, et tous avaient affirmé ne pas l'avoir vue depuis deux mois au bas mot. Et encore, Gaston, son propre fils, qui se moque des leçons de son professeur, qui néglige son éducation. Foutredieu, quelle mélasse ! Pourquoi avait-il répondu avec tant d'indifférence au professeur ? Parce qu'il s'en foutait. Il s'en foutait, que son fils passe à côté de son éducation. Il s'en foutait, que sa femme lui mente ! Il s'en foutait, de ce bâtard de gosse qui venait frapper son fils à mort ! Et il s'en foutait de ce plafond désespérément blanc qui lui revoyait une image, une réponse à toute ses pensées : rien. Ne pas y penser. S'en moquer. Gaston marchait lentement. Un pas. Le pied gauche. Un pas seulement. Un pas de liberté, un pas qui n'était pas demandé par son maître. Un pas qu'il avait, lui, décidé de faire, de son propre chef. Le pied droit, à présent. Il fallait savourer cet instant de liberté, cet instant durant lequel il aurait dû recevoir sans y penser toutes les informations plus inutiles les unes que les autres qui lui divulguait le professeur, tel un liquide suintant et putride qui s'infiltrerait par tous les pores de sa peau, qui inonderait toutes les rigoles qui courraient à la surface de son cerveau, cet instant qu'il aurait dû passer à être couvert des divagations du maître, énormes cloques intellectuelles recouvertes d'un infâme pus d'élocution. Le pied gauche. Devant, une porte ! Le boudoir de sa mère ! Tendre lentement le bras… prendre la poignée.. et pour le plaisir, ouvrir d'un coup, et bondir à l'intérieur ! Gaston fit irruption dans la pièce. Sa mère se retourna, et, de surprise, poussa un petit cri. Elle n'était pas vêtue de sa robe bleue moulant habituelle, mais d'une petite robe blanche, toute fine, qui laissait apercevoir ses formes, ses courbes, encore gracieuses malgré son âge. Elle était entourée par des étagères recelant de livres, anciens ou non, et adossée à une petite table basse, vide, dos à la fenêtre. La pièce respirait le vieux parchemin. "Ah ! C'est toi ! Tu m'a fait peur !" "Je croyais que tu étais au village voisin." "Oui.. mais non.. je suis là.. je lis des livres." "Pourquoi est-ce que tu ne le dis pas à papa ?" "Parce que.. parce que j'ai besoin de calme, pour lire… et tu sais, ton père… d'ailleurs, tu pourrais sortir, s'il te plaît ? j'ai besoin de tranquillité." "D'accord maman." "Au fait. Pourquoi est-ce que la fenêtre est ouverte ?" "Eh bien.. il fait si chaud, dans cette pièce, autrement ! Tu ne trouves pas ?" "Non." Quelques heures plus tard, Raoul d'Andrésy marchait d'un pas ferme, lourd et résolu vers las chambre de son fils. Il avait été mou aujourd'hui, plus qu'il n'aurait du l'être. Son enfant avait raté les cours pour une journée, mais il ne fallait pas que cela se généralise ! Il approchait de sa porte. Mon fils, aujourd'hui tu as raté les cours… non. Gaston, Aujourd'hui, j'ai été particulièrement léger… non plus. De toute façon, il arrivait. Il faudrait improviser. Sans même prendre la peine de frapper à la porte, le baron s'empara de la poignée et ouvrit cette dernière, sans violence, sans douceur. Gaston était penché à la fenêtre, et humait l'air d'un air absent. Raoul se dirigea vers lui, puis le prit par l'épaule. "Gaston." Pas de réponse. "Gaston ?" "Oui ?" "Ecoute.. aujourd'hui, tu n'as pas eu de cours.. mais ce n'est pas bien… tu reprendras l'école demain." "Alors pourquoi tu m'as laissé faire ce que je voulais aujourd'hui ?" "Parce que… parce que j'ai beaucoup de problèmes en ce moment, je suis tracassé.. et il faut que je parle à ta mère, mais elle n'est toujours pas rentrée." "Si tu veux lui parler, elle est dans son boudoir." "Ah ! Et depuis quand ?" "Depuis ce matin." Raoul observait son fils. Etait-il possible qu'il dise la vérité ? Gaston était l'être qu'il avait le plus cher au monde. Pouvait-il admettre un mensonge de sa part ? Qui croire ? que décider ? "Qui t'as dit ça ?" D'Annecy courait à travers les couloirs. Parbleu, si vraiment sa femme était en ces murs, il aurait des raisons de se poser des questions. Vite, courir. Les torches défilaient à ses côtés. L'escalier apparaissait enfin, au bout du couloir. Courir, courir. Michel apparaissait, un plateau à la main. Le baron ralentit. "Michel ?" "Sire ?" "Mon épouse est bien partie dans les villages avoisinants ?" "Assurément, monseigneur. Je l'y ai accompagnée ce matin." Raoul bouscula son serviteur, et continua sa route, de plus en plus excédé. Qui croire ? le fils ? Le serviteur ? Tout trouverait son explication, dans le potager, face à la fenêtre du boudoir de sa femme. Il ralentit un peu. Au fond, était-il certain de vouloir la connaître, cette vérité ? Que pouvait donc bien lui cacher sa femme ? Et, dans le cas où Michel dirait vrai, que penser de son fils, qui lui mentait sur le compte de sa femme ? Pourrait-il supporter tout ce qui se tramait dans son dos ? La porte du potager se présentait devant lui. Une lourde porte de bois vermoulue, cerclée de fer. Un battoir en forme de gueule de loup permettait de l'ouvrir. Raoul tendit sa main vieillie par les années, sa main parcourue de veines protubérantes, cette main recouverte par une peau, constellée de tâche brunes, une peau si relâchée qu'elle laissait apercevoir les phalanges. "Au revoir, monsieur." Le baron s'arrêta dans son mouvement. A sa droite se tenait le professeur de son fils, vêtu de son éternelle tunique blanche, salie au bout, son écritoire en bandoulière derrière le dos, et une liasse de parchemins sous le bras. "Pourquoi au revoir, mon bon ?" "Parce que je vous quitte, monseigneur." "Vous nous quittez, vraiment ?" "Vous, et toute cette maisonnée, mon seigneur. Adieu." D'Annecy ne sut que répondre. Il restait là, le corps droit, le bras tendu, la tête tournée vers la droite dans une expression d'étonnement et d'incompréhension. Le professeur attendit une réponse de sa part pendant quelques secondes puis, impatient, se dirigea vers les portes principales. Il s'y présenta, mais les gardes hésitèrent sur la marche à suivre. "Devons-nous lui ouvrir, monseigneur ?" Le baron n'esquissait aucun mouvement. Il restait là, immobile, telle une statue. Les deux paysans en armes crurent bon d'accéder à la demande du vieil instituteur. L'un s'entre eux monta le petit escalier qui jouxtait la porte. Petit à petit, la herse se mit en branle, puis, quand elle fut assez élevée, le second garde ouvrit la porte au maître, qui sortit sans mot dire. D'Annecy ne réagit toujours pas. Le professeur parti, plus personne ne pourrait s'occuper de l'éducation de qui que ce soit. Il y avait bien un monastère, à quelques kilomètres du château d'Annecy, mais il était hors de question d'y envoyer Gaston, dans l'état où il se trouvait. Bon, il faudrait bien l'ouvrir, cette porte. Il faudrait bien voir si sa femme le trompait où non. Le fallait-il vraiment ? L'heure de déjeuner était passée. Camille avait préparé une soupe de fèves, avec quelques morceaux de lard. Il y avait peu de viande, car la plupart des villageois étaient employés à abattre la forêt d'Andrésy. Ils n'avançaient pas très vite, et s'ils continuaient ainsi, la récolté céréalière serait mauvaise, cette année. La soupe fut bonne, le lard aussi. Raoul d'Annecy avait entamé se promenade digestive dans la forêt. Il était seul, sur son cheval. Aucune de ses gens de l'avait accompagné, sur son ordre. Il désirait être seul. Sa monture avançait lentement. C'était un pur sang brun, à la crinière blanche. Il avançait lentement. Son cavalier n'avait pas la tête à galoper. Ils traversèrent ensembles de vastes clairières herbeuses, ou de grands parterres de champignons, ils croisèrent des nids d'abeilles, passèrent devant un chêne centenaire, dont les branches comme les racines torturée s'étendaient à plusieurs mètres à la ronde. Il longèrent de longs affleurements rocheux, passèrent devants quelques arbres fruitiers, aperçurent des grottes sans doute habitées par de féroces animaux. Ensembles, ils traversèrent la forêt jusqu'au château d'Andrésy, dont le seigneur était un vassal de Raoul d'Annecy. Ils traversèrent champs et pâturages, longèrent collines et montagnes, traversèrent quelques villages, jusqu'à ce que la fatigue les gagne. Enfin, ils firent demi-tour, et s'enfoncèrent à nouveau dans la forêt. Enfin, après une heure de route sur le chemin du retour, le baron perçut le doux clapotis d'un ruisseau. Il stoppa sa monture, et mit pied à terre. Le soir tombait. Il faisait encore jour, mais la couleur azurée du ciel commençait à se teinter de brumes. Gaston regardait encore par la fenêtre. Il avait vu le maître partir, il y avait quelques heures de cela. Tant mieux ! Ce vieux croûton cesserait de lui faire perdre son temps ! Mais à présent, il attendait le retour de son père. Comme celui-ci tardait ! Comme la maison paraissait vide, sans lui ! Enfin, une tâche brune se détacha de l'immensité verte de la forêt d'Andrésy. La tache s'approcha. Gaston reconnut le cheval de son père, sans cavalier. Il bondit de joie : lorsque son père faisait ça, c'est qu'il avait quelque chose d'important à lui dire, en cachette. Gaston sortit de sa chambre en quadruple vitesse, fonça à travers les couloirs, dévala l'escalier, et enfin se présenta devant la porte d'entrée. "Ouvrez les portes, s'il-vous plaît." Les deux gardes le regardèrent sans mot dire. "Ouvrez les portes." L'un deux fit un pas en arrière, mais se ravisa, et ramena sa jambe à sa position d'origine. "Je vous somme d'ouvrir cette porte !" Enfin, le garde muni d'une épée se précipita à l'étage. L'autre continua d'observer le jeune homme d'un air dubitatif. Enfin, la herse se leva. A peine s'était elle élevée d'une trentaine de centimètres que Gaston s'élança en dessous, non sans s'écorcher le bras emmailloté dans du tissu, et ouvrit la grande porte. Le destrier l'y attendait. Il avait l'habitude. A présent, il fallait le monter. Avec un bras en charpie, cela n'allait pas être simple. Mettre le pied gauche sur l'étrier. Le bras gauche sur la selle. Pousser ! Han ! Passer la jambe de l'autre côté. Puis foncer ! Sa monture connaissait le chemin ! elle avait déjà fait ça à plusieurs reprises : son maître le laissait, il rentrait au château, Gaston montait dessus, puis le cheval l'amenait à Raoul. Ils passèrent au beau milieu d'un groupe de paysans qui s'évertuaient à abattre des arbres. Ils s'y mettaient par groupe. L'un montait, muni de cordes, jusqu'à mi-hauteur. Il accrochait les cordes, puis les lançait à ses compagnons et redescendaient. Tous alors tiraient sur les cordes pour déraciner l'arbre. Une fois cela fait, il fallait le couper en tronçons. Des paysans avec d'énormes haches le faisaient. Ensuite, il s'agissait de charger les rondis sur des attelages tirés par des bœufs, qui ramenaient le bois au château, où il serait coupé en petites bûches pour l'hiver, ou en planches, en prévision des réparations à venir. Ils étaient une centaine, ainsi, grimpant, tirant, coupant, chargeant. Une centaine à suer de partout selon le bon désir du seigneur, une centaine à se faire des cloques, des ampoules et des courbatures. Le cheval et Gaston continuèrent leur chemin. Ils passèrent quelques fourrés, puis, au beau milieu de la forêt, stoppèrent près d'un ruisseau. Gaston descendit de cheval. Il s'approcha du cours d'eau, cherchant son père. Il le vit, allongé sous l'eau, droit et fier, les bras repliés sur la poitrine, tenant fermement l'épée dans l'alignement du corps. Les yeux fermés, il ne bougeait plus. Seuls quelques pans de sa tunique dansaient lentement, portés par le roulis de l'eau.
  18. Petimuel

    Adoption

    IV Un jeu bien innocent « Pour clore cette leçon, on peut donc dire que, contrairement à nous, les Impériaux ne vouent pas un culte unique, dit monothéiste, - m, o, n, o, t, h, é, i, s, t, e, pour éviter les fautes-, mais un culte multiple, dit polythéiste, bien que fondé sur une divinité principale, Sigmar, dit « l’unificateur ». » Le vieux professeur marchait de long en large, devant les deux pupitres de ses élèves. Il était grand, mais maigre, la longue tunique blanche qu’il portait était trop ample pour lui. Aussi frottait-elle par terre, se salissant au rythme des jours. Son visage était creusé, ses pommettes marquées. Son visage bronzé par le temps laissait ressortir ses rares cheveux d’un blanc de lin. Ses paupières tombaient, alourdies par les années. Il paraissait fatigué. Il était fatigué. « Demain, nous nous intéresseront à l’histoire de l’Empire. D’ici-là, vous me réécrirez les phrases « Sigmar et la Dame du Lac sont deux puissantes divinités », « Sigmar est la divinité la plus importante de l’Empire » et « Il n’y a pas d’autres divinités que la Dame de Lac en Bretonnie. » en Impérial. Allons, à demain. » Les élèves étaient au nombre de deux. Deux, seulement. Deux bouches pour parler, deux paires de lèvres pour s’agiter. Mais quel vacarme ! Ils hurlaient, et roulèrent prestement leurs parchemins avant de courir en direction du château. Le vieux maître faisait l’école à quelques mètres de celui-ci, au milieu d’une cour, à quelques pas de la forêt. Deux pupitres et trois chaises y étaient installées. « C’est celui qui arrive en premier qui gagne ! » Des éclats de rire retentirent. Les deux garçons couraient à en perdre haleine. La poussière se soulevait sous leurs pas. Celui qui était en tête avait huit ans. Il s’appelait Gaston, son père était le baron du domaine d’Annecy. Ses cheveux châtains dansaient avec le vent. Le second le talonnait. Romain d’Andrésy. Sa mère, Camille, devait être en train de préparer un de ces bouillons dont elle avait le secret. Il avait huit ans et demie, mais était plus petit que son camarade. De longs et soyeux cheveux blonds s’entremêlaient derrière lui. Les deux amis étaient vêtus de même manière : un bas vert sombre et un pourpoint ocre, sur lequel était cousu le tabard de la maison d’Annecy. Leurs chaussures en cuir se salissaient un peu plus à chaque pas. Leurs vêtements, doux et confortables, en disaient long sur leur classe sociale. Un classe riche. Une classe de gens favorisés, sans doute sur le dos d’autres personnes. Un classe de gens qui n’ont à se soucier de rien sans pour autant manquer de pain. Mais les enfants n’en avaient pas conscience. Les enfants couraient. Romain ralentit peu à peu. « Hé ! Attends ! » « Quoi ? » « J’ai une meilleure idée ! Si on allait visiter la forêt. » « Mais… et le repas ? » « Oh, baste, tu sais bien que Camille ne l’aura pas fini avant une demi-heure. Viens ! » Gaston se tourna vers lui. Il semblait hésitant. « Allez, quoi ! On en a pour dix minutes…. » La bouche de Gaston s’ouvrit pour parler, mais il fut stoppé dans son élan par un dernier moment d’hésitation, les quelques secondes durant lesquelles on s’assure que ce l’on a fait le bon choix, cette dernière minute où l’on vérifie que l’on a pensé à tout, l’ultime instant de réflexion au cours duquel on se sent au bord du gouffre, sachant que la décision prise sera irrévocable. La décision en question n’était pas importante, aucune vie n’était en jeu, mais qui savait ? Qui savait ce qu’il pourrait trouver dans la forêt ? « Tu te décides ? Arrête de réfléchir comme ça, il s’agit d’une ballade en forêt, pas d’une déclaration de guerre ! » Alors, la meilleure chose à faire était de refuser. Non, ce n’était pas une bonne idée, une promenade en forêt. Romain disait qu’elle durerait dix minutes, mais lui savait bien qu’elle s’éterniserait. Mais, comment lui dire ? Jamais il n’aurait le courage de… et puis, en plus son ami lui demanderait pourquoi. Or, il n’avait pas d’argument valable. Et pourtant, vraiment, cette idée le mettait mal à l’aise… on ne sait pas ce qu’on peut y trouver… en en plus, Il avaient déjà parcouru la moitié du chemin du retour, il serait bête de retourner en arrière. Oui ! Voilà ! C’est ça qu’il devait dire à Romain ! Que Non, il ne voudrait pas venir. Pourquoi ? Mais parce qu’ils avaient déjà parcouru la moitié du chemin et qu’il avait la flemme de revenir en arrière, ne serait-ce que jusqu’à la cour au milieu de laquelle ils ont classe ! « N… » « Gaston ! Romain ! » Les deux enfants sursautèrent. Leur maître venait d’arriver dans leur dos, son écritoire sous le bras. Sans même prendre le temps de s’arrêter, il leur dit qu’ils avaient oublié leurs écritoires et qu’ils devraient aller les chercher. Les deux enfants restèrent immobiles, le maître continuait sa route, salissant à vue d’œil le bas de sa toge. « Bon. On y va ? » « Oui… » « Qu’est-ce que tu voulais me dire, au fait ? » « Rien. Rien… » « Allez, le premier arrivé est le plus fort. » Et Romain détala en direction des tables de bois. Gaston continua de marcher, mais, au bout de quelques secondes, se prit au jeu, et se mit à courir à toutes vitesse, dans un éclat de rire sonore. Les enfants couraient, couraient toujours. A ce moment précis, ils couraient, mais ils courraient le lendemain, et les jours suivants aussi. Ils ne cessaient de courir, comme si c’était leur seul but. Romain n’était plus qu’à un mètre de l’une des tables, et, pour assurer sa victoire, bondit dessus dans un râle, dans un cri de guerre, dans un hurlement de bête victorieuse. Son pied se prit sur le banc qui se renversa ; Romain s’affala sur sa table, l’épaule la première. L’écritoire se reversa, le flacon d’encre qui n’était pas rebouché se renversa, répandant son noir contenu sur le sol poussiéreux. Romain tomba au sol, et roula sur un mètre ou deux. Le garçon resta quelques secondes ainsi, face contre terre. Gaston s’était arrêté, et le regardait, avec une impression de surprise mêlée de pitié. Le bras gauche, d’abord. Han ! Romain se releva. Il titubait un peu, et avait du mal à se tenir debout. Il était couvert d’encre et de poussière, ses cheveux étaient collés par la sueur et l’encre, et ses vêtements étaient littéralement dégoulinants du liquide noir. « Je crois que j’ai gagné, hein ? » Un faible sourire sur les lèvres illuminait l’adorable visage de Romain, même couvert d’encre. Gaston lui-même commença à sourire. Rien ne se passait. Ils étaient là, l’un devant l’autre, un sourire affiché sur leurs visages, les yeux pétillants. Finalement, Gaston bondit sur son adversaire. « Jamais ! » Et les deux enfants roulèrent ensemble vers les bois, en se ruant de coup, dans un nouveau torrent de rires. Les deux amis roulèrent sur l’herbe fraîche de la forêt en se battant, passèrent quelques arbres puis atterrirent dans un buisson de ronces. Les épines déchiraient les vêtements et tailladaient la chair, mais rien ne pouvait venir à bout de ces rires. « Bon, on la fait, cette ballade ? » Un courant d’air s’engouffra par la fenêtre ouverte, soulevant les rideaux dans un murmure étouffé. Le baron se retourna. Son visage était plus que jamais buriné, ses traits saillants. Ses cheveux se raréfiaient, et sa moustache serait bientôt blanche comme les draps du lit à baldaquin. Il fit quelques pas puis ferma la porte. Michel lui avait dit que la baronne était partie dans le village voisin. Mais qu’allai-t-elle donc y faire ? Un cri. Un cri comme celui qui avait retenti huit ans plus tôt. Un peu plus grave, certes, mais un cri entrecoupé de pleurs, un cri déchirant vint percer le ciel. Le cri de son fils. Les pas de ses bottes résonnaient dans les escaliers, qu’il descendait à toute vitesse. Il n’avait pas même accroché sa ceinture, aussi sa tunique volait-elle derrière lui. Plus que quelques marches… Il arriva dans le hall d’entrée, une petite pièce de pierre, avec la grande porte d’accès encadrée par des meurtrières. Deux torches flambaient. Deux gardes faisaient la ronde. Ils avaient de longues tuniques arborant le tabard d’Annecy, un grand pavois en bois cerclé de fer, et des casques ronds surmontaient leurs têtes. L’un d’eux était armé d’une arme d’hast, l’autre d’une épée. Le baron s’empara de l’arme de ce dernier, qui le laissa faire, ne sachant que trop bien ce qu’il risquait d’endurer en contestant son maître. « Ouvrez le portes ! » Le soldat désarmé se précipita vers un petit escalier de pierre, près de la porte. Quelques secondes passèrent. Le cri retentit à nouveau. Enfin, la herse commença à se soulever. Elle ne s’était pas levée de plus de trente centimètres que le baron Se mit à plat ventre pour passer en dessous. Et là, comprimé entre ce rideau de fer et l’immense porte boisée, il chercha la poigné, finit par l’actionner et courut immédiatement en direction des bois, où les cris reprenaient de plus belle. Il courait, courait. Le chemin paraissait interminable, et… Babille ! Il venait de voir les tables renversées, les écritoires ouvertes, de l’encre répandue sur le sol ! Mais que c’était-il donc passé ? Il continuait sa course. Il n’était pas équipé, et couvrait une distance respectable en peu de temps. Il quitta la terre battue pour l’herbe haute, préférant couper au plus court, plutôt que de suivre le chemin. Les broussailles lui tailladaient les bras. Des arbres, des branches, par terre, des champignons, un ruisseau, des oiseaux, des rochers, des cris, des cris ! « C’est bon, tu peux arrêter, tu sais ? » Le soldat à qui on avait pris l’épée était en sueur. Les muscles tendus, penché vers l’avant, l’une des jambes repliées, il s’évertuait à faire tourner l’énorme engrenage qui permettait d’ouvrir la herse. Il se relâcha, bloqua l’engrenage, et tomba à terre. Il ne pouvait plus supporter cela. Haletant, couvert de sueur, la tunique entrouverte au niveau de la poitrine, c’est à peine s’il entendit : « Fais-la redescendre, maintenant ! » Inspirer… expirer… inspirer… Allons, il fallait se mettre debout. Faire redescendre la herse était plus aisé que le contraire : il suffisait d’enlever le bâton qui retenait l’engrenage. Un pas… tendre la main vers le bâton… « Non, arrête…Ce n’est plus la peine » La baronne venait d’arriver. Elle était dans son boudoir, à deux pas de là, en face des portes, quand des cris lui parvinrent aux oreilles. Elle était venue aussi vite que possible. Vêtue d’une robe bleue moulante, les cheveux décoiffés, elle regardait la forêt. « Gaston ! » Là, un énorme rocher incliné! Les cris venaient de derrière. Raoul monta sur cette plateforme naturelle, et aperçut, en contrebas, son fils à terre, en train de se faire rouer de coups de bâtons par un garçon grand et blond. A un mètre de à, sur une pierre, Romain gisait, inerte. Du sang s’échappait de son crâne. L’agresseur avait une demi tête de plus que Gaston, était vêtu de guêtres et muni d’une lourde branche, qu’il tenait brandie au dessus de la tête de l’héritier d’Annecy, dont le nez dégoulinait de sang. « Arrête cela tout de suite. » La voix rauque et ferme du baron avait de quoi effrayer un petit garçon. L’agresseur se retourna, découvrant un tête d’enfant, un tête que l’ont eût volontiers serré contre la sienne avec toute la tendresse du monde si elle n’était pas assombrie par un rictus malsain. « Ah ! Vous êtes donc le père ! Je vous salue, monseigneur », répartit l’enfant, tout en s’évertuent à faire des courbettes telles que celles qui sont de rigueurs dans les cours nobles. « Tu le prends comme ça, petit imbécile ? » « Assurément, monseigneur ! » La lame siffla. L’épée passa à quelques centimètres de l’oreille du garçon, puis vint se briser avec fracas sur un arbre derrière. L’enfant sembla hésiter. Le baron s’était relevé, et de toute sa taille dominait la scène, du haut de son gros rocher incliné, qui décollait du sol pour atteindre le mètre de hauteur. L’agresseur allait partir, la peur se lisait dans ses yeux, tous ses muscles furent tirés en arrière. Mais soudain, un détail le frappa, chez le baron. « Et comment voulez-vous que je vous craigne, à présent que vous êtes désarmé ? » Dans un rugissement sonore, le baron sauta de son support, et atterrit juste devant le garçon, qui l’accueillit avec un coup de branche dans les pommettes, ce qui eut pour seul effet de le déséquilibrer. Raoul riposta avec son poing, mais son adversaire sen pencha et évita le coup. D’Annecy profita de l’occasion, il s’agrippa au dos de son adversaire puis, tirant de toutes ses forces, parvint à le soulever. Le garçon avait la tête en bas, le sang lui tournait, il lâcha son bâton. Le vieux soldat lâcha sa proie, et bondit sur l’arme. L’enfant, en grand acrobate qu’il était, avait pensé à mettre les mains en avant, puis effectua une roue pour ses retrouver sur les jambes. Face à lui, le baron avait le bâton tendu vers l’avant. Il respirait et grognait très fort. Des flammes auraient pu sortir de ses narines que cela n’eût qu’à demi étonné le jeune garçon. Le baron fonça en avant avec un hurlement de rage. L’enfant plongea sur le côté et s’écrasea sans grâce sur le sol. Le vieil homme se retourna, ses yeux étincelaient. L’agresseur de son fils détala à quatre pattes pour se blottir sous le rocher qu’avait emprunté le baron quelques minutes plus tôt. D’Annecy tourna autour du rocher comme l’on tourne autour d’une proie apeurée avant de lui donner le coup de grâce. Il fallait prendre son temps… la proie en question était à sa merci... grelottante de froid et de peur... ce salaud avait voulu tuer son fils... oui, ce salaud, il n’y avait pas d’autre mot… il avait peut-être déjà tué l’ami de Gaston… pour tout cela, il payerait. Enfin, prenant une décision, le baron courut sur le rocher, jusqu'à arriver au bord, puis il donna de violents coups de bâton vers le bas, dans l’espoir d’atteindre sa victime… espoir vain. Le bâton n’était pas assez grand, la saillie trop profonde. Rageur, il commença à redescendre, en frappant la pierre de ses pieds, afin d’exprimer son mécontentement. Le rocher se mettait à vibrer… intrigué, il sauta sur place. La grosse pierre plate donna l’impression de se tourner : la partie enfouie sortait du sol tandis que la partie émergeante s’enfonçait vers celui-ci. Il l’écraserait ! Raoul se mit à sauter à pieds joints, de toutes ses forces, pour faire céder la pierre, qui, petit à petit, s’équilibrait. Le garçon commença à être comprimé. Il s’éloigna un peu plus vers le bord. Et le baron sautait, sautait, et riait, riait d’un rire méchant ! Encore un peu, et il serait écrasé. Il détala en direction des bois, sauta quelques buissons et disparu de la vue de baron avant que celui-ci ne puisse réagir. D'Annecy sauta par terre, et se dirigea vers son fils. Celui-ci gisait au sol, la tête contre une grosse pierre. Du sang s'écoulait de son nez et de ses pommettes ouvertes. Son visage était pâle, et respirait le froid. Son ventre se gonflait et se dégonflait timidement, et un léger souffle d'air s'échappait de ses narines. Il vivait, c'était le principal. Raoul se retourna, et s'approcha de Romain. Celui-ci était étendu, inerte, contre un gros rocher. Sa tête reposait sur un petit flaque de sang. Il était livide, et blanc comme la mort. Raoul s'agenouilla près de lui, et posa son oreille contre le ventre du garçon. Il sentait quelques pulsations hasardeuses, preuve que le cœur était encore en marche, mais pour combien de temps ? "Il… m'a dit que j'avais pris sa place…" D'Annecy se retourna. Son fils tentait de relever la tête. Sa bouche s'agitait fébrilement mais seuls quelques rares sons en sortaient. "Il m'a dit que… que j'avais pris sa place et … que c'est pour ça qu'il… qu'il devait me tuer." Le vieil homme regarda fixement son garçon. "Tu pleures, papa…" La nuque de Gaston se renversa. Ses paupières se clorent. Raoul d'Annecy courait, courait. Le chemin paraissait interminable! Mais pourquoi fallait-il que le sort le poursuive de la sorte, le traque sans relâche ? Il continuait sa course. Des rochers, des oiseaux, un ruisseau, des champignons par terre, des branches, des arbres. Il était lourdement chargé, Romain sur le dos et Gaston entre les bras, mais la peur de perdre son fils révélait en lui des forces qu'il ignorait, aussi couvrait-il une distance respectable en peu de temps. Les broussailles lui tailladaient les bras. Il quitta es herbes hautes pour la terre battue. Dame ! Que le château lui semblait loin ! Il fallait courir, courir encore ! Courir toujours ! Il aperçut sa femme, qui courut à sa rencontre. Ses yeux rougis et bouffis se chargèrent de larmes.
  19. Petimuel

    Adoption

    III Des échos du passé Des rires. Des rires et des pleurs. Quand Gaston pense à son enfance, ce sont les deux premières sensations qui lui reviennent. Deux sensations contrastées, deux émotions contraires et pourtant si ressemblantes. Des cris nous échappent, nous sommes touts rouges. Seul le sentiment diffère. Ses premières années s’écoulèrent paisiblement. Sa mère lui donnait à manger un bouillon préparé par Camille, qu’il acceptait d’avaler sans broncher. Il y prêtait tellement peu d’attention qu’il était incapable de dire s’il avait aimé ou non. C’était une soupe de légumes, parfois accompagné d’un petit bout de viande. L’après-midi, il jouait avec son père. Le vieil homme était empli de tendresse, et acceptait volontiers de faire une partie de saute-mouton, imitant parfois le bêlement de l’animal. Les murs délabrés du château d’Annecy se souviennent encore des rires qui hantèrent les grands couloirs à cette époque. De temps en temps, le baron faisait des cadeaux à son fils, comme de petits pantins de bois, représentant des chevaliers, que l’on devait faire combattre en levant ou baissant le bras. Le père se prêtait avec plaisir à ces jeux enfantins, et, à genoux, au beau milieu d’un couloir éclairé par des torches et quelques vitraux, il riait autant que son fils. « Papa ? » « Oui, Gaston ? » « J’ai un petit frère ? » Les rires cessaient, parfois. Un lourd silence s’imposait. On n’entendait alors que les piaillements étouffés des oiseaux à l’extérieur, et le crépitement des torches. Les ombres dansaient, poussées par le mouvement des flammes et des nuages. « Pourquoi me demandes-tu ça ? » « Je ne sais pas… je me suis dit, tu n’es pas toujours là pour jouer avec moi, alors, je me suis dit, un petit frère, lui, pourrait jouer avec moi. » « Oui, Gaston… tu as sans doute raison. » « Pourquoi tu ris, papa ? » « Ce n’est pas un rire. » « Mais tu ris, je t’assure ! » « Alors c’est un rire triste. » « Oui, on dirait que tu pleures. Tu es triste parce que je n’ai pas de petit frère ? » « Oui… oui, c’est cela, Gaston. Je suis triste parce que tu n’as pas de petit frère. » « Allez, on continue ? » « Non, Gaston. Il faut… que je parle à ta mère. » Et l’enfant continuait seul ses jeux, sans se douter que, loin de discuter avec sa mère, D’Annecy se lamentait auprès d’elle. Le méchant chevalier noir arrivait. C’était le plus fort, le chevalier noir ! Et le plus méchant ! Il dévastait la région, avec son épée, il tuait tous les paysans. Mais le gentil chevalier Raoul arrivait ! « Un frère ! Un frère… Vous rendez-vous compte ? Je n’en pourrais guère supporter plus ! Le souvenir de cet enfant banni, non, de cet enfant assassiné, me revient sans cesse en mémoire ! Que faire, ma Dame, que faire ? » « Calmez vous… séchez vos larmes… Calmez-vous… chuut…. » « Argh ! Je suis blessé » « Bwahahaha ! Tu vas mourir ! » « Jamais ! Pour la Dame ! » « AAAAaaaaargh ! Tu… tu m’as eu…. Je vais mourir… Adieu… » Quelques incidents se produisaient ainsi : le fils faisait revenir au père la mémoire de cet enfant, tué avant même d’être innocent. Souvent, au matin, on ne retrouvait pas le baron dans sa couche, et il fallait alors le chercher en pleine forêt, endormi sur le lit d’humus qui abritait sans doute quelques os, si petits qu’on les aurait volontiers pris pour des os de poulets. « Un jour, les loups vous mangeront, Raoul, à vous trouver ainsi, assoupi, sans défense. » « C’est bien ce que je mérite. » « Mais non, mon ami, cessez de vous en faire. Il nous fallait un héritier de sang pur ! Et puis, le bébé n’a pas souffert, vous avez dit vous-même qu’il est mort avant même d’avoir conscience de la vie ! » « Vous défendiez cet enfant, auparavant. Vous en souvenez-vous ? » « Oui. » Et les années s’écoulaient ainsi, de plus en plus longues, avec un rythme qui s’essoufflait un peu plus à chaque fois. Le père jouait de moins en moins avec son enfant. L’été passait, chaud et terne. Tout le monde restait cloîtré dans le château, à l’abri du soleil. Gaston passait ses journées à courir seul dans les couloirs, et à feuilleter des parchemins, rédigés de la main de son père. Parfois, celui-ci lui rendait visite dans sa chambre, et tout deux jouaient avec les pantins de chevaliers. La tête de l’un d’eux s’était cassée. Puis venait l’automne. Les fenêtres étaient fermées, il faisait froid. Le garçon partait chercher du bois, parfois, à la lisière de la forêt, afin d’être loin des loups. Au beau milieu d’un tapis de feuilles à la couleur de feu et de fruits écrasés, il était là, sa hache à la main .Elle était lourde, ses bras étaient frêles. Chaque coup porté assaillait les muscles et tiraillait la chair, arrachant parfois quelques larmes fugitives aux paupières lourdes. Il fallait parfois une dizaine de coups pour venir à bout d’une bûche, et une fois qu’il y avait suffisamment de fagots, il fallait encore rentrer à la maison, avec un énorme poids sur le dos. Il fallait souvent s’arrêter, le dos en feu, puis reprendre le long et douloureux chemin jusqu’à la demeure familiale. L’hiver mordait toujours, et, une fois encore, personne ne quittait le château. Malgré les toiles huilées qui recouvraient les meurtrières, un froid tiraillait les entrailles, et se déplacer, transi, à travers les couloirs était épuisant. Les jours s’écoulaient, mornes, froids, sans couleur. Les servantes apportaient le repas, les gardes faisaient des rondes de garde, Gaston apprenait à parler impérial, la vie s’arrêtait là. Parfois, une toile sue brisait, un courant entrait. Il fallait recouvrir le trou avec un tapis en attendant que les gardes ne viennent réparer les dégâts. Le printemps enfin venait. On courait, on riait, on jouait. On cueillait des fleurs pour les offrir aux filles, ces jolies enfants des villages voisins, dont les nattes dorées semblaient brodées sur les petites robes bleues, de ces filles qui respirent à pleins poumons de petites pâquerettes, de ces amoureuses timides et indécises qui sont prêtes vous aimer juste parce que vous le leur dites ; on partait se rafraîchir dans la grande fontaine en granit, au milieu du potager, qui représentait la Dame du lac, tenant entre ses mains une coupe d’où une eau claire et fraîche jaillissait. C’est pendant ces printemps fous, ces printemps qui durent toute une année, que Gaston trouva un remplaçant pour son petit frère. Cette partie là est en cours de construction, et sera étoffée ultérieurement. ne m'en veuillez pas si c'est un peu court.
  20. Oui, j'ai remarqué ensuite que "par frak" était parti.. mais j'ai averti malefosse, tout de même. (au rique de polluer le sujet, je dirais que je veux bien revenir poster des textes, mais soit ils ne toucheront pas aux skavs, soit il faudra attendre un peu.. à voir.. je crois que je vais rfaire des chtits tours de temps en temps, juste pour voir..) -Pour la Dame!-
  21. Oui, je viens de remarquer son abnnissement.. mais je n'estime pas ça suffisant! Pendez-le sur la place publique! En tout cas, je crois que je vais allez ajouter mon grain de sel sur le site de forumactif. D'autant qu'il a aussi repris le logo de malefosse pour son forum! Il a juste enlevé "par frak"! Je vais aller le dénoncer sur le fourm en question! le forum de malefosse, le vrai Heureux d'aider à la bonne cause! -pour la Dame!-
  22. Oui, pardon! le lien ici : http://www.warhammermodelisme.info/viewtop...highlight=#1694 et encore un autre, bien plus flagrant, celui-là : http://www.warhammermodelisme.info/viewtop...highlight=#1673 et encore un : http://www.warhammermodelisme.info/viewtop...&highlight=#959 -Pour la Dame!-
  23. Bon, voivi un lien de photos de nurglings dénichés sur warhaùmmer-modélisme. le gars dit qu'il sait que ce n'est pas du lui, une fois qu'on le lui ai fait remarquer, mais le fait qu'il mette "Les Commentaire sont la bienvenue" en bas me paraît louche.. -Pour la Dame!-
  24. Ca me paraît étrange, le gars parle dans un francais très correct.. bilingue à 14 ans.; remarque, en anglais, il ne tapait pas grand chose, et puis, un dico, Ca peut aidre.. je continue de chercher, mais je vais envoyer un MP aux admins avec un lien vers ce sujet, et s'ils ne r&agissent pas, ça va finir par un message directement dans le forum (à moins que je ne commence tout de suite par la seconde solution.. z'en pensez quoi, vous?) -Pour la Dame!-
  25. Je vous signale que j'ai aussi croisé ce "brother luridius" sur warhammer modélisme. il n'a pas mis le lien vers son site web, il n'a pas le même avatar, mais l'imprudent a mis le même pseudo et, encore pire, a laissé sa date de naissance : 6 janvier 1990! Donc, c'est bien lui! reperé! Je suis en train de faire une recherche sur tous ces messages, pour vois si je ne dénicherais pas des photos de figs, mais e attendant, je me propose d'avertir l'équipe administration de warhammer modélisme. je le fais? (Si je n'ai pas reçu de réponce d'ici environ 1 heure, je passe à l'action!) -Pour la Dame!-
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