cyrius Posté(e) le 10 novembre 2010 Partager Posté(e) le 10 novembre 2010 (modifié) 1. Imaginez vous avec une côte enfoncée. Mais bien enfoncée hein, le genre de truc que vous ressentiriez après avoir passé à travers une cloison en béton par exemple. Vous sentez comme une pointe qui vient vous perforer en dessous de la poitrine, vous pouvez à peine respirer et chaque fois que vous tenter de prononcer un mot, vous avez l'impression qu'un connard vous envoie des coups de lattes dans le buffet. Voilà, maintenant imaginez qu'en plus de la dite côte, vos panards ressemblent à deux escalopes crues, une migraine vous tambourine dans le crâne comme un orchestre régimentaire et vous n'avez pas dormi depuis au moins une cinquantaine d'heures. Vous avez alors une idée assez précise de l'état dans lequel je me trouvais, tandis que mon guide m'emmenait d'un pas un peu trop rapide à travers le complexe. Un guide qui n'avait, semble-t-il, pas plus d'envie de tailler la bavette que de pitié pour mon état de ruine humaine. Il n'avait pas l'air de me faire la gueule, on aurait dit un mec plutôt sociable malgré son bras bionique et sa lunette infrarouge à la place de l'oeil droit, je suis même quasi sûr qu'il devait parler la langue. Mais voilà, les minutes de silences s'accumulaient et aucune des questions que je lui posais, timidement comme un gosse qui n'aimerait contrarier personne, ne trouvaient réponse. A défaut de pouvoir discuter, j'ai essayé de passer mon ennui en regardant les portraits affichés le long des couloirs. Au fur et à mesure que l'on trottinait, j'ai observé les faciès sérieux et autoritaires d'un tas de gens probablement importants et respectueux. Le fait que les inscriptions au dessous des tableaux comportaient deux dates différentes m'amena à la déduction que les sujets devaient avoir expiré. J'en étais à l'illustration particulièrement réaliste d'un vieillard ayant dû servir comme colonel (d'après les galons affichés), lorsque mon guide s'est arrêté net. Il a tapoté habilement sur un clavier de commandes et la lourde porte blindée qui nous faisait face s'est ouverte dans un grincement particulièrement irritant. - Ils vous attendent, a-t-il dit d'une voix sombre, me rassurant sur le fait qu'il possédait bien l'usage de la parole. Au bond d'un étroit couloir mal éclairé se trouvait un petite pièce dans laquelle une brochette de gratte-papier m'attendaient, assis derrière une grande table couverte de paperasses. A coté d'eux se promenait un type d'un bon mètre quatre-vingt couvert de galons. Il marchait de long en large de la pièce, écoutant attentivement un jeune militaire planté devant lui. Ce dernier s'est interrompu lorsque je suis entré et tout les regards se sont tournés vers moi. Le troufion a levé un sourcil, d'une manière très énervante d'ailleurs, en voyant mon état mais le gradé n'a pas bronché. L'un des scribes de derrière m'a indiqué une chaise dans le coin de la pièce, que j'ai rejoint sans me faire prier. Sur un mouvement de tête de son supérieur, le soldat a reprit: - à 16:01, nous avons atteint la fonderie XII et l'avons sécurisé. Peu de résistance, une seule troupe d'éclaireurs qui a fui presque sans combattre. Mon escouade a pris position dans l'infrastructure et nous en avons profité pour nous réapprovisionner. Le peloton du lieutenant Stalker nous a rejoint comme prévu à 17:30. Après avoir reçu les nouveaux ordres par vox... Je lui aurai bien envoyé ma chaise à travers la courge, histoire de faire taire sa voix froide de fossoyeur qui aime son job, mais le gradé semblait trouver de l'intérêt dans son rapport. Le sous-fifre continua donc à disserter sur la couleur du crottin pendant dix bonnes minutes. Les scribes notaient tout, la moindre parole, chaque mot était inscrit sur le papier, en trois exemplaires. Le militaire a fini par se taire. Son supérieur a caressé sa grosse barbe grise bien entretenue, a jeté un oeil à la copie des scribes, puis a finalement congédié le troufion d'un geste. C'est à ce moment là qu'il a posé ses yeux sur moi. Il a réfléchit un bon moment, comme s'il ne savait pas par où commencer. Les scribes ont sorti de nouveaux feuillets avant de me regarder à leur tour. Inspecté de haut en bas par quatre paires d'yeux en même temps, je ne faisais pas vraiment le fier, surtout quand la moitié de ces paires d'yeux sont des implants bioniques. Le gradé s'est finalement décidé a engagé la conversation, au plus grand bonheur de ma patience longuement éprouvée. - J'ai reçu une communication du colonel Vak'rim, de la 89e compagnie du 18e Corronien. Il m'informe qu'une de ces unité spéciale, en mission avancée derrière les lignes ennemies, ne donne aucune nouvelle. J'ai à peu près saisi où il voulait en venir, cette histoire me rappelait vaguement quelque chose à vrai dire. - Une unité spéciale, dont le but de la mission ne m'a pas été transmis, qui aurait opéré à moins de trente kilomètres d'ici, de l'autre coté du no man's land. Je lui aurais volontiers demandé d'arrêter de tortiller du cul pour en venir au fait, mais mon bon sens et ses galons bien affichés m'en ont dissuadés. - Une unité spéciale composée de sept hommes. Ouille, j'ai enfin saisi. Le garnement revenait sans ses copains et il allait devoir s'expliquer. J'ai jeté un regard aux scribes qui me fixaient tous de manière tellement intense que j'ai cru un moment qu'ils voulaient me bouffer. J'ai ensuite tourné mon regard vers l'officier, cherché mes mots et essayé de trouver un moyen d'expliquer la raison du pourquoi. J'avais enfin trouvé une formule élégante lorsque le gradé s'est remis à parler, après avoir récupéré un dossier sur la table. - J'ai aussi reçu un rapport du capitaine Hitch, de la même compagnie, concernant un tireur d'élite opérant au sein de la dite unité. Il indique que ce sniper a déjà survécu plusieurs fois à des opérations dangereuses ayant coûté la vie à nombre de ses coéquipiers. L'officier a décollé les yeux du dossier pour les poser sur moi un instant, puis a repris. - Le rapport me décrit ce soldat comme le meilleur tireur de la compagnie, formé au combat urbain ainsi qu'à la survie en milieu hostile, et envoyé régulièrement derrière les lignes ennemie pour des objectifs d'assassinat et de sabotage... J'ai eu la prétention de me reconnaître dans la description et j'étais prêt à la jouer modeste, "vous savez je ne fais que mon devoir", lorsque le barbu a continué. - Il parle aussi d'un comportement dangereux, d'un caractère de tête brûlé et d'un manque de respect souvent affiché pour la discipline. Utilisation de matériel non réglementaire, possession et revente de substances illicites au sein du régiment et... intéressant... plusieurs mois de prison pour avoir frappé un supérieur. Levant à nouveau ses yeux vers moi, il a reposé tranquillement le dossier sur le table et a émis un long soupir. Il s'est ensuite relevé et a fait deux pas vers moi. - C'était juste un sergent, même pas un officier supérieur. Et c'est lui qui avait commencé, ai-je osé répondre en essayant d'oublier ma côte qui ponctuait douloureusement chaque syllabes. L'un des gratte papier a toussé légèrement et les sourcils soudain froncés de l'officier m'ont fait comprendre que ce n'était pas le moment pour ce genre de sorties. Se penchant vers moi, le gradé a placé sa figure pile devant la mienne, à une distance tellement infime que j'aurais pu lui chatouiller les narines rien qu'en tirant la langue (bien que l'idée ne me soit absolument pas venu sur le moment). - Cyrus Malron, caporal de la 89e compagnie, 3e escouade de reconnaissance. Vous confirmez ? Retenant mon souffle, dans l'espoir de survivre à son haleine de rat crevé, j'ai hoché la tête rapidement. A mon plus grand soulagement, il s'est relevé puis s'est redirigé vers la table. Les scribes ont commencé à écrire. - Quel était la cible de l'opération ? - Je ne suis pas sûr, ai-je dit d'un ton hésitant, d'être autorisé à vous révéler quoique ce soit à ce sujet. Ne faisant pas partie de mon régiment, cette information ne vous concerne pas Major... - Colonel, rectifia-t-il. - Colonel, ponctuai-je. D'un air soudain fatigué, il a jeté un coup d'oeil sur les feuilles de l'un des scribes puis s'est levé en faisant craquer ses doigts. Je n'aime pas les gens qui font craquer leurs doigts. Ca n'impressionne personne, ça fait un bruit peu agréable et ces gens finissent finalement par avoir de l'arthrite après quelques années. - Caporal, je ne vais pas tourner autour du pot. Et je vous en remercie, ai-je pensé durant le petit silence qu'il a laissé passer, histoire de donner un effet à son discours. - Vos supérieurs n'ont aucune nouvelle de votre unité, ils commencent probablement à vous penser morts et je n'ai, pour l'instant, laissé filtrer aucune information par rapport à votre arrivée dans ce complexe. Le tableau se dessinait gentiment dans ma tête. L'ambiance s'est refroidie et les scribes ont cessé d'écrire pour me fixer sans expression. Le colonel a laissé passer un nouveau silence avant de reprendre. - Vous et votre équipe êtes intervenu sur une zone de combat qui n'est pas assignée à votre régiment sans qu'aucune information ne nous soit transmises avant ce matin. Le troisième petit silence faisait moins d'effet. A vrai dire, on se lasse à force, faut pas abuser des effets dramatiques. - Quelle était la cible de l'opération ? a-t-il répété lentement, détachant bien chaque syllabes. --------- Le début d'un texte assez long dont les suites arriveront bientôt. j'essaiera de poster régulièrement. Merci de ne pas pester sur le peu d'information que dévoile ce récit (notamment sur le lieu, les personnages etc...) c'est volontaire. Modifié le 19 novembre 2010 par cyrius Citer Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
sebastus Posté(e) le 11 novembre 2010 Partager Posté(e) le 11 novembre 2010 Bonjour cyrius ! Il me semble avoir déjà lu un de tes textes il y a quelques temps, je me trompe ? Mais bon, interessons nous à ce texte plutôt. Il est très agréable, relativement bien aérer, même si le manque d'informations, même s'il est volontaire, est relativement gênant selon moi. Le début est censé être accrocheur, pour qu'un maximum de lecteurs veuillent suivre l'intrigue, mais là on est dans le flou et ça peu en décourager certains. Autrement, il y a des problèmes parfois importants et qui gênent la lecture au niveau des temps. Tu utilises du passé composé, du passé simple, de l'imparfait et du présent, mais ils ne sont parfois pas à la bonne place, rendant les phrases lourdes et maladroites. Par exemple, la phrase "Le militaire a fini par se taire. Son supérieur a caressé sa grosse barbe grise bien entretenue, a jeté un oeil à la copie des scribes, puis a finalement congédié le troufion d'un geste." sonnerait bien mieux avec "Le militaire finit par se taire. Son supérieur caressa sa grosse barbe grise bien entretenue, jeta un oeil à la copie des scribes, puis congédia finalement le troufion d'un geste." Tout du moins c'est mon avis ^^ Autrement l'intrigue semble intéressante, je suivrai ce texte de près Citer Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
shasel Posté(e) le 12 novembre 2010 Partager Posté(e) le 12 novembre 2010 (modifié) Ah,sa faisait longtemps que j'attendais d'avoir des nouvelles de tes écrits!ravi de voir que tu ne nous à pas abbandonné! Donc en gros ,c'est bien écrit,les fautes sont rares,le style d'écriture est agréable et humoristique. Néamnoins,je me permet de remarquer un petit point:j'ai déjà vu un type avec une cote pété et enfonçé presque jusqu'au poumon et je peut t'assurer que dans ce genre de cas,tu te déplace pas comme ça,meme si t'est l'homme le plus dur du monde:sur de courte distance,oui,mais dès qu'il sagit de passer un kilomètre,c'est fini Modifié le 20 novembre 2010 par shasel Citer Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
cyrius Posté(e) le 19 novembre 2010 Auteur Partager Posté(e) le 19 novembre 2010 Bonjour, je poste la suite avec un jour de retard (j'essaiera de poster chaque jeudi afin de garder un rythme et une régularité, ce qui manque souvent dans mon travail). J'assume totalement la lenteur du début, l'histoire est assez longue. Un grand merci pour vos critiques, j'essaie de les prendre en compte le plus possible pour ce texte qui subira surement quelques évolutions (positives je l'éspère) au fil des publications. Merci de l'attention que vous y portez. 2. Je me suis finalement assis en face de lui, lassé de faire les cent pas. Il dormait depuis plusieurs heures, je ne risquais rien en le réveillant maintenant. - Nous sommes presque arrivés monsieur, ai-je murmuré. Pas de réaction. J’ai attendu quelques secondes avant de répéter, en parlant cette fois à haute voix. - Nous sommes presque arrivés monsieur. - J’ai beau avoir le double de votre âge Vrik, je ne suis pas sénile pour autant. Pas besoin de me rabâcher les oreilles, je vous ai entendu. Profitant que les siens étaient toujours fermés, j’ai levé les yeux au ciel dans un discret soupir. Pourquoi est-ce que je me laissais encore avoir après tant d’années ? « Un inquisiteur ne dort jamais monsieur Vrik, il veille silencieusement. » m’avait-il dit lorsque j’étais entré à son service, dix ans plus tôt. Dès le moment où il avait accroché l’insigne de son ordre sur mon uniforme, j’avais ressenti une fierté incomparable. L’euphorie de concevoir que mon rêve se réalisait : Rallier les rangs d’un ordre prestigieux pour servir au mieux le divin empereur. Avoir l’opportunité de faire démonstration de mes talents en l’honneur d’une cause juste. Mais surtout, éviter le déshonneur de me retrouver parmi les rejetons plébéiens de la garde impériale. Se retrouver dans une escouade d’intervention, dans un régiment éloigné, rejoindre des rangs innombrables et anonymes, je n’osais imaginer pareil scénario à ma sortie de la Schola progenium. - Je vous ai déjà dit de modérer ce mépris envers la garde impériale. Elle ne vous apportera rien de bon. Les paroles de l’inquisiteur me sortirent de ma rêverie dans un brusque sursaut. Il s’était levé de son siège et me fixait intensément de ses yeux clairs, me transperçant du regard. J’ai hésité un instant, le temps de me rappeler une énième fois de ne plus rien penser à proximité de ce télépathe chevronné. J’allais lui présenter mes excuses lorsqu’il ouvrit la porte de sa cabine, sortant sans m’attendre. Je lui emboîtai le pas. - Vous semblez ignorer une réalité primordiale monsieur Vrik. La garde impériale est une digue, un barrage contre le flot incessant d’ennemis qui assaille l’imperium. Sans le sacrifice quotidien de milliards de soldats, l’humanité serait réduite à néant trop vite pour avoir le temps de le dire. Il s’est arrêté devant l’une des nombreuses fenêtres de l’appareil. On y découvrait un paysage désolé de ruines infinies, un désert de cendres et de gravas s’étirant jusqu’à l’horizon. La navette survolait ce qui avait dû être une immense zone industrielle. Quelques bâtiments tenaient encore debout, couvert de poussières, éprouvés par la guerre. - Je ne vous demande pas de montrer un quelconque respect. Je vous demande de ne pas oublier l’importance avérée de ces hommes. Il s’est tourné vers moi, m’a jaugé du regard. Ses yeux d’un bleu extrêmement pâle fascinaient et terrifiaient à la fois. Lentement, d’une voix froide, il poursuivit. - Votre vie même sera amenée un jour à reposer sur la vaillance de ces anonymes soldats. Ne l’oubliez pas. Je suis resté silencieux, me contentant de hocher la tête en signe d’assentiment. A l’horizon, dressé soudainement au milieu de ce panorama ravagé, se dessinaient les puissantes fortifications d’un complexe fortifié. Reprenant un ton plus détendu, mon maître s’est remis à parler. - Dites à Lucinius de venir, vous m’accompagnerez tout les deux. Que les autres restent dans la navette, nous n’en aurons pas pour longtemps. J’ai acquiescé silencieusement avant de repartir d’un pas rapide vers les cabines. ***** Je n'arrivais pas à croire qu’un complexe fortifié aussi immense, aussi bien défendu et aussi important propose des dortoirs aussi répugnants. La logique voudrait qu’on ne fasse pas la fine bouche après avoir ronquer pendant une semaine dans la bouillasse et le froid, mais là c’était une atteinte au moral des troupes ! De la poussière au sol à n’en plus se voir les pieds aux lits métalliques plus rouillés qu’une chimère Corronienne, tout était repoussant. J’ai quand même pris le soin de remercier sans conviction mon guide (avec qui je commençais sérieusement à sympathiser, en dépit du manque de conversation) avant de me traîner lamentablement jusqu’au plumard libre le plus proche. J’allais dormir un mois, puis me reposer un peu en attendant l’heure de la sieste. Et puis me prendre ensuite un steak de grot, cuit et sans asticots, avec de la sauce dessus et tout. Et comme je l’avais bien mérité, une bonne mousse bien fraîche. Tout ça bien sûr au bord d'un lac paisible, dans une planète en paix remplie d'autochtones avenantes. Après un somme plus court que prévu et des rêves non réalisés, je me suis décidé à ôter mon équipement. Mon treillis a fini de se déchirer, les deux jambes ne tenaient plus que par une mince ligne de tissu. Le gilet me rappelait étrangement un terrain miné ayant subi un bombardement. Quand à la cape, eh bien disons qu’elle avait dû être jadis de couleur kaki. Une douche salvatrice me délesta d’un bon kilo de crasse et une sublime surprise m’attendait à mon retour dans le dortoir : des fringues propres. Un ensemble treillis pile à ma taille (juste un peu limite au niveau de l’entrejambe). Alors que je me réjouissais d’avoir à nouveau visage humain, un grand type en débardeur s’est levé d’un des lits et m’a interpellé avec enthousiasme. - Je te connais pas toi ! T’es nouveau ? Le gaillard atteignait sans problème les deux mètres. Tellement bardé de muscles que ça devait l’encombrer. Sa carrure d’ogryn sous anabolisants contrastait avec sa bouille ronde d’énorme chérubin. - Je suis de passage, lui ai-je répondu, ne trouvant rien d’autre à dire. - Je me disais aussi. T’as une bonne tronche de baroudeur. Comment tu t’es fait ça ? Mécaniquement, j’ai passé une main sur ma joue, pour sentir la longue entaille qui la creusait de haut en bas. La plaie était refermée depuis des années, mais il fallait toujours un couillon pour me rappeler indiscrètement sa présence sur ma tronche burinée. - Je me suis cogné dans une porte, ai-je répondu dans l’espoir de clore la conversation. Le colosse s’est contenté de ricaner bêtement avant de faire quelques pas vers moi. Il avait envie de tailler le bout de gras apparemment. - D’où tu viens ? - Des douches. Cette fois il n’a pas ricané. Sa grosse bouille infantile a essayé de former un air sérieux et insistant. J’ai laissé passé un long silence en le fixant. Le genre de silence que même les mouches osent pas troubler. L’animal n’a pas bronché, me fixant sans relâche de ses yeux de poisson mort. - 89e compagnie du 18e Corronien. Tu veux mon numéro de matricule et le code d’accès aux toilettes du régiment aussi ? - Infanterie ? a-t-il interrogé comme si ce point était crucial pour lui. J’ai acquiescé d’un hochement de tête et ses sourcils se sont froncés un peu plus. Ca en devenait ridicule, sa tronche de nourrisson dopé était vraiment inadaptée et son expression, qu’il voulait sûrement intimidante, rappelait un morveux constipé. Seul ses bras, large comme un obusier, m’empêchaient de me foutre de lui. Il devait en tout cas avoir quelque chose contre la gouaille piétonne, je me suis empressé d’ajouter : - Reconnaissance. Son visage s’est éclairé pour retrouver la bouille béa et enthousiaste de la minute précédente. Comme s’il s’agissait d’une évidence, il en a déduit : - Un sniper ? Nouveau hochement de tête de bibi. Réapparition du sourire infantile. L’ambiance se réchauffait brutalement. - Mon frère aussi est dans la reco. Il est sergent dans la 54e compagnie. Il a fait encore un pas vers moi puis m’a tendu sa grosse main d’un geste vif. - Je m’appelle Max. 49e compagnie du 3e Varrénien. 2e peloton de cavalerie, a-t-il conclu avec fierté. - Cyrus ai-je répondu, lui cédant finalement un sourire. Le bougre me plaisait bien et malgré son physique de bête de foire (qui me faisait ressentir de la pitié pour le pauvre canasson qui devait trimballer ce tank), il me rappelait les clichés qui circulaient dans les dortoirs à propos des types de la cavalerie. Fiers, Impressionnants, d’une intelligence relative à leur monture et méprisant envers les fantassins. Assis sur les plumards poussiéreux du dortoir, nous avons refait le monde pendant plus d’une heure. Il me racontait la séparation de son frère et lui au recrutement. Ancien garçon d’écurie, le choix avait été vite fait alors que son frère, un type très futé selon lui, était vite passé officier. Il en était à me parler de son monde natal, une planète agricole dans l’Ultima Segmentum, lorsque la porte du dortoir s’est ouverte violemment. Un jeune soldat en uniforme, raide comme un piquet, est entré avec cérémonie puis nous a salué, solennel comme la mort. - Deuxième classe Alhitus au rapport, Caporal. Un message du Colonel Ratsen. J’ai juré silencieusement en me demandant ce qui se passait encore. Le jeunot m’a tendu un papier plié, sur lequel figurait l’aigle impérial. Ce n’était pas une convocation, mon rapport avait du lui suffire. Je ne pouvais le croire assez stupide pour me renvoyer au front dans mon état et il devait bien être au courant de l’impossibilité d’envoyer en opération un soldat qui n’appartenait pas à son régiment. Le gros Max me regardait sans expression, tournant sans arrêt son regard entre le cadet et moi. « Caporal, Votre rapport est en ce moment examiné par l’état-major, qui décidera en temps voulu des mesures à prendre. Conscient de votre état de santé actuel, mais aussi de l’impossibilité avérée de vous renvoyer au sein de votre régiment dans les jours qui viennent, j’aurai besoin de votre expérience. Demain matin, première heure, Bloc F du complexe. Vos états de service et vos talents vont être mis à contribution afin de… » J’ai lu, j’ai relu, je ne l’ai pas cru. Levant mes yeux vers le jeunot, je l’ai finalement interrogé d’une voix peu amicale. - C’est une blague ? Citer Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
Wolf's Shadow Posté(e) le 21 novembre 2010 Partager Posté(e) le 21 novembre 2010 (modifié) wahou ! j'adore ton recit ! Vivement le suite ! La personnalité de ton sniper est juste excellente ! Bonne dose d'humour et de détachement, ca gars la me plait ! Modifié le 28 novembre 2010 par Wolf's Shadow Citer Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
gwen93 Posté(e) le 21 novembre 2010 Partager Posté(e) le 21 novembre 2010 Super, J'aime bien ton récits comme dit plus haut il y a une bonne dose d'humour et il faut le dire le protagoniste (sniper) est trés attachant,c'est un bon bougre!! Je suis moi-même impacient de lire la suite. En bref continue de nous ravir! Citer Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
cyrius Posté(e) le 26 novembre 2010 Auteur Partager Posté(e) le 26 novembre 2010 (modifié) Episode un peu plus court cette semaine, on entre dans le vif du sujet à partir de la semaine prochaine. bonne lecture. 3. En presque neuf ans de service, j'en ai vécu des choses terrifiantes. J'ai vu des bestioles de la taille d'un Leman russ encaisser une roquette anti-chars sans broncher. J'ai subi le feu nourri d'une batterie d'autocanons, abrité derrière une plaque d'acier à peine plus épaisse qu'un plateau de cantine. Je suis même tombé nez à nez, sans arme, alors que je venais de couler un bonze, avec un ork de trois bonnes têtes de plus que moi. On peut donc, et je le comprend tout à fait, se poser des questions lorsque je dis que j'étais carrément flippé devant cette drôle d'assemblée. Pourtant, une bande de cadets en tenue de parade, dont pas un seul ne doit dépasser les vingt ans, qui vous fixe droit dans les yeux, au garde-à-vous, avec sur leur tronche puérile un demi-sourire teinté d'enthousiasme, franchement je vous jure que c'est à se faire dessus. Il y avait tellement de ferveur, tellement de fierté sur leur bobine que si un officier avait demandé un volontaire pour servir d'obus dans la prochaine salve d'artillerie, ils se seraient mis sur la gueule pour en être. Un tatouage sur leur front qui aurait indiqué "Impatient de se faire déchiqueter pour la cause" (écrit en petit certes) ne m'aurait même pas semblé anormal. Un homme d'un certain âge, qui semblait porter ses galons de sergent comme un fardeau, s'est approché avec un petit sourire affaibli. - Heureux de vous voir Caporal, le colonel m'a averti de votre venue. Il a fait un quart de tour pour faire face aux cadets et a repris sur le ton d'un vieux prof enjoué. - Messieurs, je vous présente le caporal Cyrus Malron du 18e Corronien. Sa longue expérience de tireur d'élite et ses états de service dans la reconnaissance ne sont plus à démontrer et nous avons trouvé intéressant qu'il puisse partager son savoir avec vous, qui aspirez à une carrière de sniper. Les bambins ont tourné à nouveau leurs yeux pétillants vers moi, dans un sourire général encore élargi. Flippant j'vous dis. Le sergent s'est à nouveau adressé à moi, d'une voix basse, à la limite du chuchotement, comme s'il allait me confier un secret qui lui tenait à coeur. - Voilà caporal. Vous avez devant vous la fine fleur des cadets Varrénien, sélectionné pour leurs aptitudes et leur sens moral. Montrez leur quelques trucs de vieux loup, pas besoin d'aller trop en profondeur. Je vous ai laissé du matériel sur le bureau. Bon courage. Après un dernier sourire qu'il devait vouloir encourageant, il m'a tapé sur l'épaule amicalement puis est sorti, me laissant seul avec les rejetons modèles. Sur le bureau, le "matériel" n'était en fait qu'un long-las sur trépied. Je l'ai inspecté un moment, comme pour retarder l'inévitable. Pour quelqu'un qui n'a jamais eu à disserter devant un public, se retrouver sous le regard attentif et enthousiaste d'une trentaine de cadets en uniforme est un exercice dangereux. Encore plus lorsqu'il s'agit de parler d'une doctrine militaire sur laquelle on a craché toute sa vie. Et lorsque l'auditoire entier considère la dite doctrine comme une ligne de conduite insurpassable, ben c'est la merde. J'ai finalement trouvé par où commencer. - Qui d'entre vous pourrait me décrire en détail cette arme ? ai-je demandé sans conviction. Je cédais à la facilité, laisser parler les jeunots me laisserait tout le loisir de me taire. Moins je l'ouvrirais, moins je leur dirais de conneries. La moitié des cadets ont levé la main sans hésiter. J'ai fait un signe de tête à l'un d'eux, dont la tronche me revenait. Avec son air moins infantile et euphorique, Il me paraissait avoir un peu plus de bon sens que ses camarades. Il s'est levé d'un bond, puis s'est mis à réciter comme un écolier à qui on vient d'apprendre une prière à l'empereur. - Le fusil long-las est une version amélioré du fusil laser Triplex modèle Mars. Son système énergétique optimisé a été conçu pour offrir des tirs de puissance et de pénétration accrus. Il se compose d'une lunette de visée type MXV, d'un système de suspenseurs automatique et d'un trépied modulable. Rechargement rapide, cadence de tir élevée, il permet des tirs précis jusqu'à une portée avérée de mille cinq cents mètres. Il utilise un système de... Faut pas se fier aux apparences finalement. Je l'ai interrompu d'un geste. Il s'est tu quasi automatiquement (heureusement pour lui, dans le cas contraire il aurait probablement réceptionné un objet lourd et contondant avec sa tronche) et le silence est retombé dans la salle. Ca n'allait pas être simple. - Bon on va faire ça autrement, ai-je commencé en hésitant. Les morveux étaient suspendus à mes lèvres, prêt à boire tout ce que je leur baverais. - Qui pourrait m'expliquer ce qu'est un sniper ? Après un petit moment d'hésitation, l'un d'eux à lever la main. Je lui ai fait un signe de tête et, se levant à son tour, il m'a répondu sans assurance. - Un très bon tireur capable, grâce à une arme adaptée, d'abattre une cible à grande distance, Caporal. J'ai souri malgré moi, j'avais enfin trouvé comment m'y prendre. - Ce que tu me décris est un tireur d'élite, soldat. Pas un sniper. J'aimerais la définition d'un sniper. L'auditoire a émis un murmure d'incompréhension, certains cadets se regardèrent entre eux. J'avais réussi à les mener là où je voulais. Le jeunot, toujours debout, m'interrogea avec hésitation. - Sauf votre respect Caporal, ne s'agit-il pas de la même chose ? Un sniper est un tireur d'élite non ? - Absolument, ai-je répondu avec enthousiasme. Un sniper est de toute façon un tireur d'élite. Mais un tireur d'élite n'est pas forcément un sniper. Nouveau murmure dans les rangs, je piaffais intérieurement. Ce cours n'allait peut-être pas être aussi désagréable que ça finalement. - Messieurs, votre sergent m'a vanté vos compétences. Vous avez probablement été remarqué pour vos prouesses aux exercices de tirs. Vous savez comment manier un fusil. Vous pouvez monter et démonter une arme les yeux bandés. Dans moins d'un an, vous obtiendrez probablement une place dans les escadrons de reconnaissance. On vous confiera un fusil comme celui-ci, ai-je conclu en montrant le long-las. Vous serez alors des tireurs d'élites, amenés à tenir des points stratégiques, à soutenir l'avancée de vos camarades de l'infanterie, à opérer en éclaireur. Un sourire débile s'est greffé sur la bobine de plusieurs d'entre eux. Ces crétins y croyaient tellement qu'ils oubliaient le fait qu'un sur deux allait finir en charpie, les tripes à l'air, la cervelle au vent, sous les salves d'artillerie d'un champ de bataille quelconque avant même de passer garde. J'ai laissé passé un silence, histoire de donner plus d'effet à la suite. - Un sniper ne se contente pas de se terrer au dernier étage d'un immeuble ni d'abattre une cible isolée à plus d'un kilomètre de distance. Un sniper n'est pas un tireur embusqué. C'est une ombre dans le noir, une rumeur dans les rangs ennemis. Une détonation soudaine dont on ne connaît pas la provenance. Un sniper est un gravier dans un tas de gravas, un brin d'herbe dans une prairie. Nouveau silence, le temps d'apprécier les quelques regards ahuris et hypnotisés de la troupe. - Serez-vous capable de passer trois jours immobiles sans manger, sans sourciller, sans pisser ni chier ? Aurez-vous la patience et le sang froid nécessaire lorsqu'il faudra plus de vingt-quatre heures pour parcourir un kilomètre ?Arriverez-vous à bloquer votre respiration et à ne pas trembler, la peur au ventre, sous une température de moins quarante ? Re-silence, putain je m'adore. Les gamins se bavaient presque dessus, je les avais dans la main, encore un peu et j'allais pouvoir en faire ce que je voulais. - Et dans l'éventualité où vous aurez le potentiel suffisant pour faire tout ça, aurez-vous toujours assez d'énergie et de concentration pour atteindre une cible en pleine tête, à mille huit cent mètres de distance, dans un angle de tir aussi étroit qu'un trou de balle de ratling ? Et vlan, remonte ton froc gamin. Tout enthousiasme avait disparu et l'intégralité des cadets affichait des tronches d'enterrements. Dénué de toutes leurs illusions initiales, ces morveux redevenaient malléables. Abandonnant le rôle de l'instructeur zélé pour reprendre un ton qui me ressemblait plus, j'ai repris d'un ton calme. - Savoir manier un fusil est une chose, connaître l'environnement et savoir... La porte de la salle s'est ouverte d'un coup, m'interrompant sans s'excuser. Le colonel est entré d'un pas pressé, accompagné de trois gugusses. Les cadets ont salué, raides comme des manches à balai, alors que le colonel me montrait du doigt, apparemment à l'intention de ses trois compères. Celui de droite traînait la patte comme un vieux chien, usé par les années. Enroulé dans une vieille robe noire d'un tissu probablement très cher, il faisait sénile et rachitique. Son petit crâne émacié et imberbe portait une paire d'yeux couleurs charbon semblant éteints. A coté de lui, son contraire parfait. Un type assez jeune, des cheveux noirs en brosse, dans une armure carapace presque trop petite pour sa carrure de jeune athlète. Pas de galons apparents mais son expression méprisante et son regard glacial me faisait penser à ces guignols des troupes de choc. Probablement sorti de je ne sais quelle haute école militaire pour ramasse-merde de la haute. J'ai finalement posé mon regard sur le dernier et le plus grand des trois arrivants. Engoncé dans une armure de cérémonie et drapé d'une longue cape noire, le type pouvait tutoyer les deux mètres dix sans problème. Son visage taillé dans le bois brut accusait un âge certain, mais son regard de commissaire mal luné contrastait avec la sénilité de son compère. Il avait quelque chose d'impressionnant, d'intimidant. Probablement ses yeux horriblement pâles qui semblaient me passer au rayon x. Ou peut-être était-ce simplement le symbole de l'inquisition qu'il arborait fièrement sur son plastron... Modifié le 26 novembre 2010 par cyrius Citer Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
TazangeL Posté(e) le 26 novembre 2010 Partager Posté(e) le 26 novembre 2010 Salut et bravo je poste rarement voir trés rarement mais franchement ton texte est excellent, je passe sur la ponctuation la syntaxe et tous les salmigondis de la langue française ... j'y connais que dalle . mais par contre les image suscité par ton histoire dans mon imaginaire son excellente continu et fait moi rêve. PS : excusé la piètre qualité de mon intervention je ne suis qu'un fou rêveur au fond de sa cambrousse. Citer Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
gwen93 Posté(e) le 1 décembre 2010 Partager Posté(e) le 1 décembre 2010 Salut, J'aime bien ton histoire:C'est frais,le sniper est super,son charactère est super rèaliste et marrant, quand au cadets je l'ai imaginais exactement comme cela : Impatient d'en découdre éssayant toujour de supassé son voisin pour finalement finir a charpie sur le chant de bataille! En tout cas,continues comme cela. Aller @+ Citer Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
haldu Posté(e) le 1 décembre 2010 Partager Posté(e) le 1 décembre 2010 Pas mal comme histoire. Je n'ai absolument rient à redire, c'est très bien écrit. Citer Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
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