Aller au contenu

[Nouveautés] Contes Magiques


Magnan XXIII

Messages recommandés

Bonjour à tous,

La traduction du Livre de Magie complet avançant doucement, je vous proposons de découvrir un extrait, de temps en temps, pour vous faire patienter.
Traduction aux soins de @Golemcide.

 

Vous pouvez retrouver le sujet principal sur le forum du 9e Âge: http://www.the-ninth-age.com/index.php?thread/23091-contes-magiques/

Modifié par Fenrie
Lien vers le commentaire
Partager sur d’autres sites

Marrons grillés, un conte magique

 
 
 
 
Voici une excellente question. Dans ma jeunesse, je n'aspirais à rien de plus qu'à maîtriser le bois et les plumes ; j'étais l'apprenti de mon père, qui fabriquait des flèches comme son père avant lui. Pourtant, j'en vins à aspirer à autre chose.
 
La vocation particulière pour ma carrière future remonte à une froide journée d'hiver, où je m'étais éloigné de la route du village. Perdu et effrayé, je m'arrêtai pour me reposer, au milieu d'arbres noirs et sans vie, sur un sol tapissé de feuilles gelées. J'aperçus au loin une silhouette inconnue et courus vers elle ; je découvris une très vieille femme encapuchonnée, soutenue par son bâton de marche.
 
- « Qui va là, hein ? », croassa-t-elle à mon intention.
 
- « Gente Dame », répondis-je, « je cherchais de l'aide pour retrouver le chemin de ma maison, mais je vois que c'est peut-être à moi de vous prêter assistance. Où allez-vous, si je peux me permettre de vous le demander ? »
 
- « Hein ? Fous l'camp ! » répondit-elle, des mots dont je me souviendrai toute ma vie. Elle s'éloigna de moi en titubant puis se retourna soudain.
 
- « Écoute p'tit monsieur, t'aurais pas deux sous pour une vieille dame, hein ? Tu m'achèterais pas des marrons ? » Plongeant une main sale et ridée sous son manteau, elle en extirpa un sac de cailloux carbonisés qu'elle m'agita sous le nez.
- « Les derniers d'la saison, grillés à point. Une occasion à pas manquer, hein ? »
 

c227e871c7edea7f626c61ab1daaef2d.png

Je considérai mes options.
- « Prenez ces quelques sous », décidai-je. « Mais gardez les marrons. Dites-moi simplement comment retrouver la route de Tréfonds-de-Taloche. »
 
Elle rafla les pièces dans ma main et les glissa dans ses vêtements avec une célérité prodigieuse, me lorgnant d'un œil suspicieux et mauvais.
- « J'connais pas d'Taloche », dit-elle. « Mais y'a une route, au-d'ssus de... » Elle s'arrêta net, et son expression s'assombrit encore.
- « Tu d'vrais te mettre en ch'min, gamin. File. File ! » Elle commença à me repousser en criant.
 
Avant que je ne puisse bouger, il y eut un bruit effroyable de sifflement, comme une bouilloire, et un arbre céda à sa base pour s'effondrer sur nous. Je me souviens avoir aperçu une autre silhouette dans les ombres, nimbée d'une aura d'un vert vif. Mais le gigantesque tronc qui tombait emplit tout mon champ de vision... Jusqu'à ce que l'arbre entier éclate en milliers d'échardes embrasées, alors que le souffle d'une énorme boule de feu faisait décoller mes pieds du sol.
 
Lentement, le silence revint. En levant les yeux, je vis des volutes de fumée qui s'élevaient doucement de la vieille femme, complètement imperturbable. Comme elle se tournait pour faire face à l'intrus nimbé de vert, je compris que j'étais en présence de véritables magiciens et ne pus m'empêcher de penser aux histoires que j'allais raconter en rentrant à la maison. Personne au village n'avait jamais vu la magie à l'œuvre.
 

dfbbe91500fad2a4c8ac1d8d0260ed64.png

- « Éric ?! », dit-elle avec irritation. « Qu'est-ce donc qu'un imbécile fini comme toi fait ici ? Encore en train d'essayer d'me tuer, à c'que j'vois. »
 
- « Bien entendu », rétorqua le [lexicon]mage[/lexicon], avançant d'un pas avec un demi-sourire sur le visage.
- « Je suis sûr que vous n'en prendrez pas ombrage. C'est pour ne pas perdre la main, vous savez ce que c'est. A présent, si vous n'y voyez pas d'objections, j'ai un village à brûler. Il faut bien faire des sacrifices, après tout. »
 
- « Hé ? Ce s'rait pas ce Tréfonds-de-Taloche dont j'n'arrête pas d'entend' causer ? Pas touche. »
 
- « Ha non ? »
 
- « Non. Maintenant passe ton ch'min avant que je ne t'ébouillante la couenne. »
 
- « J'ai bien [lexicon]peur[/lexicon] qu'il ne faille plus que quelques menaces stériles pour... »
 
Coupant court à sa phrase, la vieille femme leva une main noueuse et déversa un flot de matière en fusion dans la direction du [lexicon]mage[/lexicon], qui releva le bras, prononçant à la hâte des paroles de protection pour empêcher sa peau de cuire et fondre. Plusieurs arbres proches prirent feu.
 
- « Tu disais ? » croassa la dame, comme si elle venait de remporter un pli aux cartes, appuyée sur son bâton avec un air suffisant.
 
Toujours entouré de son halo vert, Éric ferma les yeux et plaça ses mains devant lui, les paumes tournées vers le sol. Cette posture, je la reconnais aujourd'hui comme celle d'un magicien qui évalue les ressources surnaturelles disponibles aux alentours.
 
Il ouvrit les yeux et sourit sombrement.
- « Si vous insistez, madame », dit-il en faisant une révérence, « je peux mener mes activités ailleurs ».
 
- « Oh oui, tu peux », grinça-t-elle. Quand je regardai derrière moi, Eric était parti. La vieille dame commença à s'éloigner en claudiquant, elle aussi.
 
- « Attendez ! », criai-je en me remettant enfin debout, les vêtements et la peau couverts de suie et de terre.
« Vous avez sauvé mon village parce que je vous ai donné ces pièces, n'est-ce pas ? »
 
Elle se retourna, l'air surpris.
- « Qui c'est, ça ? Oh. Toi. J't'ai pas d'mandé de fout'le camp ? Tu penses que j'me donnerais toute cette peine pour que'ques sous ? T'es aussi bête que le vieil Eric. »
 
Elle recommença à s'éloigner d'un pas traînant, sa silhouette sombre disparaissant entre les arbres dont les feux s'évanouissaient rapidement dans l'air froid. Je considérai les choses merveilleuses dont je venais d'être témoin, et à ce moment désirai de tout mon cœur être né avec de tels dons. Comme si elle m'avait entendu, la voix de la vieille femme revint, étouffée mais intelligible, comme portée par les vents de l'hiver :
- « C'est pas que'que chose que tu r'çois à la naissance ! », cria-t-elle. « C'est que'que chose qui s'apprend. »
 
Je ne la revis jamais. Mais j'ai appris que Bourg-Taloche, le village suivant en longeant la rivière, avait brûlé jusqu'aux fondations dans des circonstances mystérieuses, deux jours plus tard.
 
Réponse de l'Archiduc Karl Ferdinand, Président du Conseil Impérial des Magies, lorsqu'il lui fut demandé à quel moment il sut qu'il voulait devenir magicien.
Lien vers le commentaire
Partager sur d’autres sites

Invité
Ce sujet ne peut plus recevoir de nouvelles réponses.
×
×
  • Créer...

Information importante

By using this site, you agree to our Conditions d’utilisation.