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[AoS][VO] Critiques Nouvelles Age of Sigmar


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Nouvelle semaine, et nouvelle semaine thématique de la Black Library (il faut tenir le rythme, franchement). Ça se passera uniquement sur ce sujet cette fois-ci, le thème étant "les personnages d'Age of Sigmar" (sorry grimdark fans!). On commence avec une figure qui bénéficiera bientôt de son propre roman: Haldenarr Fall.

 

Crown of Flames - N. Van Nguyen :

Révélation

Crown of FlamesLe chef de tribu Heldanarr Fall s’embarque dans une chasse au monstre à la demande expresse de trois sorcières de sa tribu, qui ont prédit qu’un grand malheur s’abattrait sur les farouches nomades d’Aqshy à moins qu’un héros ne tue une bête maléfique qui hante une montagne toute proche. Comme la montagne en question se balade littéralement à travers les Royaumes Mortels (ce qui pose la question de pourquoi il est capital pour Fall de régler ce problème maintenant, puisqu’il partira de lui-même sous peu…), notre Beowulf au masque de fer – c’est le look officiel de son peuple, apparemment – se prépare à une ascension expresse du mont du destin, car il n’a qu’une nuit pour accomplir son exploit, sinon… Il devra revenir à pied, j’imagine. Refusant mâlement l’aide de son sidekick maigrichon (Jujjar), il entame la face Nord de la montagne maudite, et finit par arriver en haut de cette dernière, non sans avoir failli s’écraser en contrebas suite à l’arrivée impromptue d’un condor à deux têtes1.

 

Une fois sur place, il commence à explorer les cavernes alentour à la recherche de sa proie, mais surprend à la place une vampire Soulblight qui a fait retraite ici afin d’épargner son peuple de ses penchants sanguinaires. La demoiselle n’est initialement pas très avenante envers le barbare qui s’invite chez elle sans y avoir été prié, mais la situation se détend franchement lorsque les deux adversaires finissent par se reconnaître. La buveuse de sang est en effet Nadalya Mzhzhenko, une ancienne camarade/quasi love interest (ils se sont baignés ensemble dans des canaux et se sont écrits des poèmes, c’est dire) du temps où ils servaient tous deux dans les armées des cités libres. Changée en vampire à la suite d’un affrontement contre des Soulblights taquins, Nadalya a choisi l’exil pour éviter que ses fringales persistantes ne causent un carnage parmi ses concitoyens. Elle accepte toutefois d’aider son vieux copain Fall à venir à bout du monstre qui réside dans la montagne, un sort persistant de type tête enflammée, et connue sous le nom de Couronne de Flammes.

 

La progression jusqu’à la caverne où la Couronne somnole permet aux deux amis, séparés depuis des années et le départ brutal de Fall du service actif, de se rabibocher entre deux combats contre des tourteaux géants, le barbare allant même jusqu’à avouer à la vampire qu’il l’aime toujours, par portes de fer interposées (je simplifie volontairement sinon on en a pour trois pages). Ces considérations romantiques sont toutefois entravées par tout un tas de problèmes bêtement prosaïques mais néanmoins pressants, à commencer par le fait qu’il n’est pas facile de dissiper un sort persistant. Si Nadalya a bien une idée pour ce faire, cela se fera au prix de sa non-vie. Le chevaleresque Fall laissera-t-il sa chère et tendre se tuer à la tâche, alors que c’est à lui que devrait revenir cet honneur ?

 

Révélation

…Au final, oui. Mais il faut noter qu’entre cette conclusion tragique et le retour d’un Fall bien cuit jusqu’au bas de la montagne, Noah Van Nguyen nous sert une palanquée de retournements de situation, qui tournent autour du dilemme suivant : c’est Nadalya qui est la vraie proie de Fall, mais il l’aime encore (mais pas autant que son peuple), et elle l’aime encore (elle lui propose même de lui donner le baiser de sang pour qu’ils puissent recommencer leur vie sur un – verre à – pied d’égalité), mais finalement c’est pas possible, mais c’est très triste. Au final, la vampirette finit carbonisée par la Couronne de Flammes – qui elle, continue à persister à ce jour, sauf si j’ai raté quelque chose – ce qui compte comme un succès pour notre héros, mais lui laisse un goût de cendres dans la gorge. Approprié, vous ne trouvez pas ?

 

Noah Van Nguyen donne une introduction complexe au personnage de Heldanarr Fall avec ce ‘Crown of Flames’, qui révèle le passé tourmenté et la psychologie tortueuse de ce héros du peuple embarqué dans une lutte sans merci, et bientôt chaotique, contre le colonialisme azyrite. Les multiples retournements de situation du dernier tiers de la nouvelle, et la place très importante que laisse l’auteur à des considérations romantiques (ce qui est assez rare dans la GW-Fiction, faut-il le faire remarquer ?), peuvent dérouter le lecteur habitué au hack & slash qui constitue le gros des publications siglées Age of Sigmar, mais un peu de variété ne peut pas faire de mal (en tout cas, c’est mon avis). On perçoit également en filigrane de cette quête initiatique le soin apporté par Van Nguyen à créer un univers crédible et concret dans lequel ses personnages évoluent, depuis les rites de la tribu de Farr jusqu’à sa période de milicien dans les armées des cites libres de Sigmar, et cela donne plutôt envie de s’embarquer dans le roman dédié à ce nouvel anti-héros de la Black Library. Intrigant.

 

1 : Pour se venger de sa frayeur, il fait son affaire à l’insistant volatile une fois arrivé à bon port, alors que même que ce dernier était passé en mode PNJ donneur de quêtes. Quelque chose me dit que Fall n’a pas été loin dans Skyrim.  

 

Horror Week 2022J'en profite pour annoncer que le sujet a été mis à jour avec les nouvelles de la Warhammer Horror Week 2022.

  • The Somewhere Sister (J. Lambert)
  • The Gnarled Bough (J. Mistry-Evans)

 

Schattra, Ah Shit, Here We Go Again | Know Your Meme

Modifié par Schattra
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On poursuit avec la première nouvelle de Gary Kloster cette semaine, consacrée à une figure (bien) connue de la Black Library, qui nous revient après quelques mois d'absence avec quelques copains.

 

Memories of Blood and Sand - G. Kloster :

Révélation

Memories of Blood and SandNeave Blacktalon et sa fine équipe de Stormcast Eternals de choc ont été missionnés pour récupérer un artefact magique, le Sandken, dérobé par un mage de bataille pendant la bataille d’Ashfork. Bien que le voleur en question (un petit gars du nom de Tareth Vir) ait permis aux forces de l’Ordre de remporter l’affrontement grâce au déchaînement élémentaire (mon cher Watson) qu’il fit s’abattre sur les Khorneux d’en face, cet emprunt non réglementaire d’un talisman aussi puissant ne peut être toléré. Charge donc à Neave (DPS close), Rostus (Tank), Hendrik (DPS close aussi, mais moins bien forcément) et Shakana (DPS range) de localiser le fifrelin, de le mettre hors d’état de nuire et de restituer le Sandken à ses propriétaires légitimes. Bien que Shakana ne soit pas franchement emballée par cette mission, qu’elle considère comme indigne des talents très spéciaux des Blacktalons, la séniorité de Neave (un peu) et la bonhommie de Rostus1 (beaucoup) permettent à la fine équipe d’éviter une prise de bec stérile et de se mettre à pied d’œuvre sans tarder.

 

Aidée par une mage d’eau (Lorai) dont le principal intérêt est de pouvoir lancer le sort Brumisateur de zone sur le groupe – toujours appréciable quand on se balade dans Aqshy – nos héros se rendent dans le village de Karis (et non le village de Kaaris, qui est Sevran, en Hyish), où le mage renégat a été localisé pour la dernière fois. La première confrontation se passe assez mal pour les Blacktalons : bien qu’ayant réussi à approcher leur cible malgré la tempête de sable qu’elle avait créée pour préserver son intimité, les Stormcast réalisent rapidement que Tareth Vir, en dépit de son apparence famélique, est un mage de haut niveau. Grâce aux pouvoirs du Sandken, et un effroyable malus de -13 à la touche, le sorcier parvient sans mal à se sortir de l’embuscade tendue par Neave et Cie, fracassant le genou (et le marteau) de Rostus au cours de l’échauffourée. 1-0 pour le local de l’étape.

 

Pendant que ses camarades passent les alentours au peigne fin pour tenter de localiser leur cible, Rostus récupère dans le village d’à côté, ce qui va heureusement assez vite pour un Élu de Sigmar. Alors qu’il clopinait dans les ruelles, il vient au secours d’une autre éclopée, Belil (en terre, du coup), qui se faisait bolosser par une bande de gamins des rues pas très au fait de la politique « 0 Bullying » décrétée par Sigmar. Cet acte de charité se révèle rapidement payant pour les Blacktalons, puisque Belil apprend à son gros copain qu’elle n’est autre que la cousine de Tareth Vir. Ce dernier l’a sauvée grâce à ses pouvoirs naissants après que son village ait été rasé par des maraudeurs de Khorne, et elle carbonisée au 3ème degré dans le processus. Il est ensuite parti s’engager dans les armées de l’Ordre pour combattre l’engeance chaotique, et la suite est connue de tous. Info utile : Belil indique aux Stormcasts où se trouvent les ruines de son hameau, où Rostus est persuadé de pouvoir retrouver le sorcier AWOL.

 

Et devinez quoi ? C’est le cas. Tareth Vir souffre en effet d’un PTSD très sévère, et amplifié par l’énergie destructrice qui provient du Sandken, et revit en permanence l’attaque des Lames de Khorne sur son village. Peu enclin à assassiner un héros de guerre traumatisé par ses expériences passées, Rostus obtient de Neave la permission de tenter une approche raisonnée, mais se retrouve rapidement confronté à une armée de maraudeurs chaotiques de sable, conjurés involontairement par Tareth Vir et son joujou arcanique. Fort heureusement, Neave et les autres jouent le jeu jusqu’au bout et viennent aider leur comparse à repousser les apparitions, plutôt que de tenter d’achever les souffrances du mage. En fin de compte, ce dernier est tiré de sa rêverie morbide par la mention de sa cousine Belil par Rostus, ce qui le distrait suffisamment longtemps pour que les Blacktalons puissent le chloroformer en douce, et lui reprendre le Sandken au passage. Mission accomplie sans le moindre kill pour les Griffes Noires, ce qui, pour une fois, était le meilleur résultat possible.

 

Gary Kloster reprend le management de Neave Blacktalon (précédemment coachée par Andy Clark) et lui adjoint quelques camarades de jeu. Le résultat est assez plaisant, ce casting élargi permettant aux différentes personnalités de se répondre et de se compléter (même si Hendrik peine à exister dans cette nouvelle). À ce petit jeu, le Gentle Giant Rostus Oxenhammer brille particulièrement, son altruisme chevillé à l’armure en sigmarite contrastant bien avec la froide efficacité incarnée par sa supérieure hiérarchique, et plus largement le reste de la fine équipe. Ajoutons à cela quelques idées intéressantes de la part de Gary Kloster (qu’arrive-t-il à un Stormcast qui est gravement blessé, mais pas tué ?), une construction narrative peu commune (l’histoire commence par la rencontre entre Rostus et Belil, suivie d’un flashback, puis reprend normalement) et un peu de fluff, et on obtient des débuts prometteurs pour ce qui pourrait être une adaptation du thème de la Band of Brothers (& Sisters) à Age of Sigmar. Ça manquait, il faut bien le reconnaître.

 

1 : Un Stormcast tellement sympa que son surnom est le Géant Rigolard. Et que tout le monde l’appelle Rost.

 

Schattra, "live love laugh"

Modifié par Schattra
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Le 09/11/2022 à 14:38, Miles a dit :

Fichtre! Un happy end avec des goods guy dedans! Ca faisait longtemps!

 

Eh oui! Vivement qu'on ait des nouvelles de Hamilcar pour renverser la tendance. Je crains que ce ne soit pas la deuxième nouvelle de Gary Kloster qui viendra faire triompher la bonté et la justice dans les Royaumes Mortels...

 

Anger and Ash - G. Kloster :

Révélation

Anger & AshDans la famille, que dis-je, la dynastie Volari, je demande le père (Corsovo), la mère (Vasara) et la fille (Nyssa). Puisque nous parlons ici de vampires, il est à la fois tout à fait et pas du tout approprié de parler de liens du sang, même si cette triade entretient des relations assez proches de celles qui unissent les mortels d’un même foyer. L’histoire commence par la sale blague que joue Nyssa à une bande de maraudeurs nomades rôdant dans les Plaines Brisées, et ayant pris la frêle jouvencelle qu’elle semble être pour une proie facile. GROSSE erreur, bien évidemment, dont pas un ne sortira vivant. Son tour pendable accompli, Nyssa revient au bercail avec ses victimes (sauf une, qu’elle a essayé de transformer en Zombie, avec des résultats aussi décevants qu’à l’accoutumée – ce n’est pas vraiment son point fort dirons-nous), pour le plus grand plaisir de son pôpa, et sous le regard désespéré de sa môman, qui s'obstine à (tenter de) lui enseigner l’art subtil et délicat du swag. En vain jusqu'ici.

 

Avant que l’intrigue tourne à une vulgaire scène de ménage, l’invité de Corsovo et Vasara, qui sont également les souverains du petit royaume vampirique que quelques Kastelai en rade ont établi dans ce coin d’Aqshy il y a 60 ans, fait son apparition. Il s’agit du seigneur Salvera, Kastelai lui aussi mais franchement brut de décoffrage par rapport à ses hôtes, et vassal assez indépendant/problématique du Trône de la Rose. Le pétillant Salveta est venu convaincre ses suzerains de marcher sur Gowyn, la seule cité des alentours n’ayant pas juré allégeance aux vampires. Si agrandir leur domaine est tout à fait du goût de Corsovo et Vasara, ces derniers se méfient cependant de la coalition de la Bande du Poing (dont les nomades massacrés par Nyssa faisaient partie), qui pourrait profiter du départ de l’ost Kastelai pour aller piller leurs terres sans rencontrer de résistance. Au bout d’intenses tractations, pendant lesquelles Nyssa, laissée sans surveillance par ses parents, s’occupe en bolossant un des chevaliers loup de Salvera1 qui lui avait mal parlé, il est décidé de tenter une approche diplomatique. Vasara et Nyssa iront à la rencontre du chef de la Bande du Poing, Celas, afin d’obtenir son ralliement et ainsi avoir les mains libres pour attaquer Gowyn.

 

Persuadée de pouvoir gérer les négociations en personne, Vasara laisse sa fille monter la garde à l’extérieur de la yourte de Celas, mais réalise très vite que le fourbe mortel ne l’a pas fait venir pour obtenir le baiser de sang, comme elle le pressentait. Plutôt, sentant sa mort venir, il a cherché à partir sur un coup d’éclat/pari culotté : piéger les émissaires du Trône de la Rose (qui en l’occurrence, réalisent qu’ils sont tombés dans le panneau tapis) ou die trying, avec tout son peuple pour le suivre dans l’au-delà. Car Celas est un peu cabot, et ne supportait pas l’idée qu’on lui survive, apparemment. Dans la confusion qui s’en suit, si Vasara parvient à punir l’arrogant nomade en lui sirotant la jugulaire, elle n’arrive cependantpas à sortir de la yourte avant que cette dernière ne parte en fumée, et elle avec, malgré l’intervention désespérée de Nyssa pour la secourir.

 

La nouvelle se termine avec une scène père-fille, Corsovo venant remonter le moral de sa teenager en lui promettant que maman finira par ressusciter, et lui remettant l’armure trop stylée que Vasara avait faite faire pour elle en secret. Comme quoi, elle avait bon fond, au fond.

 

À l’heure où ‘Anger and Ash’ est publié (et chroniqué par votre serviteur), aucun de ses personnages principaux n’a (à ma connaissance, et je dois préciser que je ne suis plus abonné à White Dwarf depuis belle lurette) d’existence officielle dans le fluff d’Age of Sigmar, ce qui rend l’assurance avec laquelle Gary Kloster les présente assez intrigante2. On peut assez facilement parier que ce n’est pas un one shot, le nombre de personnages « inutiles » (en tout cas à cette nouvelle), la conclusion qui fait des plans sur la comète, et l’intégration de ‘Anger and Ash’ dans une Character Week, concourant à établir que Koster reviendra bientôt nous conter des histoires de Kastelai. Passé ce léger malaise, on se retrouve avec une histoire de chevaliers vampires, plus ou moins nobles, plus ou moins impulsifs et plus ou moins famille, qui tient la route mais n’envoie pas vraiment du rêve. L’héroïne principale – ou en tout cas, celle qui survit – n’inspire pas une sympathie démesurée au lecteur, et semble plutôt destinée à une carrière de protagoniste dans un roman pour jeunes adultes (l’ado rebelle qui finit par comprendre que ses parents veulent son bien) que de figure centrale dans une série de GW-Fiction. Enfin, le choix de Gary Kloster d’alterner les points de vue à la première personne entre deux personnages tout au long du récit, et celui de la Black Library de ne pas utiliser de marqueurs visuels permettant de comprendre que l’on passe d’une section « Nyssa » à une section « Vasara », ne facilitent pas l’immersion dans le récit (en tous cas au début). Bref, c’est un mouairf franc et massif de ma part.

 

1 : Un nommé Durin : comme quoi il y a des noms qui portent vraiment la poisse quelque soit l’univers de fantasy où on se trouve.

 

2 : Ce n’est pas comme si les vampires manquaient de héros nommés en ce moment (Neferata, Mannfred, Lauka Vai, Radukar, Cado Ezechiar… même Genevieve Dieudonné est revenue !), ce qui pose la question de la nécessité de rajouter de nouvelles têtes de gondole à un achalandage déjà fourni.

 

Schattra, "mais vous êtes qui en fait?"

Modifié par Schattra
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Je rattrape mon retard de la veille (sorry) avec la quatrième nouvelle de la semaine, consacrée à la moitié sympathique (en tout cas comparée à l'autre) du duo des Van Denst.

 

The Orphan of Pale Harbour - R. Strachan :

Révélation

The Orphan of Pale HarbourAyant donné rendez-vous à sa fille et néanmoins collègue dans la petite ville de Pale Harbour à la fin d’une tournée d’audit et purification de l’arrière-pays Ghurois, Galen Van Denst doit tuer le temps pendant quelques jours, étant arrivé en avance. Pour l’agent d’Azyr vétéran, c’est l’occasion de s’enfiler quelques pintes de bière locale et de fumer en skred ses cigarillos, mais aussi et surtout d’enquêter sur les agissements mystérieux d’une enfant des rues, qu’il a vu s’éclipser discrètement de Pale Harbour à la nuit venue par un trou de l’enceinte fortifiée. Les marais de Ghur n’étant pas le voisinage le plus sécurisé qui soit, à plus forte raison après la tombée du jour, Galen prend sur lui de suivre discrètement la fillette pour s’assurer qu’il ne lui arrive rien de fâcheux. Il apparaît que la jeune Alyssan (c’est son nom, comme vous l’aurez deviné) était de sortie pour déposer une offrande à l’esprit de ses défunts parents. Elle est en effet persuadée que ces derniers, morts de la peste verruqueuse vésicale – une infection qui a l’air bien fun, rien qu’au nom – il y a quelques mois, continuent de veiller sur elle depuis l’au-delà. Cette innocente croyance, qu’elle raconte à Galen après qu’il l’ait ramené en sécurité dans la ville et lui ai payé un repas chaud à l’auberge où il a pris ses quartiers, ne convainc pas vraiment notre méfiant héros, qui décide de tirer les choses au clair dès le lendemain.

 

Après avoir alerté le capitaine de la milice locale sur la possibilité qu’il se passe quelque chose de vilain dans les prochaines heures, Galen repart donc avec Alyssan dans les marécages, et lui demande de l’emmener à l’endroit où ses parents lui déposent leurs petits cadeaux (souvent faits à base d’os humains, ambiance ambiance). L’orpheline s’exécute volontiers, et conduit son nouveau copain jusqu’au petit autel qu’elle a réalisé pour communiquer avec ses esprits gardiens. Lorsque le chasseur de sorcières s’aperçoit que l’ingénue a dessiné le plan de la ville, incluant l’interstice dans la muraille par où elle se glisse pour ses visites nocturnes, sur le sol marécageux, soi-disant pour aider les esprits à veiller sur elle pendant la journée, son sang ne fait qu’un tour. Usant de l’irrésistible charisme que lui confère sa moustache, il demande à Alyssan de signaler sa présence à ses parents, et dégaine discrètement son pistolet pendant que la petiote imite le sifflement de galinette tachetée…

 

Révélation

…Ô surprise, ce n’est pas un fantôme bienveillant qui se manifeste alors, mais un Kruleboy visqueux, que Galen a tôt fait d’abattre d’une balle en pleine tête. Ce déchainement soudain de violence ne ravit pas Alyssan, qui s’enfuit en hurlant dans les marais. Galen doit alors décider s’il choisit de rattraper l’orpheline, ou partir défendre Pale Harbour, dont le vent lui porte les échos d’une attaque soudaine. N’écoutant que son bon cœur (une faute professionnelle inqualifiable, si vous voulez mon avis), le chasseur de sorcières opte pour la première alternative, ce qui l’amène après une course éperdue dans les marécages jusqu’à une clairière où un chamane Kruleboyz accomplit la danse du chaudron. Après un bref combat, Galen règle son compte à l’affreux crapaud, renverse son infâme brouet, ce qui fait se dissiper l’épais brouillard conjuré par le sorcier, et repart avec Alyssan en direction de Pale Harbour.

 

Bien que durement éprouvés par l’attaque soudaine des peaux vertes, les défenseurs locaux ont réussi à tenir en respect les Kruleboyz, et l’arrivée d’un, puis deux, personnages nommés (Doralia et sa fidèle arbalète se joignant à la fête quelques minutes après le retour de Galen in town) finit par plier le match. Démoralisés par le retour du ciel bleu, les couards Orruks finissent par détaler sans demander leur reste. Tout est bien qui finit donc bien pour le camp de l’Ordre, Alyssan pardonnant même à Galen de lui avoir menti sur ses véritables intentions à propos de ses parents plus tôt dans la journée. Un authentique happy end sans bûcher de joie, c’est rare pour une nouvelle de chasseurs de sorcières, profitons-en.  

 

Il flotte sur ‘The Orphan of Pale Harbour’ plus que l’épais brouillard typique des Kruleboyz1, mais également et surtout une grosse ambiance de quête secondaire de The Witcher, ce qui est très positif, comme tous ceux qui ont joué à cette série pourront en témoigner. Galen Van Denst pouvant assez facilement se déguiser en Geralt de Riv, le choix de Richard Strachan d’aller lorgner du côté de son collègue de fantasy polonais Andrzej Sapkowski dans cette nouvelle marécageuse, ténébreuse, trompeuse et sanglante s’explique facilement. Reste qu’il n’est pas toujours facile de rendre justice à un personnage aussi complexe que celui du « chasseur de sorcières (ou de monstres) sévère mais avec un bon fond » ; fort heureusement pour nous, Strachan y parvient fort bien ici, dépeignant son héros grisonné en vigilante implacable croisé avec un papi gâteau, lorsque le besoin s’en fait sentir. Au final, les Van Denst sortent plutôt grandis de cette petite aventure, qui démontre qu’ils peuvent aussi bien corriger les nombreuses abominations des Royaumes Mortels qu’interagir de façon (presque) normale avec le bon peuple, et entre eux (mention spéciale à la terreur qu’à Galen que Doralia se rende compte qu’il n’a pas arrêté de fumer, comme il lui a promis). Je crois que l’archétype du lonesome cowboy witch hunter a trouvé sa meilleure incarnation dans Age of Sigmar, et c’est Richard Strachan qui en est responsable.

 

1 : Que Richard Strachan convoque à nouveau après y avoir placé l’intrigue de sa novella ‘Thunderstrike’.

 

Schattra, the wild hunt

Modifié par Schattra
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Double post pour faire la passe de 5 et terminer la semaine dans les temps (merci au 11/11), avec un héros qui a réussi l'exploit de passer d'une franchise à l'autre pendant la Fin des Temps. Et non, ce n'est pas Gotrek...

 

The Ancestors' Hall - D. Guymer :

Révélation

The Ancestors' HallPetite ambiance au festin donné par le roi Aegil Throndiksson pour le Kungstrollen. Cela peut s’expliquer par la moyenne d’âge très élevée des participants, ainsi que par leur faible nombre par rapport à la démesure du grand hall où se tient l’événement. Ah, et puis la bière est fade, et les discours prononcés n’ont pas bougé depuis au moins trois millénaires. L’ambiance « EHPAD pour nabots » est salutairement secouée lorsque les gardiens des portes de la forteresse viennent annoncer au roi et à ses invités que l’impensable vient de se produire : un visiteur s’est présenté à l’accueil. Bouleversée par cette nouveauté, l’auguste assemblée se rue sur ses déambulateurs et fauteuils roulants, et part à la rencontre de ce singulier personnage. En chemin, Aegil semble être sur le point de se souvenir de quelque chose d’important, mais finit par laisser tomber pour se consacrer à son activité favorite : sucrer les fraises.

 

Enfin, tout ce petit monde arrive à destination, et fait la connaissance de Grombrindal, ou Gotti (« le voyageur » en vieux nainois1), dont le look étincelant aveugle presque les grabataires. Le Nain Blanc se plaint bruyamment du piètre accueil qui lui est fait (pas de bière, quelle honte), et fait mine de partir après avoir regretté qu’elle ne soit pas là. S’il est probable que la légende vivante fasse référence à sa Valaya d’amour, toujours portée disparue depuis la Fin de Temps, Aegil est quant à lui ramené au souvenir de sa femme Helnwyn. Qu’il avait simplement oublié (la classe), après qu’elle ait froncé les sourcils tellement fort qu’elle a implosé, ou quelque chose comme ça. C’était il y a foooort longtemps.

 

Les trous de mémoire d’Aegil ne sont cependant que le cadet de ses soucis : le roi est d’abord inquiet par ce qui se passera si les portes de sa forteresse sont ouvertes pour permettre à Gotti de sortir, persuadé qu’il est que l’ENNEMI n’attend que ce moment pour envahir son domaine. On ne stoppe toutefois pas aisément Grombrindal, et le baroudeur barbu parvient sans mal à regagner l’air libre, Aegil et sa cour sur les talons. L’occasion pour les troglodytes cacochymes de jeter un œil sur le monde alentour, qu’ils n’ont pas contemplé depuis un petit moment…

 

Révélation

…Et ils sont ainsi fort surpris de se rendre compte qu’ils sont à Shyish, comme le visage géant de Nagash qui flotte dans le ciel, dans une imitation grimdark des Teletubbies (son émission préférée, sans doute) permet de l’établir sans contestation possible. Autre révélation majeure : ils sont morts. Gotti a la bonté d’aider son hôte à se souvenir de ce petit mais important détail, ainsi que du rôle qui lui a été confié lorsqu’il a passé l’arme à gauche en combattant les légions de Nurgle à Ghyran, de son vivant : accueillir les âmes des Duardin morts dans sa forteresse. Une tâche qu’Aegil a décidé d’abandonner pour se claquemurer dans son terrier lorsque Nagash a eu sa necro-fringale et a envoyé ses armées assiéger la montagne. Quelques millénaires d’isolation et l’absence d’interactions sociales ont cependant eu un effet déplorable sur l’état cognitif d’Aegil et de ses camarades, comme on a pu le voir plus haut.

 

Il n’est cependant jamais trop tard pour adopter un mode de (non) vie plus sain, et le vieux roi passe le Rubicon Theodenis2 avec brio, menant ses guerriers à la défense de leur domaine lorsqu’une bande de spectres patibulaires les attaque alors qu’il discutait encore avec Gotti sur le pas de la porte. La nouvelle se termine avec le départ du Nain Blanc, qui affirme vouloir continuer sa tournée des forteresses Duardin de Shyish de l’espoir de la trouver (c’est beau l’amour tout de même), et l’arrivée des cohortes de réfugiés spectraux qui créchaient dans des camps de migrants aux alentours depuis des éons. Enfin un décideur politique qui prend ses responsabilités face au drame de l’immigration. C’est rare en ce moment.

 

David Guymer avait prévenu que ses écrits consacrés à Grombrindal (rassemblés en grande partie dans l’anthologie ‘Chronicles of the Wanderer’) ne ressembleraient pas à sa production classique pour la Black Library. On voit avec ‘The Ancestors’ Hall’ qu’il a tenu parole. Toute proportion gardée, on a plus l’impression de lire un passage des ‘Contes & Légendes Inachevés’ que du ‘Seigneur des Anneaux’, tant le propos de cette nouvelle semble se concentrer sur les mythes et croyances des Duardin. Si l’auteur laisse un peu de suspens planer sur la condition d’Aegil Throndiksson et de ses vieux copains, on sent qu’il n’a pas spécialement cherché à écrire une nouvelle à twist final, mais plutôt à donner à voir ce à quoi ressemble la « vie » des Duardin à Shyish. Pour ma part, le résultat final ne m’a pas plus emballé que ça, mais je soupçonne que la meilleure façon d’apprécier ces chroniques est de les lire en entier, plutôt que de se contenter d’une nouvelle individuelle3.  

 

1 : A ne pas confondre avec Gotye, qui est juste un type qu’on a connu.

 

2 : Celle-ci est vraiment de niche, mais j’ai bon espoir que mon lectorat la comprendra tout de même.

 

3 : Si c’est le cas, dommage que la Black Library ait choisi d’intégrer ‘The Ancestors’ Hall’ dans l’Age of Sigmar Character Week 2022, du coup…

 

Schattra, ready for the Inferno!

Modifié par Schattra
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Le 14/11/2022 à 23:12, gilian a dit :

JE vais poser la question vue que personne ne le fais 😛 , ça a à voir avec les primaris?^^

 

Je suis en retard moi... Oui c'était sur cette base en effet. :D

 

On enchaîne sur la seconde nouvelle AoS du Black Library 2021 Advent Calendar. Pour ceux qui se posaient la question d'où a été postée la première, la réponse est ici. The Wolf and the Rat a en effet été intégrée dans le livret Black Library 2022 Celebration.

 

The Lost Karak - G. Haley :

Révélation

the-lost-karak.pngAmbiance orageuse sur l’Aelsling. Lorsque le Maître des Runes Kedren Grunnbor, deuxième mascotte du navire (après le familier mécanique de Flynt, Trokwi), insiste lourdement pour faire une halte sur îlot rocheux insignifiant perdu au milieu des Bancs Célestes Adromites, le capitaine Kharadron commence par refuser. La Longue Barbe ne s’avoue toutefois pas vaincue, et commence à grommeler si fort que même le blagueur Flynt comprend que l’affaire est sérieuse. Si sérieuse que Kedren va jusqu’à utiliser le mot magique pour amadouer le capitaine, extrême extrémité à laquelle peu de Duardin sont prêts à se rabaisser (même s’ils ne sont pas grands). Intrigué par l’opiniâtreté de son vieux complice, Flynt finit par capituler, à la condition de pouvoir accompagner Kedren dans son escapade en terre inconnue.

 

Après une ascension éreintante à travers la forêt vierge qui recouvre l’île, le petit groupe (Flynt, Kedren, l’Ogor Gord et quelques Kharadrons additionnels) arrivent devant l’entrée d’un ancien Karak, ce qui explique l’intérêt que le Maître des Runes porte à ce caillou autrement dépourvu d’ather-or, et pique celui de Flynt. Après tout, les Dépossédés ne le sont que parce qu’ils ont oublié de prendre leur magot avec eux pendant l’Âge du Chaos : leurs anciennes demeures ont de bonnes chances d’être pleines de loot… Il faudra cependant faire attention, le flair infaillible du khemiste qui accompagne les explorateurs (Otherek Zhurafon) a décelé le puissant et musqué bouquet du Troggoth dans les galeries souterraines empruntées par la petite troupe.

 

Et cela ne rate pas, en effet. Un Dankhold Troggoth squatte les niveaux inférieurs de la forteresse, et malgré l’absence de trêve hivernale en Chamon (un Royaume plutôt chaud il faut le dire), personne n’a eu le cœur, ou le courage, de le faire déguerpir. Le combat s’engage entre les courts sur patte et le grand dadais, la régénération de ce dernier posant rapidement de gros problème aux barbus. Il faudra finalement une combinaison de tir de mitraille du tromblon runique de Kedren, et une ingestion d’aether-bombe provoquée par un shoot habile de Flynt, pour que l’ennuyeuse bestiole consente à décéder de manière définitive. Ceci fait, il est temps d’une franche explication de texte entre le Maître des Runes et ses invités involontaires : pourquoi par Grugni tenait-il tant à se rendre sur place ?

 

La réponse est toute bête, surtout pour des Kharadrons : rendre hommage à ses ancêtres. C’est en effet toute la famille de Kedren qui est enterrée dans ces cavernes, et cela n’a pas de prix pour un traditionaliste tel que lui. S’il tenait à s’y rendre seul, malgré les dangers évidents, c’est qu’il craignait que ses copains capitalistes ne profitent de la visite pour s’en mettre plein les poches… Crainte non dénuée de fondements, comme le renflement suspect dans la besace de Flynt à la fin de l’histoire le laisse apparaître, mais dans l’ensemble, l’équipage de l’Aelsling se comporte dignement. Ils ne sont pas si insortables que ça, finalement.

 

Les différences entre les factions Duardin d’Age of Sigmar ont beau être très visibles quand on compare les figurines des différentes gammes, il n’est jamais inutile de se pencher également sur ce qui les sépare de manière invisible, c’est-à-dire leurs cultures, croyances et traditions. C’est la piste que Guy Haley explore dans ‘The Lost Karak’, qui montre à quel point Dépossédés et Kharadrons diffèrent en matière de philosophie, mais aussi, et c’est intéressant, qu’ils restent liés par des valeurs communes. Sur cette idée simple mais riche, Haley ajoute un soupçon d’humour (sa marque de fabrique pour sa série arkanaute), un bon fond de fluff et un enrobage d’action, pour un résultat tout à fait correct.

 

Schattra, the more you know

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Troisième et avant-dernière nouvelle AoS du calendrier de l'année dernière, et nous avons enfin une Stormcast Eternal qui montre le bout de son museau. Il était temps.

 

Monsters - N. Van Nguyen :

Révélation

monsters.pngOù nous suivons la nouvelle1 chasseuse de monstres officielle de papa Sigmar dans l’une de ses traques dans les Royaumes Mortels, ici Shyish un soir de pluie et de brouillard. Déployée en soutien des Anvils of the Heldenhammer, occupés en contrebas à contenir une invasion de démons de Tzeentch, Yndrasta a fait le déplacement pour bannir un Duc du Changement si changeant qu’il n’a d’autre nom que l’Anomie. Super plan pour éviter d’être convoqué par des mortels ambitieux à tout bout de champ (et de chant), moi je dis. Ayant certainement compris qu’il était dans le viseur de la virago de Ziggy, l’Anomie se la joue cependant petit bras et se transforme en nuage de barbe à papa au lieu de livrer un honnête combat à la championne adverse. Sous cette forme, il se révèle aussi inoffensif qu’invulnérable, ce qui ne fait pas les affaires d’Yndrasta et de sa lance magique, Thengavar, qui disparaît corps et bien dans le protoplasme gazeux et ne revient pas dans la main de sa porteuse, comme c’est habituellement le cas.

 

Sigmar ayant pensé à lui fournir une arme de rechange, Yndie ne se laisse pas décontenancer par la tournure prise par les événements et se rue à l’assaut de sa Némésis pour finir les choses au corps à corps. Un nouveau shenanigan de l’Anomie l’envoie toutefois dans le décor, et l’intrépide héroïne fait une chute douloureuse mais pas mortelle jusque dans la piscine privée d’une grotte souterraine, Gandalf style. Elle serait repartie aussi sec (mais mouillée, je me comprends) castagner le démon si elle ne s’était pas rendu compte que son point de chute n’était pas aussi désert qu’il l’aurait dû être. Un vieil ermite d’une carrure peu commune et arborant une ‘stache de compétition a en effet assisté à sa culbute pas très légendaire, et comme le quidam exsude une aura mythique et possède une hache qui l’est tout autant (appelez ça l’intuition féminine si vous voulez), Yndrasta reste faire un brin de causette.

 

Il ne lui faut pas longtemps pour comprendre que cet inconnu n’est autre que Voyi. Si cela ne vous dit rien, c’est normal : Voyi, aussi connu sous les noms du Non Béni, du Traître et surtout de l’Oublié, était un héros de l’Âge de Mythes, élevé par Sigmar au rang de champion, mais qui choisit d’aller vivre sa vie en solitaire au lieu de défendre Sigmaron lorsque le besoin s’en fit sentir. Sigmar n’étant pas connu pour sa magnanimité envers ceux qui le déçoivent, et ayant un égo trop important pour reconnaître ses échecs, le nom de Voyi fut rayé de tous les registres officiels, et seuls une poignée d’Elus, dont Yndrasta fait partie, eut vent de l’existence de ce paria depuis lors. Dès lors, la chasseresse se trouve confronté à un dilemme peu évident : rapporter la tête du traître à son patron pour lui faire plaisir, ou tenter de négocier avec Voyi pour apprendre comment, il y a de cela des millénaires, il réussit à bannir l’Anomie…

 

Après un échange tendu, durant lequel Voyi se permit de comparer Yndrasta et les Stormcast Eternals aux monstres chassés par la première, ce qui n’est guère gentil, et ponctué par un duel rapidement conclu par un point de côté débilitant pour le champion grabataire, Yndrasta se résout à laisser l’ancêtre en paix rien que pour lui montrer qu’elle n’est pas si méchante que ça, et à retourner se battre contre l’Anomie, même s’en savoir comment le vaincre. Sa « générosité » est toutefois récompensée par Voyi, qui lui révèle avant qu’elle ne parte qu’il lui suffira de prélever un échantillon sur la forme blurbesque du démon pour l’exiler des Royaumes Mortels (et récupérer sa précieuse lance au passage). Armée de ce tuyau, Yndrasta peut enfin repartir au front, non sans promettre à son hôte de garder pour elle le secret de sa destinée. Ce sera la première fois qu’elle dissimulera des choses à Sigmar depuis sa Reforge : pourvu qu’il ne l’apprenne jamais…

 

Une très bonne entrée de la part de Noah Van Nguyen, qui part explorer l’une de mes facettes préférées du fluff des Royaumes Mortels : le côté sombre de Sigmar et de ses élus. Yndrasta en elle-même est très loin d’être une parangon de noblesse et d’humanité, puisqu’elle se décrit volontiers comme cruelle et intéressée uniquement par sa mission de chasseresse, ce qui en fait sans doute la première héroïne Stormcast Eternal de la BL ouvertement antipathique (un progrès, si vous me demandez). Sa confrontation avec Voyi m’a fortement rappelé la difficile transition entre Guerriers Tonnerre et Space Marines entre la fin de l’Unification de Terra et le début de la Grande Croisade, avec Sigmar dans le rôle de l’Empereur2, en plus de venir approfondir et complexifier le fluff de cette faction. Un choix très intéressant de la part de Van Nguyen (j’aurais moyennement apprécié me retrouver avec une nouvelle de Neave Blacktalon bis, pour être honnête), qui démontre ici qu’il est capable de sortir du manichéisme Stormcast Eternals = gentils // opposants des Stormcast Eternals = méchants dans lequel bon nombre de ses collègues ont donné. De bon augure pour son roman ‘Godeater’s Son’, qui traitera spécifiquement de ce thème, et pour la qualité et l’intérêt de la littérature AoS en général.

 

1 : Eh oui, la position était déjà prise avant que la V3 ne fasse de Miss Yndrasta une des têtes d’affiche de la franchise. Remember Neave Blacktalon ?

 

2 : On peut aussi faire un parallèle avec le ‘Misbegotten’ de Dan Abnett, où le savant fou Fo déclare à Horus qu’il considère les Primarques et les Space Marines comme beaucoup horribles que toutes créations.

 

Schattra, gurl powaaa

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On termine pour AoS avec une nouvelle introduisant le désormais incontournable Cado Ezechiar, et au titre scandaleusement proche de la précédente...  À croire que les auteurs de la BL ne se parlent pas entre eux! :whistling:

 

Beasts - J. French :

Révélation

beast.pngLes années et les siècles n’ont pas été tendres envers Cado Ezechiar : alors qu’il disposait de son propre petit royaume et gérait ses affaires dans son coin, le Chaos vint frapper à sa porte avec des gros sabots anarchiques, résultant en la ruine de son domaine et le massacre de ses sujets. Depuis, l’ex souverain immortel (c’est un Vampire) traque les huluberlus qu’il tient responsable de ce fiasco (un culte de Tzeentch nommé la Main Enflammée), ce qui l’a amené dans la cité de Glimmerheart, récemment reprise par les forces sigmarites.

 

Ayant massacré les trois sorciers de niveau 3 qui zonaient dans la ville sans penser à leur demander de le mettre sur une piste digne de ce nom pour poursuivre sa quête, Cado se retrouve dans une impasse, et obligé de faire profil bas pour éviter d’attirer l’attention des vertueux et peu tolérants Azyrites. Il accepte ainsi une mission d’escorte de prêtres chargés de contrôler la pureté d’une ancienne source sacrée, située à quelques heures de marche de Glimmerheart. De retour dans la cité, il fait la connaissance d’un mystérieux individu, Byrazan, qui semble en savoir beaucoup sur son tragique passé, et n’accepte pas « non » comme une réponse à sa demande de lui rendre un petit service en échange de renseignements. Avant qu’il n’ait pu expliquer au présomptueux mortel pourquoi il n’est pas conseillé de lui baver sur les rouleaux, Cado est mis KO de manière aussi rapide qu’inexpliquée, et se réveille quelques heures plus tard au plus profond d’une caverne humide, obscure et mal fréquentée.

 

Ayant repris ses esprits et réglé son compte à l’araignée géante qui avait des vues sur sa carcasse, notre héros se met en quête d’une sortie, mais ne parvient qu’à attirer l’attention du Troggoth affamé qui s’est établi dans ces tunnels. Bien que disposant d’aptitudes physiques bien supérieures à celles de l’humain moyen, et pouvant compter sur les esprits des membres de feu sa cour royale (ici, l’érudite Solia, qui ne peut malheureusement rester longtemps à cause de problèmes récurrents de connexion1) pour le conseiller, Cado n’est pas vraiment à son avantage. En cause, la constitution robuste et la résistance à la magie de son adversaire, ainsi que les nuages de spores hallucinogènes déversés par les champignons qui recouvrent les parois de la caverne. Fort heureusement, notre héros a la bonne idée d’utiliser le décor pour venir à bout de son poursuivant, et parvient à faire basculer le Troggoth dans un graaaaaaand trou dans le sol, qui se révèle être un abysse arcanique (encore un kit de décor qui sera vendu 50 balles par GW dans les années à venir, j’imagine), soit une sorte de trou de ver menant vers une dimension parallèle, et dont l’accès était entravé par la présence d’une locale hostile, comme l’explique posément Byrazan lorsque Cado sort enfin de son trou, quelques temps plus tard.

 

Logiquement outré par le traitement qu’il a subi, le Roi Vide doit cependant mettre sa colère en veilleuse car son interlocuteur révèle avoir sur lui une fiole contenant le sang d’un vampire de sa lignée, ce qui fonctionne basiquement comme une injonction d’éloignement/kryptonite/Xanax pour la gent à longues canines (ce qui explique le black out subi par Kad&O lors de sa première rencontre avec l’impudent mortel). En attendant d’identifier l’employeur de Byrazan et de comprendre l’intérêt qu’il lui porte, Cado récolte tout de même les fruits de son labeur, Byby lui indiquant d’aller visiter une tour de sorcier située dans les hauteurs de Glimmerheart pour faire progresser sa quête. Une tour invisible et inatteignable, certes, mais ce n’est pas vraiment son problème. Les PNJ donneurs de quête ne sont plus ce qu’ils étaient, c’est malheureux.  

 

John French pose proprement les bases de sa première série siglée Age of Sigmar avec ce ‘Beasts’, qui introduit de manière efficace le Roi Vide Cado Ezechiar, sa quête vengeresse dirigée vers les séides de la Main Enflammée, les anneaux de pouvoir qui constituent son équipement distinctif, et les relations troubles qu’il entretient avec ses mystérieux et puissants commanditaires. Toute cette exposition est faite de manière fluide, ce qui n’est pas donné à tous les contributeurs de la BL, et le combat/course-poursuite qui met notre immortel héros aux prises avec un Dankhold Troggoth jaloux de son intimité nous change agréablement de l’ordinaire des bastons mises en scène dans la littérature AoS. Un début prometteur dans les Royaumes Mortels, tant pour Cado que pour son créateur.   

 

1 : En même temps, l’histoire se passe dans un tunnel. What did you expect ?

 

Schattra, en mode Thesaurus

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  • 2 semaines après...

La deuxième partie du calendrier de l'Avent 2022 me donne l'occasion de revenir par ici avec quatre nouvelles au programme. La première est signée par un nouveau-venu au sein de la BL, qui va tenter de prendre en main rien de moins que l'Orruk le plus méchant des Royaumes Mortels. Souhaitons lui bon courage.

 

Boss of Bosses - L. Scull :

Révélation

Boss of BossesCe n’est pas la grande forme pour Gordrakk en ce moment : forcé à abandonner le siège d’Excelsis après l’arrivée de Morathi pour se réfugier dans les collines de Morruk afin de panser ses plaies, le Boss des Boss(es) sait que son emprise sur sa Waaagh ! est plus tenue que jamais. Pour ne rien arranger, il doit composer avec les reproches du chamane Snazzgar Stinkmullet, qui revient le tourmenter depuis l’au-delà en lui reprochant d’avoir tout fait de tra…vert (ce qui est assez approprié pour un Orruk, il faut le souligner). Souhaitant se changer les idées de la seule manière qu’il connaisse, il sort de sa tente pour casser quelques têtes, et montrer à ses boyz qu’il ne vaut mieux pas espérer le remplacer de sitôt. Les premiers à faire les frais de son humeur belliqueuse sont un groupe de soldats d’Excelsis faits prisonniers par les peaux-vertes, auxquels Gordrakk offre la liberté s’ils arrivent à lui entailler le cuir. Beau joueur, il retire son armure, arme ses adversaires et combat à mains nues, ce qui ne l’empêche de faire de la chair à pâté des forces de l’Ordre… jusqu’à ce qu’un Duardin trouve fair play de lui trouer le biceps avec un pistolet qu’un Ironjaw un peu benêt lui avait permis d’utiliser dans cette mêlée ouverte. You know what they say : never bring an Orruk to a gunfight. Bien que le petit malin s’en sorte avec une tête de moins (même si la FER lui donnait raison sur ce coup-là), Gordrakk n’est pas satisfait par cette victoire aux poings et trouve d’autres sparring partners plus à son niveau dans la foule des badauds : d’abord l’Ogor Stinkbelly, puis le Gargant Thromgor. Bilan : un mort, un blessé grave, et un Big Boss plus énervé que jamais.

 

Avant qu’il n’ait trouvé le moyen de martyriser une Bête Zodiacale dans sa quête d’un opposant digne de lui, Gordrakk est interrompu par l’arrivée du chamane Drooldrop, qui lui annonce qu’il a de la visite. Une délégation de Kruleboyz menée par le chef Skeptis Tongue-eater vient en effet de s’embourber à l’entrée du camp, et demande une audience auprès du Poing de Gork pour lui remettre un cadeau de la part de Gobsprakk en personne. Avant d’aller s’enquérir des desiderata des émissaires de la Bouche de Mork, Gordrakk accomplit deux quêtes secondaires : primo, récupérer son Maw-Crusha Bigteef, qui boudait dans un coin du bivouac, secundo, aller rappeler à son vieux copain Krazz Dredclaw, un Mega-Boss Ironjaw avec des vues sur sa position, si on en croit les rumeurs, qu’il a à l’œil. Ceci fait, notre colérique héros arrive en majesté jusqu’au campement de Skeptis, qui attendait sa venue en dégustant les langues de ses prisonniers, comme son surnom le laissait à penser.

 

Derrière la déférence de façade qu’il présente à son hôte (qui a après tout le privilège d’entendre les voix de Gork et Mork1), Skeptis dissimule une fourberie digne de son statut de Bosskitu. La couronne enchantée qu’il remet à un Gordrakk d’abord circonspect a en effet été maudite par son Vasomancien, et bien qu’elle commence par apaiser les maux de tête dont souffre le Big Boss (qui rentre fissa au bercail frimer devant ses troupes), elle se révèle bientôt être une nuisance débilitante, s’enfonçant profondément dans le crâne de son porteur et sapant sa force de manière insidieuse. Ayant compris qu’il a été dupé, Gordrakk convoque Drooldrop pour tenter de combattre la magie par la magie, mais le chamane se déclare incompétent (pour changer), et conseille à son patient de faire jouer le service après-vente, c’est à dire aller mettre une rouste à Skeptis. Ce plan d’une simplicité élégante est compliqué par l’arrivée imprévue de Krazz Dredclaw, convaincu par les propos séditieux du Bosskitu de défier son rival pour devenir le Vert Alpha de la Waaagh ! Malgré son état de (relative) faiblesse, Gordrakk fait son affaire au challenger mal inspiré, héritant au passage de quelques blessures supplémentaires. Les emm*rdes volant en espadrilles, Bigteef se révèle être indisposé, la collation de grunta lui ayant été offerte par les Kruleboyz ayant été marinée à la mort aux rats. C’est donc seul et à pied que le Poing de Gork se dirige jusqu’au campement de ses cousins marécageux, bien décidé à régler cette sombre affaire de manière directe et tranchante.

 

Considérablement affaibli par ses récentes mésaventures, Gordrakk parvient à se frayer un chemin à travers les Eventreurs adverses pour expliquer sa façon de penser à Skeptis, mais connaît un gros passage à vide au moment décisif. Malmené par le bruxodon de compagnie du Bosskitu, il a alors recours à son arme secrète : son karné dadress. Sa connexion privilégiée avec Gorkamorka lui permet d’invoquer inconsciemment la fameuse Main de Gork (ou peut-être de Mork), qui broie la couronne maudite et permet au Boss des Boss de retrouver son prime. Dès lors, il n’y a plus match : le caniche des marais finit en pâté pour squig, et son maître préfère battre prudemment en retraite en jurant qu’il se vengera… jusqu’à ce que Bigteef, lui aussi complètement remis de son intoxication alimentaire, lui tombe sur le râble et le coupe en deux. Faut savoir retirer les gens négatifs de sa vie.

 

Tout étant rentré dans l’ordre, Gordrakk est libre de faire ce qu’il sait faire de mieux : planifier les prochaines batailles de ses boyz. Et on peut dire qu’il vise haut : inspiré par cette histoire de couronne, il jure de trucider tous les dentistes des Royaumes Mortels, à commencer par Archaon et Sigmar. Il demandera ensuite une revanche à Kragnos pour rétablir la hiérarchie chez les poids lourds de la Destruction. Demandez le programme !

 

Luke Scull donne l’impression d’être un vieux briscard de la Black Library dans ce très convaincant ‘Boss of Bosses’, qui continue sur la lancée des Malign Portents et ‘Kragnos : Avatar of Destruction’ et développe le fluff d’un des personnages majeurs du siège d’Excelsis. Cette lecture m’a furieusement rappelé les passages narratifs des suppléments de jeu pour Hordes et Warmachines, qui développent l’intrigue sous-tendant ces univers, et sont une raison tout à fait valable d’acheter ces bouquins. Cette nouvelle m’a aussi donné envie de me renseigner sur l’arc narratif développé dans la saison de Thondia, sujet qui m’intéressait vaguement auparavant. Une franche réussite pour une première soumission, et une des meilleures nouvelles consacrées aux Orruks que j’ai pu lire depuis le lancement d’Age of Sigmar.

 

1 : Et de ses deux haches, Krazeuz' et Ruzée. Et de Snazzgar Stinkmullet. Ce qui commence à faire un sacré paquet de monde. Il faudrait qu’il embauche un Grot de direction pour gérer tous ces voicemails. 

 

Schattra, poing (de Gork) final

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On continue avec le retour de Nyssa Volari, qui prend la place de Cado Ezechiar dans la catégorie "nouveau anti-héros vampirique" de la Black Library. Comme on sait que Gary Kloster a écrit un roman pour sa création, ce n'est que pure logique.

 

The Waste, the Worm and the Witch - G. Kloster :

Révélation

The Waste, the Worm and the WitchNous retrouvons la vampire Ruinemâne Nyssa Volari peu de temps après les événements de ‘Anger & Ash’ et la perte de sa mère de sang, Vasara, brûlée au dixième degré lors de l’embuscade tendue par les nomades de la bande du Poing. Au grand déplaisir de notre héroïne sanguine, Vasara a décidé d’occuper sa non non-vie à hanter ses pensées et à hurler des choses incohérentes dans sa tête, ce qui menace de faire tomber sa belle-fille dans la folie la plus profonde. Pour ne rien arranger, le petit royaume vampirique gouverné par le père de sang de Nyssa, Corsovo, est menacé par les incursions répétées des Chercheurs de Soleil, une faction humaine un peu trop vertueuse et éclairée au goût des buveurs de sang. La nouvelle s’ouvre ainsi par une escarmouche durant laquelle la schizophrénie galopante de Nyssa l’empêche de mener à bien l’attaque surprise qu’elle avait planifiée, permettant à sa proie, la Lieutenant Takora, d’échapper une nouvelle fois à ses crocs.

 

De retour au Palais Gris qui sert de capitale au domaine paternel, Nyssa apprend de la bouche de l’un de ses gardes du corps (Erant) qu’il connaît une sorcière ayant le pouvoir de parler avec les morts, et qui pourrait donc aider sa patronne à se débarrasser de sa squateuse mentale. N’ayant plus grand-chose à tuer et du temps à perdre (et l’inverse), Nyssa s’embarque dans cette quête Doctolibesque, accompagnée de ses fidèles gorilles (Erant, donc, et sa comparse Rill). Après un trekk sans histoire ni ravitaillement dans les plaines cendreuses qui entourent le volcan Temero, le trio finit par croiser la route de la sorcière de la décharge1, qui fait son office de PNJ et demande à ce que lui soit remis un croc de verre de boue d’une longueur respectable avant de consentir à aider Nyssa. Les Ruinemânes partent donc sur la zone de farmage de cette noble bestiole, un lac peu profond situé à quelque distance.

 

Comme on pouvait s’y attendre, la mission n’est pas aussi simple qu’il n’y paraissait sur le papier. Les vers de boue en question sont en effet très coriaces, et ont la sale tendance à faire repousser les extrémités dont les vampires les amputent à grands moulinets d’épée aussi vite qu’ils en sont privés. Cela ne serait pas un gros problème pour des bretteurs de la classe de Nyssa et compagnie si les crocs des individus tailladés n’étaient pas d’une taille insuffisante pour satisfaire à la demande de la sorcière, et ne se dissolvaient pas dans l’air une fois prélevés. Quand ça veut pas, ça veut pas.

 

Le rapport de force s’inverse lorsque the mother of all mudworms fait son apparition, tel un boss de fin de donjon après que ses minions aient été vaincus. D’une taille bien supérieure à celle de ses congénères, Lombricator a également les crocs, ce qui est à la fois une bonne et une mauvaise nouvelle pour les chasseurs de vampires. Il faudra une coopération sans faille entre Nyssa, Erant et Rill pour parvenir à tronçonner une longueur convenable du ténia géant, dont les dents plantées dans le bras de Miss Volari au cours de la bataille resteront heureusement en un seul morceau après que le trio ait pris la poudre d’escampette.

 

De retour devant la sorcière, Nyssa lui remet la quenotte demandée, et obtient en échange un conseil de psychiatre (« faîtes le deuil de votre perte ») en lieu et place du rite nécromantique trop stylé qu’elle espérait recevoir. Cela chagrine fortement notre héroïne, qui décide de faire goûter à cette charlatan sa propre médecine en lui enfonçant le croc dans la jugulaire, mais s’en trouve empêchée par la disparition soudaine (et salutaire) de cette dernière – la sorcière, pas la molaire. Nyssa se rend cependant compte peu après qu’il y avait de la logique dans la folie de l’enchanteresse, puisque la voix de sa mère semble désormais être consciente de son état, et consent à ne plus hurler « AU FEEEEEEEEEEEUUUUUUUUUU2 » à tout bout de champ, comme elle faisait auparavant. A la place, elle lui prodiguera ses sages conseils depuis l’outre-tombe, comme la mère attentionnée – mais insupportable – qu’elle était jusqu’à son regrettable accident. Pas l’idéal pour une esprit libre comme Nyssa, mais un progrès certain par rapport à sa précédente condition.  

 

Deuxième épisode des aventures de Nyssa Volari, ‘The Waste…’ se révèle être une side quest sans beaucoup d’intérêt, ce qui est dommage car Gary Kloster aurait pu utiliser cette nouvelle pour contextualiser un peu plus ses personnages, leurs relations et leurs histoires. L’avantage de son approche est qu’il n’y a pas besoin d’avoir lu ‘Anger & Ash’ pour faire sens de cette histoire, mais le résultat n’est pas spectaculaire, ni même très utile pour la suite de la série (à moins que la voix de mommy Vasara joue un rôle par la suite). Si Kloster veut concurrencer le Cado Ezechiar de John French, il va falloir qu’il se donne un peu plus de mal.

 

1 : Witch of the Waste en V.O., ce qui sonne mieux en plus d’être un clin d’œil au Magicien d’Oz.   

 

2 : Vasara semble également détester cordialement une certaine Lira, qui l’aurait trahie et dont elle souhaite se venger. Il est probable que ce personnage apparaisse dans la suite de la série, je me permets donc de le mentionner ici.

 

Schattra, "...and the wily walled-well"

Modifié par Schattra
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C'est le moment de prendre des nouvelles du duo père-fille le plus connu des Royaumes Mortels, partis se ressourcer dans la campagne de Ghur. À moins que...

 

Shadowglass Creek - R. Strachan :

Révélation

Shadowglass CreekGalen et Doralia ven Denst poursuivent leur tournée de Ghur (entamée dans ‘The Orphan of Pale Harbour’) et arrivent dans la charmante bourgade de Shadowglass Creek, où un indicateur leur a signalé la présence de deux cultistes du Chaos ayant fui Excelsis après la victoire de l’Ordre. Bien que les suspectes en question, Chellane et Niss, se soient parfaitement intégrées dans leur nouvelle communauté, où elles ont ouvert une petite supérette fréquentée par tous leurs concitoyens, l’Ordre d’Azyr n’est pas connu pour passer l’éponge facilement1.

 

Les ven Denst débarquent donc tous flingues et arbalètes dehors dans le fonds de commerce des exilées, qu’ils conduisent manu militari sur la place centrale de Shadowglass Creek pour un feu de joie purificateur et éducatif pour le reste des péquenauds du coin. Leur zèle est toutefois entravé par le manque de coopération manifeste desdits péquenauds, qui ne croient pas un mot des accusations des Répurgateurs et se tiennent prêts à défendre leurs exemplaires épicières/philanthropes/sages-femmes/paroissiennes contre leurs bourreaux. Même le lecteur de Sigmar local (Gruphoven) se joint à la foule en colère, laissant Galen et Doralia bien isolés au milieu des Ghurites en bisbille. Se pourrait-il qu’ils aient fait erreur sur la personne, comme Chellane et Niss ne cessent de leur répéter ?  

Révélation

…Eh bien, non. Lorsqu’il devient clair que la situation est sur le point de dégénérer, Niss, a.k.a. Salvann Urad décoche un Don du Changement dans la direction de Galen avant qu’il n’ait pu appuyer sur la gâchette de sa pétoire, et entraîne Chellane (a.k.a. Xollniz Ta’zath) vers la porte de la cité sous le couvert d’une bombinette à fumées (rose et bleue, évidemment). Le templier est sauvé par l’intervention fortuite de Gruphoven, qui s’interpose sans le vouloir entre le sort et sa cible, et finit transformé en Enfant du Chaos pour sa peine. Une fois le lecteur euthanasié par charité sigmarite, nos héros font parler la poudre et le chanvre, et mettent fin à la cavale des cultistes repenties de deux tirs bien placés. Comme on dit à Azyrheim : never forgive, never (Guy) forget.

 

Petite nouvelle qui prend la suite de ‘The Interrogator’ (du même auteur) en poussant la réflexion un peu plus loin : est-il possible pour un cultiste du Chaos de laisser son passé derrière lui et d’être absous de ses péchés, si son repentir est sincère ? A Warhammer Fantasy Battle, la réponse avait toujours été un « non » franc et massif. Age of Sigmar étant un univers (un peu) moins sombre et torturé que son prédécesseur, la question était ici ouverte, et Richard Strachan est resté droit dans ses bottes grimdark au moment d’y répondre. Le résultat n’en est que plus impactant, et permet au lecteur de réfléchir à cette question philosophique de son côté. Une nouvelle soumission solide2 de la part de cet auteur, très à l’aise dans la mise en scène des tribulations manichéennes des agents de l’Ordre d’Azyr.  

 

1 : La chose coulant chez lui, c’est les nœuds.

 

2 : Je m’interroge cependant sur la possibilité que Chellane et Niss aient pu être des cultistes de la Nullstone Brotherhood, qui détestait les pratiquants des arts arcaniques, et était affiliée à Slaanesh plutôt qu’à Tzeentch.  

 

Schattra, Law & Order

Modifié par Schattra
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Dernière soumission AoS de ce calendrier de l'Avent 2022, on retrouve les Blacktalons sous la plume d'un nouvel auteur (après le 'Memories of Blood and Sand' de Gary Kloster), pour une nouvelle traque à haut risque.

 

Harrowhand - E. Dicken :

Révélation

HarrowhandLes Collines Creuses de Ghyran présentent des particularités qui les rendent stratégiques pour deux factions ennemies des Royaumes Mortels. Pour Sigmar (en l’occurrence, les croisés Dawnbringers qui représentent le grand barbu hors d’Azyrheim), il s’agit d’un endroit parfait pour établir une colonie du fait de la présence d’un nexus géomantique. Nagash (qui a donné sa délégation à la Wight Queen – #Féminisme – Isavir Harrowhand) est quant à lui plus intéressé par les tertres funéraires qui tapissent l’intérieur des trois collines en question, et Skeletor s’est jusqu’ici montré intraitable dans la défense de ce qu’il considère comme étant son bien, et tant pis si on est dans le Royaume de la Vie. Une croisade entière est déjà tombée sous les coups d’Harrowhand et de ses guerriers sépulcraux, et une autre est promise au même sort funeste à moins que Neave Blacktalon et ses Stormcast Eternals d’élite (la Raptor Shakana Goldenblade et son dindon de combat Anda, le Retributor Rostus Oxenhammer et le Deambulator1 Hendrick) ne parviennent à assassiner la meneuse ennemie. Problème : personne ne sait où elle se cache, et même les pouvoirs de détection de la Soulscryer Idoneth (Lorai) que les Blacktalons ont pris avec eux pour l’occasion ne sont d’une grande aide. Chaque seconde qui passe rapprochant la colonne de sigmarites de son funeste destin (apparemment, on n’a pas le droit de les prévenir qu’ils se dirigent droit dans un piège dans ce scénario), la bouillante Neave finit par abandonner l’approche prudente conseillée par Shakana, et emmène son commando à l’assaut du tertre #2 après avoir tiré son objectif au D3. Quand faut y aller, faut y aller.

 

Malheureusement pour nos héros, Loec s’est foutu de leur masque en sigmarite, et après avoir vaillamment ferraillé pendant quelques pages contre des hordes de squelettes qui ne demandaient que ça, ils finissent par battre en retraite par le toit ouvrant du tertre (une fonctionnalité très pratique, installée en 2-2 par Rostus et son gros marteau). Bien qu’aucune perte ne soit à déplorer du côté des Stormcast Eternals, ils n’ont pas avancé d’un pouce dans l’atteinte de leur objectif, et ce constat d’échec crée quelques crispations dans les rangs. Particulièrement entre Shakana, qui aimerait bien éviter de devenir un légume à force de reforges successives et n’est plus trop chaude pour mourir pour les mauvaises idées de sa supérieure – même de mort lente –, et Neave Blacktalon, qui ne voit absolument pas le problème. La tension professionnelle est cependant évacuée lorsque les Blacktalons réalisent brusquement que si Harrowhand n’était pas dans le tertre, comme la logique le scénario le voulait pourtant, c’est parce qu’elle était en train de préparer l’embuscade de la prochaine croisade. Vous savez, celle que Sigmar vous a envoyé protéger. BANDE DE GLANDS. Comme quoi, on peut être foudre de guerre et très lent à la comprenette.

 

Cette épiphanie un peu tardive remet Neave et Cie dans le sens de la marche, et la fine équipe tend une embuscade aux petits oignons à la Wight Queen alors qu’elle attendait au milieu de ses troupes l’arrivée des ses prochaines recrues (involontaires), sans doute en jouant aux osselets. Comme l’a chanté Francis Cabrel à la fin du siècle dernier : « pas la pei-neuh que je pray-cise » ce qu’il se passe au cours des quelques minutes suivantes. Au terme d’un affrontement éclair, la revenante, qui était elle aussi dans la Team Sigmar dans sa première vie, ce qui perturbe un peu cette sensible de Shakana, repart hanter Shyish, ce qui désorganise légèrement son armée. Les croisés en seront toujours quitte pour une bataille rangée contre les légions de Nagash, mais ce n’est plus l’affaire des Blacktalons, que l’on quitte sur une scène de franche rigolade et d’honnête camaraderie. C’est bien de faire un métier que l’on aime, tout de même.

 

On se croirait revenu au bon vieux temps des débuts d’Age of Sigmar, où la Black Library ne nous proposait que des récits de batailles de Stormcast Eternals. Certes, ici les fiers paladins en armure sont opposés à des Squelettes et non à des guerriers du Chaos (#Variété), mais le résultat n’en est que marginalement différent, et marginalement intéressant. Lorsqu’une nouvelle peut être résumée en une (courte) phrase sans que rien d’important ne soit omis, ce n’est jamais bon signe pour la qualité de la soumission, et l’autrement irréprochable Evan Dicken faillit à ce test avec ce simpliste ‘Harrowhand’, qui ne mérite même pas d’être lu par les fans inconditionnels des Blacktalons à moins qu’ils ne soient devenus les automates décérébrés dont Shakana redoute tant de rejoindre les rangs2.

 

1 : Comprendre qu’il est vieux. Et c’est sa seule caractéristique différenciante de ces petits camarades, malheureusement.

 

2 : Mon hypothèse à ce stade (Décembre 2022) est que la BL est en train de préparer son lectorat au retour des Blacktalons, sous une forme ou une autre, dans les prochains mois. Si cela se vérifie, certains aspects de cette nouvelle pourraient faire plus de sens. Je pense notamment au personnage de Lorai, qui traverse l’histoire comme un fantôme et ne sert pas à grand-chose au final : je ne vois pas pourquoi Dicken a trouvé utile de l’intégrer à son récit, sauf s’il s’agissait pour lui de respecter une continuité narrative qui n’a pas encore été totalement établie à ce stade. À suivre…

 

Schattra, "c'est non"

Modifié par Schattra
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Ajout des nouvelles des Black Library Advent Calendars 2016, 2021 & 2022.

  • The Road of BladesThe Road of Blades (J. Reynolds)

 

  • black-library-2021-advent-calendar_mosaique.pngThe Lost Karak (G. Haley)
  • Beasts (J. French)
  • Monsters (N. Van Nguyen)

 

  • Black Library 2022 Advent CalendarBoss of Bosses (L. Scull)
  • The Waste, the Worm and the Witch (G. Kloster)
  • Shadowglass Creek (R. Strachan)
  • Harrowhand (E. Dicken)
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  • 1 mois après...

Bonjour à tous et bienvenue dans cette revue de ‘Conquest Unbound, anthologie de nouvelles se déroulant dans les Royaumes Mortels, et publiée par la Black Library en Novembre 2022. Avec 21 histoires au compteur, ce beau pavé concurrence ‘Gods & Mortals’ pour le titre de plus gros recueil Age of Sigmar mis sur le marché (à ce jour), ce qui en fait une très bonne affaire si on s’intéresse au ratio quantité/prix. À moins de 12€ pour sa version numérique, on en a pour son argent.

 

Conquest Unbound’ présente également des similitudes avec un autre omnibus, à savoir ‘The Hammer & the Eagle’ (chroniqué ici). Ce dernier ouvrage visait principalement les nouveaux arrivants dans la GW-Fiction, et présentait donc un florilège de nouvelles variées, présentant la plupart des factions les plus populaires de la franchise, à travers les personnages les plus iconiques de cette dernière. Ici, on retrouve un sommaire divisé en 6 parties1, chacune composée d’entre 3 et 5 courts formats, que je suppose avoir été choisis par les éditeurs de la BL dans un but de variété et d’exhaustivité. Le fait que certaines armées, pourtant majeures (Skavens, Filles de Khaine, Fyreslayers…), ne soient pas représentées dans cet épais grimoire est un peu dommage, mais cela est sans doute dû à l’absence de nouvelles récentes les mettant en avant à y faire figurer2.

 

En effet, toutes les histoires figurant dans ‘Conquest Unbound’ sont relativement récentes, les plus anciennes ayant été initialement publiées en 2019. Comme c’est l’usage pour les anthologies de courts formats de la Black Library, une majorité (16) du sommaire a déjà été proposée au public. La présence de quelques inédits est cependant à souligner, et cet ouvrage pourrait donc intéresser les vétérans hobbyistes en plus des dénicheurs de bonnes affaires.

Terminons enfin par un mot sur les contributeurs sollicités pour l’écriture de cette ribambelle de nouvelles. Au nombre de 15, dont 6 (Werner, Guymer, Gregory, Dicken, Van Nguyen et Fletcher) bénéficiant d’une double apparition, ils sont pour la plupart bien connus des habitués de la BL. La présence d’inédits permet cependant à Adrian Tchaikovsky et Rhuairidh James de faire officiellement leurs premières armes, dans Age of Sigmar pour le premier, et dans la GW-Fiction pour le second. Souhaitons leur bonne chance pour ces débuts, et souhaitons nous bonne lecture pour venir à bout de cette brique…

 

1 : Les Royaumes Aelves (3 nouvelles), Les Elus de Sigmar (3), Les Anciens Empires Duardin (3), Les Guerriers du Chaos (3), Peaux-Vertes et Gargants (5), et Serviteurs de Nagash (3).

 

2 : A l'inverse, Gotrek et sa sidekick Maneleth réussissent à figurer dans pas moins de trois nouvelles différentes, en faisant les véritables star de 'Conquest Unbound'.

 

Conquest Unbound

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The Warden in the Mountain - E. Gregory :

Révélation

The Warden in the MountainC’est la soirée du grand oral pour les apprentis garde-chasses (Wardens-in-the-Wild en VO) de la Grande Gardienne Tythrae. La petite poignée d’aspirants se rend au pied de la Beastgrave pour passer l’épreuve décisive : passer toute une nuit prosternés dans la poussière à l’entrée d’une des cavernes de la montagne magique, sous le regard sévère de Mémé Tythrae. Et si cela ne semble pas très compliqué de prime abord, il faut prendre en compte la fâcheuse tendance de la Beastgrave à venir souffler des propos peu amènes dans les oreilles de ceux qui s’en approchent trop. Imaginez-vous un podcast de 10 heures pendant lequel Alex Jones d’InfoWars ne ferait que hurler que personne ne vous aime, que votre race et vos dieux sont morts, et qu’il a mangé votre passé et votre futur avec des cuisses de grenouilles gay. Soumis à un tel traitement, il n’est pas étonnant que plusieurs novices pètent les plombs. Pour les chanceux, cela se termine par une reconduite au bas de la montagne, et une inscription en CAP chaudronnerie. Pour les autres, c’est un sprint malavisé directement dans la gueule du loup, ou plutôt de la montagne, ce qui force Tythrae à abandonner la supervision de l’épreuve pour ramener ses brebis perdues au bercail.

 

Leur professeur n’étant pas revenue au moment où le jour se lève et l’épreuve prend fin, les trois derniers participants (Maethys, Laeren et Weheol) décident de pénétrer à leur tour dans la caverne pour s’enquérir de la situation, et malgré les instructions très claires laissées par Tythrae à son départ de ne surtout pas la suivre. Aaaah, si jeunesse savait écoutait… Bien évidemment, ce noble dessein ne va pas tarder à rencontre la dure et froide (normale pour une montagne) réalité de la Beastgrave, d’où il est beaucoup plus facile d’entrer que de ressortir…

 

Le premier personnage à tirer sa révérence est Maethys, qui n’avait jamais été trop branché (haha) par la position de garde-chasse de toute façon, mais s’était accroché à cause de son béguin pour sa camarade Laeren, qui se trouve être la petite-fille de Tythrae. Lorsque le trio est embusqué par un monstre flou et maniant le couteau comme Philippe Etchebest, le chevaleresque Aelf s’interpose entre sa dulcinée et l’affreux jojo, et finit au fond d’une crevasse, les os en miettes. Son sacrifice permet toutefois à Laeren et Weheol de distancer leur agresseur, mais seulement pour un temps. Perdus dans le dédale des galeries, et retardés par la cécité de Weheol, les deux survivants se font rattraper par leur stalker, qui blesse l’aveugle mais ne rate pas Laeren. Dans son dernier souffle, elle expédie son camarade dans la rivière souterraine qui coule en contrebas, lui permettant d’échapper à nouveau au surineur de l’ombre.

 

Repêché par Tythrae, qui avoue ne pas avoir réussi à sauver l’aspirant qui avait piqué son meilleur sprint dans la Beastgrave, et être aussi totalement perdue, Weheol indique à sa mentor qu’il a mémorisé l’itinéraire emprunté par feu ses camarades et lui-même, et qu’il se fait donc fort de trouver la sortie si on le ramène à l’endroit où Laeren l’a initié au plongeon de 10 mètres. C’est dans les cordes de la Grande Gardienne, qui guide son dernier pupille dans la remontée, jusqu’à ce que la paire doive négocier un nid de stagwyrms endormis pour accéder au niveau supérieur.

 

Révélation

…C’est le moment que choisit le monstre pour refaire parler de lui. On apprend qu’il s’agit d’un ancien aspirant garde-chasse (Ossifal), qui a raté son épreuve de passage du temps où cette inconsciente de Tythrae organisait cette dernière non pas devant, mais dans la Beastgrave. Perdu corps (seulement yeux et bras pour être exact, mais c’est déjà pas mal) et biens dans la montagne, Ossifal a toutefois trouvé une nouvelle vocation dans les ténèbres, s’autoproclamant Gardien des Wyrms et prenant sur lui de poignarder tous les aventuriers passant à sa portée. Désireux de tester le métal dont est fait Weheol pour s’assurer qu’il est digne de devenir garde-chasse, il se heurte au refus catégorique de Tythrae, et de dépit, siffle la fin de la récré. Cela réveille en sursaut les stagwyrms qui pionçaient pénards à proximité, et dans la confusion qui s’en suit, Weheol parvient à s’échapper en direction de la rivière, pendant que Tythrae et Ossifal s’entretuent à l’arrière-plan.

 

Un peu plus gaillard que son ancienne prof principale, Ossifal se traîne jusqu’à l’aveugle pour aller s’empaler de son plein gré sur le bout pointu de sa canne de marche, et lui proposer de prendre sa succession comme Gardiens des Wyrms. La position vient avec une super cape de bras spectraux, très pratique pour poignarder les intrus, et qu’Ossifal portait jusqu’à son récent suicide. En bon objet magique maléfique, la cape essaie de se greffer à son nouveau porteur, mais Weheol, après avoir considéré une reconversion, décide qu’il n’a pas envie de revivre le cauchemar de la plateforme Parcours Sup pour changer de filière, et bastonne la relique impie à mort (?) avant de repartir vers la sortie. On espère qu’il aura trouvé son chemin, après avoir trouvé sa voie...

 

Très bonne nouvelle de la part d’Eric Gregory, qui parvient à se sortir de l’écueil narratif que représente Warhammer Underworlds en mettant en scène des personnages ne faisant partie d’aucune bande nommée, et donc dont il a tout loisir de pouvoir faire vivre et mourir comme il l’entend. L’ambiance de thriller/slasher qui se dégage de ces pages est une réussite, tout comme la manière dont l’auteur retranscrit la malignité de Beastgrave, qui vient plomber le moral de nos pauvres aspirants de manière à la fois directe et insidieuse. Seule micro-doléance de mon côté, le manque d’explications fournies à propos de la super cape d’Ossifal, qui semble être la véritable antagoniste de l’histoire, et la source des pouvoirs du Gardien des Wyrms. Rien qui ne vienne gâcher la lecture de ce qui est à mes yeux la meilleure nouvelle de cette sous-franchise (en même temps, la concurrente n’est ni nombreuse, ni rude), cependant.

 

The Harrowing Deep - M. A. Drake :

Révélation

The Harrowng DeepLe Prince Cycladaean poursuit le noble but de l’unification de toutes les enclaves Idoneth, préférablement sous la férule de son boss, le Haut Roi Volturnos, à qui il sert d’émissaire et de diplomate itinérant. Ayant engrangé quelques succès notables, notre héroïque héraut trouve cependant dans l’enclave de Dhom-Hain, gouvernés par la Haute Reine Mheáve et son époux, le très consort (le -sort est silencieux), Roi Akhamar, un défi à la mesure de ses talents. Incarnations même des farouches péquenots de Ghur – qu’ils sont, dans une certaine mesure – les Idoneth de Dhom-Hain n’ont pas l’hospitalité facile envers leurs cousins ultramarins, et ne se montrent guère emballés par le projet de désenclavement (c’est le cas de le dire) que Cycladaean pilote. Il n’y a guère que Mheáve pour se montrer moins glaciale que le reste de ses sujets, et tolérer que Cy’ prenne la parole à la cour, quand son butor de mari ne fait pas le moindre effort pour masquer l’animosité qu’il nourrit à l’égard de son hôte. Et il paraît que l’air marin rend aimable1.

 

Ce délicat jeu de pouvoir et d’influence, dans lequel Cycladaean part perdant, est toutefois perturbé par les ravages causés par un mystérieux prédateur, ayant déjà rasé plusieurs hameaux périphériques de la cité de Rundhar, capitale de Dhom-Hain, et englouti corps et biens les trois expéditions de chasseurs envoyées lui faire les écailles. Saisissant sa chance, notre héros parvient à se faire inviter à la nouvelle partie de chasse montée par leurs altesses bassesses royales, contrariant tellement Akhamar au passage que le Roi décide de se joindre également aux réjouissances, afin de montrer que lui aussi, il en a (des branchies, sans doute). Empoignant sa fourchette magique Pontumahár et chevauchant sa fière monture tentaculaire Ishcetus, Malbrough Cycla s’en va en guerre mer, aux côtés d’une force conséquente d’Akhelians, tous montés sur des bestioles au nom décidément compliqué pour quiconque n’est pas familier de leur livre d’armée (sans blague). Sur la route des profondeurs, le Prince fait la connaissance de Saranyss, l’Isharann de garde, qui, eau surprise, se montre elle aussi plutôt sensible aux arguments fédéralistes, déistes et lumineux développés par l’onctueux VRP. Il faut dire que la donzelle a voyagé pendant sa jeunesse, et roulé sa vague d’enclaves en enclaves, ce qui lui a ouvert les yeux (façon de parler, voilà la fig’) sur les bienfaits de la coopération.

 

Sur ces entrefaites, l’expédition vengeresse autant que chasseresse arrive sur les lieux des dernières déprédations du monstre, que ses membres se mettent à fouiller à la recherche d’indices. Pas de chance pour eux, ils ne réalisent qu’un peu tard que l’absence de traces sortant du village dévasté ne peut signifier qu’une chose : la présence du monstre en question, qui, malin autant que rusé, s’était caché dans un espace fumeur pour s’en griller une petite en attendant que son dessert arrive. Confronté à un Kharibdyss pétant le feu (c’est le cas de le dire), les Deepkin ne sont pas à la fête, d’autant plus que la coopération entre Cycladaean et ses comparses est loin d’être optimale : passe encore que Saranyss reste dans sa bulle – après tout, c’est à ça qu’elle sert – mais l’approche prudentielle adoptée par Akhamar et ses sbires laisse notre preux paladin en fâcheuse posture. Esquivant tant bien que mal les suçons insistants de la bête, il parvient de justesse à se désengager, et décide de charger son rival pour se passer les nerfs. Bon en fait, pas vraiment, il s’arrête juste avant de commettre l’irréparable et se contente d’engueuler Akhalamar comme du poisson pourri, ce qui est assez fluff. Il faut l’arrivée salvatrice de Saranyss, et son expertise pour faire retomber la pression, pour que les alliés ne commencent pas à se fritter, et se lancent à la place à la poursuite du Kharibdyss importun, blessé mais loin d’être mort.

 

Après quelques minutes de marche, ou de nage, dans les profondeurs stygiennes de l’océan, les survivants arrivent en vue de l’antre du monstre, qui se trouve être le cadavre d’un autre monstre, mais plus gros (comme la plupart des bâtiments sur Ghur d’ailleurs). Comprenant que ses camarades de chasse ont toutes les dents de la mer contre lui, Cycladaean se décide à la jouer finement, et parvient à faire passer tous les PNJs restant en pertes et profits, à l’aide de sa science du placement (toujours mettre un gus entre soi et le concombre de mer polycéphale et enragé dont on viole l’intimité, c’est une règle d’or). Gardant le meilleur pour la fin, notre héros, un tout petit peu revanchard, joint l’utile à l’agréable en enchaînant un double kill grâce à son trident incendiaire2 : la bête et le bête. Émergeant seul, mais victorieux, de cette confrontation, le Prince rejoint Saranyss, qui avait une nouvelle fois décidé d’attendre prudemment à l’extérieur (dur de garer un leviadon, même en double file), et nos deux comparses se mettent en route pour Rundhar, où Cycladaean a maintenant bon espoir de convaincre Mheáve d’accepter le principe d’une reprise de contact avec les autres enclaves Idoneth. Après tout, la formule consacrée ne dit-elle pas : sans âme, ouvre-toi (au monde extérieur) ?

 

Plongée (haha) réussie de la part de Miles A. Drake dans le monde baroque et exotique des Idoneth Deepkin, ‘The Harrowing Deep’ se montre plus intéressant dans sa contextualisation de la faction dont il traite (leur rapport à Teclis, la volonté unificatrice de Volturnos, l’isolationnisme de certaines enclaves…) que dans la traque du Kharibdyss qui occupe une bonne moitié du récit. Non pas que l’auteur pêche (qu’est-ce que je suis spirituel, vraiment) dans sa mise en scène des passages d’action, qui se révèlent tout ce qu’il y a de plus correct, même si sans enjeu (on ne doute pas un instant que le héros va s’en sortir), mais seulement que ces derniers n’apportent qu’une faible valeur ajoutée par rapport aux descriptions « géo-politiques » qui ont précédé. Le temps passé par Drake à présenter Cycladaean, et dans une moindre mesure Saranyss, me laisse à penser que nous pourrions retrouver notre/s héros dans de nouvelles aventures d’ici peu, ce que le titre de la nouvelle (‘Ghosts of Khaphtar’, qui est une autre enclave Idoneth) citée dans la bio de notre homme laisserait en effet supposer. Même si le Prince de Belle Eau ne m’a pas emballé outre mesure, le concept du diplomate errant est suffisamment riche pour que j’accueille avec curiosité une nouvelle soumission de cet acabit. On peut enfin reconnaître à Miles A. Drake son appropriation et utilisation poussées du lore des Idoneth Deepkin, à tel point que le profane se perd parfois dans le glossaire racial dont l’auteur imbibe son récit. Pas que je m’en plaigne, notez, je préfère de loin faire quelques recherches complémentaires en cours de lecture plutôt que d’avoir l’impression d’être pris pour un abruti fini incapable de la moindre extrapolation. Tous dans le grand bain !

 

1 : On aurait beau jeu de me répondre que les Idoneth Deepkin n’en ont cure puisqu’ils vivent sous les flots. Ce que j’accepte.

 

2 : C’est encore plus fort sous l’eau.

 

The Perfect Assassin - G. Kloster :

Révélation

The Perfect AssassinCoincée dans le bourg décati de Losten, en Ulgu, Maleneth Witchblade tourne en rond comme une lionne en cage pendant que Gotrek s’amuse à lentement drainer de sa bière une taverne qui croyait malin de proposer une offre « boisson à volonté » à celui qui battrait le champion local (un Ogor) au bras de fer. Les Nains ayant la constitution robuste et la rancune tenace, il ne fait aucun doute que le Tueur réformé arrivera à son objectif, une pinte à la fois, mais à son rythme de sénateur alcoolique, il s’en faudra d’encore quelques jours avant que le duo ne puisse quitter Losten. Aussi, lorsqu’une aristocrate du nom de Talm et se revendiquant comme l’une des notables de la ville se présente à elle et met un contrat sur la tête d’un mystérieux Seigneur des Ombres, accusé d’avoir assassiné deux aristocrates en autant de jours nuits pénombres (dur à dire en Ulgu), la cultiste de Khaine repentie se pique au jeu et se met à suivre son employeuse à bonne distance, laissant Gotrek chanter Les Lacs du Kone Mharag seul dans son bouge.

 

Plus intéressée par le challenge de se frotter à un collègue assassin semble-t-il compétent que par l’accomplissement scrupuleux de sa mission de protection de Talm, Maleneth laisse cette dernière et ses gardes se faire écharper par un assaillant mystérieux, semblant se matérialiser depuis les ombres, en plus d’être protégé des coups par une chappe d’obscurité. Elle note cependant que le reître porte autour du coup un pendentif orné d’une pierre pourpre, assez semblable à celui, vert, qu’arborait feu Talm au moment de sa mort. Comme elle ne tarde pas à l’apprendre en rendant une petite visite à l’Office de Tourisme local (l’Aethaneaum1), ces colliers sont l’apanage des sept grandes familles de Losten, et la lignée des Verska était celle qui avait choisie le magenta comme couleur. Les Verska étaient des maîtres assassins réputés, et de ce fait, les véritables maîtres de la cité, jusqu’à ce que leur patriarche, Novim, pousse le bouchon et le stylet un peu trop loin, et se mette à massacrer sans discrimination ennemis, critiques et mécontents. À sa mort, son héritier se révéla ne pas être aussi doué en ninjutsu que son prédécesseur, et se fit donc neutraliser par ses pairs de manière préemptive. Ce qui aurait dû mettre fin à la lignée des Verska. Mais rien n’est aussi simple qu’il n’y paraît.

 

Ainsi rencardée, Maleneth décide logiquement de se rendre dans l’ancien manoir des Verska, où elle trouve facilement le dernier rejeton de la famille, un avorton nommé Arvis, fort occupé à essayer de récupérer sa cape que le sang de sa dernière victime a malencontreusement taché. Si Arvis est un bretteur assez quelconque, la breloque qu’il a piquée dans le mausolée de son grand-père, l’illustre autant qu’obscur Novim, compense largement son jeu de jambes médiocre et sa synchronisation déficiente. Capable de se matérialiser depuis les ombres, qui parent à sa place les coups assenés par l’Aelf, le dernier Seigneur des Ombres donne du fil à retordre à Witchblade, jusqu’à ce qu’elle identifie le point faible de son adversaire : une aversion pour les liquides. Un jet de cire brûlante à la figure plus tard, voilà l’apprenti surineur en PLS sur le sol, paralysé par le poison dont Maleneth a enduit sa dague et délesté de son précieux colifichet. Malheureusement pour notre héroïne, la relique ne peut-être palpée que par un membre de la lignée des Verska, et lui glisse entre les doigts comme la savonnette que Gotrek n’a jamais utilisé depuis qu’il a prêté le serment du Tueur. Dommage. Elle rend toutefois son calme à Losten en exécutant sans état d’âmes le jouvenceau vengeur, dont la vendetta était motivée par le meurtre de ses parents par les autres familles nobles de la ville, comme vu plus haut. Ceci fait, elle peut retourner à l’auberge que le Duardin n’a toujours pas fini de tarir, et sonner la fin de la beuverie en mettant le feu au local comme elle l’avait pour le manoir des Verska. C’est un Gotrek bougon mais philosophe qui finit par émerger du brasier, un dernier tonneau de bière sous le bras pour solde de toute ardoise. Le déicide est une activité déshydratante, c’est bien connu.

 

Depuis sa renaissance dans les Royaumes Mortels, Gotrek Gurnisson est passé sous la plume de nombre d’auteurs, perpétuant une tradition datant du Monde Qui Fut, où le petit rouquin a été mis en scène par un aéropage de collaborateurs de la Black Library, depuis King, Long et Reynolds jusqu’à Brunner, Guymer ou Goulding, pour n’en citer que six. Gary Kloster s’attaque avec ce ‘The Perfect Assassin2à un sous-sous-genre particulier : la nouvelle de Gotrek & Felix sans Gotrek (ni Felix, pour des raisons évidentes), qui permet de développer un peu plus le compagnon du nabot irascible sans que ce dernier ne vienne résoudre l’intrigue à grands coups de hache. Tout le monde n’a pas réussi à mener à bien ce genre de projet de façon convaincante (je pense en particulier à ‘The Oberwald Ripper’), mais Kloster s’en sort de manière honorable. Cette petite virée en tête à tête avec Maleneth Witchblade permet ainsi d’en apprendre plus sur le passif et les motivations de l’Aelf au couteau, tout en insistant sur ses points communs et ses différences par rapport à Gotrek. Ainsi, si les deux comparses peuvent être qualifiés de tueurs chevronnés, là où le Duardin est honorable (à sa manière) et frustre, l’agente de l’Ordre d’Azyr est sans pitié (comme le montre son exécution sans complexe d’un antagoniste pas foncièrement mauvais et qui ne lui avait rien fait) et raffinée. La dynamique intéressante que l’auteur souligne entre ces protagonistes mal assortis mais complémentaires fonctionne bien, et donne envie de voir ce que Kloster pourrait faire du duo le plus iconique d’Age of Sigmar si l’occasion se représente.

 

1 : Où Gotrek était venu chercher quelques jours plus tôt des informations sur la meilleure façon de tuer un dieu. Sans grand succès d’ailleurs (une autre raison pour se saouler).

 

2 : Un homonyme presque parfait d’une autre nouvelle de la Black Library, ‘Perfect Assassin’ de Nick Kyme. Un hommage à l’éditeur senior de la part du nouveau-venu Kloster, ou une simple coïncidence ?

 

Chain of Storms - E. Dicken :

Révélation

La glorieuse campagne de reconquête du royaume d’Eldingar, en Hysh, à laquelle le général Skeos a consacré tant de temps et d’efforts, est en passe de se solder par un échec cuisant et sanglant à peine initiée. Descendant d’une longue lignée de princes et princesses exilés de cette ancienne cité, frappée par le fléau du vampirisme il y a des siècles, Skeos a réussi à convaincre de généreux mécènes d’Hammerhal de financer son expédition, mais la petite armée sigmarite a été fraîchement accueillie par les hordes de goules d’Arakhir Boneblight, le seigneur mort-vivant (et lointain grand-oncle de notre héros) alors qu’elle touchait au but. Malgré les savantes formations inventées par Skeos pour repousser l’ennemi, ce dernier refuse de jouer le jeu et s’amuse au contraire à trucider et boulotter (et pas forcément dans cet ordre) les miliciens de la cité libre. Sauvé d’un tel destin par l’intervention d’un Prêtre Guerrier pragmatique et mal embouché (Trask), Skeos bénéficie d’une autre arrivée miraculeuse, en la personne du Knight-Azyros Telamon, dont la lanterne magique crache suffisamment de lumens pour convaincre les nécrophages de battre en retraite pour le moment. Comme l’Elu de Sigmar a fait le déplacement seul (le service public d’Azyr est lui-aussi concerné par des coupes dans les effectifs), la partie est loin d’être pliée en faveur de l’Ordre.

 

Sur les conseils avisés, et grâce au jet-pack angélique et bras musclés, de Telamon, Skeos décide d’aller rendre une nouvelle visite aux clans des Pics Prismatiques pendant que ses hommes fortifient le camp dans l’attente de la nouvelle attaque des Mordants. Nouvelle, car l’arrogant général a déjà tenté de s’attirer les bonnes grâces des autochtones dans sa lutte contre ce qu’il voyait comme un ennemi commun, mais les a pris tellement de haut lors de sa première entrevue qu’il n’a récolté que l’hostilité des péquenauds. Sous le regard scrutateur et insondable de son business angel, Skeos essaie donc de repartir du bon pied avec la cheffe de clan Ydri, avec des résultats encore une fois assez peu concluants. Il pense alors avoir une idée brillante en défiant son interlocutrice en duel, et en désignant le Stormcast comme son champion… mais ce dernier refuse (lol), laissant le freluquet se battre tout seul contre la robuste Ydri. C’est toutefois un mal pour un bien pour Skeos, qui écope de quelques bleus dans l’affrontement mais parvient à gagner le respect des clans dans la foulée, et arrive finalement à convaincre ces derniers de lui prêter main forte dans le combat contre Arakhir.

 

Cette quête secondaire rondement menée, nos deux personnages se séparent, Telamon partant faire de la reconnaissance au-dessus d’Eldingar en fredonnant ‘Ca plane pour moi’ tandis que Skeos retourne au camp à l’arrière d’un char à yak, les sympathiques montagnards ayant également accepté de ravitailler leurs nouveaux alliés afin qu’ils ne partent pas à la bataille le ventre creux. Une surprise désagréable attend toutefois le général diplomate à son arrivée : croyant à sa désertion, et assez peu impressionnés par la qualité de son leadership jusqu’ici, ses troupes ont placé Trask à leur tête, et ce dernier n’est pas très chaud à l’idée de laisser ce bon à rien de Skeos reprendre son rôle de commandant. Usant de la même tactique qu’il y a quelques heures (manger quelques gnons avant de finalement convaincre son interlocuteur), l’aristocrate mal aimé parvient tout de même à obtenir que « son » armée se rende sur le champ de bataille pour engager l’ennemi, au lieu d’attendre l’assaut des goules sur le campement fortifié, ce qui aurait empêché une coordination avec les clans montagnards.

 

Enfin, la bataille décisive s’engage, et comme on pouvait s’y attendre, la participation de Telamon et des tribus des Pics Prismatiques équilibre le rapport de force. Combattant en première ligne pour inspirer ses troupes, Skeos finit par se retrouver face à face avec Arakhir, tout à fait enchanté de faire connaissance avec un nouveau membre de sa famille. Les pas de danse du vampire ne lui servent pas à grand-chose contre la détermination de Telamon et l’opportunisme de Skeos, et l’affable nécrophage finit décapité par le second, scellant la défaite des Mordants. Avant de repartir sur un autre front, le Knight-Azyros fait promettre au nouveau souverain d’Eldingar de faire reforger le Collier Fendu, une des reliques de la dynastie régnante dont Skeos est l’héritier, et que le prince de Bel Air gardait sur lui par sentimentalisme (et parce que personne n’avait voulu lui acheter un bout de chaine de vélo rouillé, aussi). Telamon lui remet aussi un maillon portant le nom du dernier roi d’Eldingar avant l’usurpation d’Arakhir, révélant qu’il a été cet homme avant d’entrer au service de Sigmar (et donc également un ancêtre de Skeos). La famille, c’est important.

 

On a vu et lu tellement de nouvelles consacrées aux exploits guerriers des Stormcast Eternals depuis le lancement d’Age of Sigmar que ce créneau narratif est – à mon humble avis – largement épuisé. Heureusement pour les surhommes en sigmarite, certains auteurs parviennent tout de même à proposer des angles intéressants pour continuer à les mettre sur le devant de la scène (et d’autres, moins scrupuleux, se contenteront de nous servir encore et toujours la même sauce pour des siècles et des siècles1). Evan Dicken fait partie de ceux-là, et son ‘Chain of Storms’ constitue une variation rafraichissante du topos classique « les Stormcast arrivent à la dernière minute pour sauver les miches d’une armée de l’Ordre ». En plus d’être des formidables guerriers, ce que la fin de la nouvelle met bien en avant, les Elus de Ziggy peuvent aussi jouer le rôle de stratège, mentor, commémorateur, scout et chauffeur Uber, comme démontré dans ces quelques pages. Et cela est tout aussi intéressant à lire que la description d’une mêlée furieuse, quand celui ou celle qui tient la plume sait ce qu’il fait.

 

Une autre bonne idée de Dicken aura été de refléter toute la diversité culturelle des Royaumes Mortels, qui peut avoir tendance à disparaître derrière les images d’Epinal données par les figurines et les illustrations des Battle Tomes. Les Mordants d’Arakhir Boneblight en sont un parfait exemple, leurs manières raffinées et leurs cris de guerre en vieux François contrastant admirablement avec leur apparence très classique de marée de goules. Les clans de la montagne bénéficient aussi de ce traitement, Dicken parvenant en quelques paragraphes à nous donner l’impression d’une société avec son histoire, ses croyances et ses traditions. Pas étonnant de la part de l’auteur qui nous a donné le très dépaysant (en bien) ‘The Path to Glory’, mais appréciable quoi qu’il en soit. Bref, encore une preuve que vous pouvez vous diriger en confiance vers les écrits de cet homme, même (ou surtout) s’ils sont consacrés à l’une des factions les moins mystérieuses d’Age of Sigmar.

 

1 : Amen. On peut appeler ça la tragédie du Space Marine.

 

Monsters - N. Van Nguyen :

Révélation

MonstersOù nous suivons la nouvelle1 chasseuse de monstres officielle de papa Sigmar dans l’une de ses traques dans les Royaumes Mortels, ici Shyish un soir de pluie et de brouillard. Déployée en soutien des Anvils of the Heldenhammer, occupés en contrebas à contenir une invasion de démons de Tzeentch, Yndrasta a fait le déplacement pour bannir un Duc du Changement si changeant qu’il n’a d’autre nom que l’Anomie. Super plan pour éviter d’être convoqué par des mortels ambitieux à tout bout de champ (et de chant), moi je dis. Ayant certainement compris qu’il était dans le viseur de la virago de Ziggy, l’Anomie se la joue cependant petit bras et se transforme en nuage de barbe à papa au lieu de livrer un honnête combat à la championne adverse. Sous cette forme, il se révèle aussi inoffensif qu’invulnérable, ce qui ne fait pas les affaires d’Yndrasta et de sa lance magique, Thengavar, qui disparaît corps et bien dans le protoplasme gazeux et ne revient pas dans la main de sa porteuse, comme c’est habituellement le cas.

 

Sigmar ayant pensé à lui fournir une arme de rechange, Yndie ne se laisse pas décontenancer par la tournure prise par les événements et se rue à l’assaut de sa Némésis pour finir les choses au corps à corps. Un nouveau shenanigan de l’Anomie l’envoie toutefois dans le décor, et l’intrépide héroïne fait une chute douloureuse mais pas mortelle jusque dans la piscine privée d’une grotte souterraine, Gandalf style. Elle serait repartie aussi sec (mais mouillée, je me comprends) castagner le démon si elle ne s’était pas rendu compte que son point de chute n’était pas aussi désert qu’il l’aurait dû être. Un vieil ermite d’une carrure peu commune et arborant une ‘stache de compétition a en effet assisté à sa culbute pas très légendaire, et comme le quidam exsude une aura mythique et possède une hache qui l’est tout autant (appelez ça l’intuition féminine si vous voulez), Yndrasta reste faire un brin de causette.

 

Il ne lui faut pas longtemps pour comprendre que cet inconnu n’est autre que Voyi. Si cela ne vous dit rien, c’est normal : Voyi, aussi connu sous les noms du Non Béni, du Traître et surtout de l’Oublié, était un héros de l’Âge de Mythes, élevé par Sigmar au rang de champion, mais qui choisit d’aller vivre sa vie en solitaire au lieu de défendre Sigmaron lorsque le besoin s’en fit sentir. Sigmar n’étant pas connu pour sa magnanimité envers ceux qui le déçoivent, et ayant un égo trop important pour reconnaître ses échecs, le nom de Voyi fut rayé de tous les registres officiels, et seuls une poignée d’Elus, dont Yndrasta fait partie, eut vent de l’existence de ce paria depuis lors. Dès lors, la chasseresse se trouve confronté à un dilemme peu évident : rapporter la tête du traître à son patron pour lui faire plaisir, ou tenter de négocier avec Voyi pour apprendre comment, il y a de cela des millénaires, il réussit à bannir l’Anomie…

 

Après un échange tendu, durant lequel Voyi se permit de comparer Yndrasta et les Stormcast Eternals aux monstres chassés par la première, ce qui n’est guère gentil, et ponctué par un duel rapidement conclu par un point de côté débilitant pour le champion grabataire, Yndrasta se résout à laisser l’ancêtre en paix rien que pour lui montrer qu’elle n’est pas si méchante que ça, et à retourner se battre contre l’Anomie, même s’en savoir comment le vaincre. Sa « générosité » est toutefois récompensée par Voyi, qui lui révèle avant qu’elle ne parte qu’il lui suffira de prélever un échantillon sur la forme blurbesque du démon pour l’exiler des Royaumes Mortels (et récupérer sa précieuse lance au passage). Armée de ce tuyau, Yndrasta peut enfin repartir au front, non sans promettre à son hôte de garder pour elle le secret de sa destinée. Ce sera la première fois qu’elle dissimulera des choses à Sigmar depuis sa Reforge : pourvu qu’il ne l’apprenne jamais…

 

Une très bonne entrée de la part de Noah Van Nguyen, qui part explorer l’une de mes facettes préférées du fluff des Royaumes Mortels : le côté sombre de Sigmar et de ses élus. Yndrasta en elle-même est très loin d’être une parangon de noblesse et d’humanité, puisqu’elle se décrit volontiers comme cruelle et intéressée uniquement par sa mission de chasseresse, ce qui en fait sans doute la première héroïne Stormcast Eternal de la BL ouvertement antipathique (un progrès, si vous me demandez). Sa confrontation avec Voyi m’a fortement rappelé la difficile transition entre Guerriers Tonnerre et Space Marines entre la fin de l’Unification de Terra et le début de la Grande Croisade, avec Sigmar dans le rôle de l’Empereur2, en plus de venir approfondir et complexifier le fluff de cette faction. Un choix très intéressant de la part de Van Nguyen (j’aurais moyennement apprécié me retrouver avec une nouvelle de Neave Blacktalon bis, pour être honnête), qui démontre ici qu’il est capable de sortir du manichéisme Stormcast Eternals = gentils // opposants des Stormcast Eternals = méchants dans lequel bon nombre de ses collègues ont donné. De bon augure pour son roman ‘Godeater’s Son’, qui traitera spécifiquement de ce thème, et pour la qualité et l’intérêt de la littérature AoS en général.

 

1 : Eh oui, la position était déjà prise avant que la V3 ne fasse de Miss Yndrasta une des têtes d’affiche de la franchise. Remember Neave Blacktalon ?

 

2 : On peut aussi faire un parallèle avec le ‘Misbegotten’ de Dan Abnett, où le savant fou Fo déclare à Horus qu’il considère les Primarques et les Space Marines comme beaucoup horribles que toutes créations.

 

The Huntress of Ghur - N. Van Nguyen :

Révélation

Nous suivons Luda, traqueuse de monstres de Ghur, dans une cavalcade éperdue à travers les forêts et les montagnes qui entourent l’avant-poste azyrite de Far-Keep. La raison de tant d’empressement ? Son compagnon, un forgeron et vétéran des armées des cités libres, s’est enrôlé dans un des régiments rassemblés pour chasser les Skavens de cette partie du Royaume. Malheureusement, les vermines avaient d’autres idées derrière le crâne-tête et ont embusqué les humains sur la route, décimant leurs forces avant que la bataille n’ait pu avoir lieu.

 

Après avoir examiné le lieu de l’accrochage, Luda se convainc que son cher et tendre n’est pas mort, mais a été fait prisonnier par les Skavens et ramené avec quelques survivants dans leur repaire souterrain, dont elle trouve assez facilement une entrée. Bien que se défendant tout à fait au maniement de l’arc et de la lance à Troggoth, elle sait qu’elle n’est pas de taille à s’aventurer seule dans ces tunnels, et se hâte donc vers les clameurs d’un affrontement tout proche, espérant convaincre d’autres soldats de se joindre à elle pour augmenter ses chances de réussir ce raid audacieux. En fin de compte, elle parvint à embarquer une Stormcast Eternal, Greta Wolfclaw, après lui avoir sauvé la mise lors d’un face à face tendu avec des Stormfiends et Rats-Ogors. Se doutant qu’une Elue de Sigmar ne se rangerait pas à un argument aussi fleur bleue que « mon bien aimé a été kidnappé par des furries », Luda promet à sa nouvelle amie de la guider jusqu’au portail utilisé par les Skavens pour acheminer leurs renforts, et dont la destruction porterait un rude coup à leur effort de guerre.

 

S’étant enduites de bouse de rat (c’est gros un Rat-Ogor) pour masquer leur odeur, les deux chasseresses s’enfoncent dans les tunnels, et… se perdent. Au bout de quelques heures à tourner en rond, et alors que Greta commencer à regretter de s’être embarquée dans cette galère, elles tombent sur une patrouille de Vermines de Choc en train de faire une enquête de voisinage, et massacrent allégrement tout ce qui porte moustache, à l’exception d’un Guerrier des Clans. Luda veut l’utiliser comme guide pour accéder jusqu’au portail, où elle espère low key retrouver la trace de son compagnon, mais Greta, qui a pu expérimenter la fourberie des hommes rats au cours de ses nombreuses vies, est plutôt partisane de liquider le surmulot et de continuer en binôme. La discussion s’envenime (Luda révélant à Greta ses vraies raisons pour la faire participer à son excursion de spéléologie, ce que cette dernière prend moyennement bien) jusqu’à ce que le raton parvienne à tromper la vigilance de Luda et lui entailler la joue avec son canif empoisonné, avant de se faire proprement fendre en deux par la Stormcast pour lui apprendre à respecter les lay-dees. Greta utilise aussi ses pouvoirs (c’est une Evocator-Prime de la chambre Sacro-Sainte des Astral Templars) pour cautérifier la blessure, épargnant à sa comparse une mort longue et douloureuse. Suite à cet épisode cocasse, Luda se persuade que son significant other doit être mort (sans aucune raison particulière, je dois dire), et passe en mode vengeresse. Comme il y a bien un portail à faire péter dans le coin, autant y aller pour embêter le Rat Cornu, pas vrai ?

Le portail en question étant défendu par plus de ratons que deux viragos en colère peuvent gérer à elles seules, Greta décide prudemment de passer un coup de fil au standard des Reforgés pour demander des renforts, ou l’équivalent en rituel arcanique. Pendant ce temps-là, Luda est témoin de l’attaque d’une bande de soldats humains sur la position Skaven, menée par nul autre que son +1. Bien évidemment, elle ne peut se retenir de voler à sa rencontre, laissant Greta s’engu*ler avec les standardistes sigmarites à l’arrière-plan. Serait-ce enfin un happy end dans les Royaumes Mortels ?

 

Révélation

...Et non. Enfin, ça dépend de votre allégeance. Si vous êtes un fan des Stormcast Eternals, vous serez heureux d’apprendre que le chéri de Luda se fait drafter par Ziggy, et disparaît donc en un éclair devant les yeux ébahis de notre héroïne. Cette dernière prend évidemment beaucoup plus mal ce revirement de situation, au point de laisser Greta, qui avait à ce stade raccroché après avoir passé vingt minutes à attendre que son appel soit transféré, se débrouiller toute seule dans son combat contre un Verminarque venu se joindre aux réjouissances par le portail des hommes rats. Pire, elle refuse délibérément de lui passer son épée après que le démon l’ait désarmée, causant sa 47ème mort et scellant probablement le destin de Far-Keep, le portail ayant vomi suffisamment de Skavens pour balayer les défenseurs de l’avant-poste, même s’ils peuvent compter sur l’appui des Stormcast Eternals. Nous quittons Luda alors qu’elle part en courant vers la surface avec un nouvel objectif, encore plus ambitieux que le précédent : se rendre en Azyr pour reconquérir le cœur de son boyfriend. Et gare à Sigmar s’il fait mine d’intervenir…

 

Il y a deux choses qui distinguent positivement ‘The Huntress of Ghur’ des autres récits mettant en avant les exploits guerriers des Stormcast Eternals. Premièrement, le choix d’une narration à la première personne, parti pris assez rare dans la GW-Fiction, et qui permet au lecteur de se mettre à la place du personnage dont l’histoire est racontée. Deuxièmement, et de manière assez complémentaire avec le premier point, la mentalité « tiers mondiste » de l’héroïne de l’histoire, qui balance durant toute cette dernière sur la manière dont elle considère Sigmar et ses serviteurs. Honorables frères (et sœurs) d’armes, alliés de circonstance ou simples esclaves d’un maître à l’égo surdimensionné, Luda passe part tous les états au cours de sa quête souterraine, ce qui permet à Noah Van Nguyen de ménager un véritable suspens au moment de conclure son récit. Une soumission qui ne manque pas d’intérêt, et dont j’aimerais bien qu’elle donne lieu à une suite, pour voir comment les retrouvailles entre Luda, son homme et Greta se passeraient. Quelque chose me dit que ça ne se terminerait pas en ménage à trois…

 

The Age of Enlightenment - D. Guymer :

Révélation

The Age of EnlightmentNous retrouvons Hamilcar Bear-Eater après les événements narrés dans Champion of the Gods, et si vous n’avez pas lu ce bouquin, c’est bien dommage car Guymer ne s’embarrasse guère d’un compte rendu des aventures vécues par son héros. Juché sur une princesse aetar (une sorte d’aigle géant, de ce que j’en ai compris) et accompagné de son écuyer/garde du corps/conscience Nassam, le Mangeur de nounours en guimauve arrive dans les Terres Déchaînées (Unchained Lands), où une force des cités libres défend une forteresse isolée contre une armée de Nighthaunts. Jugeant certainement qu’il est de son devoir d’intervenir en faveur des assiégés, qui ont le bon goût de connaître son nom et de l’acclamer alors qu’il fait des loopings dans le ciel porcin1, Hamilcar atterrit avec la classe et le panache qu’on lui connaît, et n’a que le temps de se farcir un petit Morghast qui passait par là qu’un Liberator vient le chercher pour le mener jusqu’au commandant en chef des sigmarites.

 

Malheureusement pour notre grande gueule, l’officier en question se révèle être une connaissance, plus professionnelle qu’amicale : le sépulcral et très corporate Lord-Celestant Settrus. Qui est également une connaissance de tous les anciens de Warhammer Fantasy Battle, comme le démontre amplement le nom de la chambre militante qu’il dirige d’une main de fer : les Impérissables. Ça, et la décoration très nehekarienne dans l’esprit de son armure. Wink wink2. Plongé dans la contemplation d’une carte dessinée à l’encre antipathique (c’est à dire qu’elle se révèle petit à petit) de la forteresse qu’il défend, Settrus n’a que peu de temps à accorder à son franc tireur de collègue, qu’il considère être venu aider sur ordre du patron. Ce n’est pas vraiment le cas, Guymer révélant à mi-mot qu’Hamilcar est au contraire recherché pour déformation spirituelle, ou quelque chose comme ça, mais notre héros est trop heureux de donner le change pour éviter d’être âme-çonné par la patrouille. Bear-Eater apprend ainsi que les Anvils of the Heldenhammer sont chargés de défendre l’une des Stormvaults récemment révélée par le Necroséisme, le trésor qu’elle contient ou le monstre qu’elle enferme étant convoité par les scions de Nagash. Cela explique aussi pourquoi la carte du bastion reste relativement cryptique, la magie du Penumbral Engine de fonction jouant des tours à la mémoire, tant vive que réelle, des êtres et choses des alentours.

 

Alors que Settrus, tout à ses ordres, est absolument ininterressé par le contenu de la Stormvault, Hamilcar ne peut résister à la tentation d’aller y jeter un coup d’œil, et parvient sans aucun mal à trouver l’entrer du lieu (alors que les autres défenseurs évitent inconsciemment l’endroit, ce que Guymer ne justifie pas le moins du monde), toujours accompagné de son coffee boy Nassam. À l’intérieur, le duo trouve évidemment un neuralyzer arcanique construit par Grugni selon les plans de Teclis, mais également sa batterie intégrée, qui se trouve être la haute prêtresse Ansira, une vieille femme enfermée dans la crypte depuis des millénaires et dont la foi en Sigmar a alimenté la machine pendant tout ce temps. Seul petit problème dans cette parfaite symbiose, Ansira en a gros. Très gros. Peut-être du aux douloureux escarres que des éons passés sur un fauteuil, même rembourré, ont certainement causés, ou bien au fait que ce goujat de Sigmar ne lui a même pas installé le cable et la wifi avant de partir jouer à la guerre, la brave dame en a ras la carafe et est bien décidée à prendre sa retraite, l’âge pivot étant depuis longtemps dépassé. Malgré les arguments – assez médiocres, il faut le reconnaître – avancés par Hamilcar et Nassam, mamie supernova (ses yeux brillent très forts) ne veut plus rempiler pour servir de pile à la machine. D’ailleurs, sa foi en Sigmar s’est trouvée tellement ébranlée après tout ce temps qu’elle ne pourrait plus officier, même si elle le voulait. Na.

 

Cette joute oratoire est interrompue par la percée réalisée par les forces mortes vivantes, forçant les survivants sigmarites à un dernier carré (ou un dernier rhomboïde, la faute à ces damnés socles ronds) dans la crypte, tandis que Mannfred von Carstein, qui était le général en charge de l’assaut, emmène ses boys au pillage…

 

Révélation

..Ayant déjà perdu la au moins une vie sous les coups du Mortarque, Hamilcar charge ce dernier pour obtenir sa revanche, décapiter l’armée adverse et se couvrir de gloire (dans l’ordre que vous voulez), tandis que Settrus et ses bien mal nommés Impérissables tentent de repousser les chevaliers vampiriques et Morghasts personnels du lieutenant de Nagash. Dans la fureur des combats, nos trois têtes d’affiche finissent par converger, au grand plaisir de Mannfred qui finit par se rendre compte qu’il connaît le sinistre Stormcast qui s’échine à lui faire bosseler la grève (sans grand succès). À moins qu’il ne s’agisse d’une vieille blague de Sigmar dont seuls les quelques transfuges du Monde qui Fut auraient le secret, ce que soupçonne le Manf’ devant la faiblesse de son adversaire. La rigolade s’arrête toutefois pour le vampire lorsque Settrus, totalement surclassé mais loyal jusqu’au bout à son patron, trouve le moyen de se connecter en dérivation au Penumbral Engine délaissé par Ansira, entrant en surcharge mystique et finissant sa carrière en fusible arcanique, non sans avoir illuminé/purifié/désinfecté (triple effet kiss cool) la crypte, avec des effets dévastateurs sur les morts vivants. Il n’y a guère que Mannfred qui s’en sorte à peu près, et trouve le moyen de ramper hors champ pour aller s’acheter un tube de biafine, profitant de l’amnésie commode d’Hamilcar au moment de porter le coup de gâce à sa Nemesis. Car, inspirée par le sacrifice altruiste de Settrus (qui pour le coup, est bel et bien mort, et ne pourra pas repasser à la case reforge), Ansira décide de reprendre ses fonctions de génératrice à communion nucléaire, permettant au Penumbral Engine de se remettre en marche de façon optimale. Comme disait Sigmaurice Thorez : « Il faut savoir terminer une grève ». À bon entendeur…

 

Je suis assez partagé par ce The Age of Enlightenment, qui comporte à mon sens autant de points forts que de faiblesses. Du côté de la coupe à moitié pleine, le personnage d’Hamilcar est toujours aussi distrayant à voir évoluer, son second degré assumé, parfois teinté d’un zeste d’amertume, le rendant très sympathique auprès du lecteur, surtout lorsqu’il est mis en contraste avec des Stormcast Eternals plus « classiques ». Et à ce titre, on ne pouvait pas trouver meilleur contrepoint à notre exubérant héros que le primesautier et gouleyant Settrus, dont le statut de demi-personnage nommé (si je puis dire) est un autre argument à mettre au crédit de cette nouvelle. D’ailleurs, le fait que notre very imperishable person rencontre ce qui semble être son destin dans The Age… ne fait que renforcer l’importance de cette lecture. Fans des Rois des Tombes, voici un incontournable absolu.

 

D’un autre côté, je reproche à Guymer d’avoir pensé cette nouvelle comme une sorte d’épilogue de Champion of the Gods, et n’avoir pas (ou en tout cas peu) pensé aux lecteurs qui aborderaient cette nouvelle sans connaissance particulière des événements relatés dans ce livre. Il faut donc s’accrocher pour replacer les personnages, leurs relations mutuelles et leurs motivations respectives, alors que quelques lignes de contextualisation auraient permis de reprendre le fil de façon satisfaisante. Peut-être en lien avec ce constat d’ignorance, j’ai trouvé que l’intrigue péchait par manque de vraisemblance sur certains points : comment les défenseurs Sigmarites ont-ils pu localiser une forteresse protégée par un appareil dissimulant magiquement sa présence, et toujours fonctionnel comme le montre la carte inutile de Settrus ? Comment se fait-ce qu’Hamilcar ne soit pas tout le temps affecté par cette magie, et beaucoup moins que les autres sigmarites, puisqu’il arrive à trouver la porte de la crypte en deux minutes montre en main ? Comment expliquer que le Penumbral Engine fonctionne tout court, puisqu’Ansira a perdu la foi quand Hamilcar la trouve ? Et comment arrive-t-elle à le remettre en marche, alors qu’elle semble plus résolue que convaincue à la fin de la nouvelle ? Peut-être que la réponse – logique, s’entend – à ces questions se trouve ailleurs dans les écrits de Guymer, mais sans éléments convaincants à exploiter de mon côté, mon impression finale est assez contrastée. Il faudra faire lumière sur tout cela.

 

1 : Sans rire, l’air de Ghur sent apparemment le sanglier.

 

2 : Ironiquement, Settra/us est lui incapable de faire des clins d’œil, le masque intégral couvrant son visage ne laissant apercevoir que des puits insondables à la place des yeux. Il paraîtrait que ce regard sévère aurait, par contre, fait ciller un Slann.

 

The Dead Hours - D. Guymer :

Révélation

The Dead HoursEreintés après une rude journée de tuerie en Shyish, Gotrek et Maneleth ont fait halte dans la petite ville de Skeltmorr pour se requinquer en attendant l’aube. Lorsque commence notre histoire, le Duardin a sombré dans le sommeil du juste après avoir vidé un tonneau de de bière et s’être fait un masque de beauté à base de jeune d’œuf et de bacon (c’est ça où il fait la vaisselle avec la langue et sans les mains). Maneleth s’est elle éclipsée pour prendre l’air, et, d’après la discussion entre les deux occupants de l’auberge investie par le vieux couple, aurait fait une mauvaise rencontre sur le chemin. Skeltmorr doit en effet un bon paquet d’os à Nagash, et les rares visiteurs sont donc invités à faire des donations en nature à l’œuvre de salut public municipale. Un tel destin attend également Gotrek, dont l’état comateux n’inspire pourtant pas confiance à Nieder Pedsen, le malabar chargé de l’amener, mort de préférence, jusqu’au repaire du redouté Tithekeeper.

 

La méfiance du reître était justifiée car le nabot émerge du coltard au moment où Pedsen s’apprête à lui faire tâter de son gourdin, et parvient à massacrer l’aubergiste (qui pour sa défense, venait de lui tirer dessus à la chevrotine) et à traîner son complice dans la rue malgré une gueule de bois carabinée. Sous ses abords bougons, Gotrek ne peut en effet laisser Maneleth dans les griffes des locaux, et demande donc à être conduit jusqu’à ce fameux Tithekeeper afin de plaider sa cause (un peu) et de planter sa hache (surtout). Sans doute nommé Lagardère sous sa cagoule de fonction, c’est le fonctionnaire tortionnaire qui vient toutefois à lui, en même temps que la moitié de la ville, réveillée par les beuglements imbibés du Duardin. Trop musclé/runé/ravagé pour être incapacité par les faibles attaques des Skeltmorriens, Gotrek massacre sans distinction tous ceux qui ont le malheur de croiser le chemin de sa hache, à commencer par le Tithekeeper. Le « boss final » de la nouvelle a donc mordu la poussière alors que nous n’en sommes qu’à la moitié du récit : comment Guymer va-t-il meubler la fin de ce dernier ?

 

La réponse est : avec des étagères Ikea et une petite visite dans la crypte du temple de Sigmar local, reconverti il y a quelques millénaires en entrepôt de stockage par les autorités de Skeltmorr. C’est en effet là qu’attend cette princesse de Maneleth que son chevalier servant vienne la secourir, ou plus précisément qu’un gentleman vienne lui rendre le couteau qu’elle a laissé planté dans la dépouille de son agresseur (ce sera Pedsen qui lui rendra ce service). Au passage, Gotrek réduira en cendres une meute de chiens issus de la filière de recyclage des déchets organiques de la ville, et que le Tithekeeper gardait pour lui tenir compagnie. Jamais à court de bonnes idées et toujours prêts à rendre service, les deux compagnons finissent la nouvelle en saccageant les stocks de cendres, d’os et d’âmes accumulés par leurs hôtes, actant par là leur « libération » de la tutelle de Nagash, mais signant plus certainement l’arrêt de mort des derniers habitants de Skeltmorr lorsque l’heure de la dîme aura sonné. Mais après tout, ils l’ont bien cherché.

 

Péripétie très mineure de la nième saison des aventures de Gotrek, ‘The Dead Hours’ est plus intéressant par les détails fournis sur la vie en Shyish que par ses péripéties combattantes, ni Gotrek ni Maneleth ne rencontrant ici un adversaire digne de ce nom1. Cela sent vraiment la panne d’inspiration devant un travail de commande pur et dur pour David Guymer, dont la tentative de s’écarter un peu du schéma classique de la nouvelle gotrekienne (embrouille, fessage de goons, gros monstre final) s’avère aussi peu concluante ici qu’elle l’avait été bien des années plus tôt avec ‘The Tilean Talisman’, son tout premier travail publié par Nottingham. Je sais bien qu’il est dur de faire des variations sur un thème usé jusqu’à la corde, mais une soumission classique mais sérieuse aurait été plus appréciable que cette improvisation assez peu concluante. Le mieux est l’ennemi du bien, du rien, et du Nain.

 

1 : Cela aurait été le cas si le Tithekeeper avait été la vieille qui se met à flécher Gotrek depuis sa fenêtre, avant de se faire fracasser les côtes d’un grand coup de boule. Sans doute le combat le plus mémorable de notre Nain depuis la Fin des Temps.

 

Death on the Road to Svardheim - D. Hinks :

Révélation

Death on the Road to SvardheimEn route vers la cité de Svardheim pour une raison sans doute logique mais inconnue de l’auteur de ces lignes au moment de l’écriture de cette chronique, le duo le plus mal assorti des Royaumes Mortels1 passe le temps et les kilomètres sur la route 88 (c’est tout plat, désertique et décoré avec des monceaux de crânes) en discutant théologie, comme à leur habitude. Bien évidemment, la situation finit par gentiment dégénérer, l’anticléricalisme blasphématoire d’un Gotrek toujours chafouin de s’être fait rouler dans la farine par les Dieux du Monde Qui Fut mettant sur les dents, qu’elle a éclatante, la dévote Maleneth. À force d’enquiller les bornes, elle finit même par les dépasser, allant jusqu’à accuser son rusé et runé camarade de servir le Chaos, à l’aide de l’argument, bien connu de George W. Bush, du « si tu n’es pas avec moi (et Ziggie) tu es contre moi ». Avant que la situation ne dégénère trop franchement, et que le Tueur vétéran ne doive se trouver encore un nouveau sidekick, les comparses tombent sur le théâtre d’une embuscade ayant été fatale à une bande de prêtres sigmarites, dont les corps décapités jonchent les alentours d’une carriole incendiée.

 

Après une rapide enquête, il s’avère que les assaillants n’ont pas réussi le perfect en matière d’élimination de témoins, une pauvre nonne répondant au nom de Carmina se présentant à nos héros et leur expliquant que sa congrégation s’est fait dérober une relique irremplaçable, le Poing Incorruptible, dont elle avait la charge et promenait de ville en ville pour ranimer la foi des locaux. Avant que Gotrek n’ait pu marquer de nouveaux points d’athéisme hardcore en demandant à Carmina en quoi un poing pouvait être corrompu, pour commencer (il en serait capable le bougre), Maleneth se fait embringuer dans une mission de récupération du saint gantelet, qu’il s’agit simplement de reprendre des mains malpropres d’une petite vingtaine de bandits, retranchés dans une forteresse abandonnée à quelque distance de la route. Rien que de très banal pour notre Tueur, qui accepte toutefois de mettre les formes et de suivre un plan un minimum intelligent (attendre que Maleneth se soit mise en position derrière le bastion pour intercepter d’éventuels fuyards) avant d’aller toquer à la porte le plus naturellement du monde.

 

La prévoyance de l’Aelf paie rapidement car il se fait bientôt jour (enfin, nuit, mais je me comprends) que les brigands sont un peu plus qu’une bande de maraudeurs sanguinaires, mais bien une authentique secte de Khorne, en train d’invoquer un démon de fort belle taille à l’aide de leur collection bien mal acquise de grigris et talismans. Maleneth n’a pas le temps de signaler qu’il y a une courge dans le potage que Gotrek est cependant déjà en train de défoncer la porte et de se tailler un chemin à travers les mobs de bas niveau, jusqu’à poser l’œil sur une Némésis digne de lui, qu’il engage évidemment en combat singulier dans la plus pure tradition du genre. Etant un VIP incontournable du multivers, Gogo est reconnu par son adversaire, qui a la mauvaise idée d’insinuer que le Tueur a fui son monde au moment de la Fin des Temps au lieu de rester et de se battre pour le défendre. Cela met notre nabot en rogne, et les deux adversaires se balancent quelques baffes amicales, sans trop d’effet de part et d’autre, jusqu’à ce que Meleneth ait l’idée géniale de confisquer les reliques ayant été mise à profit pour invoquer le démon, et dont ce dernier a encore besoin pour maintenir sa présence dans les Royaumes Mortels. Au fur et à mesure que les héros shootent dans les breloques, leur adversaire perd en taille et en carrure, jusqu’à finir rachitique et malingre, et se faire décapiter sans cérémonie par un Gotrek enfin à la bonne taille pour jouer de la hache.

 

Ceci fait, le duo infernal n’a plus qu’à remettre le Poing Incorruptible à la brave (en fait pas trop) et reconnaissante Carmina, qui s’en va à cheval remettre le précieux héritage en sécurité, pendant que nos héros continuent à pied leur périple. Poing/t final de notre histoire ?

 

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Eh bien non (comme la balise spoiler ne le laissait pas du tout envisager), car lorsque nos voyageurs, fourbus (surtout pour Maleneth) et assoiffés (surtout pour Gotrek) tentent d’obtenir le gîte et le couvert d’un monastère sigmarite croisé un peu plus loin sur la route, se disant à juste titre que tous les culs bénis à la ronde leur sont redevables de leurs récents exploits, c’est pour entendre un son de cloche bien différent. Carmina était en fait une voleuse ayant mené sa bande, déguisée en prêtres, dérober le fameux Poing Incorruptible (mais pas Inatteignable) de la garde des vrais fidèles de Sigmar, en tuant quelques uns au passage. L’abbé outré qui fait ce récit aux voyageurs est persuadé que l’iconoclaste va briser la relique en mille morceaux pour revendre la Pierre de Royaume dont elle est faite au plus offrant, au mépris de tous les commandements de Sigmar. C’est donc une grosse boulette, sur laquelle Maleneth manque de s’étouffer, mais qui ne déclenche chez ce philosophe de Gotrek qu’un rire tonitruant. Il en a certes vu d’autres…

 

Eh bien ça y est : après avoir laissé Gotrek (et le regretté Felix) à leurs aventures dans le Monde Qui Fut, je renoue enfin avec ce héros mythique sous sa nouvelle incarnation, à travers ce court format signé du père adoptif #3 du Tueur de… trucs, Darius Hinks. Ce qui m’intéressait particulièrement dans ces retrouvailles était de voir ce qui avait changé, et ce qui était resté, des précédentes aventures de M. Gurnisson, qui constituaient un sous-genre de la littérature BL à elles seules. L’équilibre n’était pas facile à trouver entre respect servile du cahier des charges, forcément un peu obsolète, établi par King et Long en la matière, et innovations radicales, qui auraient enlevé tout le sel de ce come-back improbable. Et je dois dire que Darius Hinks s’en est plutôt bien sorti, tant sur le fond que sur la forme. On est bien en présence d’une aventure de Gotrek & Cie, avec notre petit rouquin teigneux, grincheux et pince sans rire s’embarquant dans un combat à haut risque contre un adversaire très balèze (sur le papier en tout cas), au grand désespoir de son partenaire attitré. Ce qui change ici est que Gotrek est devenu un mécréant militant, gardant sa dernière dent contre tout le panthéon divin (à commencer par Sigmar, qui s’en prend plein les tresses), alors que Maleneth est, sous ses abords de tueuse froide, une zélote du grand barbu, ce qui est à la fois surprenant (c’est le type qui la voyait comme une pseudo Assassin druchii qui parle) et intéressant. Notons également que Hinks ne se gêne pas pour glisser quelques références au passé proprement légendaire de son héros et donc à feu Warhammer Fantasy Battle, ce qui devrait faire plaisir autant qu’intriguer le lecteur historique de la saga. Bref, le contrat est bien rempli dans ce ‘Death on the Road to Svardheim’, qui tient son rang parmi les cohortes de nouvelles Gotrekesques publiées par la BL depuis des temps immémoriaux. Reste à savoir ce que cette dernière compte faire de son increvable héros sur le long terme, maintenant qu’il ne peut absolument plus mourir (ce serait un énorme fail), mais ceci est une autre histoire.

 

1 : Gotrek est un Nain (et pas un Duardin) roux exhibitionniste, et Maleneth est une Aelf brune gothique.

 

Buyer Beware - G. Thorpe :

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Buyer BewareNotre histoire commence par une descente de boardercross Kharadron, qui, comme chacun sait, se court en combinaison intégrale de laine de goret à poils longs de Chamon. Partis à cinq de la ligne de départ, située dans le nid d’une Maw-Crusha en attente d’un heureux événement, seuls quatre Duardin parviennent à boucler la course dans les temps impartis et en un seul morceau. On portera longtemps le deuil de Rogoth (casaque, culotte et barbe jaune poussin), dont les tendances gauchistes lui ont été fatales. Les Nains sont un peuple de (virage à) droite, c’est bien connu.

 

Parvenus jusqu’à la sécurité – toute relative – de leur vaisseau (Night’s Daughter), le capitaine Karazi ‘Fairgold’ Zaynson et ses acolytes n’ont pas besoin de signaler au reste de l’équipage qu’il serait de bon ton de souquer les aethertibuses, comme on dit à Barak-Mhornar : les rugissements tonitruants et les attaques en piqué de la mère poule dérangée dans sa retraite étant une motivation suffisante. Un tir de mitraille bien senti plus tard, l’affaire est réglée aux torts partagés : une gueule et une épaule chevrotinée pour le Maw-Crusha, ce qui l’oblige à rejoindre le plancher des Squigs, et une méchante estafilade de coque pour la Night’s Daughter. Pas assez pour amener le fier vaisseau par le sol, mais assez pour occuper l’endrineer de bord et son assistant pendant une bonne partie du voyage jusqu’à la destination fixée par Fairgold : un avant poste Orruk où l’attend le deal de sa vie. Car oui, à Age of Sigmar, les Nains et les Orques ne sont pas irrémédiablement et définitivement fâchés, et peuvent (apparemment) faire affaire quand la situation l’exige. En l’état, Fairgold a besoin de renflouer les caisses en exploitant un filon d’aether-or localisé par la tribu peau-verte avec laquelle il a rendez-vous, afin de financer une nouvelle expédition pour localiser l’épave d’un navire familial, le Night’s Gift. Une raison qui en vaut une autre, et se révèle donc assez impérieuse pour justifier les tractations contre nature dans lesquelles le capitaine entraîne ses matelots.

 

Arrivés à bon port après ne s’être que légèrement écrasés dans la forêt proche du village Orruk (équipage secoué + immobilisation), les Kharadron envoient une délégation réduite négocier l’accord avec la partie adverse, tandis que le reste de l’équipage s’emploie à remettre le châssis en état, sous les ordres de Verna (l’endrineer susnommée). À terre, Fairgold et ses compagnons rencontrent finalement le massif Orgaggarok, chef de la tribu du Poing qui Tombe, qui possède ce qu’ils désirent : une carte localisant l’emplacement précis du gisement d’aether-or convoité, flairé par les pouvoirs surnaturels du Wardancer local1.  Mais en échange, Orgaggarok veut les trois œufs de Maw Crusha que ses invités ont apportés avec eux, ce qu’un négociateur vétéran comme Fairgold ne peut laisser passer sans froncer de la moustache. Après un marchandage vindicatif et énergique, l’accord est sur le point de sans conclure sans le moindre sang versé sur la base de deux filons contre trois œufs, lorsque l’expert en ruralité profonde que le chef Orruk a amené à la table au tronc de négociation, lui hurle dans l’oreille qu’il est en train de se faire avoir comme un bleu. Les taches caractéristiques qui ornent la coquille des œufs montrent en effet de façon formelle que ces derniers viennent des Pics de Fer… qui sont sur le domaine des Poings qui Tombent. Oupsie.

 

Vendre un bien que l’acheteur possédait déjà étant une pratique universellement condamnée, le dialogue tourne court et les lames sortent des fourreaux (pour ceux qui en ont). Bien que tenus en respect par l’arsenal de leurs visiteurs, les Orruks sont tout prêts à foncer dans le tas pour apprendre les bonnes manières leurs visiteurs, mais l’arrivée de deux catastrophes aériennes coup sur coup va donner à Fairgold et ses matelots la distraction nécessaire pour se sortir de ce guêpier. D’abord, Mama-Crushaw débarque au village, guidé par son instinct maternel infaillible, ou la puce de géolocalisation qu’elle avait placé sur ses œufs (allez savoir, c’est de la high fantasy, je ne serais même pas surpris). Puis, c’est la Night’s Daughter, enfin réparée, qui arrive à son tour, abat pour de bon le lézard volant en rut, défonce la palissade Orruk, et maintient les sauvages en respect assez longtemps pour permettre aux VRP de remonter à bord. Bien entendu, Fairgold a trouvé le moyen de chiper la carte d’Orgaggarok au passage, et tout est bien qui finit donc bien pour nos petits gars et filles. Même mieux que bien, car ils ont gardé le dernier œuf de Maw Crusha pour eux, et que ce dernier vient d’éclore. Et une mascotte pour la Night’s Daughter, une !

 

Après des débuts discrets à Age of Sigmar (comparé à sa production soutenue pour Warhammer Fantasy Battle ; 40.000 et l’Hérésie d’Horus), Gav Thorpe signe une petite nouvelle posant tous les jalons d’une suite plus ambitieuse avec ce ‘Buyer Beware’. J’en vux pour preuves la galerie conséquente de personnages qu’il prend le temps de nous présenter, ainsi que les relations particulières qui unissent certains d’entre eux (Fairgold et Verna semblent très proches), mais également la mise en perspective de la quête inlassable de Fairgold pour le Night’s Gift, qui justifie tous les événements narrés dans ce court format. Il est encore trop tôt (au moment où cette chronique est écrite) pour acter de la véracité de cette intuition, d’autant plus que Thorpe a déjà une série de romans sur le feu – ça se passe à Aqshy après tout – pour AoS, avec ‘The Red Feast’ (et sa.es suite.s), mais il y a des signes qui ne trompent pas. Pour le reste, ‘Buyer Beware’ tient assez bien la route, sans originalité folle ni style flamboyant, mais avec un dosage correct d’action et d’humour, et surtout sans les incongruités regrettables dont Gav Thorpe parsème parfois ses soumissions à écrire sans se poser de questions. Qualité naine, dirons-nous.

 

1 : Spécialisé dans les souffles (ou pets, si on demande à ce diplomate né de Fairgold) de Mork, nom donné par les Orruks à ce type de filon.

 

Reflections in Steel - C. L. Werner :

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Reflections in SteelLe village de Kyoshima, attaqué par la bande du chef barbare Gharm, brûle bellement tandis que ses habitants sont passés au fil de l’épée par les pillards1. Tous ? Non ! Le jeune Kenji, qui revenait sans doute du casting de The Voice, est épargné in extremis par le boss en question, qui n’hésite pas à châtier un de ses sbires de son épée enchantée2 lorsque le rustre fait mine de hacher menu notre menu. La discipline, c’est sacré. La situation de Kenji ne s’améliore toutefois que marginalement suite à ce sauvetage, le coup de buzzer et d’espadon de Gharm ne débouchant que sur une douloureuse servitude aux mains du maître esclavagiste Sazaal, dont le sadisme et l’amour des châtiments corporels font honneur à cette belle profession. Placé tout en bas de la pyramide sociale de l’armée du chef de guerre Kravoth, Kenji tue le temps en tuant ses compagnons d’infortune pour nourrir les fringantes et carnassières cavales de l’ost chaotique, et en se jurant de vivre assez longtemps pour se venger de son infâme tortionnaire.

 

C’est à l’occasion d’un raid mené contre un nouveau village qu’une occasion se présente pour l’esclave de mener ses plans à exécution, et Sazaal également par la même occasion. Réquisitionné par les maraudeurs – qui apprécient sans nul doute sa jolie voix, même s’il est quasiment impossible de jouer de la guitare avec les mains enchaînées – Kenji se retrouve pris dans une embuscade montée par des Skavens en quête de loot, et qui s’abattent sur l’arrière garde piétonne de la bande pillarde alors que les cavaliers ont le dos tourné. Quand on vous disait que ces hautes herbes étaient dangereuses (saleté de Ratatas). Un coup de chance et une épée récupérée sur un cadavre plus tard, Kenji peut enfin laisser libre cours à sa revanche, et réduit Sazaal en purée une fois la vermine mise en déroute. Loin de s’offusquer de ce petit meurtre entre amis, Gharm, revenu sur ses pas constater pourquoi ses péons n’arrivaient pas, libère Kenji de ses chaînes et lui offre un CDI (carnage à durée indéterminée) dans son équipe, ce que Jiji accepte sans broncher.

 

Nous retrouvons notre héros quelques temps plus tard, à l’occasion d’une véritable bataille entre la horde de Kravoth et un ost de Fyreslayers probablement doublement discriminés du fait de leur peau noire et de leur poil roux (combo). L’affrontement donne l’occasion à Kenji de s’illustrer auprès de son n+1, en l’aidant à venir à bout d’une Salamandre souffrant d’un léger problème de coordination motrice, en s’acharnant comme le sadique qu’il est devenu sur le petit orteil de la bestiole. Ce qui est atrocement douloureux, comme quiconque a une table basse chez lui peut en témoigner. De hauts-(mé)faits en triomphes, la côte de Kenji continue de croître en même temps que son stuff se bonifie, ses chakrams de fer passant à l’or, au platine, puis au diamant, jusqu’à ce jour fatal où Gharm emmène ses ouailles piller un hameau absolument mi-na-bleuh, ce que notre self made man trouve très humiliant, en grande partie car cela lui rappelle douloureusement ses propres débuts. D’ailleurs, c’est lorsqu’il refuse d’épargner un jeune garçon qui se cachait dans les décombres de sa cahute que Gharm se retourne contre son suivant dissipé, et lui fait goûter à la même médecine métallique et auto-nettoyante qu’au faquin qui avait fait mine de lui porter le coup de grâce toutes ses années auparavant. La boucle est bouclée pour Kenji, qui ne peut constater la disparition de sa bonne étoile, tandis que son menton repart avec sa nouvelle trouvaille, Lilian Renau (sans doute).

 

Après The Last of the Blood (Maledictions), C. L. Werner poursuit ses explorations japonisantes des Royaumes Mortels, avec cette nouvelle de belle facture, remettant au goût du jour deux classiques de la littérature « chaotique » : le cheminement (ou la déchéance) du héros, qui progresse insensiblement vers la damnation jusqu’à devenir ce qu’il avait toujours combattu d’une part (Les Cavaliers de la Mort, et plus récemment, The Path to Glory), et la saga épique se terminant de façon ignomieuse et prématurée, rappelant à quel point les Dieux du Chaos sont des maîtres cruels et inconstants (The Ignorant Armies, The Laughter of the Dark Gods, The Talon of Khorne). Si ce récit n’apprendra rien de nouveau aux vétérans de la BL, qui pourront tout de même bénéficier de la maîtrise de Werner en matière de conduite d’intrigue et de construction d’atmosphère – on regrettera seulement que les Skavens de l’histoire ne soient que des goons, alors que l’homme au chapeau s’est souvent illustré par son utilisation inspirée de cette noble race dans ses écrits – , les plus jeunes (ou en tout cas les plus neufs) des lecteurs en seront quitte pour un apprentissage des choses du lore, en compagnie d’un des professeurs les plus qualifiés et compétents qui soient. À mettre en toutes les mains/pattes/tentacules.

 

1 : Ce qui permet de vérifier encore une fois que les noms se terminant en -shima semblent attirer les catastrophes (voir Hiroshima et Fukushima).

 

2 : Elle se nettoie toute seule en un clin d’œil… Voilà ce qui arrive quand on laisse ce farceur de Zuvassin s’occuper des dotations aux aspirants.

 

The Inevitable Siege - R. James :

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La très longue vie de Kanem Sharu, sorcier de Tzeentch de profession, a pris un tour désagréable ces derniers temps. Membre de la légendaire troupe des Inévitables Chevaliers (ça rend sans doute mieux en VO), notre héros est techniquement immortel, ce qui est assez sympathique il faut le reconnaître. Ce don lui a été accordé après que lui et ses potes aient mis la main sur l’équivalent du Death Note des Royaumes Mortels, pendant le sac d’une bibliothèque Lumineth. Inscrire le nom et la manière dont une personne doit mourir dans le Livre des Fins Inévitables condamne en effet la première à décéder de cette façon… mais seulement de cette façon. Toujours prompts à exploiter les failles des règles, comme tout bons disciples de Tzeentch qui se respectent, les affreux ont couché sur le papier les morts les plus improbables qui soient (ex : décapitée par une plume), s’assurant de facto l’immortalité. Toutefois, rien n’est éternel sous le regard des Dieux, et la renommée des Chevaliers a fini par leur attirer l’attention soutenue des suivants de Khorne, toujours à la recherche de nouvelles têtes pour décorer le trône du Patron. Jugeant que celles de pseudo-immortels auraient plus de chances de leur accorder les faveurs du K, ils ont poursuivi Kanem et ses potes à travers les Royaumes (et usé d’une approche scientifique du problème à résoudre très étonnante pour des disciples du dieu du carnage) jusqu’à ce que seul ce dernier demeure en vie… pour le moment. Poursuivi par une tueuse du nom de Gulnar Thrax, le Sorcier s’est enfoncé dans un désert très hostile avec l’espoir que sa Némésis périrait avant lui, mais réalise bientôt qu’il se fera rattraper avant cela.

 

En désespoir de cause, il choisit d’utiliser un de ses derniers jokers et appelle un ami démoniaque pour lui demander conseil. Serviable, l’entité magique le téléporte un peu plus loin dans le désert, où une armée est censé l’attendre pour lui permettre de régler son compte à la tenace Thrax. Petit problème, l’ost en question a déjà un commandant, l’Elu de Tzeentch Tzymon Gul Techtvar, et est très occupé à assiéger la cité de Khulna Khesh, pour la plus grande gloire de Cui. Simon est persuadé que l’arrivée subite de Kanem est une intercession de l’Architecte du Changement en sa faveur, et que le légendaire Chevalier Inévitable va l’aider à conquérir la ville. De son côté, notre héros cherche juste à mettre le plus de distance et d’obstacles entre lui et sa poursuivante, et accepte donc la mission impossible qui lui est confiée : s’emparer seul de Khulna Khesh. Confiant dans son immortalité, il demande à son nouveau boss de le déposer au cœur de la cité, où il pourra se refaire une santé avant de se téléporter dans un voisinage plus sympathique (Khulna Khesh est affiliée à Khorne). Tzymon accède à sa requête et charge un de ses Tzaangors sur disque du convoyage, mais garde avec lui le précieux bâton cabalistique de Kanem, en partie pour le forcer à revenir le chercher, et en partie pour se venger du fait que le Sorcier ne se soit pas prosterné devant lui au début de leur entretien. #MeanBoss

 

Echoué dans une cité aussi inconnue qu’hostile, Kanem n’est toutefois pas totalement dépourvu. Usant de son mode opératoire favori (le micro-management des irritants), il créée des dizaines de petits incidents, entourloupes, quiproquos et autres émeutes sur le chemin qui le mène vers le temple central de Khulna Khesh, plongeant la ville dans une anarchie meurtrière encore plus grande que d’habitude, et lui permettant d’esquiver les gardes de faction pour accéder jusqu’au Hierofex, le seigneur de Khorne régnant sur la cité.

 

La confrontation entre notre héros au corps de lâche et l’idole à la peau d’airain qui se révèle être le Hierofex ne tourne logiquement pas en la faveur de Kanem. Bien qu’étant techniquement protégé par son immortalité, cette dernière ne sert qu’à prolonger ses souffrances face au champion de Khorne, qui cherche à attirer l’attention de son dieu en lui sacrifiant l’Inévitable Chevalier (sounds familiar), et est tout à fait au courant de la protection mystique dont son adversaire dispose. Résolu à littéralement tout tester pour parvenir à ses fins, et à celle de Kanem, le Hierofex multiplie les blessures débilitantes mais non mortelles, limitant drastiquement les options du sorcier. En désespoir de cause, ce dernier sort une baguette de sa besace, et la pointe de manière menaçante sur le colosse de métal, semblant oublier qu’il a reçu une bénédiction divine contre les sortilèges, et que quiconque tentera de l’abattre avec de la magie sera puni par Khorne en personne…

 

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Début spoiler…Aussi, lorsque le Hierofex lui arrache son hochet des mains et le casse en deux sans y penser à deux fois, il ne se rend pas compte qu’il a commis une tragique erreur. La baguette contenait un charme de guérison mineur, invoqué par celui qui la brise. Le Hierofex est donc devenu, à son corps défendant, un utilisateur de magie, ce qui fâche Khorne tout rouge. Le champion disgracié fait donc une spectaculaire sortie du chemin de la gloire (alors que l’ascension était si proche, c’est triste) et se retrouve changé en Enfant du Chaos. Cela laisse à Kanem les mains libres pour saboter le plan qu’il avait établi pour vaincre les assiégeants, à savoir sonner la neuf fois (et pas huit) la grande cloche du temple, signalant à tous les défenseurs de Khulna Khesh de s’entretuer pour permettre à un ost de Sanguinaires de se matérialiser dans la cité. Le coup de cloche supplémentaire ayant douché l’enthousiasme des démons, la ville se retrouve sans chef ni renforts, et privée d’une bonne partie de ses troupes. Ce ne devrait plus être très compliqué d’en venir à bout, si ?

 

Eh bien, il semblerait que Tzymon rencontre tout de même quelques difficultés à remplir son objectif, même en mode facile. Lorsque Kanem sort de la cité, cette dernière est en effet toujours contestée, et l’Elu de Tzeentch n’est visiblement pas en maîtrise de la totalité de ses troupes. Ce ne sont toutefois pas les affaires de notre héros, qui veut simplement reprendre possession de son bâton avant de tailler la route. C’est alors que quelqu’un lui tape sur l’épaule pour attirer son attention…

 

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…Horreur, il s’agit de Gulnar Thrax, qui a profité de son occupation récente dans une side quest débile pour refaire son retard. A la grande surprise, suivi d’un grand soulagement, de Kanem, sa poursuivante ne le reconnaît pas, et le prend au contraire pour un collègue (elle l’a vu sortir de la cité). En quête d’informations sur la localisation de sa proie, elle lui demande s’il ne pourrait pas la rencarder à ce sujet, et Kanem se fait une joie de lui indiquer qu’il a pris l’apparence de Tzymon Gul Techtvar pour tromper sa poursuivante, mais a fait la grossière erreur de conserver son bâton comme signe distinctif. Voilà qui devrait occuper ces deux fripouilles quelques temps, et laisser à notre héros éprouvé toute latitude pour disparaître des radars. Du passé, faisons inévitable rase…

 

 

Ils sont peu nombreux les auteurs à avoir réussi à dompter le potentiel narratif du Chaos dans leurs écrits, la plupart se contentant de mettre en scène le parcours sanglant mais prévisible et assez ennuyeux au final, d’un héros parvenant à s’élever dans la hiérarchie chaotique et/ou à mourir dans la tentative. Rhuaridh James démontre ici qu’il fait partie de ce cercle très fermé d’Elus, en signant avec sa toute première nouvelle pour la Black Library un futur classique de la littérature chaotique.

 

The Inevitable Siege’ nous plonge en effet dans ce que l’on pourrait considérer comme « la vie de tous les jours » pour les servants mortels des Dieux Sombres, expression beaucoup trop mondaine pour rendre justice à l’anarchie et la folie ambiante qui est leur lot. Kanem Sharu, sorte de Rincevent des Royaumes Mortels (c’est-à-dire un personnage tout à fait banal et prosaïque, auquel le lecteur peut facilement s’identifier, mais maîtrisant parfaitement les codes et les règles de l’univers étrange dans lequel il évolue), tente tant bien que mal de gérer les petites complications de sa vie de champion-de-Tzeentch-immortel-mais-pas-tout-à-fait, avec l’enthousiasme de Carlo Tentacule et la roublardise de Thanquol (oui je sais, ça fait beaucoup d’univers différents convoqués en une phrase). Cette formule détonante fonctionne à merveille, bien aidée par le respect dont James fait preuve envers le background d’Age of Sigmar1. Il ne s’agit pas ici d’une parodie assumée, comme ont pu l’être les écrits d’Andy Jones à l’époque de Warhammer Fantasy Battle2, mais bien des aventures d’un anti-héros dans les Royaumes Mortels.

 

Bonus appréciable, ‘The Inevitable Siege’ contient tous les éléments nécessaires pour devenir le premier épisode d’une future série, qui serait très intéressante à lire si elle continue sur cette lancée : un héros charismatique (à son niveau), son impitoyable Némésis – qui finit aussi l’histoire en un seul morceau –, et un concept central suffisamment riche et original pour permettre à un auteur compétent de produire plusieurs nouvelles/romans pour l’explorer en profondeur. Bref, il va falloir apprendre à écrire correctement le nom de Rhuairidh James (comme celui d’ADB il y a quelques années), car ce petit gars a un vrai potentiel.

 

1 : Pas étonnant de la part d’un auteur qui a commencé par écrire du fluff pour Games Workshop.

 

2 : ‘Grunsonn’s Marauders’ et ‘Paradise Lost’.

 

The Heart of the Fallen - S. Cawkwell :

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The Heart of the FallenDans les grandes plaines du Bloodwind Spoil, une double traque est en cours. Pendant qu’un mystérieux chasseur poursuit sa proie dans les étendues sauvages, trois jeunes guerriers Untamed Beasts, le sensible Dhyer et les frère et sœur Open Skies et Fleet-Foot, sont à la recherche du frère ainé du premier, un pisteur bravache du nom de Sharp Tongue. Ayant juré de traquer l’une des grandes bêtes qui hantent le territoire de la tribu afin de prouver sa valeur et de gagner en prestige, Langue de P*te est parti en solitaire il y a quelques jours, et son frangin s’inquiète de ne pas le voir revenir. Comme quoi, on peut vénérer une divinité chaotique assoiffée de sang1 et avoir le sens de la famille.

 

Les deux pistes finissent par converger à l’entrée d’une caverne d’un genre un peu particulier. Non pas qu’elle semble être un organisme géant, avec mur fourré (et probablement moquette du même acabit), ventilation pulmonaire et œils-de-bœuf plus vrais que nature. C’est finalement assez commun dans la région. C’est plutôt qu’elle possède des caractéristiques hydrographiques a priori inconciliables, la marque d’une véritable bénédiction des Dieux Sombres si vous voulez mon avis. Les Castueurs Juniors relèvent des indices de lutte, dont une dent humaine traînant dans la poussière, révélant que leur cher disparu n’est sûrement pas loin (et en effet, il a dû négocier un pétunia un peu envahissant à son arrivée dans la grotte, qui lui a prélevé quelques PV au passage). Redoublant de prudence, ils finissent par arriver dans une salle occupée par un lac de boue, au milieu duquel, unis dans la mort, se trouvent les cadavres d’un chasseur Untamed Beast et du monstre qu’il a tué avant de périr. Et quel monstre! Il s’agit rien de moins que d’un fort beau spécimen de Raptoryx2. On ne rigole pas dans le fond! Les ornithorynques du Chaos peuvent être dangereux quand ils sont acculés, et ce n’est pas Sharp Tongue qui soutiendra le contraire, raide mort qu’il est.

 

Bien qu’un peu tristes de cette conclusion tragique, US Open, Flip Flop et D’ailleurs décident de rendre au défunt l’hommage qu’il mérite, en dévorant rituellement son cœur afin de bénéficier de la force du macchabée. Le buffet froid est toutefois brutalement interrompu par le réveil du Raptoryx, qui, malgré la lance lui traversant le gésier de part en part, était loin d’avoir dit son dernier coin. La triplette de ploucville n’a guère le choix: il faut finir le boulot que ce peine-à-occire de Sharpie a salopé pour espérer sortir de l’antre de la bête. Malgré leur habileté à la sagaie en os, la hachette en silex et la dague en onyx, les Untamed Beasts ne s’en sortent pas indemnes, et Open Skies change rapidement son nom en Open Guts. Son sacrifice n’est toutefois pas vain, sa sœur et son (probablement futur) beauf combinant leurs forces pour euthanasier l’impossible palmipède. La nouvelle se termine sur un nouveau gueuleton, obligeamment offert par Open Skies, qui dans la mort comme dans la vie, avait le cœur dans la main (même si, ironiquement, c’est du coup aussi vrai de Dhyer et Fleet-Foot). Mais alors que nos tourtereaux se préparent à prélever le foie gras proprement monstrueux de leur proie, les eaux du pédiluve boueux se mettent de nouveau à trembler3

 

Je suis un peu partagé au sujet de ce Heart of the Fallen. D’un côté, il m’est agréable de constater que Sarah Cawkwell ne semble pas partie pour retomber dans ses travers Hammer & Bolteresque, sa nouvelle étant solidement construite et, mises à part quelques incongruités (comme la caverne à la sécheresse humide) et erreurs de fluff (le Raptoryx présenté comme un prédateur solitaire alors qu’il a littéralement une règle qui indique qu’il chasse en meute – oui, je suis chiant -), somme toute assez mineures, plutôt agréable à lire. De plus, l’effet de nouveauté de Warcry joue encore à plein, justifiant d’autant plus la lecture de ce genre de soumissions, intrinsèquement originales (ce que ne peuvent pas dire les nouvelles de Space Marines et Stormcast Eternals qui constituent l’ordinaire de l’habitué de la BL). De l’autre, je suis assez déçu de la platitude de l’intrigue, alors que tout semblait indiquer qu’un twist final viendrait récompenser le quidam à la fin de la nouvelle. Jugez plutôt: et si le mystérieux chasseur, qui se révèle au final n’être que ce fier-à-bras-cassé de Sharp Tongue, avait été un guerrier d’un autre tribu que celle de nos héros, et que la bête qu’il traquait avait été Sharp Tongue, horriblement muté par le Chaos? J’avoue que je m’étais drôlement hypé sur cette hypothèse, que le refus catégorique de Cawkwell de nommer son premier protagoniste m’avait fait soupçonner, puis espérer, jusqu’à ce que le pot aux roses soit découvert. On ne me retirera pas de l’esprit que Heart of the Fallen aurait eu plus d’allure avec ce petit retournement de situation final, tout à fait grimdark dans l’esprit. Et puisqu’on parle de conclusion, ce qu’a voulu faire Cawkwell en achevant son propos sur ce que j’interprète comme l’arrivée d’un nouveau monstre dans la mare au canard (mais quel canard), sans plus de précisions ni d’indications sur son origine, m’échappe encore à l’heure actuelle. La nuit porte conseil paraît-il, alors…

 

1 : D’ailleurs Cawkwell insiste pour appeler le Grand Dévoreur ‘Eater of Worlds’. Ca ne vous rappelle rien? Peut-être qu’Angron vient chiller dans les Huit Pointes lorsqu’il se fait expulser du Materium par les Chevaliers Gris.

 

2 : Sachant que l’individu moyen arrive à l’épaule d’un être humain, celui-ci devait être aussi grand qu’un homme. Bon, ce n’est pas Thornwinder contre Harrow (voir The Devourer’s Demand), mais tout le monde ne peut pas se battre contre des vraies créatures semi-divines.

 

3 : Et? Eh bien rien du tout. Ca se termine vraiment comme ça. Etrange.

 

I, Behemat - E. Gregory :

Révélation

Exilé de son clan après avoir joué trop de sales tours à ses petits camarades, Yaggle le Git a trouvé refuge dans une ferme (dont il a tué le propriétaire, il faut tout de même le préciser), et médite sur sa condition de génie incompris auprès du cochon qui lui sert de thérapeute. Ses réflexions cathartiques sont interrompues par l’arrachage en règle du toit en chaume de la masure, et la descente d’une main gigantesque, qui vient rafler bétail, cadavre et gobelin, avant de tout fourrer dans une musette de fort belle taille. Yaggle, qui n’est pas le dernier des abrutis, comprend assez vite qu’il a été ramassé par un Gargant, situation peu favorable s’il en est1. Profitant de la gloutonnerie du géant, qui ne peut s’empêcher de piocher dans son sac comme s’il s’agissait d’un sachet de dragibus, Yaggle s’accroche à la vache sélectionnée par le Gargant et se retrouve face à face cagoule avec HRADOTH, le plus puissant des Mega-Gargants, ou du moins se présente-t-il ainsi. De son côté, notre ruzé héros s’introduit en toute simplicité comme étant la réincarnation de Behemat, le dieu et ancêtre de tous les Gargants. Hradoth faisant remarquer avec justesse qu’il est un peu petit pour une bête zodiacale, Yaggle assure qu’il vient de renaître, et qu’il grandira plus tard. Sentant le doute s’emparer de son public, le pseudo-Behemat propose à son pseudo-descendant de lui révéler une information que seul un dieu peut connaître, et qui se trouve être l’endroit où faire le meilleur repas de sa vie. Plus affamé que brillant, Hradoth accepte et son nouvel ami le dirige droit vers le campement de son ancien clan, pour une petite revanche par Gargant interposé…

 

Après avoir aplati, piétiné et englouti la plupart des Gitz et leurs animaux de compagnie, Hradoth se laisse aller à une confidence digestive auprès de Yaggle. Il a lui aussi été chassé par les siens, en l’occurrence la sévère Tantine et ses trois idiots de fils (Baldoth, Qu’un Œil et Junior), après qu’il ait commis l’affront de se servir en premier à manger. Bien que ne boxant pas dans la même catégorie, Yaggle est sensible au traitement injuste que son gros copain a subi, et lui souffle quelques conseils avisés pour lui permettre de se venger de sa famille indigne. Grâce à la ruse du Git et l’avantage de taille de Hradoth par rapport à sa parentèle (qui ne sont « que » des Gargants), le duo de choc remporte une victoire probante, les trois affreux cousins mordant la poussière et Tantine étant à son tour forcée à l’exil.

 

Cette nuit bien remplie a fatigué Hrodath, qui se dirige dans une forêt toute proche pour piquer un petit roupillon, mais pas avant que Yaggle ne lui ait raconté une histoire pour s’endormir. How cute. De son côté, le Git décide de ne pas plus forcer sa chance, et abandonne le grand dadais dans son sommeil pour reprendre une vie normale. Ce retour sur le plancher des Squigs se passe cependant moins bien que prévu, Yaggle tombant sur une bande de guerre de chevaucheurs d’araignées, bien décidés à régler son compte au Mega-Gargant avant qu’il ne leur fasse subir le sort de leurs cousins troglodytes, dont ils ont eu vent. Embarquant Yaggle au passage dans leur vendetta colossale, ils ne se doutent pas que le Git maigrichon qu’ils ont pris en stop est le commanditaire de l’extermination de leurs voisins. Par contre, le loonboss Wazzit, seul survivant du massacre et responsable de l’exil de Yaggle, est en mesure de les rencarder sur ce petit détail de l’histoire. Ce revirement de situation force notre héros à prendre ses robes à son cou et courir réveiller Hradoth avant que le venin des araignées ne le paralyse.

 

Profitant du nez chatouilleux du Gargant, Yaggle parvient à sortir ce dernier de sa torpeur à temps pour qu’il écrabouille les menaçantes bestioles, et Wazzit avec par la même occasion. Cette péripétie convainc le Git, qui avoue à Hradoth n’être pas vraiment Béhémat, mais son prophète, de finalement rester coacher le grand dadais, lui promettant de lui trouver les meilleurs plans pour casser la croûte à travers les Royaumes Mortels. Après tout, la fable ne dit-elle pas qu’on a toujours besoin d’un beaucoup plus gros que soi ?

 

Petite nouvelle fun de la part d’Eric Gregory, dans la lignée de ‘Bossgrot’. Sans grande surprise, mais avec un plaisir curieux (c’est la première fois qu’une nouvelle donne le point de vue d’un Gargant), on suit les mésaventures de ce duo de choc, pas si différent l’un de l’autre une fois la question du gabarit évacuée2. L’intrigue est très simple, et Gregory a déjà montré qu’il savait faire mieux que ça, mais ça reste tout de même sympathique à lire.

 

1 : Au moins ce Gargant là avait un sac, et notre héros n’a pas fini dans le pantalon du colosse, comme ça aurait pu être le cas à Warhammer Fantasy Battle.

 

2 : Ce qui est logique parce qu’il n’y a plus de gabarit à Age of Sigmar.

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A Taste of Lightning - A. Tchaikovsky :

Révélation

La ville minière d’Ort, en Ghur, n’est pas née sous une bonne étoile. A peine établie par une cohorte de hardis mineurs humains et Duardin pour exploiter les filons des montagnes toutes proches, elle s’est révélée être à proximité d’un portail de Royaume donnant sur Shyish, et a été promptement envahie et annexée par une légion d’Ossiarch Bonereapers. Pour ne rien arranger, les expulsés doivent aussi composer avec l’arrivée de gens du voyage d’un genre particulier : la tribu ogor du Tyran Krult. Ce dernier avait prévu d’assiéger la ville pour se repaître de ses habitants, mais a la flexibilité d’esprit nécessaire pour changer le programme de la journée lorsque ses éclaireurs viennent l’informer de l’identité des nouveaux occupants d’Ort, et décréter un « peekneek » (il a appris plein de mots savants lorsqu’il était Mangeur d’Hommes) de réfugiés à la place.

 

Avant que les Ogors n’aient pu se mettre en marche, une délégation menée par l’érudite Lumineth Celarais demande à parler au Tyran. L’Aelf propose à Krult de changer à nouveau de plan, et de se battre aux côtés de la milice d’Ort et des Stormcast Eternals qui les ont rejoints (représentés dans l’ambassade par le taciturne Stenarius) pour reprendre la ville. En dédommagement des services rendus, les Ogors seront payés en nature par l’organisation d’un grand festin, préparé par nul autre que le célèbre chef Hugh Pen Andual, que Celarais a également fait venir, contre son gré il faut le préciser. Intéressé par la proposition mais souhaitant vérifier les credentials de celui qu’il a immédiatement rebaptisé Poignée de Poêle1 avant de s’engager à quoi que ce soit, Krult met au défi le chétif humain de relever le brouet que la Bouchère de la tribu (Brugha) a fait bouillir pour le petit déjeuner des troupes. Une tâche que le chef accomplit aisément grâce à sa réserve d’épices (qui sort très entamée de la préparation, les concepts de « pincée » et « soupçon » étant absents du vocabulaire ogor), lui gagnant l’estime de Krult et de ses fins gourmets. Ce que ces derniers ne savent pas, c’est que Pen Andual a tenté de les empoisonner pour pouvoir filer à l’anglaise, une tentative qui n’avait aucune chance de réussir dixit Celarais (Céleri pour les intimes), qui se doutait que le cuisinier allait recourir au poison pour se sortir de ce guêpier. La Lumineth, spécialisée dans l’écriture de livres de cuisine, ou quelque chose comme ça, a en effet étudié la carrière de Pen Adual et compris qu’il avait tendance à laisser ses employeurs morts ou très malades une fois qu’il décidait d’aller voir ailleurs. Une technique de mobilité professionnelle comme une autre…

 

Du côté d’Ort, un gentlemen’s agreement a donc été trouvé entre les factions non-mortes, qui convergent sur la ville pour en chasser les squatteurs. Grâce à l’impact apporté par les Ogors, la coalition arrive à entrer dans l’enceinte fortifiée, mais la défense inspirée du général Ossiarch (Ankahnet), l’empêche de clamer victoire. Barricadés sur la place du centre-ville, les lanciers squelettiques se montrent intraitables. Pour ne rien arranger, Krult décide de retirer ses troupes de la bataille pour aller prendre un thé à l’extérieur de la cité, au grand désarroi de Celarais. Elle ne met pas longtemps à apprendre que le fourbe Manche de Poêle s’est mis sous la protection du Tyran, qui n’a donc plus besoin de remplir sa part du contrat pour bénéficier des services du chef. Il va falloir trouver un autre moyen de convaincre les Ogors de se remettre à table…

 

Révélation

…Et c’est de Stenarius que vient l’illumination. Ayant entendu Krult se plaindre qu’il n’avait jamais eu la chance de déguster un Stormcast Eternal, du fait de leur fâcheuse tendance à partir en fumée au moment de leur mort, le serviable sigmarite accepte de remédier à cette lacune et de faire don de son corps à la panse, mais seulement si Krult arrive à l’attraper. Ceci fait, il part en courant vers les combats, entraînant à sa suite toute la tribu, et se fait un devoir d’aller défier en duel le général adverse, qui le renvoie voir Sigmar en un moulinet de son épée enchantée, sous les yeux horrifiés du Tyran. Ankahnet n'aura pas le temps de savourer sa victoire, son squelette finissant éparpillé façon puzzle par un Krult furieux qu’on lui ait piqué son goûter, et sa fière légion lui emboîte rapidement le pas.

 

Notre histoire se termine par le banquet promis aux mercenaires ventripotents, qui acceptent de mettre les voiles après avoir fini de lécher les assiettes. Il ne fait pas de doute que la tribu reviendra voir ses nouveaux amis dans quelques temps, et que la cohabitation pourrait ne pas aussi bien se passer, mais c’est un problème pour une autre fois…

 

Pour sa première nouvelle siglée Age of Sigmar, Adrian Tchaikovsky a choisi de marcher dans les pas de Robert Earl, l’auteur de référence pour la noble race des Ogres à l’époque de Warhammer Fantasy Battle2. On peut aussi lui trouver une affiliation avec Sandy Mitchell, en raison de son approche décomplexée et humoristique d’une franchise autrement plus premier degré. Le résultat est en tout cas très distrayant, parfaitement lisible, et fera plaisir aux fans des Ogors et des Ossiarch Bonereapers, deux des factions les moins gâtées par la Black Library à ce jour3. On espère aussi avoir des nouvelles de Celery et Panhandle, un duo les plus mal assortis des Royaumes Mortels et dont la suite des aventures promet donc d’être passionnante, si le très occupé Tchaikovsky a du temps à y consacrer.

 

1 : Panhandle en VO, jeu de mots avec Pen Andual.

 

2 : ‘Wild Kingdoms’, ‘The Last Little Bit’.

 

3 : On peut tout de même signaler que gros lards et sacs d’os se retrouvaient déjà opposés dans la nouvelle ‘Strong Bones’ de Michael J. Fletcher. L’atmosphère était bien moins bon enfant, par contre.

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The Offering - A. Clark :

Révélation

The OfferingC’est la belle sombre nuit de Noël Nost’rnight, ce qui signifie une chose pour les habitants de Breaker’s Vale, avant-poste minier de Chamon : leur offrande doit être livrée au pied de l’arbre du don sans tarder, sous peine de terribles représailles. Guidée par leur Aîné, une petite délégation de péquenauds chemine donc péniblement jusqu’au point de drop ‘n collect le plus proche, chargée des maigres richesses que les locaux ont mis de côté à cette fin au cours de l’année écoulée. Au moment de repartir se calfeutrer dans les chaumines, le jeune Narry choisit cependant d’initier sa crise d’adolescence en questionnant tout haut le choix de ses concitoyens de détourner une partie de la production de Breaker’s Vale pour payer un tribut à ce qu’il considère n’être que de vulgaires brigands. Le moment a beau être très mal choisi, l’Aîné prend sur lui de remettre le petit rebelle à sa place, en lui racontant ce qui s’est passé l’année où l’offrande n’a pas été faite…

 

À l’époque, Breaker’s Vale venait d’accueillir son nouveau maire, Gustav Thatcher, fils exilé pour détournement de fonds d’une grande famille azyrite. Ce châtiment n’avait cependant pas suffi pour guérir Gus de sa sale manie de truquer les registres et s’en mettre plein les poches (ou dans le cas précis, le coffre), l’édile malgré lui de Breaker’s Vale ne comptant pas rester toute sa vie à moisir rouiller dans l’arrière-pays chamoniard, et ayant besoin d’accumuler un petit pécule pour pouvoir faire son retour dans le game. Un amoureux des livres (de compte) comme lui ne pouvait donc pas manquer de rapidement remarquer les discrètes mais visibles modifications apportées par un quidam tout aussi filou que lui à son propre registre, preuve indiscutable que le PIB de Breaker’s Vale se faisait siphonner par de multiples fripouilles. On pourrait presque parler de république bananière si Sigmar n’était pas un despote (et plutôt foudroyant qu’éclairé, si vous voulez mon avis).

 

Guère soucieux de partager, et encore moins ravi d’avoir été pris par une andouille par ses administrés, Gustav remonta rapidement à l’origine du problème, et fit main basse sur le butin collecté par les locaux, malgré les supplications de son majordome (Saul) de laisser les habitants déposer leur offrande annuelle aux Grobbi Blackencap, sous peine de représailles. Croyant avoir affaire à une vulgaire superstition paysanne, Gustav refusa tout net, ce qui mena Breaker’s Vale à connaître une nuit très agitée, comme vous pouvez vous en douter. Mécontents de n’avoir pas reçu leur dû, les Gits locaux organisèrent une soirée à thème « Spores sur la ville », résultant en de multiples vomissements et purulences fatales parmi la population. Sauvé par le dévouement de ses gardes et le bon cœur de Saul, Gustav parvint à s’enfermer dans son coffre alors que les séides de la Mauvais Lune prenaient d’assaut son manoir, laissant son majordome s’expliquer avec les intrus. Ce fut toutefois la fourberie de trop pour l’arnaqueur de la métropole, qui se rendit compte un peu trop tard que Saul connaissait lui aussi le code de la chambre forte, et n’avait plus aucun scrupule à laisser son employeur s’expliquer en tête à tête avec la mafia gobelinoïde chamoniarde (et le Troggoth du parrain à capuche local).

 

Son récit terminé, l’Aîné (un Saul un peu décrépit par le poids des années) constate avec satisfaction que cette grande gueule de Norry n’a plus rien à redire au versement de la dîme, et enjoint son monde à regagner ses pénates métalliques en attendant que le soleil se lève. Comme on dit dans le coin, entre la caverne et le fungus, mieux vaut ne pas mettre le doigt.

 

Andy Clark retourne aux champignons avec ‘The Offering’, nouvelle mettant à nouveau en lumière (de la Mauvaise Lune) les déprédations micellaires des Gloomspite Gitz, quelques mois après la sortie de son roman ‘Gloomspite’. Ce court format se suffit à lui même1, et nous sert une variante AoSesque du récit classique du tribut versé par une communauté démunie à une force maléfique pour éviter les ennuis. Le déroulement de cette petite fable sera donc familier à la majorité des lecteurs, l’originalité et la valeur ajoutée de ‘The Offering’ résidant (un peu) dans les quelques descriptions graphiques des maléfices dont sont capables ces farceurs de Gitz, et (un peu aussi) dans la révélation de l’identité « secrète » de l’Aîné, qui aurait pu être aussi bien un Thatcher assagi par son accrochage avec la ruralité profonde de Chamon que le très évident Saul. À titre personnel, et ayant lu à de nombreuses reprises que Clark avait produit pour ‘Gloomspite’ des passages proprement nauséeux (ce qui est une bonne chose pour de la littérature gobeline, j’imagine), je suis resté sur ma faim : mis à part la classique mouche dans le potage – ici livrée sous sa variante d’asticot dans le pudding – et quelques inhalations de spores aux effets dermatologiques regrettables, rien n’est vraiment dégoutant. Un peu trop insipide à mon goût donc, même si l’ensemble reste très correct.

 

1 : On notera tout de même la présence d’un personnage nommé Saul dans les deux histoires. Comme quoi, en cas d’infestation gobeline, better call Saul.

 

Strong Bones - M. R. Fletcher :

Révélation

Strong BonesJeunes Ogors idéalistes (un peu) et affamés (beaucoup), Stugkor – Stug pour les intimes et les moins dégourdis, ce qui va assez souvent ensemble chez les ogres – , Chidder et Algok décident de fuguer de leur tribu. Le but de cette manifestation, somme toute assez classique du mal-être adolescent et de la remise en cause de l’autorité établie qui va avec, est simple : trouver un campement humain dans lequel se servir directement, la consommation des restes rapportés par les vrais chasseurs du clan ne suffisant plus à nos rebelles. Aussitôt dit, aussitôt fait : le trio enfourche ses scooters débridés Ferox et part à travers la taïga hivernale, à la recherche d’une proie digne de lui. Las, les vastes étendues et la faible densité démographique de cette partie de Ghur ont tôt fait d’épuiser l’enthousiasme juvénile des teen-agers, qui peinent dans la neige et le froid pendant quelques jours avant de tomber sur le village qu’ils appelaient de leurs vœux (et de leur estomac).

 

Manque de chance, Stug et Cie ont été devancé par une armée de constructions squelettiques, affairées à dépecer les cadavres de leurs victimes, dans le but de récupérer les os de ces dernières. Un comportement à la limite du sacrilège pour nos Ogors affamés, qui ne comprennent pas pourquoi les morts-vivants jettent de la viande de premier choix pour se concentrer sur les parties dures des cadavres. Il y a certes de la savoureuse moelle à l’intérieur, mais tout de même ! Leurs savantes supputations sont toutefois interrompues lorsque le Soulreaper en charge de l’opération de tri et de collecte, pose son regard perçant sur les badauds bedonnants, et envoie l’un de ses Deathriders kavaler aux alentours. Confiants dans leur capacité de règler son compte au scout ossu, les Ogors piquent des deux et contre-chargent, pour des résultats assez dramatiques. Le Kavalos n’a en effet aucun mal à coup-fataler les Ferox de la fine équipe, ne laissant que Stug en état de se battre après que ses comparses aient raté le test de terrain dangereux consécutif à leur désarçonnage. Et, si l’intraitable squelette finit en esquilles, ce n’est pas sans avoir gravement blessé notre héros, et l’avoir complimenté sur sa solide ossature (ce qui revient sans doute à une déclaration d’amour lorsqu’on est soit même constitué uniquement de cela).

 

En rade au milieu de nulle part et confrontés à une horde de fémurs pas vraiment amicale, les trois petits ogrons décident de mettre les bouts pour avertir leur tribu de l’arrivée de ces nouveaux voisins. La course de fond étant, comme chacun sait, une spécialité des morts-vivants, et voyant la partie mal engagée, les Ogors se séparent, espérant qu’au moins un d’entre eux parviennent à bon port. La fin de la nouvelle est ainsi centrée sur Stug, qui après un vaillant effort, finit par cesser sa course pour faire face à l’inévitable. Les Bonereapers prenant les choses de la guerre très au sérieux, notre vaillant gros lard a l’occasion de prouver sa valeur en concassant un certain nombre de champions ennemis, jusqu’à ce qu’un Stalker vienne finir le job. À l’agonie, Stug ne peut même pas tirer un peu de fierté de la réussite de son plan de contingence, Chidder et Algok ayant déjà été calcifiés par les sbires de Nagash, comme notre héros vaincu ne peut que le constater alors qu’il gît dans la neige. Et quant au sort de sa tribu, il est également scellé, comme lui apprend l’aimable Soulreaper de faction : ses sortilèges lui permettront de prendre possession des souvenirs de sa prochaine victime en même temps que de sa dépouille mortelle. Moralité : ventre affamé n’a pas d’oreilles, mais attention à ne pas tomber sur un os.

 

Fletcher signe une nouvelle aussi solide que les os de ses malheureux personnages, dont l’un des attraits est la mise en avant de deux factions encore assez peu couvertes par la Black Library à ce jour : les Ogors et les Ossiarch Bonereapers. Si le propos de ce Strong Bones est avant tout de permettre aux petits derniers de Nagash (décidément un family man) de faire leur entrée dans le monde (ou plutôt, dans les Royaumes), Fletcher se révèle également assez habile dans l’utilisation de Stugkor, Chidder et Algok, et parvient à donner une bonne image de la mentalité et du quotidien des Ogors. Au final, on ressort de cette lecture avec une meilleure image du danger que représentent les Ossiarch pour les autres factions d’Age of Sigmar, ainsi qu’avec une description crédible d’une des plus discrètes de ces dernières. Que du bonus.

 

.Fangs of the Rustwood - E. Dicken :

Révélation

Fangs of the RustwoodChargé d’escorter les trois suspects de l’assassinat du Gouverneur Bettrum de la cité d’Uliashtai, en Chamon, le Répurgateur Kantus Val(l)o de l’Ordre d’Azyr décide de couper à travers bois pour rallier au plus vite la cité d’Eshunna, où les geôles spacieuses et les tortionnaires attentionnés de l’Inquisition sigmarite auront tôt fait de délier – ou d’arracher, à défaut – les langues des gardés à vue. Ces derniers, mis à part un bon motif d’en vouloir à feu Bettrum, n’ont pas grand-chose en commun. Notre triumvirat de crapules se compose en effet du mage geignard et prophétique (un vrai Nighthaunter d’Age of Sigmar) Elabrin, de l’empoisonneuse patentée Garrula Heko, et de la Capitaine édentée de la garde d’Uliashtai, simplement nommée Lim.

 

Le choix de Kantus d’emprunter la route traversant le Bois de Rouille ne s’avère guère brillant (ce qui est normal, car l’oxydation du fer corrode le métal), mais plutôt tranchant, la flore acérée de Chamon forçant la petite troupe à jouer de la hache pour se frayer un chemin sous les frondaisons métallisées. Ayant profité d’une halte pour cuisiner ses prisonniers, le Répurgateur doit mettre en pause son interrogatoire lorsqu’une de ses gardes se prend les pieds dans le tapis et choit lourdement dans une fosse tapissée de pieux empoisonnés (piejâkon#1). N’écoutant que son courage, Kantus… accepte qu’un des collègues de la malheureuse aille la repêcher au fond de son trou. Il donne cependant de sa personne en faisant contrepoids au bout de la corde, mais une autre fausse manœuvre des plus ballotes déclenche prestement la détente d’une tige épineuse… empoisonnée (piejâkon#2), qui met le bon samaritain en PLS, juste avant que Kantus ne le laisse carrément aller se pieuter en sous-sol lorsqu’un Gobelin des Forêts juché sur une araignée géante décide de s’inviter à la fête en hurlant « I am Groot! ». L’invité mystère ayant intoxiqué l’un des deux gardes restants de notre héros, ce dernier est colère et règle leur compte aux nuisibles de quelques moulinets bien sentis, avant d’aller s’enquérir du bien-être deses charges (une enquête de l’IGPN est si vite arrivée).

 

Le dialogue qui s’engage a vite fait de convaincre Kantus de l’impératif catégorique de laisser les gredins lui prêter main forte afin d’avoir une chance de se sortir du guêpier arachnéen dans lequel il s’est jeté. Rendant à ses prisonniers leurs armes et équipements en échange d’une vague promesse de bien se comporter (quel laxisme), Kantus les entraîne vers l’orée du bois, dans l’espoir un peu vain de distancer les Grots dont les tambours commencent à résonner dans les fougères. Ce qui devait arriver arrive lorsque notre petite troupe, au casting digne du JDR Age of Sigmar s’il était sorti (un Chasseur de Sorcières, un Mage, un Guerrier, un Rôdeur et un PNJ à DLC courte), débouche dans une clairière où l’embuscade des peaux vertes se déclenche. Bien aidé par le sort de pointeur laser inversé et préemptif d’Elabrin1, les humains ne s’en sortent pas trop mal dans un premier temps, les carreaux empoisonnés de Garrula et les coups d’épée de Kantus et Lim prélevant un lourd tribu dans la biodiversité du Bois de Rouille. Hélas, comme il l’avait prédit, le mage se fait capturer au lasso, et si son noble – et pas du tout consenti – sacrifice permet de gagner un peu de temps à ses comparses pendant qu’il se fait torturer à mort dans un bosquet, la situation n’est pas brillante pour ces derniers…

 

Révélation

…réduits au nombre de deux après que Kantus ait constaté le décès inopiné de la dame de carreau(x). Fichtre. Enjoint par la vétérane Lim de quitter les lieux le plus rapidement possible, notre héros décide de faire du zèle en collectant les armes de Garrula, qui pourront peut-être permettre d’identifier le tueur du Gouverneur Bettrum, si on venait à retrouver une trace d’un poison similaire à celui utilisé pour pourrir (littéralement) l’édile sur les lames de l’empoisonneuse. Une bonne action ne restant jamais impunie, le Répurgateur se fait prestement attaquer par Brienne de Tarth (dans ta gu*ule), après avoir constaté que Garrula a connu la même fin que l’infortuné Gouverneur, révélant Lim comme la coupable des deux meurtres. Cette dernière trouvait en effet que cette grosse bête de Bettrum utilisait bien mal les forces de l’Ordre, et que son incapacité notoire à s’occuper de l’infestation Grot couvant dans le Bois de Rouille condamnerait à terme Uliashtai à la Destruction. Ca se tient, ça se tient, y a pas à dire. 

 

Insensible aux arguments de la soldate, Kantus l’est beaucoup moins à ses bottes vachardes, et l’idée de son trépas prochain lui travers l’esprit en même temps que l’épée de Lim fait de même avec sa panse. Abandonné à son triste sort par l’intraitable Capitaine Marlim, Kantus devrait se dépêcher de mourir s’il ne veut pas goûter à l’hospitalité légendaire des tribus Spiderfang…

 

Evan Dicken nous revient après ses débuts très convaincants (The Path to Glory), toujours à Chamon mais cette fois à l’époque contemporaine2, avec une histoire se voulant un match-up d’enquête policière (Mais qui a tué le Gouverneur Bettrum?) et de sword & sorcery. Si la brièveté de son propos ne lui donne pas la possibilité  d’exceller dans l’un ou l’autre de ces exercices, le meurtre de Bettrum se résolvant sans grande révélation, et la baston finale, pour honnête qu’elle soit, n’étant en rien mémorable, Dicken déroule cependant son récit avec sérieux, ce qui rend la lecture de The Fangs of the Rustwood plaisante. L’auteur réussit assez bien à faire ressortir la nature sauvage et dangereuse des Grots des Forêts, qui n’ont pas grand-chose de marrant lorsqu’on se retrouve nez à chitine avec leurs araignées géantes. Il parvient aussi à maintenir une tension narrative digne de ce nom, d’abord en jouant sur l’identité secrète du tueur, puis sur le destin attendant le héros. Venin sur le crochet, le fluff n’est pas absent de ces quelques pages, ce qui est tout bénef. Bref, ce (plus) court format permet à Dicken de cimenter son statut de Hot New Talent de la BL, et l’une des plumes à suivre d’Age of Sigmar dans les mois à venir.

 

1 : En gros, on voit une petite lumière s’allume à l’endroit où un projectile va finir sa course une seconde avant que le coup parte, très pratique pour la balle au prisonnier et l’esquive de flash ball).

 

2 : Même si des références à son cher empire Lantique et à la cité d’Uliashtai, qui avaient été mis à l’honneur dans cette première nouvelle, se retrouvent tout au long du texte..

 

The Threshold - D. Annandale :

Révélation

the-threshold.pngBien qu’il lui en ait beaucoup coûté, aussi bien physiquement (bras gauche, œil droit, rotules…) que mentalement, le Seigneur Ormand a réussi à atteindre le but qu’il s’était fixé : libérer sa cité de Lugol de la domination de Nagash et de Neferata. Ce qui n’est pas un mince exploit quand on réside au cœur de Nefaratia (le royaume personnel de la Mortarque du Sang), et que l’on ne peut plus compter sur les Stormcast Eternals de l’affable Sigmar pour faire service d’Ordre. Au prix de mesures drastiques (interdiction des cimetières, crémation obligatoire en dehors de la ville le jour même du décès) et arcaniques (mise en place d’un sceau magique autour de la ville pour en interdire l’accès à tous les morts vivants), Lugol est devenu indépendant, et Ormand a la satisfaction de pouvoir passer ses derniers jours avec la satisfaction du devoir accompli.

 

Alors qu’il effectuait sa balade quotidienne jusqu’aux ruines de la passerelle qui reliait précédemment la forteresse de la cité à la passe de Blindhallow, détruite lors de l’ultime siège subi par la cité1, notre héros à la désagréable surprise de se faire héler par nulle autre que Nefarata, venue par Adevore express tailler le bout de gras avec celui qui a osé la défier. Assise posément de l’autre côté de l’abîme, la Mortarque ne semble pas nourrir, ou boire, de mauvaise intention envers Ormand, et se montre simplement curieuse à propos des ambitions poursuivies par le mortel à travers cette émancipation « amortelle ». D’abord suspicieux, et on le comprend, Ormand se laisse finalement convaincre de revenir dialoguer le lendemain, malgré les protestations de sa fille et héritière Kristane, qui flaire un coup fourré de la part de la vamp. La conversation reprend donc, et après avoir flirté un moment avec la haute philosophie (Nefarata demandant à son interlocuteur que valait une liberté achetée au prix d’une peur et d’une vigilance constante2), finit par porter sur le crépi (Nefarata trouve que l’extérieur de Lugol est tristounet) et les divertissements (Nefarata est convaincue que les Lugolois s’ennuient à – presque, vue que c’est interdit – mourir). Ormand n’a beau ne pas être d’accord, il peine à contredire son adversaire, et passe une très mauvaise nuit à imaginer des répliques percutantes qu’il aurait pu lui sortir pour lui rabattre le caquet.

 

À son réveil, cela va tellement peu fort qu’il se persuade rapidement que son heure est arrivée. N’ayant donc plus rien à perdre, ni à craindre, il tue le temps en attendant d’aller poursuivre son entretien avec une vampire en faisant un petit tour en ville, où, effectivement, ce n’est pas la joie qui étouffe ses sujets. Qu’importe pour Ormand, dont la thanatophobie militante s’accommode bien de quelques sacrifices. C’est donc le cœur léger mais le souffle très court que le vieil homme rejoint son siège près du pont, pour une ultime joute verbale avec la Reine des Mystères…

 

Révélation

…Qui évidemment, ne s’est pas tapée le voyage depuis Nulahmia et deux nuits en camping sauvage au pied des murailles de Lugol pour repartir bredouille. Comme craint par la sagace Kristane, Nefie avait un plan pour reprendre le contrôle de la cité : donner à Ormand le baiser de sang pour en faire son serviteur. Sans blague. La vraie question est de savoir comment elle va s’y prendre, étant donné que l’accès de la ville lui est impossible, et que notre héros n’est pas assez bête pour l’inviter à entrer. Eh bien, par l’hypnose, pardi ! Nefarata baratine quelque peu son public sur la « joie du sang » et la « beauté de la mort », et quand elle claque des doigts, Ormand est devenu son vassal. Simple, basique. // Ta Gueule, C’est Magique. Pas la peine d’être plus précis, cette histoire est déjà finie. Ormand pète le sceau protecteur le soir même, convertit sa fille à l’hématophilie, et l’envoie ouvrir la porte à Neferata, qui prend possession de Lugol comme si de rien n’était. Une reconquête sans arme ni haine ni violence, ça se respecte.

 

David Annandale retombe dans ses travers passés de jemenfoucécool-iste décomplexé avec la conclusion de ‘The Threshold’, qui était pourtant assez plaisant jusqu’à ces fatidiques deux dernières pages. Les bonnes idées de l’auteur, telles que donner le beau rôle à l’adversaire de Neferata, ou privilégier la réflexion (pseudo) philosophie à l’action frénétique, se retrouvent en effet battues en brèche par le dénouement proprement scandaleux que l’auteur nous sort de son stylo, justifié par une pauvre phrase balancée par Nefarata au détour d’un paragraphe3, comme si de rien n’était. Au-delà du fait qu’il ne faut pas prendre les enfants du bon Dieu pour cafards volages, et que ce qu’a fait Annandale correspond à annoncer « bombe nucléaire !!! » dans une partie de chifoumi, cela ouvre une longue et large faille de « mais si…, alors… » dans le background, ce qui est cher payé pour pouvoir offrir un twist final à une nouvelle de 12 pages. À moins qu’il soit de notoriété publique et fluffique que dans Age of Sigmar, on peut donner le baiser de sang par message vocal, auquel cas, je retire mon accusation d’opportunisme narratif envers Annandale. Mais on ne me retirera pas de l’esprit qu’il y avait moyen de faire, et surtout, de finir, mieux que ça.

 

1 : Quand il dit qu’il coupe les ponts, il ne fait pas semblant.

 

2 : Ormand, qui a fait un bac pro et pense que Kierkegaard est une marque de baskets, ne sait pas trop quoi répondre.

 

3 : “VaMpIrIsM cAn TaKe MaNy FoRmS.

 

The Wolf and the Rat - C. L. Werner :

Révélation

The Wolf and the RatScandale à la cour de Radukar le Loup, sanguinaire car vampirique maître de la cité d’Ulfenkarn, en Shyish. Une précieuse relique a été dérobée dans la crypte où elle sommeillait depuis des lustres, plongeant notre atrabilaire héros dans une colère noire (logique) : on lui a volé son doudou !!! Ah, on me dit dans l’oreillette qu’il s’agit en fait de la pelisse du vampire qui lui donné le Baiser de Sang, ce qui est un peu plus classe, mais beaucoup moins drôle, que ma version des faits. Je m’incline de bonne grâce et reprends le cours de mon récit.

 

On apprend rapidement que le crime à peine commis est déjà revendiqué par une coterie de suceurs de sang ne goûtant pas au règne sans partage de Radukar sur son fief, et souhaitant, d’après les mots bredouillants de leur émissaire, le froussard Valac Chrobak, seulement remettre au goût du jour le conseil municipal, où Loulou aurait bien sûr un siège. Le messager ayant raté son test de charisme de façon critique, il est expédié dans la post non-vie par les gardes du corps Ogors de Radukar, qui décide de prendre les choses en main. Sachant que les ravisseurs de courtepointe lui ont donné rendez-vous dans le quartier des docks pour procéder à l’échange, il en prend le chemin sans tarder, confiant dans le fait que sa Sénéchale, l’ex-pirate tournée vampiresse (vive les reconversions professionnelles, franchement) Natasyia, sécurisera discrètement le périmètre avec les squelettes de la garde municipale, au cas où l’affaire s’envenimerait.

 

Sur place, il retrouve une vieille et funeste connaissance, le Prince des Rats Kritza, un noble dévoyé (vampire lui aussi, évidemment) qui a pris la tête de la cabale lupophobe après que Radukar l’ait laissé pour mort suite à un petit accrochage autour de la machine à café. Kritza et son corps de lâche ne sont évidemment pas venus seuls : une petite bande de petites frappes à canines pointues a fait le déplacement, afin d’équilibrer un peu les choses entre Rad’ the Chad et Kritza le Rat. Sans surprise, l’entrevue se passe moyennement, chacun campant sur ses positions, jusqu’à ce que Natasyia arrive avec les renforts promis pour précipiter la résolution du litige…

 

Révélation

…Seulement, cette fourbe de flibustière repentie jouait en fait du côté de Kritza. C’est d’ailleurs elle qui a dérobé la peau du père de Radukar, et l’a remise aux conjurés. Les griefs de Nat’ sont simples : elle en veut à son boss de ne lui avoir pas dit qu’être un vampire créait un grand vide spirituel, ce qui était pourtant assez facile à prévoir en réfléchissant deux secondes au concept de non-vie. Heureusement qu’il n’y a pas de termes et conditions dans les Royaumes Mortels, ce serait un véritable carnage. Quoiqu’il en soit, Radukar se retrouve finalement isolé et encerclé au milieu des épaves pourries (je ne parle pas des vampires) du port, ce qui n’est pas une situation enviable. Le plan de Kritza est simple : mettre le feu à l’une d’entre elles et faire pousser le seigneur d’Ulfenkarn dans le brasier par le cordon de sécurité squelettique rameuté par Natasyia. Aussitôt dit, aussitôt fait. A moins que…

 

Révélation

…A moins que ce rusé de Radukar ait flairé la combine à des kilomètre grâce à sa truffe de loup, et ait pris des mesures de contingence pour piéger les piégeurs. Il désactive ainsi les squelettes d’une simple commande vocale1, et fait signe à ses fidèles Ogors zombies de sortir des coulisses avec leurs pieux de fonction pour châtier les trublions. Ce retournement de situation pousse la clique de Kritza à tenter de rusher Radukar, avec des résultats… médiocres. Un peu plus réfléchie, Natasyia se saisit de la pelisse convoitée par son ex-patron, et fait mine de la jeter dans les flammes de l’épave s’il ne la laisse pas partir. Manque de bol, en tant que « fille » de Radukar, elle découvre bientôt que braver la volonté paternelle n’est pas une sinécure, et finit par apporter gentiment la fourrure au brasier, et elle avec par la même occasion, lorsque le pater familias lui ordonne. Reste Kritza, qui en tant que personnage nommé avec une figurine dispose d’une sauvegarde invulnérable en sigmarite, et se tire donc d’affaire avec son special move, l’effervescence murine. La nouvelle se termine sur ce tableau théâtral, Radukar jurant sur ses grands morts d’éradiquer la menace surmulote sans aucune merci. Prend des notes, Anne Hidalgo.

 

Nouvelle d’accompagnement du livre qu’il a consacré à la dynastie Vyrkos (‘Cursed City’), qui n’était lui-même qu’un produit dérivé de la boîte de jeu éponyme, ‘The Wolf and the Rat’ sent franchement le réchauffé. Les fortes contraintes scénaristiques avec lesquelles il a dû composer pour écrire cette nouvelle, dont tous les personnages nommés devaient réchapper, ont amené le vétéran Werner à nous servir de la soupe littéraire, qui n’intéressera à la rigueur que les lecteurs souhaitant creuser le lore d’Ulfenkarn, bourgade mineure de Shyish et bac(kground) à sable patenté. Mêmes les surprises que l’auteur souhaitait ménager en guise de twists finaux tombent à plat, faute d’alternatives crédibles à l’inénarrable trahison-du-bras-droit-secrètement-insatisfait, contrée aussi sec par la toute aussi fameuse prévoyance-de-vieux-briscard-qui-ne-faisait-que-donner-le-change-mais-qui-avait-tout-pigé-depuis-longtemps. C. L. Werner fait généralement beaucoup mieux quand on le laisse s’amuser avec des ratons, et on peut donc classer cette nouvelle parmi ses moins réussies pour le compte d’Age of Sigmar.

 

1 : J’imagine que chacun squelette avait une dent bleue au fond de la mâchoire.

 

A Tithe of Bone - M. R. Fletcher :

Révélation

A Tithe of BoneMarkash, champion de Tzeentch de son état et philosophe bavard à ses heures perdues (il commence la nouvelle en dictant ses pensées sur la destinée à son scribe Palfuss1) a été envoyé par ses patrons conquérir la ville de Knazziir, en Shyish, histoire d’apprendre à ce vieux chnoque de Nagash que le changement, c’est maintenant. Persuadé d’avoir hérité d’une destinée grandiose, il ne doute pas un instant de réussir là où son ancien mentor, le légendaire Ammerhan, a failli. Cet autre Élu de Tzeentch a en effet cessé de poster sur Instagram peu de temps après avoir commencé sa campagne necrophobe, ce qui laisse à penser que les indigènes ont eu sa peau, ou plutôt, ses os. Ayant réussi à enlever Knazziir en un après-midi de glorieux combat, Markash a passé les dernières semaines à la défendre contre les attaques, à vrai dire mollassonnes, des âmes damnées du grand Nécromancien, qui poppent au petit bonheur la chance de façon régulière. Cela lui laisse donc beaucoup de temps pour enrichir son corpus philosophique, même si son humeur reste, comme son épée démoniaque Ktchaynik2, massacrante (en témoignent les volutes de fumée noire exhalées par les joints de son armure). Alors qu’il était sur le point de revisiter ‘I Had a Dream‘ à la sauce samouraï architecte (du changement), il est interrompu dans son exposé par l’arrivée de son bras droit, le chevalier Stayn Lishik, qui lui annonce que des « morts bizarres » se sont présentés à la porte de Knazziir. Remisant ses souvenirs d’enfance dans sa psyché éclatée, Markash sort de son isolement pour voir de quoi il en retourne.

 

Effectivement, un petit groupe ossu patiente obligeamment devant les murs de la cité. Menés par un Mortisan Soulreaper très poli, les collecteurs de Nagash demandent que la dîme d’os leur soit remise. « Des os neufs » précise Morty, après que Markash lui ait fait remarquer que les alentours de la ville étaient tapissés de cadavres en plus en moins bon état. Le Nag’ ne fait pas dans la seconde main (ni pied, ni jambe, ni cage thoracique) pour son élite combattante, c’est bien connu. Peu impressionné par les envoyé mortifères, Markash décide d’aller se dérouiller les solerets et entraîne quelques uns de ses suivants avec lui – laissant la cité aux mains avides de Stayn Lishik en son absence – pour débiter de l’os à moelle. La bataille qui s’en suit se révèle cependant bien plus accrochée que ce à quoi s’attendait le champion de Tzeentch, qui voit ses guerriers se faire abattre, dépecer et recyclerpar les sac d’os, tandis que lui se trouve fort occupé à repousser les assauts d’un Necropolis Stalker en furie, dont l’un des aspects et des crânes se révèle être occupé par feu (rose de Tzeentch) Ammerhan. Après avoir mis son ancien professeur K.O./Chaos, Markash doit recommencer avec un duelliste Aelfe, un Stormcast Eternal, et une maîtresse bâtonnière bien vénère, qui prélèvent chacun un peu de son endurance et quelques éléments de son anatomie au passage. Finalement vainqueur de ce 1 vs 4 imprévu, et seul survivant de l’équipe anarchiste (je ne compte pas Palfuss, qui se contente de prendre des notes dans un coin), Markash exulte un court instant… avant de se faire prendre la tête d’un coup de faux par le Mortisan Soulreaper de garde. Pas très fair play, ça.

 

Par un étrange revirement de situation, peut-être dû à l’endroit où se déroule le récit, ce n’est pas la fin pour notre champion déchu, qui contemple d’un air (et d’un crâne) détaché son corps être collecté par les Ossiarchs, et sa tête incorporée au Stalker qu’il venait de vaincre, en remplacement de ce bon à rien d’Ammerhan. Sonné par l’expérience, il se « réveille » un peu plus tard dans son nouveau corps, totalement rallié à la cause du Nag’ grâce aux bons soins des Mortisans Soulmasons, qui ont remplacé toutes les mentions de Tzeentch dans son code interne par Nagash. Voilà un bel exemple d’économie circulaire appliquée. Les Soulmasons ne l’ont toutefois pas débarrassé de sa croyance en la destinée, et Markash se fixe donc le but de grimper dans la hiérarchie des Ossiarch Bonereapers jusqu’à devenir Katakros à la place du Katakros4. Il faut bien avoir des rêves dans la (non) vie. L’histoire se termine avec le retour de notre héros devant Knazziir, où il a le plaisir de défier en duel son ancien assistant de direction, qui n’a pas fait grand-chose pour venir à son secours lorsqu’il en avait eu besoin. Le combat entre un Markash calcifié et un Stayn Lishik sur-stuffé (il a récupéré l’épée de son patron) est rapidement expédié, et le vaincu mis à profit pour construire un petit Kavalos (triste destin pour un chevalier du Chaos). Comme quoi, il n’est jamais trop tard pour opérer une réorientation professionnelle dans le monde merveilleux d’Age of Sigmar.

 

Soumission sympathique de la part de Michael Fletcher, A Tithe of Bone permet au lecteur d’en apprendre un peu plus sur la nouvelle faction des Ossiarch Bonereapers, et plus particulièrement, sur les mortels Necropolis Stalkers que notre héros finit par rejoindre, d’abord à sa tête défendante. Si le titre et la structure de la nouvelle permettent au lecteur d’anticiper le triste destin de Markash, que l’auteur arrive bien à « caractériser » dans les quelques pages qui précèdent sa dernière sortie en ville, le choix de Fletcher de poursuivre la narration après la décapitation de son héros, pour surprenante (dans le bon sens) qu’elle soit, lui permet d’explorer plus en profondeur les arcanes et le fonctionnement de troupes de choc de Nagash. On sort de cette nouvelle avec une meilleure idée du potentiel et de la dangerosité des Ossiarch Bonereapers, qui ne sont définitivement pas venus dans les Royaumes Mortels pour faire de la figuration. Do fear the reapers

 

1: Vu de loin, on aurait dit Hitler dictant ses pensées à Rudolf Hess, sauf que le livre se serait appelé ‘My Change’ au lieu de ‘Mein Kampf’.

 

2: D’où dérive ce cri de guerre bien connu: « Ktchaynik, Ktchaynik,Ktchaynik… Aïe Aïe Aïe ».

 

3: Les Ossiarch Reapers ont bien des défauts, mais ce sont les champions incontestés du tri sélectif des Royaumes Mortels.

 

4: Ce même sentiment le pousse à bolosser ses camarades de crâne, sur lesquels il a prouvé sa supériorité. Il existe donc dans les armées de Nagash un Necropolis Stalker qui n’utilise qu’un seul Aspect – l’aspect de Bogosserie – pour tataner ses adversaires. C’est ce qui s’appelle avoir une nuque roide.

.

***

 

Voilà qui conclut cette revue de 'Conquest Unbound', et je me dois de terminer en soulignant que la qualité de cette anthologie m’a semblé être significativement supérieure à celle des autres recueils publiés par la Black Library ces dernières années. Certes, la sélection compte quelques points faibles (sur plus de vingt nouvelles, c’était couru d’avance), mais la grande majorité des soumissions méritent le détour. Ce constat concerne particulièrement les six inédits de 'Conquest Unbound', qui figurent tous dans la tranche haute des courts formats de la GW-Fiction, et font donc de ce bouquin une référence pour qui s’intéresse aux courts formats d’Age of Sigmar.

 

Schattra, good stuff

Modifié par Schattra
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Ajout des nouvelles de Conquest Unbound.

  • Conquest UnboundThe Warden in the Mountain & I, Behemat (E. Gregory)
  • The Harrowing Deep (M. A. Drake)
  • The Perfect Assassin (G. Kloster)
  • Chain of Storms & Fangs of the Rustwood (E. Dicken)
  • Monsters & The Huntress of Ghur (N. Van Nguyen)
  • The Age of Enlightenment & The Dead Hours (D. Guymer)
  • Death on the Road to Svardheim (D. Hinks)
  • Buyer Beware (G. Thorpe)
  • Reflections in Steel & The Wolf and the Rat (C. L. Werner)
  • The Inevitable Siege (R. James)
  • The Heart of the Fallen (S. Cawkwell)
  • A Taste of Lightning (A. Tchaikovsky)
  • The Offering (A. Clark)
  • Strong Bones & A Tithe of Bone (M. R. Fletcher)
  • The Threshold (D. Annandale)

 

 

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  • 3 semaines après...

À cause d'un bug dans l'envoi des mises à jour quotidiennes de la Black Library Celebration Week 2023, je n'ai pas reçu la deuxième nouvelle de la semaine à temps pour la chroniquer hier. Je repars donc dans ma série avec l'histoire d'aujourd'hui (tant pis pour Zograt, mais son tour viendra).

 

The Long Run - C. Thursten :

Révélation

The Long RunLe problème quand on est techniquement immortel, c’est qu’on est jamais à l’abri qu’un jeune loup ne vienne piquer votre place en se faisant bien voir auprès de la direction générale (un désagrément beaucoup moins fréquent quand on a que <insert number of years here> à cotiser avant de partir à la retraite). C’est la mésaventure qui est arrivée à notre héros personnage secondaire, Hendrick Silver Wolf : alors qu’il a eu l’honneur de compter parmi les tout premiers Knight-Zephyros des osts de Sigmar, et d’occuper la fonction « honorifique » de maître assassin du patron pendant un temps, il a été déclassé par l’ascension de cette arriviste de Neave, qui lui a chipé le nom de Blacktalon (singulier) ainsi que le rôle de meneur de la petite bande de tueurs connue sous le nom de… Blacktalons (pluriel). Bien qu’il ait accepté cette mobilité interne avec philosophie et noblesse, les relations entre Hendrick et Neave ne sont pas tout à fait apaisées, chacun ayant tendance à considérer que sa parole fait foi.

 

Le briefing de mission qui réunit la fine équipe, constituée de nos deux lascars et de deux autres Stormcast Eternals (le bourrin Rostus et la snipeuse Shakana) ainsi que de la Soulscryer Idoneth Lorai, voit ainsi Mr H. et Mme N. se chamailler sur la marche à suivre pour régler son compte au Prince Démon de Slaanesh Skiros, dont la dernière occupation est de tailler des croupières à la colonne de croisés Dawnbringers ayant entrepris la traversée de Chamon pour aller secourir la cité de Vindicarum. Isolés dans le désert métallique, les sigmarites sont à la merci des raids réguliers menés par les Hédonistes véhiculés de Skiros, beaucoup trop rapides et fuyants pour être contraints à une honnête bataille rangée. C’est cette mobilité démoniaque qui pose également problème aux Blacktalons : bien que ne doutant pas être en mesure de régler son compte au fat faquin s’ils parviennent à lui mettre la hache dessus, l’attirer dans une embuscade ne sera pas une partie de plaisir. Finalement, nos barbouzes concluent que leur meilleure chance consiste à exploiter la présence d’un canyon à proximité de la route de la caravane pour – tenez-vous bien – balancer par surprise un de leurs Knight-Zephyros dans le buffet du Slaaneshi grâce au pouvoir de « chevauchement de courant d’air en Mach 3 »  dont ces versatiles guerriers disposent, apparemment. Après quelques crispations, c’est finalement Neave qui occupera le rôle de la femme canon, laissant ses comparses tenir la ligne en compagnie des croisés et cliquer Skiros au corps à corps.

 

L’exécution de ce plan très aéré à défaut d’être bien huilé se passe sans anicroche, Hendrick et Rostus se tapant le sale boulot en utilisant la technique « dos d’âne en sigmarite » sur le char démoniaque de leur Némésis. Persuadée qu’elle n’aurait aucun mal à littéralement rouler sur un pauvre cordon de deux Stormcast Eternals après charge, cette dernière se craque monstrueusement sur ses jets de dé et laisse les fiers paladins à un PV chacun. Esquintés mais pas vaincus, nos héros ne font rien en retour mais l’arrivée providentielle et millimétrée (ça aurait été très drôle qu’elle rate son approche et aille se planter dans une dune) de leur boss, et ses 6D6 blessures mortelles à l’impact, sonne le glas de Skiros. Perforé comme doughnut, le Prince rend piteusement l’âme et ses suivants se débandent, laissant les survivants éprouvés reprendre leur marche vers la cité promise dans de meilleures conditions. Pour les Blacktalons, c’est une nouvelle mission accomplie avec brio grâce à une coopération optimale. Pourvu que ça dure !

 

Après plusieurs soumissions plus ou moins heureuses sur le nouveau line up Black-talonesque, Chris Thursten remet enfin le temple au milieu de la cité (de Sigmar, bien sûr), avec ce très correct ‘The Long Run’. On a finalement droit à une, certes limitée, mais c’est tout de même appréciable, présentation et contextualisation des différents membres de la bande, de leurs talents particuliers1 et de leurs relations personnelles. La rivalité entre Hendrick et Neave, née de la supplantation du premier par la seconde dans la hiérarchie des traqueurs de Sigmar, est ainsi une trouvaille très intéressante, puisqu’elle donne à la fois envie d’en savoir plus sur le passé de ces deux personnages, et sur la manière dont ils parviendront – ou pas – à passer outre ce changement de statut un peu awkward. En plus de cela, la traque de Skiros, qui sert de trame et d’excuse à ce passage en revue des Blacktalons, se révèle être tout à convenable dans son genre (high fightasy, si vous me passez le néologisme et l’anglicisme). Bien qu’il ne s’agissait pas de l’aspect central de son propos, l’auteur livre une copie propre en la matière, le brave mais vicelard Skiros jouant son rôle de méchant très méchant sans fausse note. Au final, je sors de cette nouvelle avec une envie sincère de connaître la suite des aventures de cette troupe de tueurs en sigmarite, ce qui n’était pas le cas des précédents épisodes de la saga Blacktalon : rien que pour ça, merci à Chris Thursten.

 

1 : On apprend ainsi que Shakana est capable de faire des simulations mathématiques afin de déterminer les meilleures conditions pour déclencher une embuscade, en plus d’être la DPS à distance de la fine équipe.

 

Schattra, court-termiste

Modifié par Schattra
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Weekend bien rempli oblige, je ne reprends que maintenant le cours de ma chronique de la Black Library Celebration Week 2023, avec comme promis la revue de la nouvelle gobelinoïde de la semaine.

 

Zograt - A. Clark :

Révélation

ZogratLa vie de Zograt, humble Git à la carrure chétive et au pied bot de la tribu du Badwater Drop (que l’on pourrait littéralement traduire par « Chasse d’eau pleine », c’est dire), n’est pas de tout repos. La camaraderie n’étant pas une vertu cardinale chez les peaux vertes, quelle que soit leur taille, l’avorton passe son temps à subir des mauvais traitements de la part de ses camarades mieux bâtis, exception faite du benêt – et pas très costaud non plus – Driggz. Cependant, lorsque le chef Skram Badstabba réunit ses guerriers dans la grande caverne tribale pour faire une annonce générale, les deux minus se rendent sur place avec le reste de la troupe, ne serait-ce que pour s’assurer qu’une catastrophe ne va pas s’abattre sur eux sous peu (ce qui arrive assez souvent chez les Gloomspite, on peut le reconnaître).

 

Skram, accompagné des Chamanes de son Gobbapalooza, déclare à ses ouailles qu’il a reçu une vision de la Lune Funeste en personne (?), l’enjoignant à mettre la griffe sur le légendaire le Granpignon Kibrille (Great Glowy ‘Shroom), une rare variété de champignon bénie par la divinité tutélaire des Gloomspite. Se jugeant trop important pour mener cette quête par lui-même, le Loonboss cherche donc à convaincre un des ses séides de faire le boulot à sa place, en l’échange d’une promotion bien méritée. L’enthousiasme délirant que suscite cette offre de prime abord est cependant rapidement éteint par un Zograt trop malin (et grande gueule) pour son propre bien, qui interpelle son chef en lui demandant pourquoi il a soigneusement omis d’indiquer l’endroit où le champignon magique est sensé se trouver. Et pour cause, le divin fungus a été localisé par le Gobbapalooza à proximité du sinistre Shudderwood, une forêt peuplée de monstres (ce qui est mal) et située en surface (ce qui est pire). Cette petite information a pour effet de doucher d’un coup les velléités de progression sociale au sein de la tribu, ne laissant plus d’autre choix à Skram que d’envoyer le souffre-douleur du Badwater Drop s’enquiller le sale boulot, ou plus probablement, mourir horriblement en essayant.

 

Accompagné par un duo de guerriers (Narks et Buggit) tout aussi peu appréciés du management que lui-même, Zograt prend donc la route de Shudderwood. Si le trio parvient à localiser le Granpignon sans autre aléa que l’écrasement malencontreux d’un pauvre scarabée innocent par le Z (à sa décharge, il était alors distrait par les récits de monstre que ses camarades s’amusaient à lui servir pour le « motiver » à avancer – je pense que l’on peut plaider l’insecticide involontaire), le récupérer se révèle être une autre paire de manches, une… bête, ressemblant assez à un Ur-Ghul de 40K, ayant investi la caverne où la précieuse morille a poussé. Alors que Narks et Buggit ne seraient pas contre une retraite prudente, quitte à revenir plus tard avec des effectifs supplémentaires, Zograt se sent attiré de manière inexplicable par le champignon, et décide de tenter sa chance, bien aidé par ses capacités cérébrales supérieures à la moyenne. Il comprend ainsi que le monstre est aveugle mais se repère grâce à son ouïe et à son odorat surdéveloppés, et qu’il est donc possible de lui échapper en progressant sans un bruit et en plaçant un leurre odoriférant (comme le bout de champignon phosphorescent utilisé comme lanterne par les aventuriers de la truffe perdue) à l’entrée de l’antre de la bête. Ces sages précautions, et la stupidité crasse de ses camarades, qui attirent rapidement l’attention de leur hôte et se font donc dépecer sans ménagement, permettent à Zograt de toucher prendre un croque dans le saint des saints. Des visions aussi apocalyptiques que grandioses s’emparent alors de notre héros, culminant en l’apparition de la Lune Néfaste dans sa blafarde majesté : il est évident que le petit Git est destiné à de grandes choses, et donc peu étonnant que Zograt parvienne à s’enfuir avec son butin sans trop de dommage (une oreille balafrée), en se glissant dans une fissure dans la roche trop étroite pour que le monstre puisse le suivre.

 

Si le retour au Badwater Drop ne se passe pas aussi bien qu’il l’avait imaginé, Skram lui arrachant le précieux champignon sans même un merci, lui refusant tout net de le faire Boss comme il l’avait promis, et l’envoyant récurer l’enclos à Squigs avec Driggz pour faire bonne mesure, Zograt sent confusément qu’il n’est plus le même Grot qu’au début de sa quête initiatique, et que les choses sont sur le point de changer du tout au tout au sein de la tribu. Ce petit a du potentiel…

 

Une introduction honnête au roman consacré par Andy Clark au plus philosophe des Gloomspite Gits (à la différence près que Zograt tient sans doute mieux la ciguë que son illustre prédécesseur), mais où l’on ne retrouve pas assez des deux éléments qui font à mes yeux tout le sel de la littérature grot : l’humour nihiliste d’une part, et l’horreur graphique de l’autre. À considérer comme le « chapitre 0 » de ‘Bad Loon Rising1 plutôt que comme une nouvelle autonome.

 

1 : Le roman commence d’ailleurs 10 secondes après la fin de ‘Zograt’, ce dernier pelletant la bouse de Squigs en compagnie de son fidèle Driggz comme ordonné par Skram Badstabba

 

Schattra, tout vient à point...

Modifié par Schattra
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Bonjour à tous et bienvenue dans cette revue de Gods & Mortals, anthologie de nouvelles Age of Sigmar publiée par la Black Library en l’an de grâce 2019. Premier recueil de courts formats de l’ère « moderne » d’AoS1, ce copieux pavé de 512 pages regroupe pas moins de 18 nouvelles, ce qui en faisait l’ouvrage le plus imposant de sa catégorie à sa sortie (depuis, 'Conquest Unbound' est venu lui chipper la place du TOAT). Il fallait au moins cela pour tenter de livrer une synthèse un tant soit peu complète des nouvelles sorties entre 2016 et 2018 et prenant place dans les riants et primesautiers Royaumes Mortels.

 

C’est qu’il s’en est passé des choses en l’espace de trois années, aussi bien dans qu’autour cette franchise de la GW-Fiction. Ainsi, si Josh Reynolds et David Guymer se taillent la part du lion parmi les contributeurs convoqués, avec quatre histoires chacun à leur crédit, il s’agissait pour le premier d’un chant du cygne2, alors que le second continue à l’heure actuelle sa collaboration avec la Black Library. Du côté des personnages mis en scène dans ce florilège de nouvelles, on découvre ou retrouve beaucoup de têtes de figure d’Age of Sigmar, tels que Hamilcar (présent dans 100% des soumissions de son créateur, David Guymer), Neferata, Neave Blacktalon, Callis & Toll et Esselt & Talorcan. Si certains d’entre eux ont réussi à inscrire leur nom au Panthéon des héros des Royaumes Mortels, d’autres n’ont pas eu cette chance et sont rapidement retombés dans l’oubli. La concurrence est rude…

 

A l’heure où d’autres auteurs (Richard Strachan, Dale Lucas, Anna Stephens…) et d’autres personnages (Drekki Flynt, Cado Ezechiar…) sont déjà venus remiser les travaux de Gods & Mortals dans le passé, certes récent, des Royaumes Mortels, l’heure est opportune pour donner à cette anthologie que l’on peut qualifier de classique le long and hard look que les anglo-saxons réservent aux choses qui méritent un jugement digne de ce nom.

 

1 : Qui peut se reconnaître grâce au modèle « binaire » utilisé pour les titres d’anthologies (‘Gods & Mortals’, ‘Myths & Revenants’, ‘Oaths & Conquests’, ‘Lords & Tyrants’…).

 

2 : Après un hiatus de quelques mois, Reynolds annoncera sa décision de cesser de travailler pour la BL en Mai 2020.

 

Gods &amp; Mortals

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Force of Personality - D. Guymer :

Révélation

Force of PersonalityLa guerre opposant Sigmar aux Fab4 fait toujours rage dans les Royaumes Mortels, et les champs de bataille sur lesquels s’illustrer ne manquent pas pour les Stormcast Eternals. Certains sortent cependant franchement du lot, et c’est une remarque qui s’applique aux deux catégories précédemment citées. C’est ainsi qu’on retrouve le Lord Castellant Hamilcar Bear Eater en position de conseiller stratégique dans la ville flottante de Nemisuvik, assiégée par la flotte du redoutable Capitaine Blackjaw depuis de longs mois. Une affectation que notre grandiloquent héros n’apprécie guère à cause du choix de l’ennemi de bombarder la cité à distance respectable, ce qui rend impossible l’honnête confrontation d’homme à homme qu’Hamilcar considère comme la forme la plus civilisée du combat. De leur côté, les Nemisuvikois prennent les événements avec une décontraction et une résilience impressionnantes, heureux de passer le temps en regardant leur allié surhumain insulter les Khorneux depuis les remparts de la ville.

 

Les choses se décantent toutefois lorsque Hamilcar est témoin d’une émeute opposant une foule en colère à quelques gardes entourant ce qui ne semblait être à première vue qu’un bassin de plus dans cette cité portuaire maritime1. Les mécontents semblent réclamer la présence d’un certain Roi Gris, qui ne tarde pas à apparaître dans notre histoire après qu’une manifestante ait réussi à déjouer l’attention du service d’ordre et à plonger dans la cuvette. Elle a ainsi l’honneur de se faire ramasser par un immense tentacule, qui la jette dans une non moins immense gueule, celle du Roi Gris en question, ou Angujakkak pour les locaux, comme un notable de Nemisuvik l’explique ensuite à Hamilcar autour d’une soupe de poisson. A la fois protecteur et prisonnier de la cité flottante, le Roi Gris grandit lentement sous cette dernière jusqu’à atteindre la taille et la force nécessaires pour déchirer les filets qui l’emprisonnent, et finalement partir faire sa vie dans l’océan ghurite, non sans avoir laissé un œuf derrière lui pour que le cycle se perpétue. Les gilets jaunes de Nemisuvik essayaient donc d’accélérer le processus en sortant Angujakkak de sa léthargie grâce à un bon gueuleton, afin qu’il aille couler la flotte de Blackjaw avant que cette dernière n’ait rasé la cité. Un plan que ce bon Hamilcar trouve absolument génial, mais qui est fermement refusé par le conseil des anciens de Nemisuvik, car Jak n’a pas encore pondu de mini-lui2. S’il part maintenant, qui prendra sa place ?

 

Et la réponse sera au final : Sigmar. Pas littéralement, bien sûr (encore que, pour ce qu’il fait en ce moment pour aider l’effort de guerre dans les Royaumes Mortels, il pourrait barboter dans une piscine d’eau de mer sur le littoral de Ghur), mais philosophiquement. Suite à un strike chanceux d’une catapulte chaotique ayant envoyé Hamilcar et quelques défenseurs de Nemisuvik à la flotte, le Roi Gris décide enfin de se secouer les écailles et d’aller se servir dans les eaux très poissonneuses qui baignent la cité. Hamilcar se convainc tout seul que c’est son impayable personne qui est responsable de ce petit miracle, son combat acharné contre les multiples bestioles ayant tenté de le becqueter alors qu’il faisait de la brasse coulée ayant été sanglant, mais la vérité restera probablement un mystère. Toujours est-il qu’Angujakkak est de sortie, et que la flotte de Blackjaw n’était pas prête pour cette attaque de bête zodiacale. Les navires chaotiques sont réduits en allumettes les uns après les autres par les tentacules musclés du Roi Gris, en plus de servir de trompe de mûmak pour un Hamilcar qui passe en mode Legolas une fois sorti de sa trempette, et finit par arriver sur le pont du navire amiral de sa Némésis. Cette dernière étant visiblement plus à l’aise au tir qu’au corps à corps (shocking je sais, même Hamilcar n’en revient pas), le rideau tombe sur cette nouvelle avant même que ce duel déséquilibré ne soit conclu. Et c’est ainsi que Nemisuvik a banni à jamais le maintien en captivité de grands animaux marins, deux ans après Marineland. Une pratique barbare qui n’avait plus lieu d’être dans une époque aussi avancée que l’Âge de Sigmar, bien évidemment…

 

David Guymer nous donne une nouvelle de Hamilcar à son plus drôle avec ‘Force of Personality’, qui peut donc logiquement concourir pour le titre de meilleure entrée de cette saga haute en couleur, et mérite donc d’être lu par tous ceux qui souhaitent vivre l’Hamilcar experience dans des conditions idéales. En auteur vétéran et maître de l’exercice délicat de l’écriture comique, Guymer s’applique à faire de chaque élément de cette histoire autrement très classique une source d’amusement pour le lecteur, la palme revenant sans doute aux dialogues riches en one liners percutants et aux commentaires en aparté que Hamilcar distille à son auditoire alors qu’il narre ses invraisemblables exploits.

 

De plus, tout le monde agit stupidement dans cette histoire, depuis la flotte de Blackjaw qui n’arrive pas à toucher un éléphant dans un couloir avec ses catapultes mais s’obstine à bombarder Nemisuvik pendant des mois plutôt que de l’attaquer, jusqu’aux habitants de la cité qui préfèrent attendre que leur mascotte finisse de grandir plutôt que de hâter un peu les événements, et même jusqu’à Sigmar qui envoie le pire choix possible parmi ses Stormcast Eternals pour renforcer une ville soumise à un barrage d’artillerie. Comme il est clair que Guymer ne se prend pas du tout au sérieux, le résultat final n'est pas grotesque (ce qu’il aurait été si l’histoire avait été racontée au premier degré) mais ajoute à la folie ambiante de ce mélange entre un épisode d’American Dad et un rapport de bataille de ManoWar à la sauce Age of Sigmar. Très sympathique, si vous aussi vous aimez quand la BL sort de son paradigme grimdark de temps à autres.

 

1 : Car les habitants de Nemisuvik ne maîtrisent pas l’art de la construction navale, ce qui explique aussi pourquoi ce siège prend aussi longtemps.

 

2 : Comment une bande d’Inuits hippies ne maîtrisant pas la technologie du kayak est capable d’asséner de grandes vérités sur la reproduction des poulpes géants me dépasse.

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Pilgrim's Trial - R. MacNiven :

Révélation

Vanik, aussi appelé le Pèlerin Noir (ça sonne mieux en anglais), est un seigneur de guerre chaotique poursuivant le rêve de toute une faction : rejoindre la Varanguard pour approcher le GOAT Archaon. Une telle position se mérite cependant (beaucoup d’Elus, mais peu d’appelés…), et ce n’est pas avec un CV aussi famélique que le sien que Vanik a la moindre chance de réussir son casting : notre héros doit en effet se contenter d’une modeste bande d’une vingtaine de chevaliers du chaos (la Fraternité de Fer) pour toute armée, ainsi que d’un écuyer froussard (Modred) et d’une épée qui coupe. Bien décidé à améliorer son inventaire afin de devenir un redouté Bling King, Vanik entraîne son monde jusqu’en Aqshy, et plus précisément à l’orée du Bois de Braises (Cinderwood), où il a le sentiment que, je cite, sa destinée l’attend. Sa destinée a du coup un point commun avec la Fraternité, qu’il laisse sur le parking de la forêt avec le cadavre de sa monture, sacrifiée pour des raisons aussi brumeuses que la visibilité locale (normal pour une forêt qui passe son temps à brûler, vous me direz). Il est en effet capital qu’il entreprenne la quête qui va suivre seul, et également en moins d’une journée (mais pourquoi, mystère) : s’il n’est pas revenu au premier champ du c(ha)oq, ses braves guerriers ont ordre d’aller porter la nouvelle de sa mort tragique, ou de son égarement gênant, à sa sœur Jevcha, Reine de Guerre de son état. Elle lui donnera un enterrement digne de ce nom, ou viendra le ramener à la maison, selon la situation.

 

Nous suivons donc Vanik alors qu’il explore le Bois des Braises à la recherche de quelque chose, ou de quelqu’un. Cette quête est entrecoupée par des passages narrés en italiques par un personnage qui semble flotter à quelques mètres de l’aspirant garde du corps sans que ce dernier s’en aperçoive, et qui se matérialise lentement grâce à la puissante émanation de… quête qui entoure Vanik. Ses vues sur ce dernier sont ambivalentes, pour dire le moins, mais c’est un problème que le Peignoir Nain devra gérer un peu plus tard, occupé qu’il est à défendre son intégrité physique contre la faune bigarrée qui hante la forêt. D’abord un Chien de Khorne à collerette verte (original), du nom de Korhel1, auquel il n'arrive pas à apprendre à donner la papatte en dépit de ses meilleurs efforts – qui consistent à lui balancer des grands coups d’épée dans la truffe, ceci dit. Ensuite à un duo de Chasseurs de Kurnoth équipés d’arcs, ayant mis en déroute le pauvre cabot avant de flécher la sortie à ce mortel égaré dans leur réserve naturelle. Ayant la vue très basse pour un champion du Chaos (ou ayant mis son heaume à l’envers ce matin-là), Vanik opte pour une fuite éperdue à travers les arbres, mais finit par se faire rattraper par les intraitables Sylvaneth, qui lui mettent une solide raclée au corps à corps et menacent d’interrompre brutalement sa quête de gloire. Ça commence à sentir le sapin…

 

Révélation

Heureusement, la cavalerie finit par arriver. Ou plutôt, la monture démoniaque finit par se matérialiser. Car c’était bien ça qui zieutait sans gêne le Pèlerin quelques pages plus tôt. Baptisée Tzatzo, la cavale infernale triomphe là où son (futur) maître avait échoué – un grand classique des wargames – et réduit les Kurnothi en granulés de biomasse en quelques secondes, un chouilla aidée par cet assisté de Vanik. C’est évidemment le début d’une grande amitié entre ces deux êtres que tout oppose, et la nouvelle se termine sur le retour triomphal de notre héros au camp de base de la Fraternité de Fer, et l’annonce de la nouvelle et dernière étape de sa classe quête préparatoire : aller chiner une épée démon aux puces de Saint Ouen. Ce sera risqué, mais il faut bien ça pour attirer l’œil des dieux…

 

Introduction au roman qu’il a consacré à l’ascension carriériste (plutôt que démoniaque) de son héros Vanik le Pèlerin Noir, ‘Pilgrim’s Trial’ ne frappe pas par son originalité, tant au niveau de l’intrigue que du style ou des personnages mis en avant. J’irai même jusqu’à dire que sa lecture est hautement facultative, même si Robbie MacNiven ne livre pas une copie honteuse. Qui a dit que le cheval, c’était génial ?

 

1 : On ne sait pas d’où vient cette connaissance poussée qu’a Vanik du nom des démons qu’il rencontre (sans doute un Pokédex chaotique ramassé dans un donjon mineur), mais en tout cas, cela ne lui rapporte aucun avantage au combat.

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The Dance of the Skulls - D. Annandale :

Révélation

the-dance-of-the-skulls.pngInvitée à honorer de sa présence un bal donné par la reine Ahalaset et le seigneur Nagen dans la cité de Mortannis, Nefarata se doute bien que cet évènement mondain n’est qu’un prétexte commode pour permettre à ces deux grandes lignées d’agir à ses dépends, ce qui ne l’empêche pas d’accepter gracieusement de se rendre sur place, n’ayant de toute façon rien d’autre de prévu ce soir là. Voyant d’un mauvais œil le rapprochement s’étant récemment opéré entre Ahalaset et Nagen, la Mortarque de Sang suppute avec raison qu’un piège va lui être tendu, et se réjouit d’avance de cette (més)aventure, le quotidien de Nulahmia devant apparemment être assez terne.

 

Après avoir été accueillie avec tout le faste et la pompe liés à son r/sang (et infligé râteau sur râteau à ce pauvre Nagen, auquel elle promet toutefois une danse plus tard dans la soirée1), Neffie se voit proposer par son hôte une dégustation privée de crus tirés de l’hématothèque personnelle d’Ahalaset, ce qui ne se refuse pas. Guidée jusqu’à un salon lounge où l’attendent une dizaine d’esclaves qui s’appellent tous Mathusalem ou Réhoboam, notre rusée vampire à tôt fait d’identifier l’aiguille d’argent se terrant sous la roche, en l’occurrence un assassin assermenté doté d’une fourchette à escargot à la place du bras (c’est la mode à Hammerhal). Ayant raté son test d’Initiative, le faquin est toutefois aisément neutralisé par sa victime supposée, qui l’attache à son service d’un langoureux battement de cils. Satisfaite de la tournure prise par les évènements, et comme toute quinqua-millénaire de la bonne société après une dure journée de labeur, Neferata s’accorde un petit verre (et fracasse au passage toutes les « bouteilles », qui espéraient peut-être qu’on les laisse tranquille le temps qu’elles refassent le plein) aux frais de ses hôtes avant de revenir se joindre à la fête.

 

Là, il est temps pour la Lahmiane de porter l’estocade aux traîtres débusqués, et en musique s’il vous plaît, la danse des crânes consentie à ce benêt de Nagen donnant amplement le temps à notre héroïne de cimenter sa victoire en enchantant légèrement son cavalier, qui ne trouvera rien de plus malin lorsque l’assassin d’Ahalaset viendra sonner les douze coups de minuit à son ancienne patronne à l’aide de son argenterie intégrée, de lancer sa devise dans le silence de mort (héhé) qui s’ensuit. Cette dernière tombera à plat comme la totalité de ses blagues, et, mal comprise par la garde de la reine défunte, aura des conséquences tragiques pour notre pauvre Nagen. Un verre ça va, trois verres…

 

C’est peu de chose de dire que la prose de Herr Annandale n’était pas tenue en haute estime de ce côté du clavier, depuis la chronique de ses débuts pour la BL (The Carrion AnthemHammer & Bolter #11) jusqu’à aujourd’hui. Les choses ont légèrement évolué avec cette Danse des Crânes, qui s’affirme facilement comme la meilleure soumission de notre homme que j’ai pu lire à ce jour. Certes, on parle ici en progrès relatif plutôt qu’en performance absolue, cette courte nouvelle ne se comparant guère aux travaux d’auteurs que je considère être plus méritants que David Annandale, Abnett, Dembski-Bowden, Farrer et Fehervari en tête, pour n’en citer que quelques uns (la liste serait assez longue sinon), mais j’aurais trop beau jeu de ne pointer que les trous dans la cuirasse ou les défauts dans la raquette des travaux de ce régulier de la BL, si je ne soulignais pas également les sources de satisfaction à la lecture de ces derniers. L’Empereur sait qu’ils sont encore rares à cette heure.

 

Alors, quels sont les éléments positifs de La Danse des Crânes ? Pour commencer, une absence de ce que l’on peut presque appeler une « annandalerie », terme forgé par votre serviteur et désignant une mauvaise, grossière ou grotesque exploitation d’une idée de départ pourtant assez sympathique, pour des résultats évidemment décevants. Le huis-clos victorien qui nous est proposé ici ne pêche ainsi pas par excès de zèle ou manque de structuration, les péripéties s’enchaînant de façon tout à fait convenable et crédible, ce qui pourrait sembler aller de soi mais n’était pas gagné d’avance au vu du pedigree de l’auteur. On sent que ce dernier a réfléchi à la manière dont il devait dérouler son récit pour que le plan alambiqué de Nefarata puisse se dérouler sans (trop) d’accroc, et même si l’usage d’un petit TGCM en fin de nouvelle pour parfaire le triomphe de Mama Lahmia peut être noté, c’est finalement peu de chose comparé aux problèmes structurels émaillant quelques unes des précédentes soumissions de David Annandale.

 

Autre source de contentement, la description intéressante qui nous est faite de la haute société mort-vivante, nid de vipères aux crocs acérés et n’hésitant pas un instant à comploter pour précipiter la chute de leurs prochains, alors même que les ennemis extérieurs se comptent par milliers, et qu’un brin de solidarité entre macchabées ne serait pas de trop pour défendre le pré carré de Nagash. Le fait que cette société, mêlant vampires et humains à tous les échelons, apparaisse comme fonctionnelle et pérenne (en même temps, c’est bien le minimum quand on est immortel) est une autre réussite d’Annandale, qui parvient à donner un volume fort bienvenu à une faction qui jusque là se réduisait à des légions de squelettes traînant leur mélancolie dans des déserts violacés. On peut s’amuser aussi en Shyish, telle est la morale de cette petite histoire.

 

1 : En même temps, cette coquetterie de laisser dépasser une canine par dessus sa lèvre inférieure ne doit pas aider à lui donner un air très intelligent.

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Tourney of Fate - J. Reynolds :

Révélation

Lorsque la plus totalement fraîche mais tout de même respectable Dame de Cankerwall, régente des Duchés Niellés, est enlevée par un Héraut de Tzeentch pendant un tournoi opposant la fine fleur (fanée) des chevaliers pesteux des environs, nombreux sont les braves qui jurent de libérer leur suzeraine et se mettent en quête de la tour ambulante où le faquin se terre avec sa victime. Parmi eux se trouve le jeune Carkus Gryme, qui doit encore gagner ses éperons et sa bedaine de Blightknight, mais qui compense son inexpérience et sa taille 36 par une dévotion et une noblesse indéniable. Ayant reçu l’autorisation de la Dame de participer au tournoi malgré son statut inférieur, il était bien décidé à l’impressionner de ses putrides prouesses1, et en veut donc mortellement au disciple du dieu poulet, Ompallious Zeyros. Accompagné d’un Pestigor cuisinier et fataliste (Blisterback), Carkus remonte la piste de la caravane de Zeyros, espérant la rattraper avant que les autres paladins enrhumés (qui ont des montures, eux) ne récoltent toute la gloire.

 

À toute chose lenteur est bonne cependant, car le peloton de tête a visiblement rencontré plus fort que lui. Carkus tombe en effet sur les cadavres épars de ses frères de pus, éparpillés façon puzzle par un adversaire mystérieux. Avant cela, il avait reçu la visite d’un vieux démon de Tzeentch asservi par Ompallious, et chargé par ce dernier de dissuader le blanc-bec de se frotter à lui. Ayant considéré cette offre comme la preuve que son adversaire avait peur de lui, notre héros avait refusé crânement. Pour sa peine, il se trouve donc confronté au plus Disney de tous les adversaires : un chevalier constitué entièrement d’une nuée de rossignols, grives et autres merles, contre lequel son épée est bien inutile. Heureusement, le sagace Blisterback parvient à identifier l’oiseau en chef, qu’il capture et gobe aussi sec, provoquant la désagrégation de la murmuration. Ce premier adversaire vaincu, Carkus et son sidekick sont libres d’accéder au logement de fonction d’Ompallious, dans lequel le pas encore chevalier pénètre seul, comme le panonceau interdisant l’entrée à nos amis les animaux situé à côté du paillasson le stipule.

 

La troisième épreuve de notre héros (la deuxième étant de ne pas s’arracher les yeux devant les choix de décoration intérieure très tzeentchy de son hôte) est d’affronter un autre serviteur de Lompallious, et en l’occurrence, une (quasi) célébrité : Mordrek le Maudit en personne. Bien que ce vénérable guerrier se plaigne que les petits jeunes chaoteux d’aujourd’hui ne le connaissent plus, il a gardé suffisamment de punch pour pousser Carkus dans ses derniers retranchements. Qui plus est, les Dieux du Chaos n’ont pas résilié son immortalité lors de son transfert de franchise, ce qui fait une fausse joie au pesteux après qu’un coup chanceux ait brisé la nuque de son adversaire, qui se relève sans broncher quelques secondes plus tard. Désespérément surclassé et n’ayant pas la caisse d’un véritable Blightknight, Carkus voit sa dernière heure son compostage arriver… mais réussit un deuxième coup critique d’affilée, ce qui convainc Mordrek de le laisser poursuivre sa quête et de se confronter enfin au maître des lieux.

 

Ce dernier l’attend en compagnie de la Dame de Cankerwall, qu’il a kidnappé pour qu’elle l’aide à guérir d’une maladie honteuse refilée par un champion de Nurgle avec lequel il a eu un duel non protégé il y a de cela bien longtemps. L’heure des révélations ayant sonné, Carkus apprend coup sur coup qu’Ompallious Zeyros faisait partie de l’ordre des chevaliers ayant juré allégeance à la Dame lors de son arrivée dans les Duchés, et que si le premier cherchait tant à éviter le combat, c’est parce qu’il est en fait son lointain ancêtre. Cette double annonce ne détourne cependant pas Carkus de son leitmotiv, mais son état de fatigue avancée ne lui permet pas d’inquiéter Ompallious, qui le flanque par terre sans ménagement. Il aurait incinéré son arrière petit fillot sans état d’âme n’eut été l’intervention conjointe de la Dame de Cankerwall et de Mordrek, la première acceptant de débarrasser Ooumpa Loompa de ses mycoses tenaces en échange de la vie de Carkus, et le second forçant son ex-patron (son contrat d’asservissement contenant une clause suspensive à la première défaite enregistrée) à tenir sa parole après sa guérison express.

 

Son problème sanitaire ayant été traité, Ompallious donne congé à ses invités (c’est fort civil de sa part) et met le cap sur un autre Royaume pour passer sa convalescence. De son côté, si Carkus n’a pas le bonheur d’être élevé au rang de Blightknight par sa Dame, il repart tout de même avec un lot de consolation fort sympathique, en l’occurrence un cor de chasse enchanté lui permettant d’invoquer le redoutable Mordrek (qui part faire du tourisme de l’Apocalypse dans cette franchise qu’il ne connaît pas) en soufflant dedans. Quant à la Dame, elle souhaitait en fait utiliser le Héraut de Tzeentch pour ressusciter un ancien champion après qu’il eut atteint un taux de moisissure satisfaisant (un peu comme un roquefort), et n’a donc pas vraiment apprécié l’intervention du morveux, mais se calme lorsque Carkus révèle qu’il a gardé un bout de la biopsie de son illustre aîné pendant qu’Ompallious passait le reste au lance-flamme, ce qui donne une réelle chance de revival à l’ancien. Quelqu’un aurait-il une boîte de Petri en rab ?

 

Josh Reynolds exerce son talent de conteur dans ce ‘Tourney of Fate’, qui parvient à donner leurs lettres de noblesse aux Maggotkin de Nurgle sans galvauder le moins du monde leur aspect foncièrement morbide et résigné, qui ne le destinait pas du tout à endosser le rôle de protagonistes (à mon humble avis). En faisant de son héros un parangon de chevalerie, certes putride mais animé des sentiments les plus honorables, Reynolds démontre sa capacité à questionner les stéréotypes de fantasy que nous avons tous intégrés – souvent sans nous en rendre compte –, ce qui contribue à en faire l’un des auteurs les plus intéressants et talentueux de la Black Library. Si l’aventure dans laquelle le jeune Carkus Gryme est, elle, relativement convenue (même si de bonne facture), ‘Tourney of Fate’ mérite donc la lecture rien que par son originalité par rapport aux autres nouvelles chaotiques d’Age of Sigmar.

 

Ceci dit, cette histoire a d’autres atouts à faire valoir, Josh Reynolds ayant été particulièrement motivé par son sujet. Ainsi, il prend soin de poser les jalons d’un arc narratif plus ambitieux que cette nouvelle, à laquelle répondent plusieurs autres de ses travaux. On peut retrouver Ompallious Zeyros dans ‘The Last Gift’, et Feculus dans ‘The Tainted Axe’, ce qui est suffisant pour parler d’un mini-Reyniverse des Royaumes Mortels. Dommage que son départ de la BL ne lui ait pas donné l’occasion de mener à bien son projet, par exemple en faisant intervenir Gryme et Zeyros dans la série des Huit Lamentations, aux côtés du champion de Khorne Ahazian Kel. Avec des antagonistes aussi charismatiques, et un auteur aussi doué que Reynolds à l’écriture, les épisodes suivants de la saga auraient été passionnants à suivre. Quoiqu’il en soit, ‘Tourney of Fate’ est une nouvelle qui sera d’autant plus intéressante que le lecteur est familier des histoires déclinées en parallèle de la quête de justice de Carkus Gryme.

 

Pour finir, il régale le fluffiste en réalisant un savoureux cross over entre Warhammer Fantasy Battle et Age of Sigmar, à travers la convocation du Comte Mordrek, personnage nommé de second ordre du Vieux Monde (et qui apparaissait déjà dans des productions écrites pour WFB par Reynolds). Il nous avait déjà fait le coup avec Aekold le Miraculeux dans ‘Hammerhal’, et cela ne fait que m’inciter à lire le reste de sa bibliographie AoSesque pour voir s’il n’y a pas d’autres easter eggs dissimulés au fil des pages. Bref, c’est du Josh Reynolds comme on adore le lire, et dont il serait dommage de se priver.

 

1 : Dessiner un blason en vomissant est le comble du chic chez les Maggotkin.

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The Hardest Word - D. Guymer :

Révélation

the-hardest-word.png?w=400&h=620En poste dans la forteresse des Sept Mots (sans doute construite par les sept nains) en Ghur, l’incommensurable Hamilcar Bear Eater reçoit la visite de la Lord-Veritant Vikaeus, qui arrive porteuse, outre de son heaume et d’une moue dédaigneuse, de troublantes nouvelles. Prophétesse reconnue à travers les osts de Sigmar, Vicky a eu la vision d’une horde de Skavens attaquant le bastion tenu par les Astral Templars et capturant l’insurpassable Hamilcar pour en faire le sujet d’une expérimentation aussi obscure dans ses motifs que douloureuse dans son application (d’après la description qui en faite, Hamilcar passerait de battant à batterie, ce qui n’est pas une évolution de carrière très désirable). Pour notre inarrêtable héros, il est clair qu’il faut saisir le rat-taupe par les bornes, et tant pis si la prophétie de son invitée n’est guère précise à propos du moment où le danger se matérialisera, et la direction d’où il viendra. Prédiction, mobilisation, comme dit le proverbe.

 

Lors donc, Hamilcar s’emploie à rassembler le ban et l’arrière-ban de son petit domaine, sans va se planter à l’entrée de sa forteresse, et hurle un défi à la cantonade : si les Skavens arrivent à la vaincre en combat – et même pas en combat singulier, c’est dire s’il est sûr de son fait – les Sept Mots leur seront remis sans coup férir. Voilà une offre qui ne se refuse pas, et à la grande surprise de l’assistance réunie pour voir le patron faire ses pitreries, un émissaire Skaven se présente quelques instants plus tard pour annoncer à la grande-gueule en armure violette que le Warlock Ikrit accepte la confrontation.

 

Comme on pouvait s’y attendre de la part d’une race totalement étrangère au concept d’honneur martial, Ikrit ne se déplace pas en personne, mais envoie une de ses créations, que l’on peut décrire comme le fruit des amours illicites entre un Cuirassier Némésis et un Rat Ogre, s’emparer de l’indémodable Hamilcar, qui l’intéresse beaucoup plus que la possession des Sept Mots. Bien que le cédant à son adversaire mécanique en carrure et en force, et devant composer avec le feu nourri des Jezzails que le prudent Ikrit a également mis sur le coup (on n’est jamais trop prudent), le Lord-Castellant préféré de ton Lord-Castellant préféré réussi à vaincre son adversaire déséquilibrant l’exo-ratmure et la mettant sur le ventre. Ce triomphe est toutefois assombri par le retour de cette pimbêche de Vikaeus, très courroucée d’être tombée sur une bande d’éclaireurs Skavens pendant ses investigations, et d’avoir dû s’en débarrasser par elle-même. Avant de s’en aller bouder dans ses quartiers, elle assure à l’indécrottable Hamilcar que son récent exploit n’a fait que repousser l’échéance, et que les Hommes Rats en ont toujours après lui. Ce qui est fort possible – après tout, qui ne rêverait de posséder une copie conforme de Sigmar ? – mais sera l’affaire d’une autre histoire…

 

David Guymer prépare dans ce ‘The Hardest Word’ (rien à voir avec la chanson d’Elton John, pour autant que je puisse le dire) l’intrigue du roman qu’il consacrera à son personnage fétiche (‘Hamilcar : Champion of the Gods’), et dans lequel le Stormcast prodigue et prodige devra défendre son intégrité physique contre les assauts répétés d’un Skaven illuminé. On y voit un Hamilcar en grande forme faire ce dans quoi il excelle : prendre des décisions radicales sur un coup de tête, se battre comme un chiffonnier (et gagner à la fin), et plus important, balancer des vannes dirigées autant vers ses camarades que vers le lecteur, ce qui est une raison suffisante pour lire les travaux consacrés à ce personnage haut en couleurs d’Age of Sigmar, si vous voulez mon avis. Une honnête réussite pour Guymer, qui arrive à trouver le juste équilibre entre les nombreux composants d’une bonne histoire d’Hamilcar Bear Eater (intrigue, contextualisation, développement des personnages, style…), ce qu’il ne parvient pas à faire à tous les coups.

 

Auction of Blood - J. Reynolds:

Révélation

Auction of BloodLes plans pour une soirée de bouquinage tranquille de Palem Bo(o)k, libraire d’incunables à Eauxgrises et accessoirement espion à la solde de Nefarata, sont brutalement et définitivement balayés lorsque notre fin lettré reçoit l’ordre de représenter sa généreuse patronne à une session d’enchères privées, se tenant le soir même au Nid de Pie, une institution bien connue par les habitués de la vie secrète de la métropole Ghyranite. Bien forcé d’accéder à la gracieuse et impérieuse requête de sa bienfaitrice s’il tient à conserver sa jugulaire intacte, Bok se rend sur place, et réussit à négocier son entrée, malgré une absence d’invitation (les grandes de ce monde ne prennent pas en compte des détails aussi triviaux) et une vigile elfique vraiment patibulaire du tout. Même pas briefé sur l’objet qu’il devra acquérir pour le compte de sa maîtresse, il a peine le temps de jeter un regard sur le reste de l’assistance, où se pressent pêle-mêle un mage lumineux et son dragonnet de compagnie, un Nain du Chaos essayant de camoufler son appartenance à une franchise défunte sous une épaisse capuche, et la Femme en Rouge locale (il en faut une dans tous les univers med-fan dignes de ce nom apparemment), beauté ténébreuse et balafrée au sourire qui aurait pu être avenant s’il ne dévoilait pas des dents taillées en pointe.

 

Attendant patiemment que son heure vienne pendant que les premiers lots trouvent preneurs, Bok finit par comprendre que la babiole que Nefarata veut ajouter à sa collection est l’étrange fouet à huit lanières que le commissaire priseur révèle être Charu, le Fouette-Âme, rien de moins que l’une des huit Lamentations de Khorne ! Pressentant que cette acquisition va le mettre sur la paille, à condition qu’il arrive à remporter l’enchère avec ses moyens somme toute limités (l’industrie du livre est en crise partout), Bok est sauvé de la faillite par l’intervention inattendue de Melissandre, qui se trouve être une activiste de Khorne et ne goutte pas du tout à ce que cette sainte relique soit vendue comme un vulgaire bibelot lantique. Preuve que la malabar de l’entrée n’a pas fait son job de façon correcte, une demi-douzaine de comparses de la Lady in Red (Kesh de son prénom), se lèvent pour appuyer la revendication de leur meneuse, et la situation dégénère tranquillement lorsque le préposé à la vente tente de prévenir le service d’ordre et se prend une hache de jet entre les deux yeux pour sa peine.

 

Dans la mêlée générale qui s’en suit, Bok a l’occasion d’assister aux premières loges à une démonstration de fouet que n’auraient renié ni Corax ni Indiana Jones, Kesh ayant réussi à mettre la main sur l’arme du crime, dont le deuxième effet kiss cool est de voler l’âme des malheureux qu’elle lacère. D’abord contraint de régler leur compte à quelques cultistes mugissants tout prêts à l’enkhorner, Bok est rapidement convaincu par le talent meurtrier de Kesh de mettre le Charu avant les boeufs. Malheureusement pour notre héros, this girl is on fire et sa pétoire, bien que de fabrication Duardin, ne suffit pas à mettre fin au tohu-bohu. Animée de mauvaises intentions, malgré la perte d’un hémisphère cervical consécutif à un headshot proprement exécuté, Kesh l’est également par la magie impie de son arme, et il faudra que quelqu’un se dévoue à lui prendre littéralement la main pour que l’ambiance, finalement, retombe. La seule autre survivante de la soirée étant l’Aelf de garde, à présent chômeuse et à laquelle il s’empresse de proposer un job, Bok n’a aucun mal à faire main basse sur la vieille Charu, dont on se doute que Nefarata fera un usage raisonné…

 

Voilà une nouvelle de Josh Reynolds telle qu’on les aime. Loin du fracas des combats de première ligne entre Stormcasts et indigènes, Enchères de Sang s’attache à dépeindre la vie dans une cité libre de Sigmar, où, si l’ordre règne, tous les citoyens n’épousent pas forcément les vues progressistes et altruistes du Dieu céleste. Comme le Monde qui Fut avant lui, les Royaumes Mortels sont gangrenés par les agissements souterrains d’individus peu recommandables, ce qui est dans l’ordre naturel des choses à mon avis, mais méritait quand même d’être couvert par une nouvelle ou deux afin que le lecteur, surtout novice, ne s’y trompe pas1. Les amateurs de la série Malus Darkblade apprécieront sans doute le récit de la soirée très compliquée de Bok, contraint comme son lointain et illustre prédécesseur de prendre tous les risques pour récupérer une relique impie pour le compte d’un employeur pas vraiment compréhensif. Les nostalgiques du Vieux Monde et de l’archéo-fluff souriront à la rencontre des quelques easter eggs que l’auteur a glissé au fil des pages2. Tous reconnaîtront que Reynolds sait s’y prendre pour dépeindre les côtés peu reluisants d’une métropole med-fan, quadrillée par les sociétés secrètes en tout genre, les cultes chaotiques de quartier et les exécuteurs des basses œuvres d’éminences d’un gris souvent très foncé. Une chose est sûre, cela donne plutôt envie de découvrir quelles sont les sept autres lamentations que ce distrait de Khorne a égaré dans les Royaumes Mortels, dans ce qui pourrait bien être la série la plus intéressante des premières années d’Age of Sigmar. Les paris (et les enchères) sont ouverts…

 

1 : À quand la sortie du supplément ‘Quelque chose de pourri à Hammerhal’ ?

 

2 : On peut d’ailleurs s’étonner que la BL ait laissé passer la mention faite à Necoho, divinité chaotique désavouée par GW depuis des lustres. Ne boudons pas notre plaisir, ce n’est sans doute pas demain la veille que nous recroiserons ce Dieu renégat.

 

Pantheon - G. Haley:

Révélation

pantheon.png?w=402&h=612À une époque lointaine et plus heureuse, Sigmar prit sur lui de faire construire l’équivalent de Strasbourg (une ville avec du cachet + un lieu de rassemblement pour les décideurs politiques) sur la plus haute montagne d’Azyr. Nommé Highheim, ce qui sonne convenablement alsacien vous le reconnaitrez, ce complexe accueillit pendant un temps, voire une ère, les Dieux (plus ou moins) civilisés qui formèrent le panthéon des Royaumes Mortels. Puis le Chaos arriva, et chacun repartit dans ses pénates, laissant le pauvre Ziggy errer comme une âme en peine dans les allées désertes de la Theopolis.

 

La guerre totale décrétée par le divin barbu contre les quatre affreux est toutefois l’occasion pour le premier de réactiver ses vieux réseaux, et par une belle mâtinée pas encore tout à fait ensoleillée, il invite Alarielle à faire un Teams (avec webcam) pour parler du bon vieux temps. Au début franchement sur la défensive – ne pas oublier que la blitzkrieg sigmarienne a failli très mal finir pour elle – la Déesse finit par se détendre un peu, et accepte d’accompagner son hôte jusqu’à la place centrale du Highheim, où se trouve comme de juste une pièce d’eau. Mais attention, ce n’est pas n’importe quoi : plutôt qu’un bête bassin avec une fontaine rococo et des fientes de pigeon sur la margelle, il s’agit d’un miroir argenté créé par le mage Sanasay Bayla, et offert au Panthéon comme cadeau, outil et avertissement. Bayla, qui n’était pas la moitié d’un abruti, a en effet réussi à réaliser une œuvre qui permet à qui la contemple de voyager dans l’espace et dans le temps. Si Sigmar a tenu à ce qu’Alarielle vienne avec lui devant le miroir, ce n’est pas pour tenter de conclure avec la seule Déesse un tant soit peu accorte de son entourage (on est d’accord que Morathi est un peu creepy sur les bords), mais pour mater ensemble la vie de Brian Bayla, qui en plus d’être distrayante – on parle tout de même d’un type qui a réussi à maîtriser cinq des huit formes de magie – pourrait se révéler instructive.

 

La caméra se braque donc sur le mage prodige, au moment où une crise existentielle le saisit. A force d’exceller en tout, notre homme ne sait plus quel but se donner dans la vie, et après mûre réflexion, il décide d’aller vérifier si les Royaumes Mortels ont bien une fin physique, just for the thrill of it. La première étape de cette odyssée est de fact checker le sujet auprès d’une sommité en la matière, et comme Bayla a le bras long et le cœur bien accroché, il monte tout en haut du minaret du temple de Teclis le plus proche, entre en transe et se téléporte directement auprès du Dieu, qui lui assure que l’on peut bien s’asseoir sur le rebord du monde1. Cependant, cela n’est pas donné au premier clampin venu, car il faut passer par une porte secrète qui ne peut s’ouvrir qu’avec une clé forgée exprès par Grugni, puis terrasser un monstre immortel. Ca fait cher le coup d’œil.

 

Ce topo ne fait cependant pas peur à Bayla, qui abandonne séance tenance femme et enfants pour se lancer dans ce trek de l’extrême, ce qui l’occupe pendant quelques années. S’il ne parvient pas à négocier une audience auprès du Dieu forgeron lorsqu’il se rend à son temple de Chamon, il réussit tout du moins à obtenir un double de la clé en partageant sa Rince-Cochon avec le Nain Blanc (qui passait dans le coin). Il trouve également une astuce pour venir à bout du loup géant (Afrener) qui garde l’accès au bord du monde en se suicidant à 99% pour pouvoir rencontre Nagash, qui accepte d’euthanasier l’encombrant clébard en échange de cinq siècles et cinq jours de servitude post-mortem. Faut ce qu’il faut.

 

Ces obstacles enfin négociés, Bayla peut enfin boucler son périple, et contempler l’immensité magique et chaotique où les Royaumes (ici Ghyran) commencent et s’achèvent. Il est cependant immédiatement alpagué par un Magister de Tzeentch, qui essaie de lui vendre un plan de carrière mirobolant en l’échange de son âme, mais qui commet l’erreur de révéler que l’équilibre perso-pro ne serait alors pas vraiment respecté. Car Bayla est, au fond de lui, un authentique pater familias, et toutes ses pérégrinations lui ont ouvert les yeux sur le fait qu’il n’a pas été très présent au cours de la dernière décennie. Raccrochant violemment au bec de son démarcheur (ou l’équivalent dans les Royaumes Mortels), il repart dare dare en direction de son foyer, non sans avoir eu la vision d’une époque lointaine où ce dernier serait frappé par la guerre. Sachant qu’il ne serait plus là pour le voir, et donc l’empêcher, il décide de créer son fameux miroir pour que les Dieux puissent s’en servir dans leur veille constante contre le Chaos. Ce qui nous ramène au point de départ et à Highheim.

 

La nouvelle se termine sur un petit speech de Sigmar à sa bonne amie, qu’il voudrait plus active auprès des mortels afin de contrecarrer les fake news répandues par le Chaos à propos de la vie éternelle qui attendrait les serviteurs des puissances de la ruine. Qui de plus qualifié que la Déesse de la Vie pour porter ce message optimiste et philosophique auprès des habitants des Royaumes Mortels, hein ? Alarielle lâche un gros « mouais, j’y penserais » et repart semer du gazon en Ghyran, laissant Sigmar passer la mop et fermer la lumière sur Higgheim. C’est pas tous les jours facile d’être un petit patron.

 

On savait Guy Haley très à l’aise dans le registre « mythique », qu’il est l’un des seuls contributeurs de la Black Library à pratiquer de manière régulière2, et ‘Pantheon’ est sans doute sa soumission de référence en la matière. Il parvient en effet à mettre en scène une épopée légendaire comparable à celle Gilgamesh (un héros d’une puissance quasi-divine s’embarque dans une quête impossible), transposée dans l’univers d’Age of Sigmar, et même plus largement, de la GW-Fiction, comme les références au Monde qui Fut qui émaillent le récit le dénotent. On se laisse embarquer dans ce voyage très différent des nouvelles ordinaires de la BL, où le moindre personnage est un Dieu, une Bête Zodiacale ou un individu mythique, et qui se termine comme souvent dans ce type de littérature par un enseignement moral à méditer (ici un bon carpe diem des familles). C’est à la fois rafraichissant et bien réalisé, et mérite donc vraiment d’être lu par celles et ceux qui souhaitent explorer le catalogue de la Black Library à la sauce AoS. Un classique en devenir, à mon humble opinion.

 

1 : C’est malin, je vois maintenant Teclis avec la moustache de Francis Cabrel.

 

2 : Voir sa série sur le Prince Maesa, par exemple.

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Vault of Souls - E. Dicken:

Révélation

Envoyés par Sigmar en personne explorer Shadespire à la recherche de toute information utile à l’amélioration du processus de Reforge des Stormcast Eternals, et en particulier l’effritement de leur personnalité au fil du temps (le fameux syndrome de délavage), le Knight Incantor Averon Stormsire et ses deux acolytes (Ammis et Rastus) sont sur une piste aussi prometteuse que dangereuse : celle du Katophrane Thalasar. Ce dernier est passé maître dans l’art nécromantique, ce qui pousse Stormsire à penser qu’il pourrait utiliser ses savoirs (un peu impies certes, mais on ne fait pas de surhommelettes sans casser des œufs) pour avancer dans sa propre thèse de recherche fondamentale. Problème, Thalasar est discret, et remonter sa piste n’est pas facile, même pour un arcaniste du talent de notre Knight Incantor. Problème bis, Thalasar était le gardien de la Briar Queen avant que le Nécroséisme ne vienne la libérer, et cette âme damnée n’a pas oublié les millénaires de tourments qu’elle a subi des mains de son geôlier. Son but dans la non-vie est donc de lui rendre la pareille, et elle hante (haha) elle aussi la Nightvault à la recherche de sa proie.

 

Les Cursebreakers disposent toutefois d’un coup d’avance grâce à leurs sacro-saints pouvoirs, qu’ils mettent à contribution pour localiser, immobiliser et fouiller une construction nécromantique de Thalasar, faisant office de raffinerie à âmes mobile. L’automate collecteur n’avait cependant pas été laissé sans surveillance par son propriétaire, et le trio de choc doit affronter un golem animé par une source d’énergie particulièrement détestable pour nos vertueux héros : l’âme d’un de leurs cousins de chambrée. Grâce au copieux grimoire de sort de Stormsire, la menace est neutralisée, et le chemin menant vers le laboratoire secret de Thalasar localisé grâce un rituel tellement limite-limite que l’acariâtre meneur de bande demande à ses sous-fifres de l’attendre dehors pendant qu’il fait sa petite affaire. Il me faut préciser ici que l’ambiance n’est pas au beau fixe chez les Cursebreakers, Stormsire étant l’archétype du vieux de la vieille aigri et cassant, tandis que Rastus est un newb plein d’enthousiasme affublé d’une fâcheuse tendance à foncer dans le tas sans réfléchir. Ammis quant à elle essaie de fluidifier les échanges entre ses collègues, mais souvent sans résultat.

 

Ces considérations psychologiques doivent cependant être remises à plus tard, car l’écho de la bataille et le rituel de Stormsire a attiré la Briar Queen et son épineuse cour de spectres, et une confrontation ne serait pas forcément en faveur des Stormcast Eternals (peut-être que c’est la méta qui veut ça). Guidé par sa vision, Stormsire peut toutefois entraîner sa troupe en direction du repaire de Thalasar, situé au plus profond de la Nightvault, et juste en dessous du trône où la Briar Queen a passé quelques siècles à se faire spiritboarder. Les Cursebreakers sont accueillis par une vision de mauvaise augure de Stormcast se faisant laminer et dépouiller de leur âme et de leur matos par les golems du Katophrane, ce qui explique pourquoi les pertes ont été si élevées lors de la première exploration de Shadespire par les larbins du divin barbu. Et bien évidemment, le piège que leur avait tendu Thalasar ne manque pas de se refermer sur eux…

 

Révélation

…Le Katophrane reclus était en fait aussi intéressé par Stormsire que ce dernier, et cherchait à l’attirer dans son laboratoire afin de s’incarner dans son corps1. Terrassé par la douleur de cette tentative d’usurpation d’identité, Stormsire ne peut qu’assister du coin de l’œil à l’attaque brave mais futile de Rastus contre les sortes d’aimants à âmes que Thalasar a installé dans son sous-sol, et qu’il utilise pour animer ses golems. Les éclairs conjurés par l’Evocator sont en effet absorbés par la machinerie infernale au lieu de l’endommager, et les automates de Thalasar ne tardent pas à se mêler à la partie, pour ne rien arranger.

 

La solution viendra d’Ammis, qui sous ses airs de sainte nitouche, avait retenu les invocations pas très recommandables de son supérieur et les utilisera pour combattre l’influence néfaste de Thalasar. Ce léger sursis permet à Stormsire d’endommager le VPN arcanique déployé par le Katophrane sur son labo, attirant immédiatement l’attention de la Briar Queen, qui débarque avec pertes et fracas pour régler ses comptes avec son vieux copain, faisant s’écrouler le plafond sur les machines infernales de ce dernier et renversant par la même le cours de l’affrontement. Peu enclin à goûter sa propre médecine, Thalasar supplie Stormsire de le laisser crécher dans son cerveau pour échapper aux funestes intentions de la Briar Queen, et aurait sans doute obtenu un bail mental sans l’intervention d’Ammis, qui choisit de régler son compte au faquin d’un cri qui tue bien placé. Bien que Stormsire commence par lui reprocher sa prise d’initiative après que les Cursebreakers se soient tirés d’affaire dans la confusion de la bataille, il finit par réaliser que la prudence de l’Evocator était sans doute bien fondée. La journée n’a cependant pas été vaine, nos héros ayant recueilli l’âme de plusieurs Stormcast Eternals gardés comme batterie d’appoint par Thalasar dans leurs gourdes magiques, en plus d’avoir fait s’écrouler le laboratoire du Katophrane sur le suaire de la Briar Queen. Il faut parfois savoir remporter une partie grâce aux objectifs secondaires…

 

Evan Dicken signe une masterclass dans le sous-genre particulièrement casse-gueule de la nouvelle d’Underwolds, sur lequel plus d’un contributeur de la Black Library s’est cassé les dents depuis que cette mini franchise dispose de son accompagnement littéraire, avec ce ‘Vaults of Souls’. Il y est parvenu en adoptant une approche pragmatique qui lui a permis d’éviter les écueils que les prémisses de cet univers (des bandes immortelles cherchant toutes à accomplir un objectif impossible) présentent à tout auteur cherchant à intéresser son lectorat à une aventure qui ne peut pas, par nature, s’achever. Voici comment il s’y est pris.

 

Premièrement, en créant un antagoniste original pour la bande à laquelle l’histoire est consacrée, ce qui a le grand intérêt de permettre aux héros de se débarrasser pour de bon de leur Némésis, au lieu de devoir souffrir l’infamie de la voir s’en tirer d’une manière ou d’une autre. Cela permet également d’éviter le classique, mais maladroit, « bande contre bande » que certains auteurs ont cherché à mettre en scène, avec des résultats généralement assez peu concluants (pour la raison ci-dessus, a.k.a. personne ne peut gagner). Notons tout de même qu’Evan Dicken a enrichi son histoire en intégrant les Epines de la Briar Queen à cette dernière, mais en prenant soin de ne jamais opposer directement les deux bandes sur le champ de bataille. À la place, leur rivalité pour embaucher Thalasar comme free lance permet de faire avancer l’intrigue de manière fluide, sans risquer de déboucher sur un bête statut quo.

 

Deuxièmement, en permettant à ses héros d’accomplir un objectif, même mineur, à la fin de leur aventure. Ici, il s’agit de la récupération des âmes de Stormcast : on est loin du secret de la Reforge sans déperdition d’énergie qui est le leitmotiv d’Averon et de ses gorilles, mais c’est tout de même une victoire notable pour ces derniers, et surtout, une progression nette par rapport au début de la nouvelle.

 

Troisièmement et pour terminer, en faisant évoluer ses protagonistes entre le début et la fin de la nouvelle, ce qui donne une bonne raison pour le lecteur de s’intéresser à leur sort. Le trio de Stormcast Eternals bénéficie de ces délicates attentions de character development : Averon Stormsire gagne en empathie envers ses camarades, Ammis sort de cette aventure légèrement corrompue par son utilisation de magie nécromantique, et Rastus a appris à réfréner sa nature impulsive. Bien qu’ils soient légers (et pour être honnête, il n’y avait pas grand-chose de plus que Dicken pouvait s’autoriser s’il ne voulait pas enfreindre son cahier des charges), ces changements donnent l’impression que les Cursebreakers ne sont pas un trio monolithique condamné à errer dans le sous monde jusqu’à la Fin des Temps (ou l’arrêt du jeu), mais une bande de héros affectés par leur quête.

 

Vous l’aurez compris, c’est une franche réussite en ce qui me concerne, et un, si ce n’est le, modèle à suivre pour les prochaines nouvelles de Warhammer Underworlds.

 

1 : Petit rappel utile si vous n’êtes pas familier avec le fluff de Shadespire, les Katophrane ont été emprisonnés par Nagash dans des éclats de shadeglass (verre d’ombre ?). Pratique pour résister au passage du temps, mais plutôt restrictif en termes de mouvement.

 

The Road of Blades - J. Reynolds:

Révélation

The Road of BladesAhazian Kel est ce que l’on peut appeler un routard des Royaumes Mortels. Guerrier accompli et sans pitié, il a tout sacrifié (y compris sa famille et sa tribu) pour se vouer à Khorne et devenir le plus grand dresseur Pokémon la guerre incarnée, avec un certain succès il faut le dire. Au début de notre propos, nous cueillons cette grande baderne flegmatique (y a pas grand-chose qui touche sa hache qui fait bouger son marteau) au saut du cheval, sa monture ayant prise une flèche dans l’œil après qu’il ait été repéré par un groupe de maraudeurs de Caldera alors qu’il parcourait les Herbes Noires, une steppe d’Aqshy. Peu impressionné par cet accueil hostile, Ahazian découpe quelques-uns de ces faquins mongoloïdes, ce qui convainc les survivants d’aller voir ailleurs s’il y est. L’Elu de Khorne peut donc reprendre sa route, qui doit le mener… à une autre route, mais pas n’importe laquelle : il a en effet reçu des présages insistants l’enjoignant à rejoindre la légendaire cité de Soulmaw, située à la croisée des Royaumes et centre névralgique de la production d’armes et d’armures des hordes du Dieu du Sang. Pour cela, il est nécessaire d’emprunter une huit voies, connue sous le nom de Route des Lames.

 

L’appellation n’est pas mensongère, comme il ne tarde pas à s’en rendre compte, puisque cette route est littéralement constituée de lames fondues ensemble, comme si un conquérant Targaryen anonyme avait eu des envies de tapis plutôt que de fauteuil. A chacun ses goûts. Comme Khorne n’est pas du genre à ménager ses champions, Ahazian est confronté à quelques épreuves sur le chemin de Soulmaw : des Epées de Vive-Argent s’extirpent de la route et lui tombent sur le râble, des automates tueurs lui refusent la priorité, et d’autres aspirants attirés par les mêmes présages de carnage et de grandeur que lui cherchent querelle alors qu’il attend à la sortie de la bretelle de péage. Pas vraiment ce qu’on peut appeler de la mobilité douce. Le sanguin A-ha est bien décidé à resteeeeeer sur sa route, en recourant au meurtre si nécessaire, mais avant que l’irréparable ne se produise, il est téléporté à l’intérieur d’une forge spacieuse mais rustique, où le maître des lieux lui accorde audience.

 

L’hôte en question, le Skullgrinder Volundr, n’est pas n’importe qui. Il s’agit de l’un des huit Maîtres de Forge de Khorne, soit l’élite de la crème des forgerons chaotiques. Chacun d’entre eux a notamment créé l’une des huit Lamentations du Dieu du Sang, armes exceptionnelles que Khorne avait offert à ses frères1, et qui furent perdues pendant l’Âge du Sang. Vovo a ainsi confectionné l’épée Coupemoelle (Marrowcutter, c’est à peine moins ridicule), trempée dans le sang de cent démons. C’est lui qui a convoqué Ahazian, car il sait que les armées du Chaos auront bientôt besoin d’être menées par des héros maniant des armes légendaires, et il a pressenti que notre homme, s’il est le dernier des Kel, n’était pas le dernier des abrutis, et pourrait avoir l’étoffe nécessaire pour le job. Pour en être sûr, et comme c’est la tradition lors de recrutement à la Khorne Khorp., il défie Ahazian en duel, et se fait vaincre par une fourchette dans les yeux vicelarde mais réglementaire. Satisfait par le fighting spirit de sa recrue, il lui remet une hache bien stylée, et le prend à l’essai pour un premier contrat. La suite dans ‘The Spear of Shadows’.

 

Nouvelle présentant les origines du principal antagoniste de ‘The Spear of Shadows’ et contextualisant la légende entourant les Lamentations de Khorne, ‘The Road of Blades’ n’a curieusement pas été nommément reliée au cycle éponyme par la Black Library, alors qu’elle y a toute sa place. Il n’en reste pas moins que cette histoire de champion chaotique embarqué dans une quête mortelle et affrontant des dangers aussi variés que surnaturels (Chaos oblige) se laisse lire sans problème, et permet à Reynolds de nous livrer un beau spécimen d’anti-héros aussi charismatique que détestable. Comme le dit l’adage, une bonne histoire repose en grande partie sur la qualité de son méchant, et Ahazian Kel est un (futur) antagoniste auquel on s’attache rapidement. Lecture essentielle si vous vous lancez dans la saga, malheureusement inachevée, de Reynolds pour Age of Sigmar, et sympathique sinon.

 

1 : Ce qui est assez stupide de sa part car cela fait 2.666666666666667 armes par Dieu. Il en aurait fait 9, ça aurait été plus simple.

 

Bear Eater - D. Guymer :

Révélation

Bear EaterToujours en maraude dans les Royaumes Mortels (ici en Ghur) avec ses Astral Templars pour le compte du patron, Hamilcar Bear Eater voit une occasion en or d’agrandir le protectorat sigmarite se présenter à lui lorsqu’il arrive en vue de la cité de Jercho. Miraculeusement épargnée des déprédations des hordes du Chaos, cette ville ferait un bastion idéal pour les croisés d’Azyr… si Hamilcar arrive à convaincre son monarque, le Roi Soleil Joraad el Ranoon, de rejoindre le camp de l’Ordre. Rien de plus facile pour notre héros, dont les prouesses martiales ne sont égalées que par ses talents de diplomate (du moins c’est comme ça qu’il voit les choses, en sa qualité de plus grand fan de lui-même).

 

Après une petite parade militaire réalisée dans des conditions éprouvantes (#SousLeSoleilExactement), même pour des immortels en sigmarite, Hamilcar et ses lieutenants (le vieux bougon Broudiccan et un random dude du nom de Thracius) sont pris à parti par une émissaire de Jojo et sommés de laisser leurs armes au vestiaire pour respecter le protocole officiel. Lorsque nos trois compères finissent par obtempérer, ils ont la désagréable de surprise de constater qu’ils sont tombés dans un piège, une petite armée de gardes se déversant dans le hall avec des velléités peu charitables envers les Stormcasts.

 

Punk à chien gryffhound dans l’âme, Hamilcar ne perd pas de temps à tenter de résoudre ce conflit par la parole, et commence à zlataner à tout va les malheureux mortels qui lui passent sous la main. Ayant manifestement sous-estimés la puissance de leurs adversaires, les miliciens de Jercho finissent par battre en retraite, laissant toute latitude à notre héros de monter une expédition punitive envers ce pendard de Joraad el Ranoon (officiellement) et d’annexer la cité pour la plus grande gloire de Sigmar (officieusement)1. Sur le chemin de la salle du trône, il rencontre une vieille connaissance, le général Sarmiel el Talame, avec qui il a fait le coup de feu contre les Sankrit quelques semaines auparavant, et qui l’avait mis sur la route de Jercho après la bataille de Heliopalis. Miraculeusement convaincu par Hamilcar en l’espace de deux répliques qu’il était dans le camp des méchants, Sarmiel fait défection de la Garde Solaire et accepte de guider ses gros copains jusqu’au Palais de la Lune, où le Roi Soleil tient sa cour.

 

En route vers son objectif, Hamilcar développe un point de côté persistant2 et se retrouve confronté, en plus des bidasses solaires qui défendent le Palais, à des vampires feulant, preuve irréfutable du passage de ce coquin de Mannfred von Castein (ennemi juré de notre héros depuis qu’il s’est fait tuer par le Mortarque3) par Jercho. Il en faut toutefois plus pour empêcher l’injouable Mimil – qui se paie le luxe d’infliger une Mike Tyson à un suceur de sang un peu trop sûr de lui – de se frayer un chemin jusqu’à l’affreux Jojo. Ce dernier ne peut compter que sur ses rayons, des serviteurs totalement assujettis à sa volonté, pour faire office de derniers défenseurs, et place Hamilcar devant un dilemme cornélien pour le héros du Bien (avec un grand B et un grand nez) qu’il est : massacrer des innocents pour atteindre son objectif, ou les épargner et laisser le Roi Soleil s’en tirer à peu de frais…

 

Révélation

…Malheureusement pour Joraad el Ranoon, une troisième voie était possible, à savoir embrocher le lumineux monarque sur son trône d’un jet de hallebarde bien senti. La mort rapide et sanglante du roitelet permet au moins d’établir qu’il n’avait pas été changé en vampire par Mannfred von Carstein, ce qui est… une information. Et le savoir est le pouvoir, paraît-il. La nouvelle s’achève sur cette conquête nette et (presque) sans bavure d’une nouvelle Cité de Sigmar par les Astral Templars. Du travail bien fait.

 

Je ressors de ce ‘Bear Eater’ avec une persistante sensation de gâchis au fond de la gorge (ou peut-être du cerveau), ce qui me désole au plus haut point compte tenu de mon attachement pour le personnage de Hamilcar, une des premières têtes d’affiche moderne (comprendre, un brin complexe) des Royaumes Mortels, et qui faisait ici ses grands débuts dans la carrière. En cause, le choix de David Guymer de placer son intrigue dans un cadre exotique et singulier (donc intéressant) en diable, mais de confiner ce dernier à une toile de fond au profit d’une nième baston entre Stormcast Eternals et locaux impénitents. La deuxième moitié de la nouvelle vient ainsi ruiner le travail de world building de la première, en se focalisant uniquement sur les exploits martiaux du fortiche Hamilcar, qui parviendra une fois encore et sans aucune surprise à vaincre l’affreux vilain que la destinée lui a mis sur son chemin. Et comme les compétences martiales de sa Némésis du jour (ou de la nuit) culminent à « lever le bras d’un air vaguement menaçant », on n’a même pas le droit à un combat final digne de ce nom, comme cela avait été le cas lors d’épisodes précédents de la série.

 

 

De manière générale, il se perçoit bien trop clairement à la lecture que ‘Bear Eater’ n’est qu’un segment d’un arc narratif bien plus large, dans la droite ligne des événements relatés dans ‘The Realmgate Wars’, écrits à quatre mains par Guymer et Josh Reynolds lors des premières années d’Age of Sigmar. Les références à la traque de Mannfred von Carstein sont tellement nombreuses au fil des pages que je soupçonne que cette nouvelle devait initialement faire partie d’une nouvelle tétralogie (comme ‘The Hunt for Nagash’ et ‘Knights of Vengeance’), avant que le projet soit abandonné pour une raison non précisée. Cela expliquerait aussi cette fin des plus abruptes ainsi que le traitement bizarre réservé au personnage de Sarmiel el Talame, qui semble avoir un passif conséquent avec Hamilcar et ses Astral Templars : je suis prêt à mettre une pièce sur le fait que cette première rencontre aurait dû faire l’objet d’une nouvelle ou d’un audio drama. Bref, un véritable et regrettable accident de parcours pour la paire Guymer & Hamilcar, sans doute causé par les errements éditoriaux de la Black Library à l’époque.

 

1 : On peut remercier Guymer d’adapter un grand classique de la culture britannique à la sauce d’Age of Sigmar. Appelons ça le Fardeau du Mangeur d’Ours Blanc.

 

2 : Qui ne sera pas expliqué dans la suite de la nouvelle et n’aura pas d’impact sur la conclusion de cette dernière, mais suggère fortement que Guymer avait quelque chose de particulier en tête au moment de l’écriture.

 

3 : Voir ‘Beasts of Cartha’.

 

Gravesend Gold - C. L. Werner :

Révélation

Les affaires n’ont pas été bonnes ces derniers temps pour le capitaine Brokrin Ullisson et l’équipage de l’Iron Dragon. Après les tapisseries pleines de rats de la lamaserie de Kheitar (‘Shiprats’) et les manticores mal lunées de Silverreach (‘Overlords of the Iron Dragon’), les ports d’attache visités récemment par l’Ironclad n’ont pas permis aux Kharadrons de se refaire, et le spectre d’une campagne déficitaire plane désormais sur les Duardins. Aussi, lorsque la vigie repère l’épave d’un vieux modèle de cargo volant Kharadron encastré dans une falaise, Brokrin saute sur l’occasion et met le cap sur le lieux de l’accident afin de fouiller cette trouvaille miraculeuse à la recherche de quoi remplir sa cale.

 

La chance semble enfin sourire à l’Iron Dragon lorsque les explorateurs mettent la main sur une cargaison d’or profond, un minerai incroyablement rare dont la source s’est tarie depuis des siècles, pendant les soubresauts de l’Âge du Chaos. Bien que l’épave exsude une aura inquiétante, qui met mal à l’aise ceux qui s’en approchent trop, Brokrin et ses hommes repartent avec un lingot échantillon, et se promettent de transbahuter le reste du magot sur leur rafiot dès le lendemain, lorsque les conditions de luminosité permettront une opération sécurisée. Car si les Kharadrons sont avides, la sécurité sur le lieu de travail est strictement réglementée dans leur Code, et aucun capitaine digne de ce nom ne risquerait de se faire intenter un procès aux Prud’uardin pour mise en danger de ses employés.

 

Toutefois, la tombée de la nuit provoque un événement fâcheux : l’épave se transforme en vaisseau spectral, manœuvrée par un équipage d’esprits de Kharadrons des temps jadis, et part à la poursuite de l’Iron Dragon pour reprendre ce qui lui appartient. Malgré la diversité et la puissance de l’armement dont dispose l’Ironclad (canons, mine volante, harpon géant…), rien n’arrête la menace fantôme, et l’abordage tant redouté finit par se produire. Les pistolets et coutelas étant aussi inefficaces contre les ectoplasmes barbus qu’un déodorant sur un Grand Immonde, l’affaire semble bien mal engagée pour Brokrin et Cie

 

Révélation

…Heureusement, le capitaine n’est pas le dernier des abrutis et comprend vite que ses visiteurs ne souhaitent que rentrer en possession de leur lingot. Bien qu’ils n’en ont guère l’usage dans l’état où il sont réduits, cela n’affaiblit pas le moins du monde la légitimité de leur requête, et Brokrin peut respecter cela. Cependant, il ne s’attendait pas à ce que son homologue mort-vivant demande en sus à être compensé pour le dommage moral subi. Mais le Code étant le Code, et lui-même guère en position de refuser quoi que ce soit à un adversaire éthéré au dernier degré, il n’a d’autre choix que de consentir à ce que les quelques marchandises que l’Iron Dragon ramenait à bon port soient accaparées par ses visiteurs nocturnes. Voilà qui lui apprendra à laisser les épaves abandonnées tranquilles…

 

Ça sent très fort la panne d’inspiration du côté de C. L. Werner avec ce très quelconque ‘Gravesend Gold’, qui vient « conclure » le premier arc de l’équipage de l’Iron Dragon sans apporter le moindre développement digne de ce nom à ses personnages. Pour un scénariste aussi consommé que notre homme, se contenter d’une simple fouille d’épave qui se termine mal, sans aucune surprise dans le déroulé ni dans l’issue de l’histoire, est un aveu de je m’en foutisme assez patent. Sans doute une commande expédiée à la va-vite pour faire plaisir à la Black Library… Quoi qu’il en soit, on peut faire l’impasse sans problème sur cette micro-péripétie et se concentrer sur ‘Shiprats’ et/ou sur les nouvelles de Drekki Flynt de Guy Haley, si on est à la recherche de khourts formats digne de ce nom.

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The Tainted Axe - J. Reynolds :

Révélation

The Tainted AxePeu de temps après les événements relatés dans ‘Spear of Shadows’, nous retrouvons le chevalier – ou plutôt, demigryphier – Roggen de Ghyrwood March, de retour en Ghyran avec une main en moins et des souvenirs en plus. Ayant refusé l’offre de Grugni de remplacer son membre manquant par une réplique mécanique, au profit d’une solution plus naturelle, notre héros n’a toutefois pas trouvé chaussure à son pied ni prothèse à son moignon. Sa convalescence prend un tour particulier lorsqu’il se sent appelé une nuit dans le bosquet de ferbois consacré de son ordre, où l’attend une Branchwraith mutine, avec une nouvelle quête divine à lui confier.

 

Loin au Sud se trouve le Gaut Tors1, une forêt qui a cruellement souffert des déprédations de Nurgle et des ses séides au cours des dernières années. Un champion du Dieu des maladies y a jadis mené une expédition corruptrice, dont il n’est jamais revenu mais qui a résulté en l’abandon de sa hache maudite sous un tas de feuilles. Depuis lors, cette arme maléfique corrompt les bois aux alentours, comme une pile au mercure enterrée dans l’humus. La mission de Roggen consistera donc à localiser cette relique impie et à la ramener à sa commanditrice, qui en échange de ses bons et loyaux ordonnés services lui fera pousser une nouvelle menotte. Bien que notre héros ne soit pas né de la dernière pluie, et se méfie à juste titre des fantasques Sylvaneth, le serment d’allégeance à Alarielle qu’il a prêté en devenant chevalier, et l’attrait de retrouver la main, le convainquent rapidement d’accepter cette quête. Avant de retourner écouter pousser les fleurs, la Branchwraith a l’amabilité de lui adjoindre les services d’un sherpa forestier, en la personne compacte mais grincheuse d’un esprit de la forêt.

 

Nous suivons alors Roggen, son guide mal-luné (il passe son temps à appeler le chevalier « viande », ce qui n’est guère aimable) et sa farouche monture (Harrow) jusque dans les profondeurs mal famées du Gaut Tors. Bien que sa patronne lui a promis qu’il aurait un droit de passage auprès des Sylvaneth du cru, le fait que ces derniers soient perturbés par les émanations toxiques de la hache perdue d’une part, et leur allégeance à nulle autre que Drycha Hamadreth d’autre part (un petit détail que la Branchwraith avait omis de préciser à son prestataire pendant le briefing), n’incitent pas Roggen à la détente de son slip (en bois, comme le reste de sa garde-robe). Le trio finit toutefois par arriver dans une clairière, où un petit groupe de Rotbringers est à pied (gangréné) d’œuvre, et vient d’exhumer une sorte de cocon de racines calcifiées, qui ne peut être que le réceptacle de cette fameuse hache.

 

Confiant dans ses capacités de bretteur et l’effet de surprise, Roggen fonce dans le tas avec abandon, mais se retrouve rapidement en difficulté, notamment du fait que ses adversaires ont apporté avec eux des arbalètes, ce qui n’est pas très fluff tout de même. Avant que l’impétueux chevalier n’ait été transformé en hérisson manchot (ce qui vaut mieux qu’un échidné pingouin, qu’on se le dise), une voix tonitruante vient intimer aux Nurgoons de cesser le feu. Il s’agit du Blight Knight qui commande l’expédition des prouteux, et qui, en véritable chevalier de l’ordre de la mouche, propose à Roggen de régler l’affaire par un duel tout ce qu’il y a de plus honorable, et au gagnant le loot. N’ayant pas de meilleure option sous la main, notre héros accepte la proposition de son adversaire (Feculus), et les deux champions se mettent sans tarder à l’ouvrage.

 

Si sa monture parvient sans mal à vaincre le destrier démoniaque de sa Némésis, Roggen éprouve quant à lui les pires difficultés à tenir tête à cette dernière, qui est à la fois plus forte et plus résistante que lui. Au bout du compte, il faudra l’intervention, pas vraiment fair play mais très secourable, de son sidekick végétal (qui utilise l’attaque airbark) pour que Roggen parvienne à vaincre l’ignoble Feculus. La mort de leur patron libère toutefois les Rotbringers de leur serment de non-intervention, et le chevalier Dubois n’aurait pas fait long feu sans l’arrivée à point nommée des Sylvaneth du Gaut Tors, qui se font un plaisir d’offrir une démonstration de bio compostage express à leurs ennemis honnis. Cela laisse le temps à Roggen de repartir avec sa relique rouillée, et de se retrouver en bout du compte avec une greffe maniable. C’est tout le mal qu’on lui souhaite.

 

On ne le savait pas encore à l’époque de sa publication, mais ‘The Tainted Axe’ constituait la dernière apparition du chevalier Roggen de de Ghyrwood March, l’un des personnages attachants2 créés par Josh Reynolds dans le cadre de sa saga – laissée inachevée – des Lamentations de Khorne. Si cette péripétie mineure ne se place pas parmi les meilleures soumissions de notre homme, on y retrouve toutefois les points forts habituels de sa prose, à savoir des personnages intéressants (mention spéciale au jovial Feculus, que l’on retrouve cité dans les écrits consacrés par Reynolds à l’ordre de la mouche), une intrigue et un développement qui tiennent la route, et une généreuse dose de fluff pour napper le tout. Des nouvelles comme ça, je pourrais en lire 10 par jour sans me lasser. A mettre entre toutes les mains (haha).

 

1 : Je ne sais pas si cette nouvelle a été traduite en français, mais je suis hyper fier de ma proposition (Writhing Weald en VO).

 

2 : Notamment parce qu’il a pas mal de traits communs avec Erkhart Dubnitz, du très saint et très violent ordre de Manann, un des héros les plus hauts en couleurs de la Black Library.

 

The Witch Takers - C. L. Werner :

Révélation

The Witch TakersMis sur une sale histoire de meurtre dans la ruralité profonde du Khanat d’Arkl, en Chamon, les chasseurs de sorcières Esselt et Talorcan, unis à la scène comme à la ville, remontent une piste, forcément chaude, à travers les dunes du désert de Droost. De villages martyrs en tombes profanées et cadavres possédés il ne faut pas longtemps à notre fine équipe pour subodorer que quelque chose de pas sigmarite se cache au fond de ce dossier. Il semblerait que quelqu’un hante Droost avec pour seule mission de massacrer tout ceux ayant le malheur de croiser sa route. Quelqu’un… ou quelque chose, qui asservirait ses hôtes les uns après les autres, passant de main en main et ne laissant que les dépouilles de ses victimes et de ses porteurs derrière lui. Alors que les deux Répurgateurs approchent l’oasis de Tora Grae, miraculeusement épargnée par la folie environnante, il leur faudra agir rapidement et intelligemment pour empêcher le Tournetueur (pun intended) de commettre un nouveau carnage…

 

C.L. Werner qui met en scène un duo de Répurgateurs embarqués dans une quête qui les conduira dans quelque sinistre recoin de leur « circonscription » : du tout cuit pour l’auteur de la (plutôt bonne) série des Mathias Thulmann me direz-vous. C’est aussi ce que je pensais avant de commencer la lecture de ces Tueurs de Sorcières, et me suis donc surpris à reconsidérer légèrement ce postulat une fois passé le point final. Comme quoi, rien n’est gravé dans le marbre dans ce bas monde. La première divergence notable qui m’est apparue est la relation amoureuse unissant Esselt et Talorcan, ce qui n’a rien de rédhibitoire en soi (et est même suffisamment rare dans une publication de la Black Library pour qu’on puisse au contraire saluer l’audace de l’auteur), mais m’a semblé tellement éloignée des conventions usuelles de ce genre de littérature que mon expérience de lecture s’en est trouvée, pas polluée, le terme serait un peu fort, mais au moins perturbée par les roucoulades échangées par nos héros1.

 

Passées ces considérations romantiques, l’intrigue que nous propose Werner ne s’avère pas être très haletante, la course poursuite par hôte interposé à laquelle se livrent Buffy, Xander et le bracelet perdu de Valkia la Sanglante suivant son cours avec une linéarité décevante, alors que la méconnaissance par nos héros de la nature et de la forme du mal qu’ils ont à combattre ouvrait la porte au développement de fausses pistes. Quant au binôme de choc proposé par l’auteur, il se révèle être d’une décevante platitude, Esselt et Talcoran ne s’écartant pas d’un pouce de leur stéréotype respectif (la paladine zélée et le rôdeur débrouillard), ce qui ne donne pas vraiment envie d’embrayer sur le roman que Werner leur a consacré (Le Cœur Corrompu//The Tainted Heart). Pour terminer, les apports fluff de cette nouvelle se comptent sur les doigts d’une main d’un Zombie de la Peste, le fait qu’elle se déroule dans un bout de désert perdu au milieu de nulle part ne jouant évidemment pas en la faveur d’inclusions significatives (même si ce genre de théâtre d’opérations n’est en rien rédhibitoire pour peu qu’on veuille s’en donner la peine, comme Guy Haley l’a prouvé avec Les Sables du Chagrin//The Sands of Grief). En conclusion, il ne reste guère que le métier de C. L. Werner pour faire tenir ces Tueurs de Sorcières debout, ce qui est suffisant pour une lecture rapide de l’ouvrage, mais à peine.

 

1 : Quand bien même ces dernières sont restées d’une sobriété bienvenue. C’est ainsi, j’ai du mal à voir des « Mon amour » apparaître dans une nouvelle de la Black Library.

 

The Old Ways - N. Horth :

Révélation

Callis and Toll_The Old WaysAffecté à la surveillance de la cité d’Excelsis, dans le royaume de Ghur, le répurgateur de l’Ordre d’Azyr Halliver Toll, escorté de son sidekick Armand Callis, est envoyé par ses supérieurs tirer au clair une sombre histoire de disparition à Marshpoint, une ville agricole située en périphérie de la Cité des Secrets. Le fils aîné de la puissante famille Junica n’a en effet plus donné signe de vie après avoir eu maille à partir avec quelques soldats de l’autre grande famille locale, les Dezraed, qui l’ont poursuivi jusque dans les profondeurs de la forêt d’Ulwhyr. L’entente entre Junica et Dezraed n’ayant jamais été cordiale, c’est une vendetta en bonne et due forme qui menace d’éclater entre les Capulet et les Montaigu de Ghur, gueguerre qui mettrait en péril l’approvisionnement des régiments d’Excelsis en précieuse soie d’acier, ressource collectée depuis les fermes arachnides de Marshpoint. Il va donc de l’interêt général que cette triste affaire soit réglée dans les meilleurs délais, et qui de plus qualifié qu’un répurgateur pour traiter ce problème ?

 

Nous suivons donc Thalys et Colle au cours de l’enquête à laquelle ils se livrent à leur arrivée dans le bourg miteux et boueux de Marshpoint. Après un interrogatoire croisé des patriciens des deux familles, l’énorme et suintant Fenrol var Dezraed, autoproclamé Gardien de Marshpoint du fait de sa capacité de bloquer à lui seul l’entrée de la ville s’il lui prenait l’envie de s’asseoir en travers du portail, et le sec et irritable Kiervaan Junica, nos experts se rendent sur les lieux de la disparition à proprement parler, escortés par l’homme de confiance du patricien Junica, un natif du nom de Ghedren, et par un trio de gardes Dezraed. Et s’il se pourrait bien que la rivalité larvée entre familles nobles ait bien fait couler le sang, les enquêteurs feraient bien de prendre au sérieux les rumeurs entourant la Sorcière Blanche d’Ulwyhr. Après tout, ils ont pénétré sur son domaine…

 

C’est avec enthousiasme que j’avais vu revenir la figure iconique du chasseur de sorcières/répurgateur dans le lore d’Age of Sigmar, que son inclinaison high fantasy aurait pu « immuniser » à l’introduction de ce type de personnage, très grimdark par nature. La lutte contre les cultes chaotiques gangrénant le nouvel ordre rutilant de Sigmar constitue en effet à mes yeux un axe de développement des plus intéressants, et une prise de recul bienvenue sur le manichéisme caractéristique des premières années d’AoS. Encore fallait-il que l’image d’Epinal Hammerhal de l’inquisiteur traquant le vice et la trahison parmi les sujets obéissants de l’autorité centrale (préférablement divine, c’est plus classe) soit convenablement adaptée dans cette nouvelle franchise, la profession en question exigeant une rigueur morale confinant à la psychose, ce qui n’est pas franchement la norme parmi la soldatesque sigmarite (ces martel-sans-rire de Celestial Vindicators mis à part), dépeinte à de nombreuses reprises comme adepte du compromis et de la tempérance. Qu’en est-il avec la paire Callis & Toll, promise à un bel avenir au sein de la BL à en juger de la façon dont leurs noms ressortent dans tous les ouvrages auxquels ils ont été inclus ? Eh bien, c’est plutôt pas mal, encore que pas spécialement pour les raisons détaillées ci-dessus. Je m’explique.

 

Si le fanatisme (dans le bon sens du terme, car, si si, dans la littérature med-fan, cela existe) de nos héros laisse à désirer, la retenue dont fait preuve Toll, sensé être le vrai bad guy du duo, dans le jugement qu’il délivre au coupable, le plaçant à un petit 2 sur l’échelle de Mathias Thulmann (le référentiel absolu de la maison à cet égard), Horth se rattrape néanmoins en glissant quelques remarques de bon aloi à propos d’un certain White Reaper (Cerrus Sentanus sur son état civil), Stormcast Eternal pas vraiment Charlie, à tel point que son nom est utilisé pour effrayer les enfants d’Excelsis. Voilà un type qui mérite que l’on suive, et j’espère bien que ça sera le cas dans un futur pas trop lointain. Celà étant dit, The Old Ways a d’autres qualités, la première étant de proposer une petite enquête policière pas trop mal troussée au vu du nombre de pages limité avec lequel elle doit composer1, l’atmosphère horrifique du passage « sylvestre » du récit étant une autre source de satisfaction. D’autre part, cette nouvelle présente également l’intérêt de creuser le background de la cité libre d’Excelsis, qui devrait normalement ne pas disparaître corps et bien dans les annales du fluff, au vu du nombre d’apparitions qu’elle a faite dans divers écrits depuis son introduction dans le background. En apprendre plus sur cette bourgade présente donc un intérêt pour le fluffiste, tellement bombardé d’informations géographiques par ailleurs qu’on ne peut lui reprocher de ne pas prendre note de tout ce qu’on lui soumet.

 

Enfin, de façon plus large, elle fait ressortir un concept intéressant : le fossé existant entre natifs d’Azyr et populations locales au sein des cités libres, les seconds étant généralement mal considérés, voire méprisés par les premiers, qui les qualifient « d’Amendés » (traduction personnelle de Reclaimed, qui peut aussi s’entendre comme « Récupéré ») ou de « Sang Maudit » (curseblood), ce qui n’est pas très sympathique, mais ajoute de la profondeur à la société sigmarite. Quand on lit que même un personnage « égalitariste » comme Toll n’aurait pas de problème à raser toutes les forêts de Ghur pour pouvoir accélérer la colonisation de ce Royaume, au grand désarroi des locaux qui ont appris à vivre dans les étendues sauvages et à les respecter, on se dit que la possibilité d’un soulèvement des indigènes contre la métropole et ses représentants est une possibilité réelle… et c’est tant mieux en termes de potentiel narratif ! Bref, une plongée satisfaisante dans l’arrière-pays d’Excelsis, et une nouvelle qui vaut le coup d’être lue pour qui s’intéresse au fluff des cités libres.

 

On saluera également le twist proprement « meta » de Horth, qui fait dire à Toll qu’il avait identifié le coupable depuis belle lurette et attendait juste de voir combien de temps il faudrait à Callis (et donc au lecteur) pour faire de même. On ne me l’avait jamais faite celle-là.

 

The Library of Forgotten Moments - J. Reynolds :

Révélation

Peu après les événements de ‘Soul Wars’, le Lord-Arcanum Balthas Arum des Anvils of the Heldenhammer décide d’aller faire retraite dans une bibliothèque perdue dans les montagnes de Shyish, afin de creuser son sujet de mémoire professionnel : la Reforge des Stormcast Eternals, et comment l’améliorer (ils ont tous le même, ces escrocs). L’endroit n’est mentionné que dans quelques vieux grimoires poussiéreux, et son accès n’est pas facile, mais il en faut plus pour décourager Balthas, qui arrive comme un prince, monté sur son gryph-charger Quicksilver, et est froidement accueilli par les archivistes morts vivants qui s’occupent de ce temple du savoir. Ayant juré qu’il venait en paix et après avoir montré sa carte d’étudiant, le Stormcast peut pénétrer dans l’édifice, contenant des montagnes d’ouvrages plus exotiques les uns que les autres.

 

Cependant, Balthas n’est intéressé que par un type bien précis de littérature : les classiques préhistoriques. La rumeur court en effet que la bibliothèque des moments oubliés (son petit nom) contient des savoirs prédatant les Royaumes Mortels, et venant du Monde qui Fut. Persuadé que la clé de sa quête d’information se trouve dans le lointain passé, Balthas part donc à la recherche des livres les plus anciens qu’il puisse trouver, bien aidé par ses sens arcaniques aiguisés. Après quelques temps, il finit par localiser une zone prometteuse, mais remarque un détail curieux sur les codex qu’il feuillette : si leur contenu semble bien provenir d’un autre temps, comme en témoignent l’usage d’écritures inconnues et le sentiment persistant de déjà-lu qu’il éprouve en les consultant, leur reliure est récente. Qui aurait pu écrire l’histoire d’un monde détruit il y a des milliers d’années ?

 

Cette question académique devra cependant attendre un peu, car l’étude de Balthas est interrompue par l’arrivée d’un autre visiteur, qui s’il rit beaucoup, n’en est pas sympathique pour autant : Mannfred Von Carstein en personne. Le Mortarque de la Nuit ayant été déclaré ennemi d’Azyr par Sigmar, le Lord-Arcanum se sent dans l’obligation d’appréhender le maraud, mais ce dernier ne se laisse pas faire. L’affrontement magique qui s’en suit dévaste quelques sections de la bibliothèque, forçant ses gardiens à s’interposer et à proposer aux belligérants de faire une trêve, en échange de l’accès au secret le mieux gardé de ces archives (quasi) infinies. Balthas et Mannfred partageant le même amour pour les informations confidentielles, ils acceptent de mettre leur inimitié en veilleuse pour quelques minutes et sont escortés par leurs hôtes jusqu’à une caverne située sous la bibliothèque…

 

Révélation

…Cette dernière a la particularité d’accueillir un authentique fragment de Mallus, a.k.a. le Monde qui Fut, dont les éclats sont utilisés par l’armée de scribes qui travaille dans la grotte pour retranscrire des connaissances datant de cette époque légendaire. Ceci explique comment des incunables comme ceux négligemment carbonisés et réduits en compost par les deux affreux quelques instants plus tôt ont pu être proposés à la lecture. Cette découverte enchante Mannfred, qui se doutait bien que l’endroit recelait un secret pouvant intéresser Nagash, et avait multiplié les visites depuis plusieurs années afin de mettre la griffe dessus, en pure perte jusqu’ici. Cependant, Balthas refuse de laisser le vampire repartir avec le caillou antédiluvien, redoutant l’usage que le Grand Nécromancien pourrait en faire, et le fragile cessez-le-feu vole en éclat. Dans la bataille qui s’en suit, le Stormcast et le Mortarque semblent revivre les (douloureux) souvenirs de vies antérieures, et le premier remporte le match en poignardant son adversaire avec une écharde tirée du rocher miraculeux. Le cringe est trop grand pour Mannfred, qui se téléporte hors de la bibliothèque, laissant Balthas seul avec les archivistes. Lorsqu’il les interroge sur les raisons qui les ont poussés à lui révéler leur secret, ils répondent que c’est Mallus qui leur a demandé de le faire, sans doute pour permettre à un être digne de lui de bénéficier de sa gnose. Quoi qu’il en soit, Balthas a maintenant accès au Verrah Rubicon, et si on n’a plus guère entendu parler de lui depuis lors, c’est qu’il doit être en train d’en dévorer le fluff

 

Josh Reynolds fait plaisir aux fluffistes et aux amoureux de Warhammer Fantasy Battle en proposant une nouvelle clin d’œil aux événements de la Fin de Temps (qu’il a écrit en grande partie). Comme vous l’aurez sans doute compris à ce stade, et c’est encore plus évident à la lecture de cette histoire, Balthas Arum n’est autre que la réincarnation de Balthasar Gelt, et si Mannfred Von Carstein semble persuadé qu’il a déjà rencontré le Lord-Arcanum masqué (bon je triche, ils le sont tous), c’est parce que c’est le cas : après avoir trahi l’Empire et s’être réfugié auprès de Vlad Von Carstein, Gelt se fit tuer par Mannfred lors de l’ultime bataille de cette campagne eschatologique. Inutile de dire que si vous êtes au courant de ce menu détail, ‘The Library of Forgotten Moments’ est une gourmandise délectable, Reynolds se faisant un plaisir de faire comprendre au lecteur qu’il sait qu’il sait (qu’il sait). Pour les autres, cette nouvelle sera sans doute moins intéressante – soyons honnête, il ne s’y passe pas grand-chose au final – mais elle reste suffisamment bien écrite pour pouvoir être lue avec plaisir par l’amateur de GW-Fiction.

 

Gods' Gift - D. Guymer :

Révélation

Gods' GiftPrenant place après les évènements narrés dans Great Red et The Beasts of Cartha, pour ne citer que deux des précédentes aventures de notre fougueux héros, Gods’ Gift voit Hamilcar et quelques uns de ses potes des Astral Templars accomplir une mission d’intérêt général, sans doute pour avoir commis quelque tour pendable à une chambre rivale lors d’une permission à Hammerhall. Il s’agit en l’état de punir et faire stopper les exactions d’une bête monstrueuse s’amusant à disposer des hardis bûcherons d’un camp de colons récemment implanté dans les terres farouches de Ghur, tâche récréative pour des Stormcast Eternals de la trempe de nos gais lurons. Guidés par un local – Fage – qui malgré son âge vénérable semble tout émoustillé par la seule présence des Elus de Sigmar, Hamilcar & Cie s’embarquent donc dans une épopée aussi directe et rapide qu’une quête de zone de didacticiel de World of Warcraft.

 

Depuis le relevé de empreintes jusqu’à la constatation de l’heure du décès, ou plutôt, de l’abattage, il ne se passera ainsi qu’une petite journée, soit une vingtaine de pages pour le lecteur, juste le temps pour Ham’ de piquer un roupillon qui lui apportera un rêve plus ou moins prophétique, dans lequel un chêne vient lui chanter Je suis malade (ce qui est ‘achement dur pour un végétal, et mérite le respect1), ce qui lui permettra de prendre une décision des plus inspirées quelques heures plus tard. La nouvelle se terminant pour un petit cliffhanger pas vraiment haletant, mais sans doute important pour la suite de la saga d’Hamilcar (Mark de son prénom), le lecteur en est quitte pour embrayer sur directement sur la première, ou plutôt le premier roman dédié à Guymer à sa coqueluche hirsute (Champion of the Gods), dans lequel il est presque certain que des réponses seront apportées aux questions laissées en suspens à la fin de Gods’ Gift.

 

Malgré les dizaines de titres que compte sa bibliographie BL à l’heure actuelle, ce n’était que la deuxième soumission de Mr Guymer m’étant tombée sous la main depuis l’inaugural The Tilean Talisman, initialement publié en 2011. Et je dois dire que mon appréciation de l’œuvre du bonhomme est resté scrupuleusement identique, huit ans plus tard : des aptitudes certaines en terme de narration, avec des personnages au minimum distrayants, à défaut d’être immédiatement attachants (mention spéciale à Brouddican, l’Hillarion Lefuneste personnel de cette grande gueule d’Hamilcar), relevé par quelques notes boisées – c’est le cas de le dire – de fluff, plombées par une vacuité de l’intrigue assez rédhibitoire. C’est bien simple, celle de Gods’ Gift (d’ailleurs, on ne comprend pas vraiment quel est le don auquel Guymer fait référence dans le titre de sa nouvelle2) s’articule en deux temps trois mouvements, sans qu’on ait l’impression d’une quelconque progression entre le début et la fin de la nouvelle. Hamilcar traque un monstre. Hamilcar rêve d’un chêne. Hamilcar tombe dans une embuscade d’Hommes Bêtes (il faut bien qu’il montre qu’il est un cador du corps à corps). Hamilcar débouche sur un bosquet de chênes sacrés, gardé par… le monstre qu’il traquait. Coup de bol. Baston. Victoire. Fin.

 

Bref, rien de bien challengeant pour l’intellect du lecteur, qui aurait pu s’attendre à quelques liens de causalité entre les différents éléments constitutifs du propos de Guymer. Rien de tel ici, ou de manière tellement évidente et peu fine que les relever n’a pas grand intérêt. Comme dit plus haut, cela peut sans doute se justifier par le fait que Gods’ Gift est un rehaut littéraire à un travail plus conséquent, avec lequel l’auteur prend bien soin de faire la liaison. Telle la rondelle de tomate venant décorer une entrecôte frites, cette nouvelle peut être consommée si on a vraiment faim, mais ne remplira pas l’estomac pour autant. Et comme dit plus tôt (Décembre 2014, pour être précis), c’est plutôt cher payé pour ce que c’est. On me souffle dans l’oreillette que c’est fois ci, c’est gratuit. Bon. Mais avant cela, cela ne valait certes pas les 2,99€ demandés. Rem-bour-sez nos in-vi-tat-tions !

 

: L’Homme Arbre qui s’était chargé de la besogne de déshumanisation – c’est comme la désinsectisation, mais avec des primates – servant de pied à terre racine à humus à une sylvaneth passablement enrhumée.

 

2Soit ce sont les visions vagues envoyées par Sigmar, soit c’est le photophore magique remis par icelui, et qui permettra à notre fier héros de venir à bout de Marylise Lebranchu. Au lecteur de décider s’il prend le messie ou la lanterne.

 

Obsidian - D. Annandale :

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obsidian.png?w=400&h=610Bien que la mort soit importante à Nulahmia, l’amour a également sa place dans la métropole vampire, et c’est lui qui réunit Karya Treveign et Evered Halorecht dans la Grande Chapelle de la Fringale (ok c’est Night’s Hunger en VO et je me suis un peu emballé dans ma traduction). Nourrissant l’un envers l’autre une passion dévorante et sincère, malgré les siècles d’inimitié opposant leurs dynasties, les deux tourtereaux sont décidés à utiliser la mort récente et tragique du conseiller du père de Karya (Vorst), afin d’obtenir la bénédiction de Neferata à leur union. Seule la souveraine est en effet en mesure d’imposer l’arrêt des hostilités entre les Capulet et Montaigu de Nulahmia, et comme elle ne peut manquer d’aller rendre hommage au cadavre du noble vampire qui repose dans la Grande Chapelle, Karya et Evered n’ont qu’à attendre qu’elle arrive pour lui soumettre leur projet nuptial. Dans un bon jour, ou une bonne nuit, Nefarata accepte de bénir cette union pourtant porteuse de danger pour elle, comme sa conseillère et maîtresse espionne Mereneth lui fait remarquer : Treveign et Halorecht s’affaiblissaient mutuellement à travers leur futile vendetta, mais réunis en une seule lignée, ils pourraient devenir une force redoutable. Cela ne semble pourtant pas inquiéter outre mesure la Mortarque du Sang, qui décide même d’assister à la noce en personne.

 

Le jour venu, la cérémonie se déroule sans anicroche jusqu’à l’échange des vœux sangs entre fiancés, puis sombre de manière assez prévisible dans le chaos et l’émeute après que non pas un, mais deux assassins se soient manifestés au cœur de l’assemblée. Le premier fait perdre la tête à la matriarche Halorecht, et le second fait mine d’attaquer Karya : lorsque le chevaleresque Evered s’interpose, c’est lui qui hérite d’une lame en argent plein cœur, et va donc rejoindre sa vieille maman au paradis des vampires. Bouleversée par la tournure tragique qu’a pris le plus beau jour de sa vie, Karya reste un temps hébétée sur le cadavre de son cher et tendre, oublieuse de l’affrontement rangé qui oppose Treveign et Halorecht autour d’elle. Lorsqu’elle revient à elle, elle surprend toutefois le regard mauvais d'un membre de l'assistance, et comprend en un éclair que cette personne est responsable de cette tragédie…

 

Révélation

…Ce qui est fort, reconnaissons-le, mais surtout pratique pour accélérer la résolution de l’intrique. Le coupable s’avère donc être Vorst Treveign en personne, et lorsque que Karya parvient enfin à le rattraper au sommet du beffroi de la Grande Chapelle, pour obtenir des explications sur son geste insensé, elle manque de se faire défenestrer par son paternel. Seule l’intervention salutaire de Nefarata évite le pire à notre héroïne, qui ne tarde pas à devenir matriarche de sa dynastie après que la souveraine ait réglé son compte au mauvais noceur. Mais pourquoi a-t-il agi de la sorte ? me demanderez-vous. Eh bien, pour plaire à Neferata, bien sûr. Vorst avait en effet été convaincu par sa reine de prouver sa loyauté à la couronne en provoquant un bain de sang pendant le mariage de sa fille. Malheureusement pour lui, Neferata trouvait également plus sage de le remplacer par une dynaste lui étant totalement acquise, par exemple parce que convaincue que sa suzeraine lui a sauvé la vie. Au final, la Mortarque du Sang sort de cette journée maritale plus forte que jamais, de potentiels rivaux ayant été transformé en laquais affaiblis et dévoués. Et elle vécut heureuse et eut beaucoup de descendants…

 

La Nefarata de David Annandale est décidément très occupée par la vie sociale et amoureuse des nobles de Nulahmia (voir ‘The Dance of the Skulls’), mais comme l’auteur parvient à utiliser ces cérémonies mondaines comme trame et excuse pour nous faire entrer dans la complexe géopolitique de Neferatia de manière originale et efficace, on ne lui en tiendra pas rigueur. Les quelques pages de cette nouvelle suffisent en effet à Annandale pour nous servir une petite conspiration assez réussie, en ce qu’elle démontre bien à quel point Neferata est retorse, et manipule son monde pour maintenir un statut quo qui consolide son pouvoir. Le fait que nous ne soyons pas en mesure de découvrir l’identité du commanditaire du double assassinat de la rue l’église Morgue par déduction logique n’est donc pas si rédhibitoire que ça, car notre propos n’est pas tant un Whodunit qu’une chronique de la realpolitik vampirique.

 

Finalement, le seul défaut que je trouve à ‘Obsidian’ est une petite incohérence logique1 oubliée par un David Annandale plus intéressé par le développement du background de sa faction de cœur que par des basses considérations terre à terre. Tels Neferata à la fin de cette histoire, faisons preuve de magnanimité et pardonnons-lui.

 

1 : Annandale explique que les familles de vampires nobles ne transforment que l’aîné de leurs enfants en immortels, afin de préserver la lignée (les vampires ne pouvant plus se reproduire après le Baiser de Sang). Or Karya et Evered sont tous les deux vampires, et tous les deux enfants uniques.

 

Hunting Shadows - A. Clark :

Révélation

Hunting ShadowsNeave Blacktalon, Knight-Zephyros des Hammers of Sigmar et chasseuse de têtes personnelle du grand barbu, opère traditionnellement seule. La mission sur laquelle son divin boss l’a mise, et qui l’a conduite sur les terres désolées d’Ashy, s’avère cependant tellement délicate que les autorités compétentes ont jugé bon de lui adjoindre du renfort, sous la forme du Knight-Venator Tarion Arl (et son aigle étoilé Krien) et d’une unité de Vanguard-Palladors, menée par une vieille connaissance avec laquelle elle a déjà coopéré pour disperser une bande de hippies ayant monté une opération escargot1 dans les Royaumes Mortels, Kalparius Foerunner. Je sais, je sais, cela fait beaucoup de jargon sigmarite en peu de lignes, mais rassurez-vous, savoir qui fait quoi est moins important que de se souvenir de la hiérarchie héroïque à l’œuvre dans cette nouvelle, qui décidera qui devra mourir et à quel moment.

 

Blacktalon les traîne un peu à l’idée de devoir faire équipe avec des collègues, mais un ordre est un ordre, et si l’on en juge par les charniers calcinés que sa proie (qu’elle peut traquer avec l’espèce de GPS sensoriel peu précis dont Sigmar lui a fait don) a laissé derrière elle, un peu d’aide sera en effet utile. Passée les formalités d’usage, la petite bande part donc en courant/volant/transmutant dans la direction indiquée par la chasseresse, qui ressent de façon diffuse que sa cible possède un moyen de brouiller sa ΣG embarquée. En gros, si elle est toujours capable de savoir vers où se diriger, elle ne peut pas jauger de la distance qui la sépare de son gibier, ce qui aura son importance plus tard. Pour l’heure, la fine équipe, en retard sur l’abomination qu’elle pourchasse, doit faire un choix potentiellement lourd de conséquences à proximité de la ville de Sigenvale, qui a reçu la visite du monstre et a été réduite en miettes/cendres par ce dernier. Neave est plutôt partante pour se remettre en route sans tarder, mais Tarion parvient à la convaincre de faire un crochet rapide par les ruines, histoire de secourir d’éventuels survivants. Malheureusement pour l’altruiste voltigeur, la Marque ténébreuse n’en a laissé aucun, et bien que les chasseurs puissent se passer les nerfs sur un pauvre corpsejaw ne faisant que ce que la nature l’a équipé pour faire (c’est-à-dire bouffer les cadavres croisant sa route), il se fait vite jour que le mystérieux prédateur/incendiaire/décapiteur est déjà loin des lieux du crime. Il faut donc à nos héros repartir sans tarder, d’autant plus que le cogfort sensé participer à la traque semble être avoir fait une mauvaise rencontre quelques kilomètres plus loin, comme le bruit de ses canons l’atteste sans doute possible.

 

Bien évidemment, les traqueurs arrivent trop tard sur place pour secourir la machine de guerre (représentez vous le fruit des amours incestueux entre une Forteresse de la Rédemption et une Arachnarok), qui s’est faite éventrer et toute sa garnison massacrée par l’insaissable bestiole. Blacktalon est colère devant ce carnage dont elle impute en partie la responsabilité à ce gros sensible de Tarion, mais avant qu’elle puisse reprendre les choses en main et relancer la poursuite, une forme colossale émerge soudainement du lac de montagne à côté duquel reposait la carcasse du cogfort…

 

Révélation

…Les pouvoirs de brouillage arcanique dont dispose la cible des chasseurs lui a en effet permis de tendre un piège à ces derniers, qui se retrouvent confronter à… pour faire simple, représentez vous Clifford le grand chien rouge, mais dont la maîtresse ne serait pas la gentille et aimante Emily, mais Valkhia la Sanglante. C’est donc à un pitbull mécanique de Khorne de fort belle taille (et crachant le feu) que les Stormcast Eternals doivent faire face, avec des résultats au début peu concluants, comme on peut s’en douter. Très étrangement, ce sont d’abord les Palladors qui sont envoyés pallader par le juggernaut, rapidement suivis par le brave Foerunner, ne laissant que Blacktalon et Tarion, tous les deux sévèrement blessés, pour tenter de renverser la situation. Ce n’est cependant pas chose facile car leur ennemi est très grand, très fort, très rapide, très costaud, et sans faiblesse apparente, mis à part l’écoutille chaînée qui lui sert de nombril.

 

Après quelques moments difficiles dans les décombres du cogfort où les deux héros ont trouvé un refuge précaire, le temps de décapsuler quelques potions de vie, le traditionnel plan de la dernière chance est conçu et immédiatement mis à exécution, permettant aux gardes chasses de Sigmar de remporter la victoire. Pour information, le haut fait en question nécessitera que Neave se déchaîne, et que son comparse loge un tir de l’aigle dans un cratère volcanique chatouilleux, ce qui aura pour effet final de noyer l’habitacle de la machine démon dans la lave. Statistiquement improbable je vous l’accorde, mais la high fantasy et les nouvelles d’action de la BL ne s’embarrassent pas de détails de ce genre. Ceci fait, les deux Knights-…, devenus bons copains dans l’adversité, peuvent reprendre le chemin d’Azyr, où ils pourront passer une convalescence bien méritée, ou se suicider pour être reforgés et ainsi redevenir opérationnels plus rapidement. Les politiques sociales sigmarites sont un peu particulières…

 

Introduction au personnage de Neave Blacktalon (et à celui de son sidekick, Tarion Arl), ‘Hunting Shadows’ met particulièrement l’accent sur les caractéristiques de super héros des Stormcast Eternals (Blacktalon bénéficie en effet de sens ultra développés, et est capable de courir grotesquement vite – pensez Bip Bip et Vil Coyote), faisant de cette traque monstrueuse une sorte d’adaptation de comics Marvel dans les Royaumes Mortels. Je ne dis pas que c’est foncièrement désagréable, mais ça surprend tout de même un peu. Autre point saillant de cette nouvelle, son côté technique en matière de bestiaire et de hiérarchie Stormcast Eternals. C’est bien simple, on dirait qu’Andy Clark a fait exprès d’aller piocher dans les entrées les plus baroques du Battletome pour trouver ses protagonistes, ce qui peut aisément dérouter/saoûler le lecteur non averti. En cela, ‘Hunting Shadows’ n’est pas très newbie-friendly, même si l’intrigue reste relativement facile à suivre, du fait du schéma narratif très simple utilisé par l’auteur. En fait, le seul suspense de l’histoire repose dans l’identité de la proie traquée par Blacktalon et ses sous fifres, qui, manque de pot, se trouve être une création inédite de la part de Clark (à moins que la gamme chaotique d’Age of Sigmar comporte un modèle de chien de métal géant). Manque de pot car le lecteur ne peut même pas au final tenter de deviner qui est derrière ces exactions sanglantes et fumantes en se basant sur sa connaissance du fluff. Petite frustration, mais frustration quand même. Pour conclure, j’ai été très moyennement convaincue par cette démonstration de force de la Wonder Woman d’Azyrheim, héroïne certes très balaise mais assez peu attachante. Peut-être que cela est corrigé dans le roman qu’Andy Clark lui a consacré ?

 

1 : Organisée par l’incontournable Horticulous Slimux bien sûr.

.

***

 

Et voilà qui conclut la revue de 'Gods & Mortals', une anthologie de bonne facture dont le plus gros point faible est le manque de contextualisation des nouvelles qui la compose. C'est d'autant plus dommage qu'il y avait de quoi présenter Hamilcar Bear Eater et le "Lamentiverse" de Josh Reynolds d'une manière acceptable avec des efforts minimes, à commencer par un regroupement dans le sommaire et quelques paragraphes de présentation de l'intrigue de ces séries. Comme souvent, il revient au lecteur de faire ses propres recherches pour relier les points et faire sens de ce patchwork littéraire, ce qui me retient de conseiller 'Gods & Mortals' à tous les enthousiastes de GW-Fiction, en particulier ceux qui ne seraient pas familiers avec les personnages abordés ici. Les vétérans de cette franchise trouveront par contre dans ce recueil un contenu varié et solide, en grande partie grâce à la grande forme de Reynolds, bien épaulé par un Guy Haley très inspiré, un David Annandale irréprochable (soulignons le, ce n'est pas tout le temps) et un David Guymer souvent distrayant. Si C. L. Werner avait été égal à lui-même, on aurait tenu le mètre étalon des anthologies Age of Sigmar, c'est moi qui vous le dit!

 

Schattra, mortel odieux

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Un grand merci @Schattra pour cette revue aussi copieuse que drôle (une - bonne - habitude chez toi ;)). Ça m'a fait plaisir de me replonger dans les quelques nouvelles déjà parues en français et de découvrir les autres... Ce qui, après cette plaisante lecture, m'amène à trois conclusions :

 

  • La perte de Josh Reynolds est un coup terrible pour le fluff d'AoS (et la BL dans sa globalité).
  • Je suis frustré qu'Hamilcar Mangeur-d'ours reste (probablement) définitivement prisonnier de la langue de Shakespeare.
  • Enfin je suis encore plus frustré que G/BLW ne développe pas plus que ça le potentiel énorme du fluff d'AoS avec davantage de romans, notamment traduits (je sais, ce n'est pas en le répétant que GW va changer de politique éditoriale :innocent::(). 
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Merci pour ton message, @Albrecht de Nuln ! :)

 

Je suis d'accord avec toi sur les trois points. On peut espérer que Reynolds soit "remplacé" par des auteurs de bon niveau dans les années à venir, mais il était le seul à insérer des Easter eggs WFB dans ses travaux pour AoS, et ça me manque assez je dois dire. Hamilcar avait le potentiel de devenir une des têtes de gondole de la franchise (il a même eu droit à sa figurine si je ne m'abuse), mais finalement on dirait que c'est Gotrek qui a pris la place de VRP international.

 

Ajout des nouvelles de Gods & Mortals.

  • Gods & MortalsForce of Personality, The Hardest Word, Bear Eater et Gods’ Gift (D. Guymer)

  • Pilgrim's Trial (R. MacNiven)

  • The Dance of the Skulls et Obsidian (D. Annandale)

  • Tourney of Fate, Auction of Blood, The Road of Blades, The Tainted Axe et The Library of Forgotten Moments (J. Reynolds)

  • Pantheon (G. Haley)

  • Vault of Souls (E. Dicken)

  • Gravesend Gold et The Witch Takers (C. L. Werner)

  • The Old Ways (N. Horth)

  • Hunting Shadows (A. Clark)

Modifié par Schattra
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