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Warhammer Forum

la revanche des HL


Invité Mr Petch

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A mesure que l’on s’enfonçait dans la nuit, Oyanotec suivait son mystérieux sauveur. Il marchait devant, frayant un passage à travers les branchages, et parlant tout en même temps avec une volubilité croissante :

« - Je l’avais déjà repérée cette créature là. Quand je t’ai vu au haut de l’arbre, je me doutais que ton plan allait rater…

Il se retourne, souriant à Oyanotec. Il s’agissait aussi d’un caméléon, mais il avait un regard un peu plus lumineux ; d’autant plus qu’Oyanotec, depuis le début de la traque avait perdu du poids et de l’allure. Il garda un silence contenu, évitant même le regard de son guide à travers la jungle. Ce dernier continua alors :

- C’était ce matin, je l’avais vu sur mon territoire et je voulais le chasser, évidemment. Alors j’avais pris un poison puissant… Celui que l’on trouve sur les rainettes noires. J’en ai enduit les pointes… (il avait pris une voix un peu dramatique, théâtrale, pour étonner Oyanotec). Je me tenais devant lui, en silence, et puis j’ai tiré… Mais manque de chance, comme pour toi, la pointe est allé se planter dans la peau de tatou ! Et c’est solide, ce machin ! Aussi solide qu’une armure ! Alors évidemment, il s’est rendu compte de ma présence, et j’ai juste eu le temps de m’enfuir à toutes jambes. Heureusement, il est plutôt balourd et facile à semer… En fait, tu sais ce que c’est ?

Une nouvelle fois, il tourna son regard vers Oyanotec, mais voyant que ce dernier avait décidé de rester muet, il reprit le cours de son discours :

- On dirait un humain en apparence, mais avec toutes les peaux qu’il a sur lui, on ne sait vraiment plus ! Et puis bon, j’ai l’impression qu’il ressemble plus à une bête… Non, ce n’est pas un humain, c’est sûr ce serait…

Oyanotec le coupa brusquement, et prit sa voix la plus grave pour préciser :

- Si, il est encore un peu humain.

L’autre caméléon le lorgna avec étonnement, faisant tourner ses deux yeux dans ses orbites à la manière d'un jongleur.

- Ah… Tu le connais comment ? Et d’ailleurs pourquoi tu voulais le tuer ?

Oyanotec lui lança un regard noir. Une sorte de tension était apparu entre eux, pour une raison bien étrange, et à mesure qu’ils avançaient dans le noir, la voûte des arbres noircissait leur chemin, les plongeant de plus en plus dans une obscurité froide et humide – Oyanotec ressentait l’odeur putride des marécages tout proches.

- Je ne pense pas que ça te regarde vraiment…

Il y eut un vide d’incompréhension dans le regard de l’autre caméléon. Il stoppa sa marche et observa Oyanotec, toujours plus inquiet. On lisait dans ses yeux une sorte de dépit : pour une fois qu’il tombait sur un de sa race, il fallait qu’il fût froid et distant. Certes, de nombreux caméléons étaient froids et distants, mais celui-ci battait des records de réserve. Alors l’autre caméléon repartit et se tût. Au bout de quelques pas, il ajouta quelques mots :

- Bon… On va arriver à ma cabane, peut-être devrions-nous faire les présentations… Je m’appelle Quotzotl.

- Oyanotec… »

Le nom avait filé dans la nuit comme le projectile d’une sarbacane, piquant et venimeux. Quotzotl n’ajouta rien de plus.

Ils accédèrent alors à une zone immense de mangroves. Quelques îlots de verdure subsistaient entre les eaux gluantes et mouvantes, qui respiraient en surface comme peuplées d’étranges monstres marins. Des algues de deux mètres de haut poussaient parfois en surface, des nénuphars immenses recouvraient certaines zones.

Quotzotl dégagea d’un buisson une petite embarcation sommaire, un simple radeau circulaire basé sur un nénuphar renforcé à l’aide planches et de lianes.

« - Voilà mon navire ! Nous allons ramer jusqu’à ma cache et puis je m’occuperai de ta blessure au crâne. Tu saignes pas mal !

Oyanotec se toucha le haut du crâne et ses doigts revinrent tachés de sang. Il ne s’en était pas rendu compte sur le coup, mais c’était sans doute cela qui avait causé son étourdissement. Quoi qu’il ne soit, il décida malgré tout de suivre Quotzotl qui finissait de tirer la barque.

Ils y montèrent doucement, les rebords tanguèrent un peu sous le poids des deux caméléons, et Oyanotec reçut une rame en feuilles de palmes. Ils se frayèrent un chemin à travers les eaux bouillonnantes :

- Attention à ne pas tomber dans l’eau ! Là-dedans, il y a des créatures féroces, des anacondas, ou des salamandres qui n’attendent que ça ! »

La voûte des arbres était toujours aussi imposante et laissait filtrer peu de la lumière de la lune. Tout dans ce marais était étrangement glauque, les odeurs nauséabondes, les bruits de clapotements n’auguraient rien de bon et le guide d’Oyanotec ne l’inspirait pas du tout. Il était étrange pour un skink caméléon.

Au bout d’un court moment, Oyanotec aperçut un grand nid de branches monté sur pilotis. Il ressemblait à la plupart des cabanes que construisent les caméléons dans les marais, de grandes boules circulaires très solides et imperméable. Celui-ci devait être déjà ancien car des pousses d’arbres avaient pris possession du sommet et le lierre recouvrait l’ensemble. L’entrée était habilement camouflée par ce drap végétal, si bien qu’il fallait connaître l’existence de le cabane pour la repérer au milieu des autres arbres.

Quotzotl amarra solidement le radeau à un des pilotis pendant qu’Oyanotec inspectait l’entrée de la cabane. Elle était décorée avec des crânes d’animaux des marais, et possédait un mobilier rudimentaire mais suffisant. La lumière était apportée par des bâtons incandescents qui brillait dans de petites fioles de verres. Il se demanda qui pouvait bien être ce caméléon solitaire. Cherchant à s’asseoir, il prit place sur une sorte de tambour en peau tanné, puis attendit le retour de son hôte.

Quotzotl arriva rapidement aux côtés d’Oyanotec. Il amenait avec lui un filet rempli de poissons.

« - Voici notre dîner pour la nuit… Tu en as bien besoin, à ce que je vois…

Il commença à retirer les écailles des poissons à l’aide de sa dague, et continua à parler :

- En fait, je ne sais pas vraiment pourquoi je t’invite ici. Je ne sais rien de toi, je t’ai juste sauvé des griffes de cette bête.

Il attendit un petit instant une réaction d’Oyanotec qui ne vint pas, le caméléon restait silencieusement assit sur le tambour, et regardait certains aspects de la décoration – il y avait de vieux totems et des peintures représentant les dieux de Lustrie. Quotzotl, résigna, continua :

- Je pourrais commencer par moi. Je suis un caméléon solitaire, et j’ai mon terrain de chasse de ce côté de l’affluent. Cela fait de très nombreuses années que je vis ici, en ermite… Alors évidemment, je connais toute cette partie de la mangrove. C’est mon royaume, j’en suis l’unique propriétaire, le seul à y chasser. Une vie plutôt agréable, en somme.

Il termina l’écaillage, rejeta les déchets sur le côté et prit le tranchant de sa dague pour découper des filets. Oyanotec le regardait faire sans rien dire. Autour d’eux, les bruits de la mangrove, amplifiés par le silence de la nuit franchissaient le seuil de la porte comme d’indésirables visiteurs, sifflant aux oreilles d’Oyanotec, perturbant ses pensées. Il n’aimait pas cet endroit, cette atmosphère si poisseuse, visqueuse comme la peau des serpents. Il aimait l’eau, mais celle-ci lui semblait croupie, corrompue, sale. Il sentait même sous ses pieds le glougloutement, les bulles qui éclataient en surface. Parfois, un oiseau criait au loin. Et en attendant, le Monstre s’éloignait, à milles lieues de cet environnement putride et désagréable.

- Alors explique-moi ce qui t’amène ici ?

Quotzotl lui tendit un des filets, tout en dévorant avidement l’autre. Son regard était un peu amusé, et un peu suppliant aussi. Il devait être très curieux de connaître l’histoire d’Oyanotec. Ce dernier ouvrit enfin la bouche pour lui répondre :

- Je chasse la créature que tu as vu. Je dois l’attraper.

- Ah… Qu’est-ce qu’elle t’as fait ?

- Elle possède certains objets précieux qui m’appartiennent.

- Quel genre d’objets ?

Le regard douloureux d’Oyanotec fit comprendre à Quotzotl qu’il devenait trop curieux. Il changea alors vite de sujet :

- Et tu viens d’où alors ? De Tlaxtlan ? A moins que tu ne sois un solitaire, comme moi ?

- Non, je viens d’une cité beaucoup plus à l’est, Petchx…

Quotzotl haussa les épaules.

- Connais pas… Ca doit être loin, alors !

- Oui, en effet, cela va bientôt faire trois cycles de lune que j’en suis parti.

- Et pourquoi t’aventures-tu si loin, et seul ?

- C’est un peu long à expliquer…

Oyanotec regarda son interlocuteur. Non, décidément, il y avait une lueur mauvaise dans son regard qui ne lui convenait pas. Il finit par lui demander, à brûle-pourpoint :

- A l’origine, je devais me rendre dans le marais des moustiques, retrouver la communauté de caméléons, mais le Monstre m’en a volé les plans.

Quotzotl eut une mimique de dégoût.

- La communauté de caméléons ?

- Tu sais où elle se trouve ?

- Mouais… Je peux t’y mener… Si tu me dis ce que tu fais vraiment là…

Ils se jaugèrent tous les deux, en silence. Dehors, le vent souffla un peu plus fort encore, et les arbres se parlèrent dans un interminable dialogue.

- Je suis en exil de ma cité…

Le visage de Quotzotl s’illumina tout à coup, il tendit sa main à Oyanotec.

- En exil ? Moi aussi, j’ai été chassé de la communauté de caméléons, il y a si longtemps maintenant ! Nous sommes, frères, Oyanotec ! Deux frères en exil ! »

Oyanotec ne lui rendit pas son salut. Et le regard qu’il lui lança indiquait qu’il ne le considérait vraiment pas comme son frère.

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Le reste de la nuit passa lentement dans la petite cabane de Quotzotl. Oyanotec s’était blotti dans un coin, conformément aux ordres de son hôte, juste au-dessus de l’immense crâne d’un carnosaure. « Ce n’est pas moi qui l’ait capturé, je l’ai trouvé un jour au milieu des marais ! Surprenant, n’est-ce pas ? » Il avait souri en disant ça, comme un guerrier qui souhaiterait impressionner son collègue. Oyanotec lui avait répondu par un simple battement de paupières, un clignement lent et humide comme savent le faire les caméléons. Puis, il s’était endormi pour appuyer son mépris.

Quotzotl avait du partir en chasse pendant la nuit (« Je vis la nuit, et je dors le jour ») car lorsque Oyanotec se réveilla le lendemain matin, le cadavre d’un jeune caïman était posé sur la table. Il répandait d’ailleurs l’odeur désagréable des marais dans toute la pièce, cette odeur putride de fermentation qu’Oyanotec n’appréciait que très peu. Mais comme il comprit rapidement que ce caïman allait constituer son petit déjeuner, il ne rechigna pas. Nourri au poisson d’eau douce depuis un bon moment, il n’allait pas refuser une nourriture un peu plus goûtue.

Le fier chasseur arriva avec son habituel bonne humeur peu de temps après le réveil d’Oyanotec.

« - Il va falloir le dépecer et sortir ses entrailles avant de le manger.

- Je n’ai jamais mangé de caïman.

- Sûr, ce n’est pas un aliment très courant en général, mais enfin, on fait avec ce qu’on a.

Quotzotl, enthousiasmé par l’apparent intérêt que semblait soudainement lui porter Oyanotec continua :

- Les jeunes comme celui-ci ne sont pas trop difficiles à attraper, ils s’éloignent souvent des groupes et se débrouillent mal hors de l’eau. C’est une chance tout de même !

- Celui-là aussi, tu l’as trouvé en te baissant ?

Quotzotl ne sut pas si Oyanotec plaisantait ou se moquait de lui. Il prit le parti d’en rire :

- Non, pas cette fois ! Ça ne pousse pas sur les arbres, tout de même.

Il lança un coutelas en obsidienne à Oyanotec et lui fit une démonstration de dépeçage. Le rituel commença, et les lames effilées s’enfoncèrent dans la chair sans défense du caïman mort. Etendu sur le dos comme une vulgaire proie, la gueule entrouverte laissant voir des canines tranchantes, ce n’était plus le féroce caïman qui terrorisait la mangrove, non, il était devenu le déjeuner de deux skinks caméléons. Une faible lueur d’ironie brillait dans ses deux yeux glauques, une lueur étrange qui troubla Oyanotec. Il ne quitta pas des yeux ce regard insistant, ce regard de bête débusquée. Pourquoi ce regard le gênait-il autant ?

« - Tu es un bon chasseur ? demanda Oyanotec alors qu’ils entamaient la peau plus souple du ventre.

- Je me débrouille… fit modestement Quotzotl ( et juste à cet instant, un peu de sang gicla sur les écailles bleu foncé de son bras).

-Alors j’ai un autre service à te demander. Plus difficile cette-fois.

- Rien n’est impossible pour Quotzotl !

D’un coup, il leva la main, ce qui eut pour effet de tâcher une seconde fois son bras. La table elle-même était une mare de sang, et l’odeur du liquide coagulant commençait à remplir la pièce, attirant même de grosses mouches de l’extérieur.

- Alors je voudrait que tu m’aides à attraper le Monstre.

Quotzotl s’arrêta, le regardant étrangement. Puis, comme s’il n’avait pas entendu la question, il demanda :

- Aide-moi à le transporter à l’extérieur, ça commence à puer et il va falloir nettoyer tout ce sang.

Ils prirent le caïman étripé à bout de bras et placèrent son cadavre à l’entrée, le pendant sur une branche servant de crochet.

- Qu’est-ce que tu penses de ma proposition, insista Oyanotec.

- Le Monstre, c’est le truc qui a failli te tuer hier soir ?

- Exactement. Et seul, je n’arriverais pas à l’avoir.

A côté d’eux gisait le caïman, pendu par la queue. Sa gueule touchait presque le sol, et les nuages de moucherons commencèrent à envahir chaque parcelle de sa peau. Quotzotl regardait Oyanotec. C’était juste pour ça qu’il avait accepté de rester cette nuit, pour lui demander un service.

- Pourquoi tu as été mis en exil ? demanda soudain Quotzotl, jaugeant son congénère avec méfiance. Tu m’as l’air d’un drôle de caméléon.

- J’ai tué quelqu’un. Et toi ?

Quotzotl déglutit. C’est à peine s’il avait entendu la question, tant la réponse avait pris de place dans le silence matinal de la mangrove.

- Je… j’avais volé un objet sacré.

Oyanotec retourna dans la cabane, maître de lui. Il fouilla dans sa besace, comme pour la ranger. Quotzotl vint vite le trouver :

- Tuer quelqu’un ? Tu veux dire on t’a accusé de tuer quelqu’un ?

- Non, j’ai bel et bien tué quelqu’un. L’érudit de la cité. Tuanahok.

Cette fois, Quotzotl tomba en arrêt. La stupeur se lisait sur son visage, ce qui n’était pas courant pour un caméléon. Il s’appuya contre la table, tachant ses mains de sang.

- Tuanahok ? Mais c’est un grand héros ! Il est connu parmi les caméléons ! Les plaquettes de prophétie parlent de lui ! C’est tout juste si on ne lui voue pas un culte… Et… Et tu me dis que tu l’as tué, comme ça !

La froideur du regard d’Oyanotec paralysa Quotzotl. Il y voyait l’instant primaire du tueur parfait, celui qui laisse longuement agoniser ses victimes avant de les achever. Cet instant qui n’existe pas dans la société lézardienne. En réalité, cette froideur n’était que résignation et sanglots contenus. Oyanotec avait dépassé le stade de la honte. Peut-être était-ce pour cela qu’il parvenait à raconter l’évènement avec autant de clarté.

- Je m’en souviens, c’était une nuit de pleine lune. J’étais allé faire une promenade nocturne, pour prendre le frais du côté des grands bassins de la cité qui entourent le temple de Tzunki. C’était une nuit comme les autres, et je portais avec moi ma fidèle besace, avec son lot de fléchettes. Car comme tu le sais, un caméléon ne se sépare jamais de ses fléchettes.

« Puis, c’est en m’approchant de la demeure de Tuanahok que j’entendis des cris. Ce n’était d’ailleurs pas des cris, mais plutôt des appels. Au début, je me méfiai, mais comme ils se répétaient et qu’ils provenaient des fenêtres de Tuanahok, je me hâtai de rejoindre l’entrée de la maison.

« Tout était plongé dans l’obscurité, et les formes murales, les silhouettes peintes le long des murs en une fresque géante semblaient vivante. Immobile, elle me regardait, et de suite, je perçus une sorte d’aura magique qui entourait le bâtiment. Je ne pouvais plus faire demi-tour, même si les cris avaient cessé, car j’étais comme absorbé dans la contemplation de ses fresques. Par distraction, je me cognai même au mobilier – une paillasse sur le sol – et manquai de tomber par terre. Par chance, je me rattrapai à un grand totem.

« Une fois, et une seule, les cris reprirent. C’était comme des cris des souffrances, des appels à l’aide mais dans lesquels on pouvait sentir une sorte de désespoir, comme s’ils savaient qu’ils ne seraient jamais entendus. Et pourtant moi, dans l’entrée de la maison, éclairé par la lumière de la lune, je les entendais bien et me faufilai vers la porte d’où ils venaient.

« C’était la chambre de Tuanahok. Il était là, allongé sur sa paillasse, en train de gesticuler comme un pestiféré. Il se tenait les jambes, serrait les dents, émettait de sourds gémissements inaudibles, cognait son vieux crâne usé contre le sol. Lui qui paraissait en pleine forme le jour donnait là l’impression d’une loque humain, d’un mort-vivant, tant ses muscles s’étaient raidis et son visage était devenu sans autre expression que celle de la douleur infinie.

« J’entrais furtivement, comme à l’habitude de ceux de notre espèce, et je n’étais plus dans la lumière qui donnait en plein sur le visage du vieux sage. J’aperçus à côté de lui des fioles ouvertes, des flacons dont le contenu gisait sur le sol. Mais surtout, je vis briller sur une table un petit coffret au fermoir doré, qui retint plus que tout autre mon attention. C’est là que Tuanahok, dont le sens de la perception dépassait celui de n’importe quel être vivant me remarqua et me parla :

« - Oyanotec ? C’est toi, je te reconnais ?

Je me retournais, surpris d’entendre cette voix si grave, profonde, presque divine, qui venait de nulle part, et, semblait-il, surtout pas de sa bouche serrée sur elle-même qui n’arrivait à émettre que des sons incompréhensibles. J’ignore encore d’où j’entendais cette vois, mais c’était bien celle de Tuanahok :

- C’est toi n’est-ce pas ? Reste, reste un peu auprès de moi.

J’obéissais, car cette voie était si reposante qu’on ne pouvait que lui obéir. Je m’accroupissais, posait ma sarbacane près de lui, et me penchai au-dessus de son crâne. Les traits étaient tirés, chaque écaille paraissait comme renfoncée sous la peau, les veines bleus ressortaient comme des rivières bouillonnantes, la crête jadis si noble était un fanion mourant par le manque de vent. Il faisait alors tellement pitié, ce Tuanahok. Encore, il me parla :

- Je suis content que tu sois là. Je savais que quelqu’un allait venir.

Je lui caressais la tête. Sa peau était desséchée, et froide comme de la pierre.

- J’ai besoin de toi, pour te confier une mission.

- Confiez-moi ce que vous souhaitez, noble Tuanahok.

- Mais elle est dangereuse.

- Je ne crains pas le danger.

- Alors tu vois la boîte, là, posée sur l’étagère ?

- Oui, je la vois.

- Prends-la, et emmène-là de ma part à une communauté de caméléons, au nord-ouest, à l’embouchure de la Qurveza.

- Soit, noble Tuanahok, j’obéirai. Mais je ne comprends pas ce qu’il y a de si difficile, c’est un chemin assez simple.

- Mais avant de partir, tu dois me tuer. Oui, me tuer avec ta sarbacane, surtout !

Je le regardais avec effroi, sans comprendre. Je le regardais incrédule, me demandant s’il s’agissait vraiment de lui qui me parlait alors. Mais je ne pouvais pas me tromper… Cette voix, cette voix, c’était bien lui !Et il me demandait de le tuer, moi, et avec ma sarbacane.

- Tue-moi, Oyanotec, tue-moi !

Je ne pouvais désobéir. Fébrile, je pris ma sarbacane, je commençais à ajuster mon tir, comme un zombi sans conscience, je pointais l’embouchure juste au niveau de la glotte, là où l’on souffre le moins, car le poison se répand doucement. Par chance, mon arme contenait une pointe de ce poison d’orchidée qui plonge dans un coma profond et indolore, provoquant la mort au bout de quelques jours. Je pointais là, cette sarbacane, sur ce cou agité de spasmes, et j’entendais la voix de Tuanahok qui me parlait par-dessus :

- C’est une mission difficile, mais tu dois me tuer, et te sacrifier pour le bien de ton espèce. C’est pour ça que je suis heureux de te voir. Au moins mourrais-je heureux. Moi aussi, je me sacrifie. Moi aussi, Oyanotec, et le sacrifice n’est sacré que lorsqu’il met en action toutes les capacités de l’être… »

Et là, à cet instant précis, ne comprenant pas encore le sens qu’il donnait ce mot, sacrifice, je soufflais de toutes mes forces. En un éclair, le flèche alla se ficher dans le cou de Tuanahok. Il eut un dernier râle, et s’endormit tranquillement, une expression clair de quiétude bienheureuse sur son visage ridé. Les muscles se détendirent et le silence se fit dans la chambre.

« Je me souviens juste alors d’avoir pris le coffret d’être parti de la maison, fuyant jusqu’à ma cabane. Peut-être aurais-je dû fuir directement ce soir-là, peut-être ai-je mal compris les paroles de Tuanahok. Mais je gardais le coffret en me promettant qu’il arriverait entre les mains des caméléons de l’embouchure. »

Il y eut un long silence lorsque Oyanotec termina son récit. Un silence religieux, que Quotzotl n’osait briser. Il ne comprenait pas tout à cette histoire, mais au moins comprenait-il qu’elle mettait en place des sentiments et des éléments qui dépassaient son entendement, touchant presque le divin. D’une petite vois fluette, effacée, il répondit :

- D’accord, je veux bien t’aider à retrouver ton Monstre et ton coffret.

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Oh c'est pas cool j'aimais bien l'idée d'Oyanotek assassin... ^_^

Pas vu de fautes Sauf :

vis
Il me semble que c'est bon mais j'ai un doute ...

Bon c'est toujours sympa.Continue c'est parfait. :D

Sur ce, NETHKHAR, qui était en embuscade. :P

Modifié par NETHKHAR
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Bon, bon bon !

Déjà, première remarque c'est que la première partie de ton texte m'a échappé ! Il a du passer dans un grand flux et je l'ai raté :D ! Donc, voilà ma contribution avec un peu de retard :P

Bon, les deux suites vont déjà bie nensemble et aurait pu être postée à la suite ! Dans l'ensemble et meme en particulier tout va bien ! C'est très bien ! On remplace un ami par un nouveau, et pas n'importe lequel !

Sinon, pas de fautes ! J'aime pas d'ailleurs parce que ca me fait moins à dire ^_^ Donc persevere !

Bon, bah j'ai l'impression de devenir un caméléon avec tous ca ! Tu mets tous en place pour nous plonger dans cet univers alors bravo!

@+

-= Inxi =-

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Vous vous sentez pas un peu seul les gars ? Ou sont passés les autres? S'il y en a manifetez vous!! Vous pouvez pas savoir a quel points ça fait plaisir de voir qu'on est lu...

Parce que la j'ai l'impression d'etre dans un truc privé... ^_^

Sur ce, NETHKHAR,c'est vrai etre 3 sur un texte superbe c'est chiant...

Edit : désolé j'étais un peu énervé ce soir là... :D

Les problèmes de retour dans la section se sont netement améliorer depuis un petit moment et ceci n'étais pas une engueulade mais un petit ras le bol... :P

Modifié par NETHKHAR
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Invité Harald Durakdammaz

Un très bon et très beau texte sur nos sacs à main favoris, avec une mention spéciale sur le tapir !

Je n'ai guère le temps de commenter plus, ce sera une prochaine fois...

Vous vous sentez pas un peu seul les gars ? Ou sont passés les autres? S'il y en a manifetez vous!! Vous pouvez pas savoir a quel points ça fait plaisir de voir qu'on est lu...

Parce que la j'ai l'impression d'etre dans un truc privé...

Boup ! désolé, j'aurais du poster plus tôt :D

Harald Durakdammaz Grumbakirikson

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Personnellement, je préfère qu' il n' y ait pas trop de commentaires mais je suis sur que le récit de Petch est lu.

L' histoire a fait un virage à 180 degrés, on est passé du récit proche de celui de Tuanahok à un récit plus sombre, qui me rappelle l' ambiance des Exilés; louche et imprévisible.

On voit enfin l' action réelle d' Oyanotec, celle du chasseur furtif et efficace. J' adore ça surtout qu' ils sont 2 maintenant.

En plus, on est rentré dans le vif du sujet, on sait enfin ce qu' Oyanotec doit faire, sa mission qui est toujours un peu mystérieuse.

On est parti pour avoir encore des tas de chapitres à lire !!!

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Oyanotec restait sur la petite terrasse, observant le cadavre sanguinolent du caïman. Quotzotl l’avait enduit d’un produit spécial pour que les insectes ne viennent pas pondre leurs œufs à l’intérieur. Ce produit le rendait luisant, et même si peu de lumière filtrait à travers le feuillage, il scintillait étrangement comme un trophée doré.

Sous ses pieds, l’eau bouillonnait toujours. Parfois, Oyanotec voyait la silhouette sinueuse de quelques immenses silures fluviales, ses poissons gigantesques et carnassiers ; d’autre fois, les insectes allaient s’agglutiner autour du cadavre flottant d’un poisson, ou d’un mammifère mort, et cela formait un amusant conglomérat insectoïde qui stridulait, et vaguait au gré du courant faible des marais. Lorsque qu’un gros prédateur approchait, la masse d’insecte s’envolait en un gros nuage sombre, impressionnant par sa noirceur intense, puis revenait lorsque le danger était passé. Oyanotec suivait d’un œil intéressé ce curieux manège de la nature qui l’entourait. Il n’y avait ici aucune trace de civilisation, et le caméléon en venait à se demander s’il ne pourrait pas se plaire à vivre ici. Toutefois, la compagnie de Quotzotl lui paraîtrait trop embarrassante, son congénère se montrait bien trop indiscret et bavard. Oyanotec avait appris à aimer le calme et le silence lors de son exil.

Quotzotl sortit de la maison et s’approcha d’Oyanotec pour lui parler :

« - Tu sais, ce soir, je n’ai pas fait que chasser le caïman. En fait, ce caïman, ce n’est même pas moi qui l’ai attrapé.

- Je le savais, ça ! répondit Oyanotec en riant.

- Non, j’allais pister ton monstre. Parce que moi aussi il m’intrigue ce machin.

- Et tu l’as trouvé ?

Quotzotl, qui était auparavant debout, marcha jusqu’à s’asseoir près d’Oyanotec, sur le rebord de l’avancée de bois, les pieds juste au-dessus de l’eau stagnante.

- Oui, évidemment. J’ai vu le caïman au départ, il flottait au-dessus de l’eau. En regardant sa blessure au cou, qui était complètement brisé en deux, je me suis douté qu’il s’agissait de ton monstre. Alors j’ai continué en barque vers là d’où venait le caïman. Ce fut un long voyage, je suis presque sortit des marais. Je l’ai vu sur la rive de l’affluent, regardant l’eau comme dans un miroir. Puis, d’un grand coup de sa masse – un branche de bois à moitié pourrie – il a frappé à plusieurs reprises de grands coups dans l’eau. J’ai attendu encore et encore. Et au bout d’un moment, il a plongé dans l’eau et il a nagé comme nage les loutres jusqu’à l’autre rive.

- Il est passé de l’autre côté de l’affluent, alors ?

- Exactement…

- Nous devons rapidement évaluer un plan d’action, il ne faut pas qu’il remonte trop au nord.

- J’ai déjà un plan d’action.

Oyanotec grogna en regardant Quotzotl lui sourire. Non, il n’aimait pas ce sourire qu’il jugeait faux et hypocrite.

- Tu peux bien t’en remettre entre les mains d’un chasseur émérite comme moi ! ajouta Quotzotl.

- Soit. Après tout, nous sommes sur ton territoire. »

Quotzotl avait amarré une grande barque, et l’avait remplie avec des outils divers : couteau, masse, piquets. Puis, les deux caméléons avaient embarqué à son bord, et la barque était partie sur les eaux du marais.

Quotzotl avait donné une rame à Oyanotec, et lui avait expliqué la direction vers laquelle ils se dirigeaient.

« C’est très simple, avait-il dit. S’il continue plus au nord, il va être bloqué par un grand lac infranchissable et va devoir faire le tour par l’ouest – car à l’est se trouve la Qurveza. Nous, en barque, nous allons le devancer et nous positionner là où il va passer. C’est très simple. »

Très simple… Malgré tout, Oyanotec était toujours aussi méfiant envers Quotzotl. Peut-être parce qu’il l’avait sauvé des griffes du Monstre, alors qu’à cet instant, il aurait préféré mourir dans l’honneur, et pas en exil, sachant que tout était perdu. Quotzotl lui avait donné de l’espoir : celui de retrouver le coffret, et d’accomplir sa mission. Mais après son crime (qui tenait pourtant plus du suicide), ne devait-il pas expier une partie de sa faute ?

Tout ces sentiments mitigés parcouraient Oyanotec alors que la barque franchissait la mangrove, contournant les masse d’algues et les îlots herbeux. Quotzotl devait lui parler, oui. Sans doute lui parlait-il de ses exploits de chasseur, de la façon dont il avait abattu un jour une salamandre, qui avait fait son repas pour un cycle de lune. Il évoquait ses souvenirs de jeune caméléon avide de dangers, ses innombrables parcours à travers la mangrove qu’il connaissait comme sa poche, et le jour où il avait failli s’empêtrer dans la toile d’une araignée géante. Quotzotl avait un grand nombre de souvenirs ici, dans ce marais qui semblait si fétide à Oyanotec. Chaque fois qu’il propulsait sa rame dans l’eau, il sentait le relent olfactif nauséabond de l’eau croupie. Ces arbres cachant la lumière, ces bruits improbables, ces dangers multiples, non, décidément, il ne pourrait jamais vivre en cet endroit.

Tandis que Quotzotl continuait de parler, Oyanotec eut l’impression que la barque avançait d’elle-même de plus en plus vite, et que les remous étaient plus nombreux.

« - C’est normal, ce courant ? demanda-t-il à Quotzotl, au beau milieu d’un récit de combat au milieu des marais.

- Ah… Oui, c’est que nous arrivons à l’affluent, il faut s’accrocher un peu, mais ça va aller, ne t’en fais »

Et en effet, le courant forcit, Oyanotec n’eut plus besoin d’utiliser ses rames. Ils quittaient peu à peu le tunnel étouffant de la mangrove, et au loin, on percevait un cercle blanc, la lumière du dehors, accompagné d’un grand bruit d’eau courante. Les arbres se raréfièrent, les bruits cessèrent, et peu à peu, l’eau devint plus claire et limpide qu’auparavant, lavée de toutes ses impuretés. En dehors de cette mangrove, Oyanotec commençait déjà à se sentir mieux.

Au bout d’un court instant, il vit la rive en face. De l’autre côté se trouvait le Monstre qu’il traquait depuis si longtemps. Peut-être même inconsciemment depuis le début de son exil. Il se sentait plus à son aise alors que la lumière revenait frapper sur sa peau écailleuse, et que le bruit du courant régulier parvenait à ses oreilles.

« Là, il faut encore s’accrocher un peu ! fit Quotzotl »

Oyanotec se cramponna au rebord de la barque. L’affluent passa devant leurs yeux, à toute vitesse. Il fallait bien manœuvrer pour ne pas se laisser entraîner par la flot incessant. Quotzotl ramait de toutes ses forces en sens inverse.

« Nous y sommes presque ! »

Après un petit effort, la barque cogna contre le rebord de la rive, et Quotzotl s’empressa de l’attacher à la racine d’un palétuviers qui se trouvait là.

« - Je n’ai pas vraiment l’habitude d’aller de ce côté de l’affluent, déclara Quotzotl un peu gêné. Ce n’est plus vraiment mon domaine, en réalité…

Il regarda Oyanotec qui ne paraissait même pas l’avoir écouté, mais ajouta tout de même :

- Mais pour toi, je ferais bien une exception ! »

Ils marchaient au milieu de la jungle, évitant les racines et les chaos rocheux. Quotzotl portait tous ses outils sur le dos, et Oyanotec suivait.

« - A propos, tu ne m’as toujours pas dit ce que c’était ce monstre. Parce que ça ne ressemble ni trop à un homme, ni trop à un animal.

- C’est un peu compliqué à expliquer…

- Dis tout de suite que je ne comprendrais pas !

- Tu ne comprendras pas.

Quotzotl s’arrêta brusquement, et frissonna un peu. Il se retourna vers Oyanotec et, sans le regarder dans les yeux, lui annonça :

- J’ai entendu un bruit comme un cri.

Ils s’arrêtèrent tous les deux, et tendirent l’oreille. Un peu plus loin leur parvenait en effet des cris et des bruissements de feuilles, assez étouffés.

- Je ne reconnais aucun animal de la jungle, fit Quotzotl. »

Il s’approcha d’un bosquet, dans la direction des cris, et soudain jaillit face à lui un humain qui le bouscula et le fit tomber par terre. Il eut un instant la vision d’horreur de la face apeurée et ensanglantée de l’homme. Sans trop réfléchir, il se mit à courir en direction de la rivière et de sa barque, alors que d’autres cris humains commençaient à les encercler.

Quotzotl courait à toute allure vers la rivière, là où il avait laissé la barque. Il portait toujours ses outils, qui le ralentissaient un peu, mais forçait malgré tout le rythme. Il n’entendait pas les sollicitations de la nature qui l’invitait à faire une pause, non, son seul objectif était l’affluent et la barque.

Il y parvint, essoufflé et chancelant, et regardant l’embarcation de bois encore solidement arrimée à la racine de palétuvier. Puis, il regarda attentivement derrière lui, comme pour s’assurer que personne ne l’avait suivit. Enfin, il se dirigea vers la barque et y monta.

Cela faisait un bon moment depuis leur départ qu’il avait envisagé de s’enfuir, d’abandonner Oyanotec. Après tout, il lui avait sauvé la vie, et s’apprêtait à lui rendre un grand service, semblait-il. Et lui ne donnait rien en échange, juste des fragments incongrus de son histoire. C’était décevant, ce caméléon-là était bien trop ingrat. Alors maintenant que se présentait une occasion concrète de s’échapper, et de retourner à sa mangrove, il allait en profiter.

Il s’apprêta à détacher l’amarre, lorsqu’une autre partie de son esprit le stoppa. Oyanotec était un assassin, d’une certaine manière. Un caméléon bien trop mystérieux pour qu’on puisse lui faire confiance. Et Quotzotl se méfiait fortement de lui. Rien ne l’empêchait, après avoir constaté la traîtrise de Quotzotl de se rendre à sa mangrove et de le tuer à son tour. De quoi était-il capable, s’il comptait affronter cet horrible monstre à main nue ?

Quotzotl regarda la jungle, d’où s’échappait encore des cris humains. Il hésita un moment, ses doigts souples posés sur ses amarres. Puis d’un coup, il bondit sur la terre ferme et courut dans les profondeurs moites de la jungle. Peut-être allait-il avoir la réponse à sa question : qui est Oyanotec ?

Oyanotec avait gardé son calme et rapidement analysé la situation. Ces hommes-là venaient sans nul doute de rencontre le Monstre. Son Monstre. Il fallait donc aller vers où il venait. Il se mit à marcher sans se soucier de Quotzotl à travers la jungle.

Assez rapidement, il accéda à une nouvelle scène de terreur. C’était une petite clairière, encore un temple abandonné, comme il y en avait tant en Lustrie – celui-ci était semblait-il en l’honneur de Chotec. Il y avait des tentes et des campements humains, les cendres éteintes d’un feu de camp, de multiples armes renversées sur le sol. Et par-dessus tout des cadavres.

Oyanotec parcourut le campement. Il compta exactement neuf cadavres, et l’un d’eux portant des galons, devait être un général. Ils étaient éparpillés un peu partout dans la camp et semblait témoigner d’un grand désordre. Tous avait la gorge détruite, et la tête tranchée, parfois même comme arrachée par la racine de leurs cheveux. Du sang tapissait de nombreuses parties du temple, comme de macabres décorations. Mais ce qui intéressait par-dessus tout Oyanotec, c’était que les cadavres étaient vraiment tout frais. On pouvait encore sentir la mort planer au-dessus d’eux. Oyanotec avait même crut voir la jambe d’un des corps chanceler en de courts mouvements convulsifs. Cela signifiait que le Monstre était vraiment proche.

Oyanotec entendit la voix essoufflée de Quotzotl qui arrivait près de lui en le hélant. Il lui lança :

« - Tu t’es enfui face à des humains encore plus effrayés que toi…

Quotzotl ne répondit, il se tenait derrière Oyanotec, ses outils à la main. Il les déposa sur le sol, pus jeta un regard circulaire à la scène de massacre.

- Qu’est-ce qui s’est passé ici ?

- Mon Monstre.

Oyanotec avança entre les cadavres, et regarda les outils de Quotzotl.

- Bon, mettons donc le plan en place, il est tout près maintenant ! Là, juste derrière nous ! Peut-être même nous observe-t-il ! »

Quotzotl frissonna en entendant Oyanotec, et, comme pour se rassurer, regarda la jungle silencieuse.

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Bon bah pas grand chose de negatif à dire :) :'(

La forme toujours aussi parfaite et ca m'impressionne toujours autant ! A mon avis, c'est pas prêt de changer :wub:

Le fond est excellent aussi, meme si je trouve que l'inamicalité de Oya envers Quotzotl est un peu tiré à l'extreme et traine un peu :) Je suis meme pas sur que tu comptes les faire pote à la fin :wink: Enfin je verai bien en lisant la suite ! Sinon, je suis pressé de savoir s'il y a eu des survivants et de savoir si le monstre est dans le coin :wub:

@+

-= Inxi =-

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Je vais peut être parraitre bizarre mais j'aurai préferé que Quotzotl s'enfuisse ou alors il faut qu'il le trahisse ... je sais pas pourquoi mais je l'aime pas... -_-

Je préfere Oyanotek seul que Oyanotek avec un gars qu'il n'aime pas...

Sinon

Ah… Oui, c’est que nous arrivons à l’affluent, il faut s’accrocher un peu, mais ça va aller, ne t’en fais »

Ne t'en fais pas on pêux pas le supprimer celui-là

Et en effet, le courant forcit, Oyanotec n’eut plus besoin d’utiliser ses rames.

Je sais que c'est français mais ça fait bizarre j'aurais plutot mit augmenta.

Ces hommes-là venaient sans nul doute de rencontre le Monstre.

Renconter.

J'ai hate qu'il le bute ce monstre :wub::) Quoique vont-ils le buter??

Peut etre pas après tout peut être qu' il va avoir un flash back de sa vie humaine et ... se suicider :'( :wub::wink: .

On remarque aussi une net évolution du récit depuis un petit moment la quête n'est plus un mystère, il abandonne ses alliés...Quand je le compare à l'Oyanotek que nous avions découvert dans ton 1er texte y a de la différence... enfin en même temps la solitude...

Bon

Sur ce, NETHKHAR, qui adore toujours. :wink:

PS : ça fait lontemps que j'en ai pas mis :):P:P:clap:

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Quotzotl avait auparavant expliqué à Oyanotec la façon dont il comptait s’y prendre :

« C’est comme un piège à carnosaure, dont se servent les chasseurs skinks. On creuse un trou profond mais assez étroit, on installe un appât, comme un morceau de viande odorant, et la bête se précipite pour manger la nourriture. Il tombe alors dans le trou, et il devient facile de l’attaquer à coup de dards de sarbacane. »

Oyanotec n’avait pas objecté, il n’était pas spécialiste de la chasse au carnosaure, et Quotzotl semblait bien sûr de lui.

Ainsi, après la découverte du massacre dans le campement humain, Quotzotl avait sélectionné un lieu idéal, un semblant de clairière à l’air libre où se trouvait un terrier abandonné, et les deux caméléons s’étaient mis à creuser un trou aux dimensions du Monstre. Le travail avait pris du temps, une bonne partie de la matinée, et lorsque Chotec fut au plus haut dans le ciel, ils s’adjugèrent une petite pause.

« - J’ai apporté de la nourriture, un morceau du caïman de ce matin.

Quotzotl déposa la part devant les yeux d’Oyanotec, qui restait immobile face au trou :

- Comment peux-tu être sûr qu’il va passer par ici ? demanda-t-il

- Bof… Mon instinct de chasseur, et puis n’oublie pas qu’on va mettre un appât pour l’attirer. Il n’est pas bien loin, alors il va venir.

- Un appât ?

- Oui… J’avais pensé à utiliser un des cadavres d’humains, ce sera une proie alléchante, pour lui, n’est-ce pas ?

- Ca ne marchera pas, répondit sèchement Oyanotec, sans quitter des yeux le trou.

- Ah ? Pourquoi ?

- Ils sont déjà décapités.

- Et alors ?

- Il lui faut des têtes, pour sa collection.

- Sa collection ?

Quotzotl se mit à rire avant d’ajouter :

- Collection ou pas, s’il a faim, il viendra !

Oyanotec se retourna brusquement et lui lança un regard noir. Puis il s’avança vers lui et le dévisagea :

- Tu m’aides pour le capturer, d’accord, c’est toi ici, le chasseur émérite. Mais c’est ma proie, et c’est moi qui la connais !

Quotzotl en fut tout étonné, il se reprit un peu et demanda froidement :

- Alors tu vois quoi d’autre comme appât ?

Oyanotec observa le trou, puis leva les yeux en l’air, étudiant une branche solide qui surplombait la fosse étroite. Il la regarda sous toutes ses coutures, tenta de l’atteindre avec ses mains en sautant. Puis, il répondit enfin à la question de Quotzotl restée en suspend :

- L’appât, ce sera moi ! »

Quotzotl et Oyanotec continuaient à creuser, ils avaient presque terminé. Quotzotl n’avait fait aucune objection quant au fait qu’Oyanotec serve d’appât. En tant normal, il lui aurait exposé les dangers d’une telle idée, mais cette fois, il n’y voyait pas d’objection. Comme Oyanotec l’avait lui-même dit, c’était son monstre, lui seul savait comme s’y prendre. Alors tant pis pour lui s’il voulait risquer sa peau, le seul intérêt de Quotzotl était de voir le monstre mort.

Ils camouflèrent le piège avec des branchages assez solides pour ne pas partir au premier coup de vent, et assez légers pour que le poids du Monstre provoque sa chute. Quotzotl avait planifié tout ça, en bon ouvrier. Puis ils avaient rapidement convenus des derniers détails : Oyanotec se suspendrait à la branche, le Monstre tenterait de l’attraper et tomberait dans la fosse. Quotzotl se cachera dans les buissons et attaquera le Monstre dans sa fosse, avec des fléchettes étourdissantes. Il ne restait plus qu’à attendre la venue du Monstre…

Quotzotl trouva un buisson idéalement placé pour bondir sur la scène de l’action au moment propice. Il s’y installa, disposant à ses côtés ses projectiles et sa sarbacane. Il regarda Oyanotec, assis sur sa branche, qui attendait, regardant de tous les côtés. Parfois, il paraissait remuer les lèvres, sans rien dire, comme s’il appelait dans le silence. Quotzotl réfléchit à la probabilité qu’il y avait pour qu’Oyanotec se fasse attraper, que le Monstre l’entraîne avec lui dans le trou. C’était une possibilité. Elle n’effrayait pas vraiment Quotzotl, qui, malgré tous ses efforts ne parvenait pas à s’attacher à Oyanotec. Tuer le Monstre, c’était son seul objectif. Il étudia ses projectiles un à un. Il sélectionna les plus importants. Ceux qu’il avait montré à Oyanotec tout d’abord : des fléchettes étourdissantes, qui endormaient la cible dans un profond sommeil pour plusieurs lunes. Il hésita un peu. D’un autre côté se trouvait les fléchettes mortelles, enduites d’un mélange de poisons virulents, de grenouilles à poison, de scolopendre géant ou de mygales à poil blanc, spécimens hautement dangereux. Un tel poison pouvait tuer instantanément, mais possédait un inconvénient : il devait bien se mêler au sang, pour passer dans tout l’organisme. Et à cause des armures sauvages qu’arboraient le Monstre, les fléchettes risquaient de ne faire que des blessures en surface, ce qui rendrait ce poison inutile. Quotzotl hésita alors, puis il lui vint une idée. Il utiliserait les fléchettes étourdissantes dans ses sarbacanes dans un premier temps. Puis, il sortit sa dague de son fourreau sommaire. Un rayon de soleil passant sur elle la fit étinceler. Elle portait une série de rubis sur son manche, et était en or massif. On disait qu’elle était magique, qu’elle rayonnait du pouvoir du dieu caméléon, et qu’elle infligeait à l’adversaire des tortures horribles. C’était un couteau sacrificiel. Celui qu’il avait dérobé dans la communauté des caméléons et qu’il était parvenu à dissimuler. Sa fierté. Il la tint en l’air un instant, s’imprégnant de son énergie magique, et l’enduisit du poison mortel. Ainsi, il serait invincible.

Chotec semblait ne pas vouloir accomplir sa course quotidienne, le temps passa très lentement pour les deux caméléons près de leur piège. Le Monstre se faisait attendre, retardait-il volontairement l’heure de sa mort ?

Soudain, dans un éclair d’obscurité, une ombre, là, passant dans les broussailles. Une ombre imposante et rapide. Celle du Monstre, qui sentait sa proie. Peu à peu, l’infinitude de ses trophées macabres, les centaines de têtes de diverses origines, humaines, simiesques, reptiliennes, rongeurs, oiseaux, poissons, insectes géants ou amphibiens, félins ou bovidés, tout se mêlait pour donner naissance à un être hybride, multiforme, improbable. L’horreur incarnée dans toute sa splendeur, l’horreur qui fixait de ses milliers d’yeux le regard d’Oyanotec. Le Monstre s’était arrêté face au caméléon pour l’observer et Oyanotec lui avait répondu, comme deux guerriers lors d’un défi sans cesse repoussé et qui enfin se rencontrent. Le caméléon ne perdait pas de vue la tête de tapir, accroché à la ceinture, où sans nul doute se trouvait le coffret et peut-être le plan. Ils se jaugèrent longtemps, et Quotzotl s’impatientait. Se parlaient-ils ? Non, ça semblait improbable. Mais le chasseur et la proie semblait se mettre d’accord.

Brusquement, le Monstre bondit pour attraper Oyanotec, élançant ses deux pattes solides en avant, rugissant de toutes ses forces. Quotzotl s’émerveilla. Dans un instant, le Monstre serait à sa merci.

Oyanotec eut tout juste le temps de sauter sur une autre branche, car le Monstre s’agrippa fermement à celle où il était assis quelques secondes auparavant. Il ne lâchait pas le bois, enfonçant ses ongles dans la chair de l’arbre. On sentait bien les efforts inhumains qu’il produisait pour pouvoir se hisser sur la ramure.

Quotzotl trépignait. Le Monstre ne voulait pas poser les pieds au sol. Pourquoi ne posait-il pas les pieds au sol ? Le caméléon surgit malgré tout des fourrés, et, sarbacane en main, décocha une première salve. Les deux fléchettes étourdissantes ricochèrent contre la peau de tatou qui faisait office d’armure. Il fallait viser un point sensible, à la base du cou par exemple.

Oyanotec sauta de l’arbre jusqu’au sol, et arriva au côté de Quotzotl. Celui-ci, attentif à son prochain tir, lui lança un bref :

« On va y arriver ! »

Il s’apprêta à souffler dans sa sarbacane.

A cet instant, le Monstre réalisa la situation. Il prit un peu d’élan, suspendu à la branche par ses deux mains, et plongea sur les deux caméléons en poussant un hurlement bestial. Quotzotl en fut désarçonné, il recula un peu. Son tir partit malgré tout, et il vit la fléchette effleurer la peau du Monstre, un peu de sang s’écoula à partir du cou, quelques gouttes coulèrent sur la peau bronzée de la créature. Celui suffirait peut-être pour injecter le soporifique.

Oyanotec pendant ce temps-là, ne faisait rien, il observait la scène. Mais ses yeux ne quittaient pas ceux du Monstre. Ce dernier était à présent parvenu sur le sol, fit un roulé-boulé qui repoussa Quotzotl, et se releva à grand-peine, en titubant et en s’agrippant aux branches. Quotzotl en profita pour lui sauter dessus. Déstabilisé, le Monstre n’eut pas le temps de réagir et tomba dos au sol. Toutefois, le poison ne faisait pas complètement effet, et il battait des mains et des jambes pour se libérer de la présence de Quotzotl.

« Tiens lui les jambes sinon, il va s’enfuir ! »

Oyanotec s’exécuta, saisissant de ses doigts de caméléons les deux jambes du Monstre. En passant, il vit l’éclat bleuté du coffret, là, à une longueur de bras. Il aurait pu le saisir, mais cela l’aurait obligé à abandonner les jambes. Il tenta la manœuvre malgré tout, tendant sa main droite vers le crâne de tapir.

« Attends un peu ! lui cria Quotzotl. Quand il sera mort, tu pourras lui prendre sans danger. En attendant, tiens lui les jambes sinon je vais tomber. »

Et à cet instant, Quotzotl sortit de sa poche la dague et la brandit en l’air. Le regard d’Oyanotec fut attiré par son éclat bleuté, et il remarqua une goutte d’un liquide noir dégouliner de la lame cuivrée. Son congénère allait donner le coup fatal.

C’est juste à cet instant qu’Oyanotec lâcha les jambes. Le Monstre en profita pour se donner plus d’aplomb, il se releva d’un bond, et envoya valser Quotzotl qui se trouvait sur son ventre. La dague sacrificielle fut envoyée dans la fosse et Quotzotl tituba, sous le choc. Il vacilla un peu, se tenant le front avec sa main. Il balbutia vaguement à Oyanotec sous forme de reproche :

« Qu’est-ce que tu as fait, je t’avais dit de le tenir… »

Mais les mots sortaient à peine de sa bouche, il chercha une prise pour s’accrocher mais n’en trouva pas. Enfin, il arriva au bord de la fosse, ses yeux regardèrent le fond. Il oscilla une dernière fois hors de la réalité. Et Oyanotec vit son image disparaître dans le trou.

Pendant ce temps, le Monstre avait eu le temps de se relever. A cause du poison, il titubait et avançait lentement, en zigzag. Il cherchait son chemin, perdant beaucoup de ses trophées en route. Finalement, il trouva la sortie et s’enfonça entre les arbres.

Oyanotec, partagé entre la jungle et la fosse eut un long instant d’hésitation. Puis il se mit à penser au coffret, à ce qu’il contenait. Alors il s’engouffra à la suite du Monstre dans la jungle.

Une nouvelle séance de traque débuta alors. Mais plus brève, et plus intense cette fois. Le Monstre avançait lentement, mais ne suivait aucun sentier, et Oyanotec ne connaissant pas cette partie de la jungle, se perdait un peu. D’autant plus qu’au fur et à mesure qu’ils s’enfonçaient dans la jungle, une nouvelle zone marécageuse fit son apparition. Ce n’était encore que de la tourbe humide, il fallait juste observer où l’on mettait ses pieds. De plus Oyanotec était épuisé par les émotions de la journée, et peu à peu, le Monstre retrouvait des forces. Il parvint par distancer le caméléon lancé à sa suite, qui dut bientôt le suivre à l’instinct, comme il avait fait jusqu’alors. Ils se dirigeaient tous les deux vers le nord, vers l’embouchure de la Qurveza.

La traque dut être longue, car lorsque Chotec se coucha à l’horizon, Oyanotec n’avait toujours pas retrouvé la trace du Monstre. Il pataugeait dans les eaux chaudes de la mangrove, cherchant entre les arbres des endroit pour se reposer. Il n’avait pas arrêté de courir, mais sans succès, le Monstre lui avait une nouvelle fois échappé. Mais cette fois, il l’avait voulu. Lorsque Quotzotl avait brandit sa dague pour tuer la créature, Oyanotec n’avait pas supporté l’idée de la mort du Monstre. Il lui suffisait d’avoir le coffret, mais il ne voulait pour rien au monde que quelqu’un d’autre le tue pour cela. C’était un sentiment étrange, comme s’il comprenait cette créature frénétique et sans émotions, une compassion inavouable. Il l’avait alors laissé s’enfuir, dans l’espoir de le retrouver d’une façon ou d’une autre et de lui prendre le coffret. Mais maintenant, il en venait à se demander l’intérêt de son acte. Il avait tout perdu, le Monstre et le coffret.

Il évolua encore un peu entre les branchages, évita une mare qu’il craignait infestée de piranhas, puis se posa sur un îlot. Il faisait noir tout autour de lui, et seules quelques lucioles constellaient cette obscurité à la façon des étoiles. C’était une nuit un peu froide et venteuse, reposante calme. Oyanotec s’allongea sur le sol herbeux et humide. Il ne devait pas être loin de la communauté de caméléons à présent. Mais à quoi bon, puisqu’il n’avait pas retrouvé la boîte. Le souvenir de Quotzotl s’était déjà envolé, il pensait à toute autre chose. Il pensait à Tuanahok.

Et puis, un cri, un simple cri dans le lointain. Pas un de ces cris qu’il percevait lors de sa chasse et qui signifiaient une nouvelle victime du Monstre, non, le cri était tout autre, à part peut-être qu’il s’agissait aussi d’un cri de mort. Il s’élança entre les arbres, naviguant à vue dans l’obscurité, alors que le cri s’éteignait au loin. Apparut dans la mangrove une odeur de mort, cette odeur qui vient lorsque la jungle est en deuil. Les oiseaux alors se taisent et les prédateurs cessent leur chasse, dans un respect muet mais si éloquent. L’ambiance était un peu comme celle-là, et Oyanotec se posait des questions par rapport au cri qu’il avait entendu. Il avait peur.

Il faisait vraiment noir, mais il parvenait à se repérer, guidé par son instinct. Il franchissait les taillis à toute allure, perçant l’obscurité comme une étoile filante. Enfin, au terme d’une longue course, il comprit qu’il était parvenu au lieu d’où provenait le cri. Tout était silencieux à présent, mais il savait. A tâtons, il chercha à voir de plus près ce qui s’était passé. Soudain, il vit Ses deux pupilles, seules, implorantes dans le noir. Il continua ses recherches.

Ses yeux s’habituaient peu à peu au noir, et il distinguait des formes. Là, un bras, maigre, et une jambe ensanglantée et constellée d’une myriade de petites pointes brillantes. Là, plus en avant, ses cheveux gras trempant dans la rosée vespérale. Et enfin son corps, presque anémique, d’où les côtés ressortaient. C’était bien lui, c’était le Monstre. Mais il avait perdu tous ses attributs, tous ses trophées. Et surtout il était mort. Et dans la mort, il apparaissait comme n’importe quel être humain normal, sa nudité ne faisant qu’accentuer cette normalité. Ses yeux étaient encore un peu injectées de sang mais si vitreux qu’il n’y paraissait plus rien.

Oyanotec s’avança un peu. Il manqua de trébucher sur un crâne. Un crâne de tapir. Fébrilement, il fouilla à l’intérieur. Sa patience avait été récompensé : le coffret brillant se trouvait toujours à l’intérieur, intact et hermétiquement cadenassé. Il continua à creuser l’intérieur du crâne de ses mains. Il y trouva encore un vieux morceau de papier. La carte de Tuanahok sans doute. Complètement illisible. Mais peu importait, car il savait à présent, en voyant le cadavre du Monstre où il se trouvait. Sur le territoire des caméléons.

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Snif, j'ai un peu de peine pour le monstre !

Bon, le fond est impecable et irreprochable ! Je me repete, je sais mais au moins tu sauras au courant !

Le fond est bizarre ! Tu ne veux pas les faire pote :P:) Ce qui me laisse penser que tu as déjà écrit ton texte depuis longtemps et que tu ne veux pas tenir compte de nos remarques ^_^ Bref c'est ton texte et quelque soit la voie que tu vas choisir, je la suis avec plaisir !

@+

-= Inxi, une suite ! =-

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DU SANG POUR LE DIEU DU SANG, DES CRÂNES POUR LE TRÔNE DE KHORNE!!!

Qu'est-ce qu'un guerrier cahotique vient faire dans la jungle de Lustrie???

Le mystère reste entier... Je n'arrive pas à savoir lequel des deux guerriers est le moins sympathique.

De la peine pour le monstre? Peut-être quand même pas.

C'est super, bravo!!!

Allez, la suite maintenant!!! :P

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AAh ! il est crevé!! :clap::P . Tiens dans le trou le Quotzotl il avait qu'a pas faire son malin... :)^_^ .

J'aime bien la suite de cette histoire, ça me plait. J'espère que son arrivée chez les caméléons ne signift pas la fin de sa quête ?? :P:clap:

J'ai pas vu de fautes.

Continue et la suite!

Sur ce, NETHKHAR, extinction de voix... :clap::clap:

Modifié par NETHKHAR
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Oyanotec commença par transporter des pierres, d’un vieux temple tout proche. Il les posa délicatement sur le cadavre nu pour en recouvrir la totalité, la moindre parcelle ne devant pas être exposée à la lumière du jour. Le vent sifflait une chanson funèbre entre les branches de palétuviers, et toute la jungle se tut pour respecter le silence d’Oyanotec, debout face à la sépulture sommaire qu’il avait bâti. Enfin, il prit la tête du tapir et la posa sur le dessus, là où devait être le visage du Monstre. Ce n’était plus qu’une charogne misérable, osseuse, puante, mais le caméléon voulut malgré tout la transporter. Au moins avait-elle su conserver son trésor, ce coffre si longuement convoité.

Trempant son doigt dans du jus de caroube, il traça sur les pierres un symbole mortuaire, celui que l’on peint sur le tombes des guerriers morts pour apaiser Tlazcotl, et pour qu’il accueille dans son monde le défunt. Oyanotec connaissait bien ses symboles, il habitait non loin du cimetière où toutes les sépultures étaient alignées. Il en sortait d’ailleurs un parfum d’encens, que brûlait les prêtres en l’honneur de Tlazcotl. Le caméléon chercha autour de lui quelques branches odorantes. Celle de l’orchidée blanche pouvait faire l’affaire, il s’en saisit et trouva rapidement de quoi faire du feu. Une flammèche parcourut bientôt l’ensemble de la branche, et une douce odeur envahit l’atmosphère l’espace d’un instant. Il jeta la branche sur la sépulture et elle continua de se consumer sur la pierre froide. Un peu de vapeur s’échappa de la rosée. Il y eut un court moment de flottement alors qu’Oyanotec restait immobile face aux pierres, puis tout s’évanouit, la branche s’éteignit et la silhouette impalpable du caméléon s’échappa à travers les branchages environnants.

Il savait à présent à quoi s’attendre. La vision du cadavre dardé de fléchettes empoisonnées lui avait permis de comprendre qu’il se trouvait sur le territoire des caméléons. Il savait qu’à tout instant, il pouvait être épié par plusieurs paires d’yeux à travers les ramifications végétales. Les caméléons étaient des êtres pacifiques, et n'avait a priori aucune raison de l'attaquer. Au contraire, même, ils allaient sans nul doute l’accueillir comme un prince – surtout avec ce qu’il apportait. Mais malgré tout, le tempérament suspicieux du caméléon lui faisait craindre le pire.

Il continua sa marche à tâtons, ne sachant ni où aller, ni quels points de repère sélectionner. Cette branche, là, face à lui, il pouvait très bien tourner autour depuis longtemps, ou encore cette mare croupissante se trouvait déjà sur son chemin tout à l’heure. La mangrove était un lieu si labyrinthique, entre ses larges étendues d’eau, ses îlots de verdure et ses arbres tous semblables, qu’Oyanotec s’y perdait et préférer errer, à la façon d’un pénitent. Les animaux habituels se faisaient de plus en plus rares et Oyanotec remarqua une concentration d’insectes, des moustiques, en particulier, dont le dard puissant pouvait transpercer les écailles du lézard. Cela signifiait qu’il approchait sans doute d’un lieu plus humide, et plus chaud. Il ne devait plus être loin de l’embouchure de la Qurveza, et donc de la Flaque, ce large océan méconnu et inquiétant.

Au fur et à mesure de son avancée, Oyanotec sentait se refermer sur lui le piège de la mangrove : les îlots solides étant de plus en plus restreints, il ne pouvait plus se déplacer que sur une mince bande de terre, à la merci de n’importe quel observateur voire prédateur. Il tenait en main sa sarbacane, mais cela ne l’empêchait de pas craindre un danger…

Il s’immobilisa en entendant un bruit venant des buissons. Un frôlement très léger qui pouvait avoir été causé par un pacifique herbivore en vadrouille. Il porta sa main sur son arme et se retourna doucement. Autour de lui, le silence le poussait à douter de ce qu’il avait entendu. Il continua d scruter les alentours avec son regard circulaire.

Soudain, il entendit clairement un son à sa droite. Bondissant, il se retourna, pointant son arme vers la ramure d’où provenait le cliquetis. Personne.

« - Bienvenue chez nous, camarade !

La voix venait de derrière lui. Un caméléon aux couleurs chaudes se tenait face à lui. Il arborait de grandes plumes colorées – sans doute tenait-il un rôle important – et était accompagné par deux autres caméléons : un aux teintes violacées et l’autre tirant sur le vert. Oyanotec ne sut quoi répondre. Le chef le tira de son embarras :

- Comment t’appelles-tu et que viens-tu faire ici ? Mon nom est Olquemok, et mes deux guerriers sont Quanapex et Ayanoquotl.

Sa voix était accueillante, ses gestes rassurants, et il avait rangé son arme. Oyanotec répondit alors :

- Je m’appelle Oyanotec, et je viens d’une cité, loin à l’est, pour vous apporter un présent. Je viens de Petchx, la nouvelle Tlaxtepok.

- La nouvelle Tlaxtepok ? En effet, c’est un long voyage… N’a-t-il pas été trop difficile ?

Oyanotec le regarda en souriant. Rangeant de même son arme, il ajouta :

- Non, pas trop difficile… »

Olquemok lui fit signe de lui suivre, les deux autres partant devant en éclaireur. Le petit cortège de caméléons traversa la jungle en silence et avec une grande discrétion.

Ils prirent une barque pendant un petit moment, jusqu’à arriver à un îlot beaucoup plus grand, juste à l’embouchure. Les arbres cachaient malheureusement la vue sur l’océan, mais on devinait derrière les branches l’horizon nocturne, et l’étendue paisible qui s’offrait à la vue. Oyanotec se laissa conduire à travers un réseau d’habitations sur pilotis, de grands nids ronds suspendus parfois aux arbres, beaucoup mieux entretenus que la ridicule cabane de Quotzotl. Des caméléons vaquaient à leurs occupations, certains voyageant en barque, d’autre se déplaçant sur la canopée. Oyanotec n’avait jamais vu autant de caméléons rassemblés. Le seul point négatif était la présence de trop nombreux moustiques, qui envahissait le ciel et qui formaient leurs conglomérats jusqu’aux seuils des habitations. Beaucoup d’ailleurs étaient fermées, et certains, mêmes, en périphérie, étaient abandonnées. Oyanotec se posait de nombreuses questions mais préféraient se taire pour le moment, face à ses trois guides silencieux. Parfois, ils saluaient courtoisement d’autres caméléons, mais ils restaient la plupart du temps muets.

« - Nous t’emmenons voir notre chef, déclara soudain Olquemok. Tu dis avoir quelque chose d’important à nous montrer, et je suis curieux de connaître la nature de cette chose. Mais le protocole doit être respecté, et tout caméléon arrivant sur cette terre doit d’abord être présenté à notre souverain, Oxayotl.

Olquemok était toujours souriant, jamais brutal, et cette attitude rassura Oyanotec. Il se sentit moins seul dans sa quête, surtout après cette longue période de solitude qu’avait été la traque. Repenser à la traque lui fit repenser au Monstre. Et d’emblée, une première question se présenta à ses lèvres, il ne put la retenir :

- Vous avez tué une créature humaine, cette nuit ?

Olquemok le regarda, inquiet, et se contenta de lui répondre :

- Tu poseras toutes tes questions au grand Oxayotl. »

Oyanotec comprit qu’il fallait se taire. Il se laissa conduire sur le courant doux. La nuit était calme assez chaude – mais cela venait sans doute de la mangrove étouffante de jour – et il se sentait bien, pour la première fois de son exil. Même si ce brusque retour à la civilisation le perturbait un peu et lui faisait perdre ses repères.

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La large bâtisse faite de feuilles, de branchages, et de terre humide qui faisait office de palais était à moitié camouflé au cœur d’une brume de chaleur opaque. Cela donnait à l’ensemble un aspect irréel, et Oyanotec se demanda à plusieurs reprises s’il ne rêvait pas. Les branchages serpentaires qui encadraient l’entrée formaient comme un portail végétal vers un autre monde. De l’extérieur, Oyanotec pouvait voir luire les merveilles du palais.

Une fois à l’intérieur, on en oubliait la brume et les moustiques de la mangrove. Des bijoux de toutes sortes faisaient briller d’éclats moirés les parois humides, le bronze coulant en fin réseau se mêlait aux branches de la voûte, tout n’était qu’abondance de richesse, de statuettes dorées, de diamants et de pierreries.

Oyanotec sentait à ses côtés la présence de Olquemok, qui lui rappelait qu’il ne rêvait pas. Ils franchirent plusieurs portes, chacune gardée par deux soldats en faction, immobiles, et dont la peau se fondait dans la végétation. Ils paraissaient identiques aux statues, et même parfois, ne faisant qu’un avec la nature environnante, remplissaient la pièce d’une formidable harmonie végétale. Tout se transformait pour ne faire plus qu’un avec les plantes : les diamants violacés ressemblaient aux orchidées sauvages qui poussaient en grappe ordonnées et certains rubis aux teintes écarlates se confondaient avec les petites oranges sanguines, à la chair solide et aux exhalaisons acidulées. On ne se savait plus au cœur d’une mangrove puante, à quelques encablures d’une mer vers l’inconnue. Il y avait là un tel faste, un tel luxe, qu’Oyanotec devait sans cesse éprouver le décor pour l’admettre dans son esprit : il caressait les fleurs, mordait dans les fruits tropicaux, ou humait les senteurs poivrées de la sève qui s’écoulait des racines de certains arbres.

Oxayotl, le souverain des caméléons, était connu dans toute la Lustrie, car la légende disait de lui qu’il était le caméléon originel, né dans les mares sacrées de Pahuax, une cité depuis tombée en ruines. Une poignée de caméléons avaient migrés de cette cité, donnant naissance à l’engeance des caméléons. Oxayotl était connu comme le seul survivant de cette première ponte, et vénéré comme tel. Après une vie d’aventures et de combats, il avait fini par s’installer à l’embouchure de la Qurveza et y fonder ce havre pour caméléons. Oyanotec savait tout ce que l’on disait sur lui, que sa peau était devenu tellement floue avec le temps qu’il était presque invisible, ou encore que son habileté à la sarbacane était telle qu’il pouvait atteindre un moustique de nuit de l’autre côté des rives d’un fleuve. Mais la perspective de voir ce mythe vivant inspira Oyanotec, il se sentit important, même s’il ne s’agissait que de la coutume.

Olquemok l’introduit dans une dernière pièce, dont l’entrée était camouflée par un banc d’algues scintillant comme le jade. Il s’avança un peu, aveuglé par les lumières qui jaillissaient de toute part, puis très vite s’habitua. L’odeur de la pièce était douce, fruitée, et contrastait encore plus avec l’extérieur. Il mit du temps avant d’apercevoir Oxayotl, qui pourtant s’était assis juste devant lui, sur une paillasse en chanvre tressé. La légende ne mentait pas : ses écailles ne trahissaient pas sa présence, il n’était qu’un brouillard aussi opaque que celui du dehors, une silhouette fantomatique aux contours indistincts dans l’obscurité de la salle verdoyante. Car partout, ici plus qu’ailleurs, était un déluge de verdure, entre les feuilles de palmes aussi larges qu’une aile de téradon, ou les herbes de la même taille qu’un carnosaure. Au centre de tout cela était Oxayotl, le maître des lieux. Une fois qu’il crut l’avoir localisé, entre deux racines, il s’assit à son tour et attendit.

Très vite, la voix profonde du vieux caméléon se fit entendre :

« - Bienvenue parmi nous, jeune camarade caméléon. Olquemok m’a dit que tu venais nous apporter un bien précieux…

- En effet, balbutia timidement Oyanotec.

- Mais avant tout, commençons par le début. Je m’appelle Oxayotl, souverain de la communauté des caméléons. Et toi, qui es-tu et d’où viens-tu ?

- Je suis Oyanotec, et je viens de la cité de Petchx

Il y eut un silence, Oxayotl devait réfléchir.

- Petchx dis-tu ? Tu viens de très loin alors !

- En effet, mais j’avais une mission. Vous apporter ceci.

Il sortit de sa besace le coffret précieux, et les pierres qui l’ornaient n’entachèrent point la beauté du reste de la salle. Comme il le tendait à Oxayotl, ce dernier le saisit entre ses doigts fins. Tout doucement, il défit le seau et regarda à l’intérieur. Oyanotec remarqua un grand sourire illuminer son visage.

- Très bien… Tu viens de la part de Tuanahok, le sage ?

- C’est exact.

- J’en suis heureux… Tu le remercieras de notre part à tous.

Oyanotec leva brusquement le tête, des mots sortirent à toute allure de sa bouche :

- Mais… le sage Tuanahok est mort…

Il faillit rajouter « je l’ai tué », mais sa conscience, revenue à cet instant, l’en empêcha. Oxayotl, pour sa part, fit une grimace de dégoût.

- Le sage Tuanahok est mort ?

Un silence de nouveau, recueilli, avant qu’il n’ajoute :

- C’est un événement important dont je dois informer la communauté. Resteras-tu avec nous pendant quelques jours ou dois-tu rentrer chez toi ?

Comme il n’avait plus de chez lui, Oyanotec répondit :

- Je resterais bien, si ma présence en ces lieux ne vous ai pas désagréable.

- Soit… Dans ce cas, Olquemok te montrera le nid que nous te réservons et t’expliquera quelques détails… »

Oxayotl dut se déplacer, même si Oyanotec n’en eut pas vraiment conscience. Mais comme il sentait que la discussion arrivait à sa fin, il se leva à son tour et sortit de la pièce, encore sous le charme des beautés du palais.

Olquemok le mena à sa cabane, un petit nid sommaire mais agréable. Il lui expliqua comment il allait se nourrir. Avant de partir, il lui adressa une dernière question :

« - On dit que le sage Tuanahok est mort… Est-ce vrai ?

Oyanotec ne s’attendait pas à ce que la nouvelle se répande si vite. Il acquiesça rapidement :

- Oui, c’est vrai.

Olquemok se tint droit et ajouta :

- Je ne l’ai pas connu, j’étais trop jeune lorsqu’il est venu dans notre communauté. Mais on raconte tant de belles choses à son propos que je ne peux que m’attrister de sa mort… »

Puis il s’éclipsa, laissant Oyanotec entre les murs de sa cabane.

Après s’être installé, Oyanotec s’était couché aussitôt sur la paillasse pour dormir. Il commençait à ressentir la fatigue de la journée. Son sommeil avait duré toute une journée, jusqu’à ce qu’il entende une voix aiguë à l’entrée de sa cabane, une voix qui l’appelait dans la pénombre.

« - Tu viens de Tlaxtepok, c’est bien cela ?

Oyanotec avait ouvert un œil, puis l’autre, encore étourdi par les pompes du sommeil, et s’était levé lentement de sa paillasse. Il avait regardé d’un œil vitreux tout autour de lui, ne voyant pas d’où pouvait provenir la voix. Il s’en étonna, et continua d’inspecter la pièce jusqu’à ce que la voix se répète :

- Oyanotec ? Tu t’appelles Oyanotec ?

Cette fois, il le vit, debout dans l’entrée de la cabane. Un petit caméléon aux écailles pierreuses et aux rides multiples. Son œil droit partait en vrille sur le côté, comme un œil mort, et ses deux mains fines étaient disposés l’une dans l’autre, contre sa poitrine. Oyanotec se leva pour le saluer :

- Oui, c’est bien moi. Oyanotec.

Le vieux caméléon sourit :

- Et tu viens de Tlaxtepok ?

- De Tlaxtepok, oui… Ou plutôt de Petchx, notre ancienne cité a été détruite et reconstruite.

- Ah, bien…

Le vieux caméléon s’avança dans la maison, et s’assit par terre, à un endroit précis, comme s’il connaissait les lieux par cœur.

- Et toi, demanda soudain Oyanotec, qui es-tu ?

- Je m’appelle Olkayotex et j’ai plus de mille ans, je suis un des fondateurs de cette colonie. A mon époque, ce n’était qu’une suite de cabane sommaire en roseaux qui se détruisaient au moindre coup de vent. Mais lorsque Oxayotl est arrivé pour nous aider, la communauté a commencé à prospérer, et de nombreux caméléons venant de tous les coins de Lustrie sont arrivés pour vivre ici, comme dans un refuge. Comme tu le sais, nous ne sommes pas forcément les plus appréciés dans les cités…

Oyanotec écoutait le discours de ce vieillard sans trop comprendre ce qu’il faisait chez lui.

- A présent, continuait Olkayotex, nous connaissons une nouvelle période de crise. Le sol se réchauffe, et le niveau de l’eau monte. Nous nous déportons de plus en plus vers le sud, mais c’est une entreprise très pénible. De plus, vers l’intérieur, les moustiques pullulent, et les dangers sont plus nombreux. Nous avons tous peur que la communauté, affaiblie, se décompose. Déjà, certains caméléons sont repartis.

En regardant par la fenêtre, Oyanotec vit un coucher de soleil. Combien de temps avait-il dormi, pour que le jour suivant décline déjà ?

- C’est pour cela que nous avions un grand besoin de la statuette Kolanxa que tu as apportée.

Oyanotec se retourna brusquement.

- Quelle statuette ? demanda-t-il

- Le précieux cadeau du grand et noble Tuanahok, duquel tu fut le messager.

Une statuette… Oyanotec avait ignoré pendant tout ce temps ce que recelait le coffret. Il ne l’apprenait que maintenant, arrivé au terme de son voyage.

- Grâce à cette statuette, continua le vieillard, nous allons pouvoir retrouver notre prospérité. C’est un puissant artefact !

Etait-ce uniquement pour lui dire cela qu’Olkayotex était venu ? Oyanotec, toujours muet eut le réponse immédiatement :

- Mais je viens te voir pour toute autre chose. Est-ce vrai que l’illustre Tuanahok est mort ?

- Oui…

Olkayotex baissa la tête pour se recueillir.

- Comment cela s’est-il passé ?

Oyanotec sursauta. Evidemment, la question allait forcément être posée. Ici, Tuanahok semblait vénéré à l’égal d’un dieu. Pendant qu’il réfléchissait, Olkayotex lui expliqua sa rencontre avec Tuanahok, il y avait de cela plus de mille ans, le sage qui à l’époque était en quête de son destin avait sauvé les caméléons d’une salamandre. Le souvenir traversa l’espace comme la nostalgie d’un instant heureux. Olkayotex souriait en le racontant. Oyanotec, lui, se sentait mal. De plus, il remarquait à sa fenêtre le visage curieux de plusieurs autres caméléons, qui espionnait leur conversation. Il regarda autour de lui, et au-dehors. Chaque nid était illuminé par une flamme lumineuse, en signe de deuil. Un temple sacré qu’il apercevait au loin était peint de fresques au couleur vives, et l’on pouvait reconnaître l’image de Tuanahok se battant contre un monstre. Dans le ciel, même les étoiles semblaient porter la marque silencieuse du deuil. Oyanotec se tourna vers Olkayotex qui attendait, ayant fini son propre récit. Il lui répondit à mi-voix, malgré tout conscient de ce que les autres pouvaient l’entendre :

- Il est mort d’épuisement. Mais je vous rassure, tous, il est mort heureux, sachant que votre communauté allait revivre.

Il avait trouvé les mots. Des mots simples qui contentèrent Olkayotex. Le vieux caméléon déglutit bruyamment, puis remercia Oyanotec. Enfin, il lui annonça :

- Nous organiserons un cortège funèbre en son honneur, tu seras bien sûr un invité privilégié.

- Je ne sais pas si je le mérite… Mais j’y assisterais… »

En lui-même, Oyanotec pensa : je n’ai pas pu assister au cortège de Petchx. Il faillit l’ajouter, mais Olkayotex était déjà parti.

Dans la communauté de caméléons, la perspective d’un cortège activait tout le monde, une frénésie de travail agitait chaque maison. Oyanotec suivit cela de loin, laissant les jours s’écouler lentement. Il quittait peu sa cabane. Parfois, Olquemok ou encore Olkayotex venait manger avec lui, mais même dans ces conditions, Oyanotec restait muet. Parfois, ses visiteurs lui proposaient rester ici, avec tous les autres caméléons, mais il répondait invariablement : « Non, ma place n’est pas ici, je n’y suis pas à mon aise. D’ailleurs j’ignore si ma place est réellement quelque part. » Il y avait u parfum d’amertume dans cette phrase qu’il était le seul à pouvoir comprendre. Les autres n’insistaient pas.

Les préparatifs étaient longs, la cérémonie promettait d’être grandiose. Presque un cycle de lune passa dans la communauté sans qu’Oyanotec ne s’en aperçoive. Pendant tout ce temps, il réfléchissait beaucoup à son aventure. Plusieurs réponses à des questions encore non-élucidées lui étaient venus. Il avait déjà entendu parler de la statuette de Kolanxa, comme une des précieuses reliques qui constituaient le trésor de Tlaxtepok. Il paraissait évident que même Tuanahok n’aurait pas pu l’obtenir pour l’expédier hors de la cité. Et pourtant, son souhait devait être d’apporter de l’aide au caméléons. Pour cela, il avait mis au point un fin stratagème. D’une manière ou d’une autre, il était parvenu à dérober le statue. Aussitôt, les dieux qui l’espionnaient depuis sa naissance avaient voulu le punir d’un tel acte, et l’avait accablé de douleurs. Il ne lui restait plus qu’à trouver un moyen d’envoyer la statue aux caméléons. Il ne pouvait le faire lui-même, les dieux l’auraient poursuivis jusque dans les tréfonds des monts de Sotek ! Alors il choisit Oyanotec. Car il était un caméléon, et parce qu’il serait le seul à accepter de le tuer pour achever ses souffrances. Une fois mis en exil, la statuette à ses côtés, Oyanotec ne pouvait pas être poursuivis par les dieux. Et la mission s’accomplirait, à la condition du sacrifice d’Oyanotec. Nul autre skink n’aurait accepté de transporter une relique volée. Les caméléons étaient connus pour leur discrétion. Tuanahok en avait profité.

Maintenant, ce scénario tournait clairement dans l’esprit d’Oyanotec. Il attendit le jour de la cérémonie tout en cherchant une réponse à la dernière question : où allait-il aller à présent ?

Chotec ne semblait pas vouloir se lever ce jour-là, il apparut timidement derrière la ligne d’horizon formée par la Flaque. Aujourd’hui, la communauté de caméléons allait honorer la mémoire de Tuanahok. Ils avaient pour cela construit un grand totem en bois d’ébène censé représenter le skink. Il formait comme un gisant et allait être posé sur une barque. Le courant se chargerait de l’emporter dans la Flaque, loin, vers l’horizon, vers là où il avait toujours voulu aller. Chaque membre de la communauté s’était paré de plumes colorées, de fils tressés ou de tatouages multicolores. Toutes les barques dont disposaient les habitants allaient être utilisées pour assurer une continuité. Le cortège allait partir loin en amont du fleuve, et revenir jusqu’à l’embouchure suivre la barque qui transporterait le gisant de Tuanahok. Oxayotl se trouverait dans la barque royale, en tête du cortège en compagnie du vieux Olkayotex. Il avait invité Oyanotec à les rejoindre, mais celui-ci avait décliné l’offre, en expliquant que sa place n’était pas ici. Il s’était placé dans une barque en compagnie de Olquemok, au centre de la colonne.

Lorsque la procession se mit en route, un immense silence traversa la jungle. C’était un moment divin, suspendu dans le temps. Seul le courant qui les menait vers l’embouchure, doucement, tout doucement, montrait que la jungle vivait. Oyanotec avait ressenti la même émotion lorsqu’il avait survolé la procession en l’honneur de Tuanahok, à Petchx. Mais aussi cette même impression de détachement, d’être hors de l’action. Il regarda Olquemok, à sa droite, qui fermait les yeux pieusement, plongé dans une torpeur méditative. Même Ayanoquotl, celui qui conduisait la barque, était silencieux et immobile. Son bras qui poussait la rame semblait mu par un effet du vent.

Oyanotec scruta la forêt, à sa gauche, qui respectait le silence du défunt. Ils avaient commencé leur périple à l’endroit où la Qurveza croisait l’affluent. Ils devaient à présent se trouver là où Oyanotec avait bâti une petite sépulture pour le Monstre. Il fixa la jungle avait le même regard soutenu. Oui, ce devait être là, il reconnut une colline qui surplombait la jungle, avec un rocher à son sommet, un point de repère bien utile. Ils arrivaient bientôt au niveau de la mangrove, là où les arbres de la jungle se faisaient vraiment rares et laissaient la place à leurs homologues des marais. Tous les regards, tous les esprits, étaient tournés vers la barque de tête, que tous suivaient du même élan. Oyanotec, lui, était attiré par la jungle. Il tendit sa main vers la feuille d’un palmier qui pendait jusqu’à lui. Il regarda vite derrière lui. Olquemok était toujours dans sa transe, et Ayanoquotl poursuivait ses mouvements mécaniques.

Nul ne le vit partir, il fila de la barque jusqu’au branche à toute allure, sans même faire basculer d’un millimètre l’embarcation. Il fut happé par les profondeurs de la jungle.

Il traversa à vitesse moyenne les premiers buissons de la jungle. Il faisait encore frais, Chotec ne frappait pas encore toute la jungle moite de ses rayons brûlants. Il fit une première halte sur la sépulture du Monstre. Rien avait bougé. Et étrangement, les pierres avaient du protéger le cadavre des mouches et autres insectes nécrophages car tout était intact, comme Oyanotec l’avait laissé. Seule le crâne de tapir n’était plus qu’un os rongé. Mais au moins était-il toujours là. Oyanotec s’agenouilla un peu, remit une pierre en place, et s’en alla.

Quotzotl jetait des cailloux dans l’eau de la mangrove. Parfois, des piranhas, croyant à quelques nourritures, s’approchaient. Cela l’amusait beaucoup. Il balança dans les fourrés une plus grosse pierre. A cet instant, une silhouette immense en jaillit. Il le reconnut aussitôt.

« - Il reste une place dans ta cabane ?

Oyanotec souriait, cette fois. Quotzotl le prit par l’épaule.

- Oui, il reste encore une place pour un ermite en exil… »

Les deux caméléons se regardèrent. Même si Quotzotl ne comprendrait jamais Oyanotec, il sut lire dans ses yeux que sa mission était terminée, et qu’il demandait le repos. Il lui fit un signe d’amitié. Puis Oyanotec entra dans la cabane et s’assit sur sa paillasse. Et là, dans le calme de la mangrove, il s'endormit.

FIN

Modifié par Mr Petch
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Et voilà... Une nouvelle page se referme sur la grande histoire des HL de Tlaxtepok. Je remercie tout ceux qui ont eu la patience de me lire et encore plus ceux qui ont eu le courage d'apporter leur soutien par des réponses... Je ne suis pas mécontent d'avoir achevé ce récit qui me tenait vraiment à coeur, il a malgré tout vu le jour malgré les aléas. Et notre brave Oyanotec a terminé sa quête et peut se reposer sur ses lauriers...

Je vous souhaite à tous de bonnes fêtes de fin d'année ! Et peut-être à bientôt en 2005!

Atchao

Mr Petch :wink:

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Voici l'exemple même d'une conclusion parfaite. Inattendue, brusque et parfaitement dans l'esprit que nous avions du héros. Je ne m'allongerai pas en éloges sur ce petit bijou d'écriture ; descriptions, ambiances, intensités réussies. L'histoire en elle-même est très bien ficelée, contrairement à ce que j'avais constaté chez Tuanahok. On ressent d'ailleurs ici une profondeur grâce à ce même Tuanahok qui enlève à Oyanotec toute importance trop élevée mais également met en scène un monde actif.

La fin de la chasse au monstre est... spécial. J'en cherche encore le sens, de même que la chute de Quotzolt dans le piège à monstre. Malgré tout, il y a dans ces événements un indénialbe réalisme qui empêche de les réfuter, ainsi qu'une dose de sentiment savamment calculée (j'irais peut-être un peu loin mais faisons-nous plaisir).

J'aurais aimé ajouter qu'il y a dans ce texte de la superbe propre à ce cher Petch qui, une fois encore, nous a réalisé un récit à la hauteur de toutes les espérances. Assurément, cette fin saura séduire ceux qui auront avec plaisir parcouru ces lignes au caractère passionné. Toutefois, l'humilité que l'on se doit de garder à l'égard de nos réalisations m'oblige à plus de retenue. Je me contenterai donc de postuler quant à l'excellence de cette histoire captivante sur bien des récits que j'ai pu rencontrer tout du long de son écriture.

Bravo, Mr Petch, pour nous livrer une si belle pièce. A 2005, peut-être.

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tu fut

Une faute ! J'ai trouvé une faute ! :wink::D:lol: Enfin, il y a que celle là aussi que j'ai réussi a voir :ermm: !

Sinon le fond est parfait, deux paragraphes finaux dignes de ce qu'ils les précéde ! Magique même :P Une belle histoire qui s'achève là ! J'espere en lire d'autre de ce genre bientot !

@+

-= Inxi =-

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Invité Harald Durakdammaz

je t'épargnerais toute la liste de termes mélioratifs qui me viennent à l'esprit....

Bravo ! :wink::D

La fin, comme l'ensemble du texte, est fort bien mené ( j'ai bien aimé les parties avec le( enfin la) tapir !) et nous emmènes avec joie dans la splendeur de la luxuriante et parfois inquiétante jungle de Lustrie.

J'espère que 2005 te permettra de nous offrir d'autres textes, avec un aussi haut niveau de maîtrise, de poésie, d'inspiration...

Harald Durakdammaz Grumbakirikson

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Et voilà encore un exellent texte de fini... Je pense que c'est ton meilleur texte (quoique pas lu la 2eme partie des contes de l'oasis...) Le style était très bien , quasiment aucune fautes... Très beau . :mrgreen::innocent::angry::ph34r:^_^

J'approuve Feurnard, et rajouterais quand même que les retrouvailles d'Oyanotec avec Quotzolt sont ... enfin je sais pas trop ... Oyanotec l'a quand même laisser tomber (c'est le cas de le dire :P ) Et il pensait quand même que c'était un assassin donc ... M'enfin on peut imaginer qu'il l'a pardonné...

Sur ce, NETHKHAR, et le prochain texte de MR Petch sera : Les aventures du tapir! :P^_^

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